Je me promène encore dans la maison, ne sachant pas trop quoi y faire. Mon sac est à l’étage, dans ma propre chambre, ouvert, mais le contenu y est encore. Contenu sommaire, certes, mais qui est toujours utile pour partir en mission. Le plus étrange? C’est qu’il me reste tout de même des vêtements et quelques menus objets dans les placards et les tiroirs. Le lit est fait, l’édredon bien tiré sur le matelas. Les oreillers sont déposés au bout, bien remplumés. Vision plus qu’étrange, sachant qu’il ne s’agit pas d’une chambre prêtée, mais bien d’une chambre donnée. Ce que Suguato leur a promis en échange de ce toit? Je n’en ai aucune idée. Je ne fais qu’en profiter, me disant que je ne mérite probablement pas autant d’attentions. Et j’avoue que ça me fatigue d’être ainsi traitée sans savoir pourquoi. Une question qui me taraude depuis un bon moment, depuis des années, mais qui n’obtiendra jamais de réponse de la part du seul qui pourrait la donner. Dans des moments comme celui-ci, j’en viens à détester Suguato de garder toujours autant de mystère, de parler par énigme.

Je ferme la porte de ma chambre, par réflexe. La main toujours sur la poignée, je finis par l’entrebâiller avant de traverser le couloir. Ma main traîne sur la rampe d’escalier. Je descends quelques marches, me retrouve dans l’entrée. Je jette un coup d’œil dehors pour apercevoir la clôture de bois qui ceint la maison. J’ai bien envie d’y mettre quelques fleurs, pour enjoliver le tout, comme certains de nos voisins, mais je ne me sens pas à l’aise de prendre une telle liberté. Il me faudra d’abord en glisser un mot à Suguato. Après tout, c’est aussi chez lui. Je vais pour me retourner, direction le salon où se trouve une petite bibliothèque sommaire, quand j’aperçois dans la rue la silhouette bien connue de mon ancien compagnon de voyage. Il rentre à la maison, mais pas seul. Je suis bien curieuse de savoir qui il ramène ici, mais je ne tiens pas à les accueillir dans l’entrée comme si j’étais la maîtresse de maison, comme si je leur étais dévouée.

J’accélère le pas pour rejoindre le salon et me planter devant la bibliothèque. Mes doigts glissent sur les tranches des livres alors que mes yeux lient les titres. Pourtant, aucun mot ne semble remonter jusqu’à mon esprit puisque je n’arrive pas à en choisir un. La porte s’ouvre. Je l’entends. Sans réfléchir d’avantage, je prends un livre au hasard que j’ouvre, comme si j’étais déjà en train de le lire. Je fais quelques pas pour me laisser tomber sur un fauteuil au moment où ils pénètrent dans le petit salon où je me trouve. Je ne lève même pas les yeux pour les saluer. J’attends un premier mouvement de la part de Suguato. J’avoue que je ne sais pas trop comment réagir. Qui est l’inconnu? Que fait-il ici? Ce qui est drôle, c’est que moi-même, je ne sais pas ce que je fais ici. Je ferme doucement le livre pour le garder dans mes mains. Finalement, je ne devrais pas être entièrement antisociale.

« Bonjour. »

Nous traversons rapidement les rues. La maison est certainement aisée, mais pas excessivement, ce n’est rien comparé à celle des Hyûga qui ont quasiment fondés ce Village. Sa cours, qui fait quelques mètres de superficie, est entourée d’une clôture de bois, une palissade, aux planches espacées. J’ignore à quoi peut nous servir ce « jardin ». En attendant, je fume sur le petit balcon de bois, regardant l’herbe pousser chaque jour, sans oser trop m’en occuper. J’entre par la porte principale, admirant avec surprise la table déjà propre et la vaisselle entassée à un endroit plus convenable que l’espèce de salon adjacent ou la table. Je ne souhaitais pas déranger Nyuuwa, mais elle est là, à quelques pas, sur un canapé près du sol devant une table. Je jette un regard vers la jeune femme qui, étrangement, ne convient pas à une maison. Je fais signe à On’ d’entrer.

- « Nyuuwa, si tu le veux bien, je voudrais te présenter quelqu’un. C’est Onpu. Il va rejoindre l’équipe quelques temps, mais je doute qu’il y reste longtemps… Lui aussi me trouve insupportable, mais contrairement à Kaya, il sait parler. »

Je jette un regard vers elle. Une étrange bouffée de joie me monte à la tête en la voyant, On’ dans la même pièce. Je prends quelques secondes de ce silence avant de froncer les sourcils pour restreindre mon enthousiaste. Je sais qu’On’ voulait la rencontrer, mais ce n’est pas normal. Nyuuwa devrait l’avoir déjà vu, mais elle reste ici, toute la journée parfois, comme si elle refusait de faire les choses par soi-même. Ce simple constant me rend amer. La joie s’efface devant un étrange sentiment glacial que je me contente de chasser en riant. Je jette un coup d’œil au livre qu’elle lit en haussant un sourcil.

- « C’est intéressant au moins ? En fait, On’ trouve que je suis plus désagréable qu’une acide pour son bonheur. Alors si vous voulez partager sur le sujet. Sinon, j’espérais te tenir au courant de ce qui se passait dans l’équipe et voir si vous ne vouliez pas vous organiser face à face, au lieu que je vous force la main. »

C’est de la provocation, mais aussi de l’honnêteté. Je fais un large sourire avant de me diriger vers l’amas de vaisselle. J’en tire une assiette que je lève pour mieux l’examiner. Je frotte un peu mon doigt dessus pour retirer un bout de résidu avant de frotter une guenille. Je termine en le mouillant un peu au robinet avant de frotter l’assiette. Je fais la même chose avec un deuxième objet en les laissant échanger. Je m’arrête soudainement, pose mes mains sur le comptoir, bien conscient de cet incident étrange dans mon caractère. Je prends une inspiration discrète avant de chercher une autre assiette.

- « Si je sors un peu de pain, du fromage, du beurre… Ce genre de choses, tu vas en manger aussi, Nyuuwa ? »

Je me retourne à moitié en parlant. Pendant que sa réponse tombe, je sors un peu de pain d’une armoire et le beurre que je pose sur la table. En fouillant un peu le réfrigérateur, j’y trouve un peu de raisins en bon état et du fromage. Je me retourne et le pose sur la table.

[Dépendant de ta réponse, Nyuuwa, je vais sortir des trucs pour toi de la même manière, si vous en tenez compte. Sinon, considèrez que je ne fais rien de plus.]