PRISONNIER
______________________________

Cet homme était le chef de cette équipe de Konoha, ça ne faisait plus aucun doute pour le Kyoshi. Ses yeux, derrière son masque blanc scrutèrent sa cible et l’analysèrent pendant sa prise de parole. Il avait accepté l’offre qu’on lui avait faite, mais sa réponse était plus intéressante que prévu. Voulait-il réellement changer l’image de Konoha ? Libérer les Sabakyô, était-ce ça qui allait modifier l’histoire ? Futile, au final, cela agaça légèrement le Monarque, qui n’allait bien entendu retirer son masque. Il ne manqua cependant pas de répondre, après avoir vu que c’était bien l’original et non un autre clone à qui il parlait.

─ Je ne retirerai pas mon masque. Si tu voulais redresser ton village, il fallait d’abord s’occuper de ce dernier au lieu de venir dans un pays en tension comme celui de la Pluie. Au final, regarde ce que ça t’auras coûté. Maintenant suis-moi.

Sans attendre de réponse, Rei s’avança et marcha en prenant soin de regarder si le Konohajin le suivait.

Après quelques minutes de marche, le Monarque sut que sa prison de métal ne pouvait être tenue. Est-ce que le shinobi qui y était enfermé l’avait détruise avant ? Lui restait-il assez de forces pour ça ? Qu’importe, il ne pouvait rien faire pour son chef d’équipe. Rei avait prévu plusieurs choses, et son intelligence allait rendre impossible toute réussite de traque.

─ Arrête-toi, je vais te présenter quelqu’un.

Le Kyoshi insuffla du chakra dans le sceau qu’il avait au front. Ce dernier s’illumina légèrement, mais le Konohajin ne pouvait le voir, vu le masque que portait son kidnappeur. Soudain, une silhouette inconnue apparut près du Monarque. Anami, portant elle aussi un masque regarda le jeune homme avant de le plonger dans une puissante illusion. Elle rattrapa le Konohajin qui s’écroulait inconscient, et lui apposa un sceau quelques instants après. Maintenant qu’il était plongé dans un Genjutsu, les deux membres du Reidan allaient pouvoir parler pleinement et sans contraintes.

─ Invoque nous.

Aussitôt dit, aussitôt fait. En composant quelques mudras, les trois shinobis se retrouvèrent dans une grande cabane abandonnée. Il ne semblait pas y avoir d’issues, mais le bois pouvait sans doute être détruit facilement. Rei remarqua que la kunoïchi était légèrement essoufflée. Il se chargea d’aller chercher des cordes et bandages. Lorsqu’il revint, il commença à attacher le Konohajin inconscient sur une chaise.

─ Tu as dépensé pas mal de chakra, repose-toi un peu. Où en sont les autres ?
─ Ils sont apparemment toujours en combat sauf Seiha, mais aucun n’est en état critique.
─ Bien. Ce shinobi est de Konoha. Ils avaient décidé de libérer les Sabakyô, nul doute qu’ils veulent rallier Ame no Kuni à leur cause. Je pense qu’ils y arriveront, et comme tu dois t’en douter, c’est tant mieux. Cependant, il ne faut pas sous-estimer le village de la Feuille, ils ne tarderont pas à envoyer une équipe pour nous traquer. Et puis, ce shinobi est loin d’être idiot, il a sûrement laissé un moyen de le retrouver.
─ Je vois, je vais donc devoir placer des sceaux à chaque repère ?
─ A ceux qui manquent oui. Ainsi, tu nous invoqueras quand ça sera nécessaire. Aucune traque ne pourra aboutir, et cela nous laissera largement le temps de mettre sur pied notre objectif pour Konoha.
─ D’accord, je vais partir de ce pas alors. Je n’en aurais pas pour longtemps, il n’y a plus que deux lieux à faire.
─ Bien, mais ne force pas trop, Anami.

