L'empire et Kiri ont perdu la guerre. Je suis de retour au pays de l'Eau et, à l'heure qu'il est, une contre-offensive est menée sur Taki. Les cartes sont redistribuées et un nouvel ordre mondial va bientôt voir le jour. Pour l'heure notre Mizukage est absent. La rumeur dit qu'il a été fait prisonnier. Tout cela reste à vérifier mais notre village n'est pas en bonne posture à mon sens. Kumo va nécessairement sortir renforcé de ce succès et les autres villages cachés n'ont pas essuyé de défaite quant à eux. Comme dit précédemment, les cartes sont redistribuées et pour l'heure nous avons une très mauvaise main.

Suite à mes déboires à Taki, j'effectue quelques recherches sur les membres du clan Jisetsu ayant désertés ou ayant été proches d'Homura, sans grand succès. De la même façon, mon enquête sur l'Hakushi n'aboutit à rien. Exaspéré, je soupire longuement et reprends ma lecture des archives. Il n'y a rien là-dedans. « Triste histoire » comme je le dis souvent. L'arrivée d'une lettre interrompt mes recherches. Je m'empare de la missive, la décachette et constate que le mot vient de Yu. Surprenant … Elle m'envoie des lettres elle maintenant. Première nouvelle. Intrigué, je lis le contenu du papier.
« Uh ? »
Pour de vrai ? Bizarre.

La Kosobayui souhaite s'entraîner. C'est bien la première fois que la brune me contacte pour autre chose qu'une mission. Je ne suis pas certain que cela vaille le coup mais j'accepte d'aider le genin de la brume. Nos cartes sont peut-être mauvaises mais qui sait … Avec un peu d'entraînement un deux deviendra peut-être un sept. Je rentre chez moi et me prépare à quitter le village ; direction la forêt de la brume. C'est là-bas que nous sommes censés nous retrouver Yu et moi.

Une fois sur place, je retrouve la Kosobayui et demande :
« C'est bien de toi ? Il n'y a pas eu d'erreur ? »
Puisqu'elle est là, cela sonne comme une évidence : Non il n'y a pas erreur mais je m'amuse de cette soudaine requête. J'ai cru comprendre que Yu et son équipe avait été envoyée au casse-pipe et que – comme on pouvait s'y attendre – leur escouade a été mis en échec. C'est peut-être ça qui motive la demoiselle à progresser. Car, c'est bien connu, c'est le dégoût de la défaite qui pousse à apprécier la victoire.
« Bien bien. »

La missive était suffisamment claire : Je sais quelles sont les compétences que Yu souhaite développer. Inutile de converser plus longtemps, je m’exécute et me fonds dans le décor. La brume cache ma silhouette et j'essaie d'être le plus discret possible. Le silence gagne la forêt dans son entièreté. Je songe à attaquer Yu en traître mais ne grillons pas les étapes. Voyons d'abord si la jeune femme peut me repérer. Je ne suis pas expert en camouflage et, selon toute logique - en se concentrant un minimum - elle devrait pouvoir sentir ma présence.

Pas de réponse. Je la sens agacée et ne provoque pas plus qu’il n’en faut la Kosobayui. J’imagine qu’elle n’est pas là pour recevoir railleries et moqueries en tout genre. Dans le but de l’aider, j’accède à sa demande sans dire un mot, me fonds dans le décor et patiente. Voyons si Yu est capable de me repérer. Des plumes virevoltent dans les airs et, bien que je me sois efforcé d’éviter tout contact avec ces projectiles indolores, une d’entre elle finit par me toucher. Mince.

Je crois qu’elle m’a repéré. Yu avance dans ma direction et ça ne peut pas être le fruit du hasard. Sa technique de localisation, même grossière, lui permet de savoir approximativement où je me trouve. Néanmoins la Kosobayui n’est pas en mesure de déterminer avec précision où je suis caché. Je compte profiter de ce fait pour attaquer la demoiselle aux pupilles bleutées. Un senseur digne de ce nom doit être en mesure de repérer l'ennemi mais aussi d'anticiper les attaques de ce dernier. Pour ce qui est de localiser l'adversaire ; on a vu mieux mais c'est un bon début. Voyons si elle est capable d'analyser mes mouvements suffisamment rapidement pour éviter un coup simple. Perché sur la branche d'un arbre et caché par la brume, j'aperçois une ombre. La silhouette est marquée, féminine et la chevelure caractéristique de la Kosobayui transparaît. Je n'ai pas de don de senseur mais je crois la voir. Je ferme les yeux, active mon dojutsu et les rouvre aussitôt. Mes pupilles dorées me permettent de distordre l'espace temps de sorte à effectuer une charge rapide sur ma partenaire d'entraînement.

