Les secondes, les minutes et les heures passaient et je marchais sans m’arrêter, en ayant l’impression d’être une saucisse dans un four. Le désert… Une vaste étendu de sable (c’est-à-dire de rien) constamment baigné d’une chaleur étouffante le jour et d’un froid glacial la nuit. On a déjà fait mieux comme destination de vacance ! Si seulement s’en était… Là au loin je verrais le guide avec son chameau qui m’attendrait pour m’aider à retrouver le chemin de la maison…
En parlant de chameau, le soleil qui frappait ma tête me faisait légèrement délirer, mais je me souvenais encore des évènements qui m’ont conduit jusqu’ici.

Chargé d’une mission d’escorte banale entre Kumo et Suna, j’étais à bord d’un convoi marchand en tant que garde du corps. Une semaine avait suffi à nous faire traverser sans encombres le continent d’un bout à l’autre et je profitais grâcement de deux jours dans un des plus beaux hôtels de Suna. La vie de rêve quoi… J’avais encore en mémoire la douceur des draps et la fraicheur de l’eau de la piscine. Cette douce pensée faillit me faire perdre contenance un instant, puis je me rattrapais tant bien que mal pour continuer à marcher comme un zombie… Bref, où en était-je ? Ah oui. Une fois mon petit séjour terminé, il fallait que je rentre au village pour reprendre ma vie d’avant. Comme vous vous en doutiez, je n’étais pas très emballé par cette idée, mais je me sentais requinqué par les petits privilèges auxquels j’avais eu droit.
Pour rentrer en toute sécurité, on m’avait confié un chameau, lequel devait m’emmener à la frontière et ensuite rentrer au village de lui-même. Le voyage de retour se fit donc calmement, sous un soleil de plomb, mais avec une bonne monture malgré tout. Mais à quelques heures de mon départ, une envie pressante me stoppa pour aller me soulager. Prenant quelques instants pour pisser derrière une dune, à mon retour je voyais l’animal cavaler au loin en direction du village. Sans vraiment réfléchir je lui courais après en gueulant des « HEY MAIS REVIENS CONNARD ! », sans succès malgré tout. Le bestiau courrait vite et moi à sprinter dans le sable, je m’épuisais tout seul. Je me retrouvais donc au milieu de nulle part, sans vraiment savoir où aller. Rebroussant chemin, je me disais qu’en suivant mes propres trace de pas je pourrais retrouver le chemin de la maison, mais c’était sans compter sur le vent qui avait déjà effacé mes traces.

Voilà donc plusieurs heures que je marchais dans ce désert ardant, sans eau ni vrai protection contre la chaleur ou le soleil… je commençais d’ailleurs à en avoir assez de cette grosse boule de feu qui me prenait pour un gâteau dans un four !... pourtant j’adore les gâteaux… les gâteaux… les gâteaux… les gat… Hey, je recommence à délirer ! Mais j’étais assoiffé et épuisé. Je ne savais pas où j’en étais dans ma traversé, ni même depuis combien de temps je marchais ! Décourageant en somme.

Plusieurs minutes plus tard, je remarquais la présence de drôle d’oiseaux au-dessus de ma tête… Sur le coup j’étais content parce que je me disais que c’était comme les mouettes qui annoncent aux marins la présence proche d’un rivage ! Mais bon, j’y connaissais rien en piaf, et puis ils avaient une sale trogne aussi. Ils me suivirent comme ça sur une bonne distance avant que, excédé par la chaleur, je n’enlève mon tee-shirt. Durant mon geste maladroit où le tissu me recouvrait les yeux, sans faire gaffe je chutais à terre, comme une loque. Le sol était bouillant, mais la position allongée m’allait parfaitement. Vidé de mes forces, je n’avais plus la volonté de me relever pour le moment. J’étais tellement naïf que je ne pensais pas une seule seconde à la mort ! Et pourtant…
Le cri des oiseaux s’amplifia de plus belle alors qu’ils tournoyaient furieusement au-dessus de moi. Mes forces me quittèrent encore et encore, et le soleil était sur ma tête comme une masse de plusieurs tonnes.

