Tranquillement installée sur le pont de son navire, Nami profitait des rares rayons de soleil que pouvait offrir le ciel du Pays de l'Eau. Elle était confortablement assise sur un transat, un bouquin à la main. Les rayons solaires étaient suffisamment intenses pour qu'elle ait retiré sa cape bleue. Les épaules à l'air, elle profitait du printemps et de ses charmes. Une légère brise maritime vint lui rappeler qu'il ne fallait pas se découvrir d'un fil, l'été ne tarderait plus mais il fallait encore patienter. Elle est une kunoichi, mais elle n'en reste pas moins une jeune fille, profitant des douceurs de la vie.
Mais la vie n'est pas conciliante avec tout le monde. Mizu no Kuni se relevait à peine que des forces étrangères si intéressaient déjà. Le port de Kiri, l'un des organes vitaux du pays, possédait en son sein les premiers commerçants prospères depuis la reconstruction. Sa position géographique lui conférait un avantage. Installé sur la rive ouest de l'île principale, entre le village et la mer, le port est l'une des principales plates formes économiques du pays, recevant les marchandises provenant de Hi no Kuni, Nami no Kuni ou encore Hai no Kuni. Le transport maritime est l'une des activités les plus importantes dans le pays, véritable institution, il irrigue l'ensemble de l'archipel en produits de première nécessité ou en matière première. Et la réussite de certains armateurs locaux captivait l'attention d'un groupuscule étranger.

Ces industriels étaient originaires de Yu no Kuni. A plusieurs reprises, ils avaient cherché à créer une relation commercial avec Mizu. Ils s'étaient d'ailleurs rendus il y a peu de temps à une vente aux enchères à Kiri, soirée réservée aux nobles des pays du coin afin de traiter les affaires en cours. Mais malgré tous leurs efforts, aucun armateur ne voulait travailler avec eux. Etrange, me diriez-vous, sachant que Mizu cherche à développer son commerce extérieur. Mais la réalité était tout autre. Des navires Kirijins plein de marchandises avaient déjà été envoyé vers le Pays des Sources Chaudes. Mais ces industriels, peu scrupuleux et un peu vantards, avaient directement chargé les marchandises fraîchement débarquées dans un convoi en partance pour Tetsu no Kuni, un pays sous le joug de Kumo... Ayant appris la nouvelle par leurs équipages, les armateurs de Kiri arrêtèrent toute relation avec ce pays. Ce commerce était juteux et il était hors de question d'en rester là. Voyant que les récalcitrants ne fléchiraient pas, les armateurs de Tetsu s'associèrent et infiltrèrent discrètement le Pays de l'Eau afin de prendre possession de ses entreprises maritimes. Bien sûr, ils n'étaient pas militaires et n'allaient pas utiliser la manière forte. Ils utilisèrent leurs ressources illimitées pour racheter les entreprises en question. Trop fières de leur nouvelle réussite, les jeunes entrepreneurs Kirijins refusèrent, même face à tout l'or du monde. Essuyant un nouveau revers, le groupuscule employa une nouvelle méthode. Il créa sa propre entité sur les rives de Mizu et cassa les prix pour rafler l'ensemble des marchés de ce secteur économique florissant. C'est pour cela que les firmes appelèrent le Mizukage à l'aide, dénonçant cette concurrence déloyale.

Un pigeon se posa sur la proue du bateau. Voyant la destinataire du message qu'il portait assoupie sur son transat, il tapa avec son bec sur le bois. Le bruit généré la fit sursautée. Elle prit quelques instants pour se réveiller. Le pigeon, trop impatient, battait des ailes comme pour lui montrer qu'il n'avait pas le temps. Nami s'approcha de l'oiseau et enleva le parchemin attaché à sa patte. Alors qu'il s'envolait, elle lut le message.

"Enfin une nouvelle mission. Je suis de nouveau accompagnée. J'ai hâte de voir avec qui je suis cette fois."

Elle enfila sa cape, descendit dans les cales du navire pour ranger le livre qu'elle tenait et les affaires qui traînaient. Elle ne se précipita pas, son navire mouillait dans les quais du port de Kiri et le premier commerçant à aller voir était juste à côté. Après une bonne heure, elle se mit enfin en route pour sa seconde mission.

Les choses avaient bien changé depuis le jour où j’avais rencontré Rinkyu durant mon travail chez Morikawa. Un commerçant gagnant sa vie dans la livraison de produits en tous genres, que ce soit l’alimentation, les matériaux de construction ou le textile, cet homme faisait partie de ceux qui avaient réussi à relancer l’économie de Mizu no Kuni. Savoir cela avait le don de le rendre arrogant, sans parler de son stupide fils Kaori qui nous en avait fait voir lui aussi.

Mais bon, à l’heure actuelle, j’en avais fini avec ces deux-là, et la raison était un groupe industriel parvenant à rafler tous les clients de notre pays en cassant leur prix au maximum. Lorsque Morikawa avait commencé à en faire lui-même les frais malgré la qualité de ses services, il n’avait eu d’autres choix que de se séparer de moi, ne pouvant plus me payer correctement. Enfin, pour ce que ce radin appelait un salaire correct... Cette nouvelle entreprise tentait de faire couler notre archipel à petit feu, et si rien n’était fait, elle allait y parvenir à ce rythme.