Toujours debout sur ma branche, je me propulse et fonds sur ma cible en piqué. À noter que je retiens mes coups et ne frappe pas fort. Il est même plus exact de dire que je ne frappe pas la kunoichi. Je me contente de lui effleurer le bras Le but n'est pas de blesser la Kosobayui. Ni moi ni elle ne devons finir cette séance à l'hôpital. Je parviens à toucher la jeune femme, m'arrête près d'elle et lui dis :

« Tes plumes ? Tu m'as approximativement repéré n'est-ce pas ? »
La question est bien entendu rhétorique. C'est la première fois que je vois une maîtresse du haneton utiliser son don de cette manière. Pour le moment ses dons ne sont pas développés mais c'est prometteur.
« Ce n'est pas mal. Par contre, il y a des progrès à faire en matière d'anticipation. J'aurais pu te charger dessus plus vite. Enfin bon. Reprenons. »
Sur ce, la partie de cache-cache reprend. Cette fois, c'est sûrement elle qui va essayer de me trouver et de me frapper le premier. Ce sera l'occasion pour moi de lui montrer ce qu'est « une anticipation de taïjutsu » correcte.

Je me cache à nouveau. Mes sens sont en éveil et je crois entendre quelqu’un approcher. Je fronce les sourcils, essaie de distinguer des formes à travers la brume et garde un champ de vision élargi. Je ne vois toujours pas la Kunoichi de la brume mais elle se dirige vers la bonne direction, c’est sûr. Est-ce de la chance ? Je n’en ai pas l’impression, non. Elle sait que je suis là. Comment ? Bonne question. En tout cas son repérage semble moins approximatif que tout à l’heure. Yu a été rapide. Plus rapide que la fois précédente. Qui plus est la Kosobayui n’a pas eu recours à son jutsu de plume. C’est à croire qu’elle progresse vite. A moins que ce soit moi qui ait été mauvais. C’est possible aussi. Je ne suis pas expert dans l’art de me dissimuler et j’ai probablement laissé de grossières traces dans mon sillage.

Je reste à l’affût du moindre bruit mais le genin est discret. Dans ces circonstances, je pense qu’il est nécessaire de prendre certaines dispositions. Je ferme les yeux un instant, me concentre puis les rouvre aussitôt. Ayant activé le troisième et dernier stade de mon dojutsu, mes pupilles dorées deviennent plus performantes que d’accoutumé. Soudain un bruit. Je tourne rapidement la tête à ma gauche et vois une nuée de plumes acérées fuser en ma direction. Eh merde. C’est mauvais cette affaire. Les projectiles sont nombreux. Sûrement trop nombreux pour que je puisse décemment tout esquiver. Je n’ai pas trop le choix et tends mes deux bras face à moi. Sans composer le moindre signe incantatoire, l’espace se tord petit à petit et une grande brèche spatio-temporelle apparaît bientôt. Les plumes arrivent, sont comme qui dirait « aspirer » et s’engouffrent dans ce portail nouvellement crée.
« C’est pas mal. »

Il y a de l’idée. Cette attaque est puissante et j’imagine que c’est la « botte secrète » de la Kosobayui. J’ai réussi à parer ce jutsu mais dans d’autres circonstances j’aurais pu y passer. Bien. « Au moins elle a appris des choses à la guerre » ai-je pensé sur le coup. Sans plus de cérémonie, j’ouvre grands les yeux et fixe l’endroit d’où provenaient les plumes. C’est là que doit être Yu. De là où je suis, je ne la vois pas distinctement mais j’imagine qu’en avançant, je pourrais discerner ses traits. C’est le moment de contre-attaquer. Voyons si elle est capable d’anticiper. A nouveau je me mets en tête de charger sur la jeune femme. Je vais toutefois y aller mollo, contrairement à tout à l’heure. D’un pas décidé, je cours vers Yu, ou plutôt devrais-je dire : « Je cours afin de rejoindre la position présumée de la Kosobayui. »

Une fois à mi-chemin, je vois effectivement une ombre féminine semblable à celle que j’ai pu apercevoir tout à l’heure. Je tente alors d’effleurer à nouveau le bras – cette fois-ci le droit – de la kunoichi.

Arrivé à mi-chemin, je sens ma peau effleurer une multitude de plumes. Loin de me faire mal ou de me ralentir, ces phanères sont inoffensives mais permettent à la Kosobayui de me repérer et, par conséquent d’éviter, mon assaut de justesse. En ce qui me concerne je peux continuer l’entraînement mais je ne suis pas sûr qu’il en soit de même pour la jeune femme. Elle est moins expérimentée que moi et ses réserves de chakra ne sont pas comparables aux miennes. Compte-tenu de tout cela, j’imagine que la meilleure chose à faire est de prendre une pause et m’apprête à suggérer l’idée à la Kosobayui quand cette dernière affirme pouvoir continuer.
« Je le peux. »

Si elle pense pouvoir continuer alors soit, continuons. Son comportement contraste avec celui qu’elle avait adopté la fois où nous devions dispenser des cours à de jeunes ninjas de la brume. Ce jour-là elle avait refusé de poursuivre l’entraînement, affirmant qu’elle était à bout et que cela n’allait servir à rien. Bien, visiblement la guerre lui a mis de la suite dans les idées. Si je le souhaite, je peux largement charger plus vite et plus fort mais je ne suis pas sûr que ce soit pertinent. Le but de l’entraînement ici n’est pas d’optimiser la maîtrise de ses dons dans un domaine en particulier mais plus de l’obliger à se familiariser avec ces nouvelles capacités et l’aider à les utiliser, même grossièrement.