- Les gars… réveillez moi dans une heure… je fais juste un somme…

Et je perdis connaissance.

Des bribes de conscience me torturaient l’esprit, comme si j’étais entre deux mondes. Encore et toujours ces cris d’oiseaux que je percevais de temps à autre, si bien que je me demandais si je ne les rêvais pas à force. La chaleur et la sècheresse ne m’atteignaient plus. Comme si je ne réfléchissais plus que par mon esprit ! Peut-être que j’étais déjà mort après tout ?

Un poids sur mon ventre, suivit d’une rotation de mon corps sur le dos me fit tout de même penser le contraire. Incapable d’ouvrir les yeux, je ne savais du tout ce qui pouvait se passer, au bord de l’inconscience la plus complète. Puis soudain… un miracle !
Perlant sur mes lèvres et dans ma bouche, je sentais des gouttes d’eau fraiche pénétrer mon corps. Puis un filet, un jet, un..

- BLOUBBLBLALAALAALBOUBLLOUBBLOU !

Mon corps retrouvant contenance, comme un diable sortant de sa boite, j’agitais les bras dans tous les sens, incapable de respirer à cause d’une masse d’eau sur mon visage venu d’on ne sait d’où ! Tiens… Je n’aurais jamais pensé mourir noyé dans un désert. Mais à y réfléchir, je pense que c’est le genre de mort qui me correspondrait bien.
J’entendis partiellement une voix et l’eau sur mon visage s’écarta. Par réflexe, je me redressais et expulsait l’eau de mes poumons en toussant, avant de tourner la tête vers une personne qui balançait de l’eau partout en criant pour que ça s’arrête.

- Hey ! Mais ça va p.. BLOUBBLBLALAALAALBOUBLLOUBBLOU !

Elle venait de recommencer à me jeter de l’eau en pleine figure pour me noyer avant que le jet ne s’arrête de lui-même… Totalement conscient et sur les nerfs, je secouais la tête pour chasser toute la flotte sur mon visage avant de tourner un regard courroucé vers l’abruti qui…
Mon visage se figea un instant. Ce n’était pas un, mais une ! Et une charmante en plus de ça. A sa mine agacée, je comprenais qu’elle n’avait pas fait exprès, et malgré le fait qu’elle est failli me tuer encore plus rapidement que ce désert, je voulais bien garder mes remarques méchantes pour moi cette fois-ci. Elle m’avait quand même sauvé la vie… d’un certain point de vu.

- *tousse* hum… merci pour cette… douche ? Tu me sauves la vie… Je ne pensais pas rencontrer quelqu’un en plein désert…

Bien que conscient, je restais encore faible, même si le visage de cette jolie demoiselle me le faisait oublier quelques instant au niveau de l’entre-jambe. Mister subtility strike again !

On appelle ça, le karma. Ou plutôt la grande balance universelle ! Celle qui équilibre le bien et le mal, nous punis ou nous récompense selon nos actes, ou nos péripéties. La mienne penchait dangereusement vers le bas depuis quelques heures. Perdu dans ce désert brulant, sans eau ni électricité… Zut, je crois que la chaleur continue à me faire délirer. Mais malgré un malencontreux accident, ma balance remonta légèrement à la rencontre de cette demoiselle (dont j’ignorais encore tout, soit dit en passant). Grande, une chevelure rosé, la peau blanche et les yeux noires, elle avait un certain charme je l’avoue. Ce n’est pas le genre de personne que l’on peut rencontrer en plein désert ! Vêtu d’une grande robe à capuche, surement pour la protéger du soleil, elle me fixait, d’un air à la fois gêné et inquiet. Bon sang, c’est ce genre de truc que j’aurais dû demander aux mecs de Suna ! Elle devait être au frai avec ce genre de fringue… pas comme moi torse-nu qui a la sensation de sentir déjà le cochon grillé !
Me secouant la tête en passant mes mains pour y chasser l’eau et le sable, la demoiselle fit soudain un bon en arrière, sortant un kunai de sa poche pour le pointer dans ma direction. Mais il lui arrive quoi à celle-là ? Je n’ai pas le droit d’être propre ?