Ces ordures n’avaient pas idée de la difficulté et du temps que demandait la remise en marche d’un pays, non, seul leurs profits comptaient. L’argent rendait ignobles et personne n’y échappait. Quand une missive m’était parvenue afin de remettre de l’ordre dans cette déchéance commerciale, j’en avais presque été content. J’allais pouvoir faire quelque chose pour faire comprendre à ces sales profiteurs qu’ils avaient eu tort de choisir la Brume pour se faire de l’argent. Ils voulaient rouler sur l’or, ils n’auront que leurs rotules pour le faire... ‘Fin, façon de parler, quoique...

Les mains dans les poches, je me dirigeai d’un pas soutenu vers le plus récent commerçant ayant eu affaire à cette nouvelle entité. Cette dernière proposait inlassablement de racheter les parts, et plus les choses s’envenimaient, moins les commerçants avaient le choix, ne voulant pas se retrouver sur la paille. Je ne tardai pas à reconnaître le magasin de matières premières, souvent les plus touchés car les plus importants. Une jeune femme aux cheveux argentés arrivait également dans une autre rue, je la reconnue tout de suite avec sa cape bleue, Nami. Un sourire étira mes lèvres en voyant ma coéquipière, c’était une bonne occasion de forger de bonnes relations.

« Salut Nami. Notre première mission en équipe, ça tombe bien ! »

Les salutations faites, il était temps d’aller commencer notre récolte d’informations. Nous entrions donc tous les deux, l’endroit avait une odeur particulière, un mélange de tout ce qui pouvait bien se vendre. Je peinai à dire si ça me dérangeait ou pas...

Les rayons de soleil caressaient la peau blanche de Nami, un vent léger effilait sa chevelure platine. Elle approchait tranquillement du lieu de rendez-vous, l’un des commerçants victimes de pression de la part de ce groupuscule industriel. Dans la rue d’en face, une autre personne marchait en direction de l’entrepôt. Le soleil dans les yeux, Nami avait du mal à distinguer un visage. Elle apercevait seulement son style vestimentaire, une chemise blanche avec un haut noir et une sorte de ceinture de cuir autour du buste. Elle connaissait un ninja portant ce genre d’accoutrement, et avant même que le soleil lui permit de voir son visage, elle comprit qu’il s’agissait d’Akio, son chef d’équipe. C’est alors qu’il l’accueillit avec un large sourire, ce garçon respirait la joie de vivre. Nami appréciait la vie également, mais elle restait toujours de marbre, non-chalante. Elle le salua simplement d’un signe de la main. Ils se retrouvèrent devant l’immense porte coulissante du hangar.

« Bonjour. Et bien, on dirait qu’après Rinkyu, ce soit toi mon prochain partenaire de mission. Ne perdons pas trop de temps à bavasser, ces gens ont besoin de nous. Tu as certainement lu l’ordre de mission. Lui et d’autres subissent des pressions de la part d’un nouvel armateur installé un peu plus loin, sur les côtes du pays. Allons à sa rencontre pour en apprendre un peu plus. »

L’immensité du bâtiment lui permet de recevoir des centaines, voire des milliers de caisses de marchandises et ce lieu devait certainement grouiller de vie. Au lieu de ça, quelques dizaines de boîtes en bois étaient entreposées et les dockers, au lieu de travailler, étaient assis dessus, fumant leur cigarette. La réalité était bien différente en effet, l’entreprise tournait au ralenti. Les deux genins s’approchèrent du groupe de dockers.

« Bonjour, pouvez-vous m’indiquer où se trouve le responsable s’il vous plait. »

L’un d’entre eux pointa du doigt le seul bureau de la bâtisse. Alors que les ninjas se dirigèrent vers lui, le patron les aperçut à travers la fenêtre et sortit directement.

« Bonjour, j’imagine que vous êtes les shinobis envoyés par le village ? »

Nami regarda Akio et les deux acquiescèrent d’un hochement de tête. Ils lui demandèrent de lui expliquer la situation dans le détail afin qu’ils puissent maitriser l’ensemble de la situation. Savoir récolter les bonnes informations faisait partie de la mission. Le marchand entra alors dans un long monologue.

« Depuis la reconstruction du village, le pays est en perpétuelle mouvement et le travail ne manque pas. En plus du commerce intérieur, nous devons importer et exporter des ressources dans le monde entier. Un pays voulait ouvrir une nouvelle voie commerciale avec nous et nous avons accepté, ce pays est Yu no Kuni. Mais dès les premières livraisons, mes équipages ont remarqué que les marchandises tout juste livrées étaient directement chargées dans un convoi terrestre et ils apprirent par l’un de leurs homologues qu’il était à destination de Tetsu no Kuni. Imaginez-vous le sort qui nous aurez été réservé si l’administration du village avait appris que je commerçais sciemment avec l’ennemi, car je le rappelle, Tetsu est une colonie Kumojin. Les autres armateurs et moi-même avons stoppé net le commerce avec eux. Je ne sais pas si l’Etat de Yu est au courant, mais il est certain que ses industriels agissent en connaissance de cause.
Quand ils apprirent cela, ils tentèrent d’abord une approche diplomatique en se rendant au village de Kiri. Face à notre refus, ils proposèrent alors de nous racheter nos sociétés, chose que nous avons refusé à nouveau. C’est alors que les ennuis ont commencé. Des hommes bizarres rodaient autour de nos navires et de drôles d’accidents surgissaient. Au début, nous n’étions pas inquiets mais face à la recrudescence de ces événements, nous avons vite compris. Ils nous mettent la pression pour que nous acceptions leur proposition. Cela fait plusieurs mois que ça dure mais nous tenons bons.
Les choses n’avançant pas assez vite à leur gout, ils ont créé leur propre structure dans un autre port, cassent leur prix et raflent toute notre clientèle. Nos clients voyant que l’entreprise est basée à Mizu, n’y voit que du feu et pensent faire travailler une entreprise locale. Voilà toute l’histoire. En plus de réparations couteuses suites aux ‘accidents’, nous perdons au fil du temps tous nos clients … Si la situation n’est pas résolue dans quelques semaines, je serai bon à mettre la clef sous la porte. »

« Je vois, et une fois qu’ils auront le marché local entre leurs mains, ils pourront exporter nos ressources vers leur pays et les revendre à prix d’or à qui ils veulent… »

La conversation fut soudainement interrompue par un vacarme assourdissant. Un nouvel accident venait de se produire sur les quais, avec un navire de ce marchand.