Yu est parvenue à me repérer. Elle arrive plus ou moins à dissimuler sa présence et est par la même occasion capable d’éviter des attaques rapides. Je crois que nous avons fait le tour des principales techniques de traques. Il est possible que j’en aie oublié certaines mais, comme dit à de nombreuses reprises, je ne suis pas expert dans le domaine. J’essaie de me remémorer les aptitudes de mes collègues du Misuto ou du Mizukage, sans grand succès pour le moment.

Soudain je me souviens de mes retrouvailles avec Michiki. A mon retour, le chef de file de la brume avait dit quelque chose quant au fait que « j’étais bien Shinichi » et « n’étais pas sous henge ». Les shinobis ayant ce don de sensorialité sont capables – pour la plupart – de reconnaître ce qui est vrai de ce qui ne l’est pas. Ainsi, ils peuvent pressentir qu’une illusion les affecte et s’en défaire ou distinguer le vrai ninja de son clone. N’étant pas capable de produire un genjutsu digne de ce nom, je compose un unique mudra et crée quatre version de moi étant en tout point identique à ma personne. Mes clones et moi partons ensuite dans des directions opposées et tentons de nous cacher au mieux. A noter que la plume qui me collait aux fesses est tombée, sans que je m’en rende compte, lors de ma charge précédente.

Cet exercice se veut plus complexe que les précédents. En effet il met en jeu à la fois un repérage global et, dans le même temps, une capacité à discriminer le vrai moi des faux.

Je pars me cacher et indique à mes différents clones de faire de même. Bien qu’elle soit capable de nous localiser plus ou moins précisément, la demoiselle maniant les plumes a le plus grand mal à distinguer le vrai des faux. Plusieurs copies de ma personnes sont détruites par ma partenaire d’entraînement avant que cette dernière ne trouve le vrai « moi ». Un senseur digne de ce nom aurait sans grand mal pu repérer lequel des cinq est le vrai et quels sont les clones.

Nous réitérons l’exercice à plusieurs reprises mais la demoiselle a du mal. Je crois qu’elle est à bout et qu’il est maintenant temps de faire une pause. Il me reste encore du chakra et je peux continuer l’entraînement encore un moment toutefois j’imagine que ce n’est pas le cas de tout le monde ici. C’est une bonne chose de vouloir poursuivre néanmoins ce n’est pas en se tuant à la tâche que Yu risque d’exécuter correctement ces techniques. D’autant que ces dernières requièrent une dextérité et une concentration sans pareille.

D’un commun accord, nous nous arrêtons et décidons de reprendre l’exercice un autre jour. La demoiselle sait où me trouver et il y a fort à parier que nous soyons tout deux amenés à travailler ensemble. Par conséquent si elle a du temps libre, il lui suffira de me proposer de venir à nouveau et je verrais ce que je peux faire.

Les deux semaines qui suivent, la brune et moi nous nous retrouvons à de nombreuses reprises dans cette forêt. Nous répétons les exercices de la première séances, tentons de les complexifier et en ajoutons même de nouveaux sous les conseils de certaines connaissances communes et expertes dans le domaine de la sensorialité. Les exercices et journées s’enchaînent à grande vitesse. J’ai quelque peu l’impression de perdre mon temps mais qui sait … Peut-être qu’un jour les dons de cette jeune femme me seront utiles à moi ou au village. C’est en songeant à ce « retour sur investissement » que je continue d’apporter mon aide à la Kosobayui.

Après plusieurs jours de dur labeur, ma présence auprès de la brune n’est plus requise. Oh bien sûr, il reste à la jeune femme des choses à apprendre. Ses talents ne se développeront pas sans efforts et travail constant. Néanmoins nous avons explorés tous les deux quelques grands domaines de la sensorialité. C’est désormais à elle de travailler seule – ou avec quelqu’un d’autres et dans des circonstances différentes si cela l’intéresse.

Bien entendu je reste à sa disposition en cas de besoin mais mon petit doigt me dit qu’elle est parfaitement capable de progresser seule dorénavant. Le plus dur lorsqu’on tente d’acquérir de nouvelles compétences est d’appréhender la discipline. C’est chose faite et c’est désormais à Yu de voler de ses propres ailes. Quoi de plus normal soit dit en passant pour une Kosobyui.