Je la fixais, sans rien dire, mes mains au-dessus de ma tête, posé sur mes cheveux. Apparement elle venait de voir mon bandeau frontal à ma ceinture (oui parce que c’est con de dire bandeau ceintural…), raison pour laquelle elle venait de bondir comme un crapaud en position d’attaque. De mon côté je ne bougeais pas, je ne disais rien, je me contentais de la fixer avec un sourcil relevé en signe d’incompréhension (ou communément appelé « WTF mode »). Elle n’avait pas vraiment l’air sûr d’elle la pauvre… Après sa tentative douteuse de me faire boire, et la position qu’elle prenait en me menaçant de son arme, je compris assez vite qu’elle n’était pas une ninja. Enfin peut être qu’elle cachait un bandeau elle aussi sous sa robe, mais ça m’étonnerai quand même ! Au bout de quelques instants pourtant, elle laissa tomber son kunai au sol, avant de s’agenouiller d’un air de lassitude. Toujours silencieux, je la laissais parler à sa guise, car cette fille m’intriguait beaucoup je dois dire… Sur son cas, j’étais partagé entre la maladresse et la cinglerie. Chose encore à débattre pour le moment !
Elle se présenta à moi, Agumi du clan Oga… sa… zut j’ai déjà oublié son nom ! Mais je me souvenais de son prénom, c’est le principal ! Des Agumis ça ne doit pas courir le désert… Au moins je pouvais mettre un prénom sur celle qui a voulu me noyer.

Je suis méchant ? Non, pas vraiment… Mais avec autant d’innocence qu’elle, j’aurais eu du mal à lui en vouloir pour ce qu’elle a fait ! Kotai, ta libido te perdra… Toujours sans rien dire, je baissais la tête en souriant après sa remarque, me passant la main sur le visage pour en chasser quelques dernières gouttes d’eau qui n’avaient pas encore été aspiré par ce soleil assassin. Et elle reprit la parole, encore et toujours… Une vrai pipelette cette fille !
Déserter ? En voilà une idée ! Si c’était le cas, le dernier endroit où je serais allé me perdre, ce serait bien ici ! Cette jeune fille devait surement ignorer que Kumo et Suna étaient allié… Elle proféra tout de même quelques vagues menaces qui eurent le don de me faire sourire une dernière fois.

- Ah ? Donc je suppose que c’est toi qui doit m’arrêter dans ce cas ?

Un sourire narquois aux lèvres, je la fixais sans scier, laissant un lourd silence de quelques instants…

- Non j’plaisante, je ne suis pas déserteur ou quoi que ce soit d’autre… Je m’appelle Kinzoku Kotai. J’étais en mission d’escorte jusqu’à Suna et maintenant que ma tâche a été rempli, je voulais rentrer chez moi. On m’a confié un chameau pour faire le voyage, mais cet abruti s’est tiré quand je me suis arrêté pour pis… enfin bref, je me suis retrouvé livré à moi-même après ça.

Je tentais de me relever difficilement, m’époussetant un peu partout sur le corps, avec l’impression d’avoir été L’Homme-Sable de Spiderman dans une autre vie… A présent il fallait que je sorte de ce désert. Certes, Agumi m’a réhydraté donc je pourrais marcher encore un peu, mais je ne sais toujours pas quel chemin prendre, ni si mes forces allaient m’abandonner une nouvelle fois en cours de route. Je n’avais pas vraiment le choix de la suite à vrai dire…

- Hum Agumi ? Je vais abuser encore un peu de ta gentillesse en te demandant ça, mais… même si tu viens de me sauver, je suis encore perdu dans ce désert. Est-ce que tu pourrais m’aider à en sortir ou m’amener quelque part où je pourrais me ressourcer avant de reprendre le voyage ? Sinon je crains de retomber dans le même état où tu m’as retrouvé tout à l’heure…