Au fil du temps passé avec chaque membre de mon équipe, j’apprenais à les connaître, à voir comment ils étaient au fur et à mesure que chacun trouvait sa place et se sentait à l’aise au sein de Kurikami. J’avais été surpris de voir Hatanabe aussi bavard et blagueur lors de notre dernière mission, alors qu’il m’avait semblé très timide le premier jour. Pour ce qui était de Nami, c’était une jeune femme avec la tête sur les épaules qui aimait s’assurer avoir toutes les cartes en mains avant de faire quoi que ce soit. Et les paroles qu’elle m’adressa en témoignait grandement.

L’Hageshii ne put s’empêcher de me rappeler l’ordre de notre mission, histoire d’être bien sûre que je l’avais bien en tête. Mais ce n’était pas pour me déranger, je savais que l’argentée aimait avoir le contrôle de la situation, stricte dans son travail mais pas dans son caractère. Comment disait-on déjà... Ah oui, une main de fer dans un gant de velours ! Ça lui correspondait bien !

« Oui, allons-y. »

Je la suivais à présent calmement à l’intérieur du bâtiment. Immense, devant être en temps normal rempli à ras-bord de marchandises en tout genre. Hors actuellement, celui-ci souffrait d’un énorme manque de clientèle et par conséquent, de produits. Le vide accentuait la grande surface que représentait la bâtisse. Et voir ces hommes assis sur leur caisse, les traits tirés, le regard baissé, contrarié voire même haineux pour certains, me fis serrer les poings jusqu’à en ressentir une petite douleur. D’autres tiraient sur leur pauvre cigarette, seule exutoire qui leur restait face au coup de couteau que leur avait mis cette saleté d’entreprise. Ma coéquipière ne tarda pas à leur demander à voir le responsable. D’un simple geste, on nous indiqua un petit bureau non loin.

Nous n’eûmes pas le temps de nous y rendre, car le dirigeant nous aperçut à travers la petite fenêtre de sa porte et sortit. Je hochai la tête de concert avec mon acolyte à sa question, et délia enfin mes lèvres.

« Pouvez-vous nous expliquer votre situation dans les détails ? »

Mes paroles furent suivies d’un long monologue durant lequel j’écoutai chacune des explications que nous donnait le marchand. Ils s’étaient fait avoir lors de la livraison de leurs marchandises, ce qui aurait pu causer d’énormes problèmes étant donné que nous étions en guerre avec Kumo. Pas besoin d’autres raisons pour refuser de continuer le commerce avec Yu no Kuni. Le fait que ce pays ait commencé à mettre la pression sur les commerçants de Mizu ? pouvait laisser penser qu’ils soient de mèche avec Tetsu no Kuni. Ou alors je pensais trop loin, hum non c’était parfaitement possible ! En affaire, la pitié n’existait pas. Le dernier point que souleva Nami était parfaitement l’issue finale d’un tel stratagème, il fallait l’arrêter, et vite !

Malheureusement, nous fûmes contraints de laisser nos réflexions de côté, car une puissante détonation retentit à l’extérieur. Jetant rapidement un regard à la jeune femme, je me précipitai déjà vers la porte de sortie. Le vacarme venait tout droit du port et nous filions à toute vitesse vers ce dernier. Arrivés sur le quai, un navire d’une taille non négligeable, venant de lever l’ancre et ayant parcouru de bonnes centaines de mètres, était en flamme. Sa coque commençait à se briser, faisant le bateau se plier en deux petit à petit, sous le poids des ressources qu’il renfermait.

Un bateau de taille plus modeste se dirigeait vers lui, nous avions également notre rôle à jouer ! Nous ignorions combien de personnes se trouvaient à bord.

« Nami, on doit faire vite ! »

Je n’avais pas à dire à l’argenté ce qu’elle devait faire, elle le savait déjà au vu de son affinité. Pour ma part, j’allai me charger de secourir les quelques hommes que je voyais sortir complètement affolés. Sans perdre une seconde de plus, je déployai mes ailes noires dans mon dos, et m’envolai vers le sinistre. Les deux victimes m’ayant remarqué, commençaient à bouger les bras frénétiquement. Un grand nuage de fumée noire s’élevait dans le ciel, les petites particules de poussières me firent tousser, alors que je me posai sur le navire. J’attrapai le plus proche moi, en assurant au second que je revenais rapidement.

Mes ailes se mirent ensuite à battre violemment, afin de me permettre de soulever le poids supplémentaire. Je pus le poser sur le bateau où se trouvait un autre utilisateur suiton.

« Combien étiez-vous à l’intérieur ? » Demandai-je hâtivement.