Nul doute que la jeune femme souriait derrière son masque. Elle disparut lorsque Rei eut terminé d’immobiliser le Konohajin. Il prit une chaise et s’assit devant lui. L’illusion dans laquelle il était plongé s’arrêta, et il retrouva donc ses esprits. Il put donc voir qu’il était totalement immobilisé, enchainé et ligoté de la tête aux pieds. Il n’y avait que sa tête qui était épargnée de toute entrave.

─ Je ne te ferai aucun mal, si tu ne tentes rien. Tu comprendras bien que je suis obligé de t’immobiliser, pour ton bien. Mais passons, avant toute chose, sache qu’aucune équipe de Konoha ne pourra te retrouver, tu seras donc mon prisonnier pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

Le Monarque s’arrêta là pour l’instant. Il attendait une quelconque réaction de la part de son interlocuteur, qui était plus que jamais son prisonnier.

Spoiler:

ADAPTATION
______________________________

Émergeant d'un songe improbable dont il préférait ne pas retenir les détails, les yeux gonflés et rouges comme souvent quand il se réveillait, la première chose que le luthier remarqua fut qu'il était très bien assit. Pas étonnant quand 3 kilomètres de chaîne et de cordes ont décidé de vous marier à votre siège. Il lui était difficile de malaxer son chakra dans ces conditions, mais une chose était sûre, Kenzaku, Kotori, les Sabakyôs... c'était très loin. Géographiquement, du moins. Mais tout cela lui revenait très lentement.

Ça sentait le bois. La pièce sonnait également comme une pièce en bois, même si les preuves auditives qu'il possédait pour l'affirmer se limitaient à son souffle et celui de son précédent adversaire. Ce dernier n'avait pas enlevé son masque, sans doute plus par prudence que pour faire le contraire de ce qu'Onpu lui demandait.
Il lui rappela les quelques modalités qu'il lui avait présentées lors de sa proposition de captivité. En effet, aucune violence physique ne lui avait été infligée, même pour le sonner il avait fait appel à une ravissante illusionniste, masquée à l'image de son invocateur. Jusqu'ici, il tenait parole. Pas un mauvais bougre, ce bonhomme en fin de compte. Pourquoi s'étaient-ils battus déjà? ... inutile de dire que le mélomane était encore un peu dans les vapes.

─ Ouais, ouais, aucun problème...

Ses yeux se remettaient progressivement en face des trous et s'adaptaient à l'obscurité ambiante. Il put regarder la silhouette et les vêtements de l'homme une nouvelle fois.

─ T'es... un drôle de gus quand même. Tu nous as barré la route comme si ta vie en dépendait, mais au final j'ai l'impression que tu voulais juste nous donner une leçon. Enfin, donner une leçon à Konoha... entre nous, "vous êtes méchants", je me répète mais je trouve ça vraiment super réducteur, t'aurais pu trouver mieux.

Un petit silence, un soupir. Un bâillement, la sensation affreuse de ne pas pouvoir mettre sa main devant la bouche pour l'occasion. Sa lucidité lui revenait au compte-goutte.

─ Puisqu'on risque de passer du temps dans cette situation, autant qu'on reparte sur des bases correctes. En tout cas, ton amie m'a peut-être déjà hypnotisé pour me faire cracher toutes les infos que tu voulais savoir sans que je m'en rende compte, mais sache que tant que je serai éveillé et que tu ne m'auras pas dit ton nom, ne ne te dirai pas le mien! Ahaha. Quoique, de toute façon il ne t'avancerait pas à grand chose, aucune réputation ne me précède. Je suis du genre discret d'habitude.

On' était shooté mais pas stupide, il savait bien que c'était peine perdue d'installer un climat de confort entre lui et son kidnappeur. Néanmoins maintenir une tension inutile aurait fait perdre de l'énergie à tout le monde. Son comportement pouvait sembler naïf, mais c'était ni plus ni moins que de l'adaptation.