« Euh, nous sommes quatre en tout ! Il y en a deux qui étaient dans la cale ! »

« Merde ! »

Ces deux-là devaient avoir subits des dégâts à cause de l’explosion, j’allais vraiment devoir me dépêcher ! Heureusement que ma coéquipière était également médecin, les risques seraient diminués. En attendant, je reprenais la voie des airs.

L’un des derniers bastions de cette entreprise était en flamme. Alors qu’il s’apprêtait à quitter les eaux du port, une explosion vint l’en empêcher. Au beau milieu de l’eau, le navire était en feu, quel paradoxe ! L’origine de l’explosion était encore inconnue, mais avant d’enquêter, il fallait d’abord sauver l’équipage. Il y a peu de temps, Nami alors capitaine d’un navire marchand avait perdu le sien. Tous les membres s’étaient fait tuer par un capitaine Kumojin. C’est cet évènement qui éveilla en elle son destin shinobi.

Akio utilisa la voie des airs pour se rendre le premier sur les lieux. De magnifiques ailes noires se déployèrent pour le porter dans le vent. Malgré l’agression des flammes et des fumées, il put se poser sur le pont pour extraire un premier marin. Une embarcation de secours dirigée par un manipulateur du Suiton était à ses côtés, le Kirijin utilisait ses techniques Suiton pour calmer les flammes et permettre à Akio d’agir.
Quant à Nami, elle courut sur l’eau pour rejoindre son partenaire. Alors que l’homme volant venait de déposer la première victime sur le bateau de secours, il prit la médecin au passage pour l’emmener avec elle sur le navire enflammé ; le cordage servant d’échelle avait été coupé par la chaleur. Il lui expliqua la situation et avec la vue que lui procurait le vol, elle analysa rapidement la situation.

« Je te laisse secourir le deuxième marin, pendant ce temps, je me chargerai d’éteindre les flammes qui mènent aux cales. Nous devons agir vite car si l’explosion ne les a pas tué, ils mourront brûlés ou noyés. »

En effet, le bois craquait de plus en plus et la coque menaçait de céder à tout moment. La logique leur imposait de sauver ceux qui pouvaient l’être, avant de prendre d’avantages de risques. Le vol, aussi excitant soit-il, prit fin quand Akio atterrit entre les flammes. Le second marin avait de légères brulures au niveau des bras, mais après une expertise rapide, Nami le laissa entre les mains de son coéquipier.

« Rien de grave pour lui, tu peux l’évacuer ! Evites juste de toucher ses bras, ils doivent lui faire un mal de chien.
Ne traine pas trop s’il te plait, ne me laisse pas seule dans cet enfer ! »

« N’oublier pas d’aller chercher mon capitaine ! Il était dans la cale au moment de l’explosion ! C’est un homme bien, nous avons besoin de lui ! » rajouta le matelot.

Alors qu’il fit battre de nouveau ses ailes, Akio s’envola, le marin dans les bras.
Nourrit par le bois de la coque et le tissu des voiles, le feu se transforma en brasier. Les flammes l’agressaient et la Kirijin dut employer les grands moyens pour tenter de stabiliser la situation.

Afin d’augmenter l’efficacité de ses sorts, Nami créa deux clones. A trois, elles utilisèrent le même jutsu.


De leur bouche jaillirent trois jets d’eau. Elles mesurèrent la pression de leur technique afin de ne pas fragiliser d’avantage le navire. Elles concentrèrent ensemble les jets vers l’entrée des cales pour les libérer des flammes. Puis, elles crachèrent toutes dans une direction opposée afin de sécuriser la zone, l’une à droite, l’autre à gauche et la dernière au-dessus. Après quelques secondes de ce jutsu de rang B, le feu était maitrisé sur l’arrière du pont, là où se situe l’escalier menant au niveau inférieur.
A peine eut-elle fini que son chef d’équipe se pointa. Comme elle l’espérait, il n’avait pas trainé, confiant aux secours le deuxième moussaillon. L’accès aux cales était maintenant libre de tout danger, les deux genins s’y engouffrèrent…

De toute ma hauteur, j’avais pu avoir une vision très large du port en question. Une foule impressionnante envahissait les quais, des cris me parvenaient, mais je peinai à comprendre ce que ces gens disaient dans tout ce brouhaha. Rapidement, ma victime posa les pieds sur le bateau de l’homme, qui hocha la tête avant de reprendre ses techniques élémentaires. Nami ne tarda pas à arriver à son tour, courant sur l’eau avec facilité. Avec son accord, je me plaçai dans son dos, l’entourant en passant mes bras sous les siens. Contrairement à l’homme que j’avais sauvé, la jeune femme était un vrai poids plume. Nous survolions le navire en proie aux flammes, toute la surface était fichu, et bientôt, ce serait tout le reste si nous n’agissions pas très vite !

« Il reste aussi deux matelots dans la cale, mais le feu m’empêche d’y aller ! »

Alors que je me rapprochai du plancher partiellement détruit, la fumée commença à m’agresser les yeux, les faisant presque pleurer. Aussitôt posés, je les essuyai d’un revers de main rapide tout en rétractant mes ailes dans mon dos. Sans perdre un instant, j’allai à la rencontre du second marchand, ce dernier était blessé au niveau des bras, mais cela restait superficiel heureusement. Je pouvais donc le porter tout en prenant plus de précautions. La dernière remarque de ma coéquipière me fit sourire malgré l’urgence de la situation.

« T’inquiètes pas, tu sais bien que je suis le plus rapide ! On fera notre possible, comptez sur nous ! » Finissais-je par répondre à l’homme blessé.

Sur une simple pensée mes ailes se remirent à battre, faisant voler des cendres et des débris de bois tout autour de nous. C’était chaque fois une bouffée d’air de sortir de cette chaleur étouffante qui me brûlait les poumons à chaque inspiration. J’espérai vraiment que les deux hommes coincés dans la cale soient encore en vie et ne souffrent pas de séquelles une fois soignés. Le trajet du retour fut aussi court que le premier, doucement, je déposai le rescapé sur la chaloupe aux côtés de son acolyte.

Le plus dur restait à présent à faire ! De ma position aérienne, je voyais les flammes diminuer grâce aux efforts du Kirijin et de Nami. L’air devenait un peu plus respirable bien que demeurant relativement lourd. Les escaliers menant aux cales étaient à présent accessibles, certaines avaient noircies. Prudemment, mon pied droit alla se poser sur la première. Je plaçai le haut de mon col au-dessus de mon nez, l’endroit était enfumé, difficile de voir à plus de trois mètres. Une toux que je ne pus traversa ma gorge irritée, se mêlant aux crépitements des flammes. Par endroit, cet élément dévastateur rongeait la coque, de l’eau entrait déjà. Arrivé aux pieds de l’escalier, cette dernière atteignait la moitié de mes cuisses. Un frisson me traversa l’échine à ce brusque changement de température.

« Évitons de trop nous séparer... Indiquai-je à l’eiseinin. - Où êtes-vous ?! » Criai-je soudainement, espérant une réponse.

Seuls des gémissements à peine audibles parvinrent à mes oreilles. J’échangeai un rapide coup d’œil avec ma coéquipière, et continuai d’avancer dans la cale à moitié inondée. La visibilité n’aidait pas, les voix faibles me guidaient jusqu’à elles. Mes yeux s’écarquillèrent lorsque je tombai enfin sur l’un des marchands. Il avait le buste penché sur un tas de marchandise, les jambes dans l’eau uniquement, celles-ci et son dos étaient brûlés sévèrement. Un de ses bras avait un angle bizarre, l’onde de choc avait dû le projeter et celui-ci n’avait pas tenu. Je ne parvenais pas à voir le second membre de l’équipage, mais entendais toujours ses râles de douleurs.

Mon cerveau surchauffait, comment j’allais pouvoir porter cet homme avec des blessures pareilles ? On ne pouvait pas faire des soins ici il fallait sortir, et vite ! Une idée me vint ensuite à l’esprit. Je n’avais jamais essayé ça mais c’était le moment.

« Nami, regarde si tu vois le second, je ne pourrai pas le porter sans aggraver son cas, j’essaie un truc ! »

Concentrant mon chakra dans mon corps, j’effectuai des signes que je ne connaissais que trop bien, mais dans un ordre différent. Une plume verte foncé se créa, elle ne faisait qu’une trentaine de centimètres. Je voulais qu’elle s’allonge davantage, de quoi pouvoir supporter le poids d’un homme. La sueur perlait sur mon front alors que mes doigts se serraient les uns contre les autres. La plume grandissait au fur et à mesure, atteignant les un mètre cinquante environ, pas assez... Aller fait pas chier ! J’injectai une grande dose de chakra dans le corps duveteux, qui atteint finalement les deux mètres de longueurs. Dans un long soupir, j’appuyai dessus pour tester, la plume était solide et apte à porter le blessé.

Je m’approchai de celui-ci et lui expliquait qu’il serait bientôt sorti de cette fournaise. Délicatement je lui mettais les bras le long du corps, non sans un cri de douleur de sa part mais je n’y pouvais rien. Mes bras passèrent ensuite sous son corps, le maintenant au niveau du torse et des jambes, puis je le soulevai avant de le poser sur le ventre sur la plume. Cette dernière ne céda pas, il me faudrait beaucoup d’énergie pour la bouger mais qu’importe !

« Ça donne quoi de ton côté ? » Demandai-je en haussant la voix.

Une épaisse fumée noire se dégageait des cales. La descente des escaliers allait se révéler dangereuse. Contrairement à Akio qui put protéger ses voies respiratoires avec son col, Nami ne possédait qu’un simple t-shirt. Malgré tout, elle emmitoufla une partie de son visage dans sa capuche, ne laissant dépasser qu’un œil en pleure. La suie se déposait sur leur vêtement, la cape bleutée devint peu à peu sombre. Les deux genins n’arrêtaient pas de tousser.

Pour faciliter les recherches, le jeune garçon s’écria. Les naufragés lui répondirent par des gémissements. Rapidement, ils purent trouver le premier. Il était allongé sur un tas de débris, le corps dans un piteux état. Son dos et ses jambes avaient été sérieusement touché par les flammes, son bras était complétement retourné. Mais il était impossible pour Nami de le soigner. Dans les entrailles du bâtiment à la dérive, l’eau et le feu se faisaient face. Ces deux éléments contraires s’associaient parfaitement pour mettre à mal l’équipe Kirijin. L’eau s’engouffrait de plus en plus et menaçait de les noyer ; les flammes s’allongeaient de plus en plus et menacer de les brûler.
Alors qu’Akio allait s’occuper de lui, le matelot prononça quelques mots :

« Le Capitaine … Où est mon Capitaine ? »

Le dernier homme était donc ce fameux capitaine tant appréciait de ses hommes. Un chef de cette trempe devait absolument être sauvé. Kiri avait tellement besoin de ses meilleurs hommes.