PASSE-TEMPS
______________________________

Il revint peu à peu à la réalité. Il semblait toujours secoué, mais ses sens devaient revenir progressivement. Aucun doute sur le fait qu’il avait entendu les paroles de celui qui le tenait captif. Rapidement, le Konohajin répondit, en affirmant qu’il n’y avait aucun problème. Il devait avoir pleine conscience de la position dans laquelle il se trouvait. Sa captivité lui semblait une évidence, et sa dépendance allait de paire avec cette dernière. Mais il ne se laissa pas pour autant changer de comportement… Toujours ce tutoiement, cette pointe de familiarité, presque d’humour. On aurait pu croire qu’il n’avait que faire de sa vie, à moins qu’il cache sa peur ? Qu’importe, ce qui était sûr, c’était que ce shinobi avait toute sa tête, et était loin d’être un idiot. Un pion, mais un pion qui ne semblait pas vouloir suivre les traces erronées de son village.

─ L’unique leçon que je vous donnerai laissera bien plus de traces que ta simple capture, ne t’en fais pas.

Derrière son masque, le Monarque ne put s’empêcher de sourire. Ce jeune shinobi était plutôt comique, mais c’était surtout le futur changement du monde qu’allait apporter Rei qui était amusant, voire ironique. Pensait-il vraiment que le Kyoshi voulait porter un coup ou donner une quelconque leçon en le capturant ? Oh non, loin de là. Il n’avait que faire de la prison, et des Suzurane. Ce qu’il fallait, c’était prendre un otage, et l’objectif de Konoha serait alors en marche. Bientôt, le village de la Feuille aurait un avant-goût du changement du monde qui s’approche. Un changement orchestré par l’homme masqué.

─ Discret, et sûrement plus intelligent que tu ne le laisses paraître. As-tu laissé quelque-chose qui permettrait à ton village de lancer une traque ? Sans doute. Cela marchera-t-il ? Malheureusement pour toi, non. Mais avant de réduire les efforts de Konoha à néant, peut-être as-tu d’autres questions ?

Il fallait bien attendre le retour d’Anami, et puis ce Konohajin était un drôle de passe-temps. Rei allait pouvoir discuter encore un peu avec lui, avant d’entamer la procédure Konoha.
Et lorsque ce serait fait, le Deuxième Objectif serait accompli à moitié.

INTÉRÊT
______________________________

Il y avait bien un moyen. En théorie Monad était toujours présente aux côtés de Kenzaku, elle avait d'ailleurs probablement dû l'aider à s'extirper de sa prison métallique. Le réseau des chauves souris était relativement grand à travers le monde, et en émettant un message en ultrasons il pourrait peut-être faire remonter l'information de sa capture et de sa localisation jusqu'à Monad, et ainsi jusqu'à Konoha. Cela dit c'était une stratégie un peu trop dépendante du facteur chance pour s'y risquer, et de toute manière ce sombre inconnu semblait avoir pris ses dispositions pour que ni cette méthode ni aucune autre ne fonctionne.
Au final, le luthier n'avait pas grand intérêt à guider son village jusqu'à lui dans l'immédiat. La tentation d'en savoir plus était bien trop grande, le fait d'avoir en face de lui une potentielle figure du monde shinobi l'excitait. A son retour, la Racine aurait de sacrées enquêtes à mener.
Mais trop de mystères planaient encore sur l'individu. Cet instant privilégié était l'occasion rêvée pour tenter de les éclaircir.

─ Si tu insistes... j'en ai effectivement quelques-unes, même si je ne suis pas vraiment dans la position idéale pour exiger des réponses.
Pour commencer, comment as-tu su pour l'opération Sabakyô? Quand ais-je gaffé, quelle était la fuite d'information qui t'a permis de nous intercepter?
Ensuite, devant la prison mon camarade a déblatéré beaucoup de généralités, mais il a soulevé un point intéressant. Ma seconde question est la suivante: que représente Makka pour toi?

Une petite pause. Bouillonnant de curiosité, le luthier était convaincu que ces deux éléments permettraient de récupérer beaucoup d'informations sur lui par la suite, et avant tout de le classer dans une catégorie de danger. S'il se trouvait être un partisan, alors l'étiquette "ennemi public" lui serait aussitôt attribuée, et dans le cas contraire il aurait certainement plus de facilités à trouver un terrain d'entente avec Konoha, quelque soit son dessein.
Aussi, Onpu se doutait bien que les réponses de l'individu seraient opaques au possible, car il n'avait aucun intérêt à lui révéler ces informations s'il tenait vraiment à le garder en vie. D'où la dernière question:

─ Enfin... tu as décrété que tu ne me ferai aucun mal. Je nage sûrement en plein délire en espérant une telle concession de ta part, mais du coup je serais bien curieux de savoir combien tu comptes me vendre, ou contre quoi tu as l'intention de m'échanger.