*Cet attentat est le dernier ! Une fois sortis d’ici, nous nous occuperons d’eux. Parmi toutes ces entreprises, tous ces hommes, il y a l’avenir de Kiri et du pays. Il est temps de mettre un terme à leur avide desseim.*

Akio commença à créer une plume qu’il tenta de faire grandir, Nami n’eut pas le temps d’admirer sa création que de nouveaux gémissements se firent entendre. Elle se déplaça péniblement dans cette eau parsemée de débris pour tenter d’en trouver l’origine. Les flammes toujours aussi intenses créer à chaque seconde de nouveaux orifices par lesquelles l’eau s’engouffrait. Le navire n’allait plus tarder à couler…
C’est dans une des pièces adjacentes qu’elle trouva le capitaine. Ce dernier n’avait pas été touché par l’explosion en elle-même mais par l’onde de choc. Elle l’avait propulsée contre une paroi et l’avait sonné pendant plusieurs minutes. Inconscient, l’eau montante, il manqua de peu de se noyer. Son corps le réveilla in extremis et il put s’arrimer à une planche flottante. Ses deux bras y étaient solidement accrochés, tandis que sa joue gauche y était posée, la tête sur le côté. A chaque respiration, il avalait un peu plus d’eau. La médecin l’ausculta rapidement et comprit qu’il n’avait que des blessures superficielles, le risque était qu’il subisse un œdème pulmonaire dû au liquide présent dans ses poumons. Afin de le sortir de là dans les meilleures conditions possibles, elle se plaça derrière lui, enlaça son torse en dessous de la cage thoracique et serra les bras violemment à plusieurs reprises. Elle voulait lui faire éjecter un maximum d’eau. L’homme souffrait de cette manipulation mais il cracha à chaque coup l’eau avalée.

CraaaaaaaaaaAAAAaaaaaCCCccccKkkkk

Soudainement, la coque se fissura, dégageant un bruit assourdissant. Il fallait quitter les lieux maintenant ! Un bras au-dessus des épaules de Nami, le duo réussit à rejoindre Akio et sa belle plume.
Trop concentré à maintenir sa technique, Nami passa devant afin de dégager la voie des divers débris qui l’encombrait. La fumée et les flammes avaient beau les menacer, l’adrénaline était tellement forte qu’elle leurs procurer la force nécessaire d’avancer. Ils réussirent à gravir les escaliers et à rejoindre le pont quand la coque se fissura. Le navire se scinda en son centre en deux parties. Le plancher alors droit s’inclina vers la mer, entrainant avec lui les survivants …

« On va le trouver ! » Répondis-je rapidement à l’homme blessé.

Dans un grand effort je l’avais placé ventre contre la plume afin qu’il ne repose pas sur ses brûlures loin d’être superficielles. Mes poumons commençaient à ne plus pouvoir faire leur travail avec toutes cette fumée. Je n’avais eu aucun retour de Nami après avoir crié pour savoir où elle en était. Inquiet, je laissai la plume flotter au-dessus de l’eau et la cherchait du regard, ou plutôt au bruit. Un craquement assourdissant me fit sursauter et quelques secondes après, la Kirijin revenait avec le Capitaine en appui sur son épaule. C’était le moins blessé de tous les matelots du navire. Je laissai la jeune femme passer devant et ouvrir la marche, tandis que je me concentrai à garder le brancard improvisé intact. L’homme allongé dessus somnolait, marmonnant des mots à peine audible et gémissant par moment. Grâce à une poussée d’énergie, nous parvenions bien vite sur le ponton du bateau.

Malheureusement, avant que nous puissions quitter l’embarcation en flamme, celle-ci finit par céder et se briser en deux. Dans un réflexe je surélevai la grande plume, mon corps commença à glisser vers la mer glacée. Rapidement, je recomposai les signes me permettant de créer mes ailes, je me retournai sur le ventre pour les déployer et pris enfin mon envol. Pour mieux fuser vers ma coéquipière et le capitaine, qui eux, continuaient leur course incontrôlable ! Les yeux embués par des larmes à cause de la fumée, puis asséchés à cause de l’air qui s’y engouffrai pendant mon accélération, je volai presque à l’aveugle. Je parvins tout de même à agripper Nami et l’homme au niveau des aisselles.

Cependant second problème, avec la force qu’ils effectuaient vers le bas, les deux se trouvaient être sacrements lourds. Il me fallut plusieurs secondes pour ralentir considérablement leur chute, juste assez pour que la jeune femme puisse reposer sur l’eau, ayant surement eu le temps de malaxer son chakra. Doucement et dans un dernier effort, je les relâchai. D’un geste de la main, je rapprochai ensuite la plume verdâtre. Essoufflé, mes plumes dorsales disparurent et j’atterris lourdement sur les vagues. J’aidai ensuite Nami à soutenir le Capitaine tant apprécié par ses pairs jusqu’à l’autre petit navire, le brancard nous suivant lentement également.

« Ses blessures sont graves, tu vas pouvoir le soigner un peu ? » Demandai-je à Nami.

Derrière nous, les dernières flammes s’amenuisaient dans l’eau salée, ne laissant plus que des débris de bois et de métal fondu flotter à la surface. D’autres bateaux se rapprochaient, en prenant la responsabilité. Je m’asseyais sur le rebord du bateau, toussant un bon coup, alors que les membres de l’équipage préalablement sauvés, étaient soulagés de voir leurs amis sauvés. Cette entreprise commençait à prendre trop d’ampleur, à trop penser qu’elle pourrait écraser Kiri !

« Ils ne frappent pas au hasard, ça va être dur de trouver les responsables. Ces explosions, ils sont passés à la vitesse supérieure, ça m’a tout l’air de parchemins explosifs, ça veut dire qu’ils peuvent avoir engager des shinobis mercenaires... Vous n’avez remarqué personne de louche sur les quais ? »

« Hmm... Non rien de spécial, les contrôles se sont accentués justement à cause de cette entreprise qui tente de faire pression... Vous pensez que, c’était ça leur vrai objectif ? »

« C’est possible, on va aller voir ceux qui se chargent de ces soi-disant contrôles. »

Ce serait un moyen simple et discret de tout saboter de l’intérieur. Tout le monde pouvait être corrompu, il suffisait d’avancer l’argent et c’était fait. L’organisation n’aurait pas pu gagner autant d’importance sans une aide interne, même en cassant les prix. Ça me dégoutait...

Le plancher du navire s’inclina vers la mer. Les quatre Kirijins glissaient rapidement vers l’eau. Les deux ninjas auraient certainement pu s’en sortir, mais les deux marins, trop affaiblis y auraient laissés la vie. Nami n’avait pas la réponse à cette solution et heureusement, elle put compter sur son chef d’équipe. Alors qu’il protégea son matelot, Akio déploya ses ailes et agrippa Nami et le Capitaine par la taille. Mais le poids des deux plomba le vol et l’homme-oiseau ne put prendre un envol digne de ce nom. Au lieu de cela, il décida de se rapprocher de l’eau pour les larguer avant de lamentablement s’écraser. La gamine comprit la manœuvre et anticipa l’action. Elle concentra son chakra dans la plante de ses pieds et une fois lâchée, elle retomba sur l’eau comme si elle était sur terre. Spécialisée en ninjutsu, elle put envoyer son chakra dans le corps du Capitaine pour le maintenir à la surface.
Une fois sur l’embarcation de secours, la plume faisant office de brancard nous rapporta le patient. Comme s’en inquiétait Akio, les blessures du matelot étaient graves. Les brûlures recouvraient la majeure partie de son dos et avaient atteint la chair.

« Je suis trop inexpérimentée pour traiter ses blessures avec mon chakra. Tout ce que je peux faire, c’est lui passer un baume anesthésiant pour réduire les douleurs. Elles doivent être tellement violentes. C’est certainement pour cela qu’il est en partie inconscient, son cerveau le protège de ses souffrances. »

L’eisenin sortit de sa sacoche un pot avec la crème en question. Elle s’agenouilla aux côtés de son patient et appliqua avec précaution la lotion. Des grimaces se dessinaient sur le visage de ce dernier, malgré les mesures qu’elle prit, les dommages étaient tels qu’une simple pression sur la zone endommagée le faisait souffrir. Mais elle n’en avait cure, peu importe ses tourments, la crème devait être appliquée, pour son bien. Puis elle s’adressa au propriétaire du navire de secours.

« Dirigez-vous directement vers l’hôpital de Kiri. Il doit être pris en charge le plus rapidement possible. J’ai fait le choix de calmer ses douleurs, mais maintenant, il risque l’infection ! Et il faut sauver le plus de tissu possible.
Laissez-nous ici, nous continuerons en marchant sur l’eau. »

Tous deux sur l’eau, Akio exposa alors sa thèse. Elle tenait la route. Depuis le début des agressions, le port avait mis en place un poste de garde à l’entrée principale. Les agresseurs étaient obligatoirement passés par là. Et normalement, n’ayant rien à y faire, ils auraient dû être refoulé. S’ils ont réussi à pénétrer la zone, c’est que quelqu’un les y a autorisé. En effet, en plus de permettre une filtration dès l’entrée, les agents de sécurité sont censés fournir un badge. Ce badge permet aux équipes mobiles de contrôler inopinément le personnel présent dans la zone portuaire. Malgré cette double sécurité, les shinobis véreux ont pu atteindre les navires qui mouillaient. Ils avaient certainement eu accès à ces badges.
Les deux kirijins devaient se rendre au poste de sécurité pour interroger les agents. L’un d’entre eux devait être de mèche avec l’organisation. Ils se mirent à courir vers le poste pour gagner du temps, peut-être que le garde ou les ninjas corrompus étaient encore dans le coin.

Nami était encore jeune malgré la maturité dont elle était capable de faire preuve. Dans le domaine de la médecine, elle n’avait malheureusement pas encore les compétences nécessaires pour soigner des brûlures aussi critiques. Pauvre homme... De quoi me faire rager contre ces enflures ! Tout en tenant le rebord du navire dans mes mains, j’observai l’état du matelot et ma coéquipière lui appliquer une crème. Mes poings se serrèrent inconsciemment et le bois émis des crissements sous mes ongles. Seulement je devais me calmer, m’énerver n’aiderait pas ces hommes et ne servirait pas à la mission ! D’une grande inspiration, je malaxai mon chakra une fois que Nami eut terminé ses soins. Délicatement je posai la plume dans le bateau, le propriétaire pouvait maintenant partir pour l’hôpital.

De notre côté, les choses sérieuses allaient commencer. Au loin j’apercevais facilement le poste de garde. À travers les baies vitrées plusieurs personnes s’affairaient à leurs tâches respectives.