C'était un peu présomptueux, mais après tout il devrait bien le savoir un jour ou l'autre. Selon la réponse, il faudrait peut être ne pas négliger l'option "s'échapper". En tous les cas, la situation de faiblesse du mélomane n'enlevait rien à l'intérêt qu'il éprouvait pour son ténébreux ravisseur.

MINUTES ET JOURS
______________________________

Quelques secondes de silence vinrent précéder les quelques questions qu’allait finalement poser le jeune Konohajin. Savoir comment Rei avait pu se rendre à la prison Sabakyô était une question logique, le concerné ne fut donc pas surpris de l’entendre. Cependant, il écouta jusqu’au bout son prisonnier, tout en réfléchissant rapidement aux mots qu’il allait choisir pour lui répondre. Ne jamais sous-estimer quelqu’un, même quand le rapport de domination est aussi élevé que dans le cas présent. En tout cas, le chef du Reidan ne manqua pas de remarquer qu’il avait bel et bien raison : celui qu’il avait fait prisonnier était non seulement le chef de l’équipe, mais aussi le chef de toute l’opération. Il sourit à nouveau derrière son masque, sachant que du coup, son plan était encore mieux préparé. Le village de Konoha devait tenir à lui, c’était chose certaine.

─ Tu n’as pas particulièrement fait d’erreur, mais sache que Konoha n’ait pas le seul village qui ait tenté une action de ce genre après vos deux guerres. Je n’en dirai pas plus sur ce sujet.

Il était vrai que le plan de ce jeune shinobi était ingénieux, et si Rei l’avait bouleversé, ce n’était pas à cause du village de la Feuille. Le Monarque pensa ensuite à Makka. Il se retint de serrer le poing face à la pensée qu’il se faisait de la puissante assimilatrice.

─ Je connais Makka plus que la plupart des shinobis, mais je suppose que tu veux savoir si je suis un Partisan. Je ne vais pas te répondre, car tu es assez intelligent pour savoir par toi-même. Si jamais j’étais un Partisan, aurais-je laissé des survivants à la prison ?

Le silence revint au cœur de la cabane. Soudain, quelqu’un apparut. C’était Anami qui était revenue.

─ Tout est prêt.
─ Bien, mais avant, je vais répondre à notre jeune invité. Sache que je ne vais pas te vendre, mais bien t’échanger. Sur ce, il est temps de te montrer pourquoi toute tentative de traque est vouée à l’échec.

L’homme masqué sortit de sa poche une montre, et la mit devant les yeux du captif. Il était 12h48. Rei regarda ensuite la jeune kunoïchi masquée, qui relança un Genjutsu sur le shinobi de Konoha. Le Monarque apposa un sceau sur la chaise du prisonnier et Anami fit une rapide chaine de mudras. L’instant d’après, les trois shinobis étaient dans un nouveau lieu, dans un nouveau pays. La jeune brune leva son illusion, et petit à petit le Konohajin revint à la réalité, toujours assis et ligoté. Il n’était plus dans une cabane, mais dans une grotte. Rei lui ressortit la montre. Il était 12h50.

─ Comprends-tu maintenant ? En deux minutes, nous avons changé d’endroit, et même de pays. Donc même si tu avais laissé quelque-chose qui pouvait permettre à ton village de te tracer, ils ne pourraient pas nous trouver.

Rei rangea sa montre, et la kunoïchi masquée utilisé une dernière fois son illusion. Une fois cela fait, elle respira fortement. Elle avait dépensé beaucoup de chakra.

─ Anami, va te reposer. Dans quelques jours, nous nous rendrons à Konoha.

Dans quelques jours, Konoha aurait à faire un choix important.