« Allons-y. »

Sur ces mots, je débutai ma course sur l’eau pour rejoindre la terre ferme au plus vite. Quelques mètres de marche suffirent à nous mener devant les portes du poste de garde. Sans hésitation, je toquai à la porte, et quelle ne fut pas ma surprise de reconnaître l’homme qui nous avait accueilli Yu et moi lors d’une précédente mission. Ce type arrogant et négligé. Lorsqu’il ouvrit la porte, il sembla me reconnaitre, ses sourcils se froncèrent instantanément, il fallait dire qu’avec ma tignasse rousse on ne m’oubliait pas facilement...

« Encore toi gamin, je croyais t’avoir dit de ne pas revenir... »

« Vous voulez expliquer à Michiki-sama pourquoi je ne peux pas venir ici ? »

« Tch, on a entendu l’explosion, c’est pour ça qu’vous êtes là j’imagine ? »

Je me retenais de le féliciter pour sa perspicacité et me contentai d’acquiescer. Le garde nous laissa donc finalement rentrer à contre cœur. Une odeur de cigarette emplissait la pièce, ils n’aéraient jamais ici ? Une dizaine de personnes travaillaient ici, tous en mouvement, difficile de voir à qui s’adresser, jusqu’à ce que je remarque une tête dépasser du comptoir, encore un peu et pour moi il n’y avait personne assis là. Jetant un regard à ma partenaire, je m’avançai vers lui. Mes doigts tapotèrent sur le comptoir pour lui faire remarquer notre présence. Brusquement le visage d’un jeune homme aux tâches de rousseurs et aux yeux verts nous scruta d’un air interrogateur.

« Oui je vous écoute ? »

« C’est à propos de l’explosion qui vient d’avoir lieu, on voudrait des informations sur le système de sécurité du port, visiblement il y a une faille. Tu dois t’y connaître mieux que moi Nami, non ? »

Je préférai laisser ceux plus compétents que moi se charger de ce genre de choses. Le détail du système de sécurité portuaire me passait au-dessus de la tête à vrai dire.

La théorie que m’exprima Nami sur le chemin me paraissait tenir la route. Seul un complice avait pu permettre cet acte terroriste, le port était minutieusement contrôlé en continue. Après tout c’était notre pilier commercial, sans lui, Kiri ne pourrait vraisemblablement pas se relever. Alors il nous restait à trouver les coupables se terrant comme des taupes. Et le standardiste derrière son comptoir allait certainement nous éclairer sur le système de surveillance, seulement, je préférai laisser faire Nami sur ce plan là, chacun avait des connaissances différentes qui servaient à un moment ou un autre.

J’eus d’ailleurs raison, la Kirijin exposa directement le fonctionnement des contrôles, le petit standardiste ne pourrait pas être tenté de masquer la vérité pour je ne sais pas moi, couvrir leur faille ? Face à la jeune femme, il ne put qu’acquiescer et apporter des précisions sur le déroulement des événements depuis l’explosion. Bien sûr, les employés contrôlés n’avaient rien révélé de suspect, mais cela confirmait donc qu’un ou des traîtres se cachaient parmi nous, peut-être même dans cette pièce ! Toujours franche dans sa façon d’être, Nami se permit une remarque qui aurait pu vexer n’importe qui, même si elle avait raison, il avait l’air un peu niais sur les bords.

Toujours silencieux, j’écoutai la suite de leur échange. Comme par hasard, le dénommé Kinzu ne se sentait pas bien, c’était plus crédible que si je disais savoir chanter. Aux mots de notre interlocuteur, je me rapprochai de l’une des fenêtres donnant sur la rue en question. On pouvait effectivement voir le soi-disant malade, qui n’en avait évidemment pas l’air. Alors que je me disais qu’en redescendant tranquillement nous tomberions sur lui, l’imbécile aux yeux verts se mit à gueuler sur le balcon adjacent à ma fenêtre.

« Tu pouvais pas la fermer ?! M’exclamai-je alors que Kinzu s’enfuyait à toutes jambes. – Nami, suis-moi avant qu’on ne le perde ! »

Sur ses mots, je me dirigeai vers le balcon tout en composant des signes que ma coéquipière n’aurait aucun mal à reconnaitre. C’était partie pour une nouvelle envolée jusqu’au fuyard. Je me plaçai dans le dos de Nami, l’entourant au niveau du buste, avant de décoller du balcon. L’homme me paraissait minuscule tandis que je surplombai le port jusqu’à lui. Je le voyais d’ailleurs jeter des regards en arrière, il nous avait remarqué et tentait d’accélérer, mais c’était peine perdue, j’étais déjà au-dessus de sa tête, dégarnie au passage, oui c’était un détail important. Perdant de l’altitude au fur et à mesure, seuls quelques mètres nous séparaient du traitre, et une idée germa dans mon esprit, un petit sourire espiègle étira mes lèvres.

« Largage ! »

Sans laisser à la Kirijin le temps de rétorquer, je relâchai mon emprise, la voyant chuter droit sur Kinzu. Étant shinobi à cette hauteur elle ne risquait rien du tout, juste une bonne dose d’adrénaline. Bon ok j’aurai dû la prévenir, mais ce n’était pas marrant sinon... Et oui ce n’était pas le moment mais je ne pouvais pas m’empêcher un peu de légèreté. Le principal suspect ou plutôt coupable enfin immobilisé, je me posai devant lui, les bras croisés.

« Lâchez-moi, je n’ai rien fait, moi ! »

« Ah ? Pourquoi tu fuis alors ? On fait peur à ce point ? Demandai-je d’une petite voix innocente, avant de reprendre un ton plus sérieux. – Maintenant tu vas nous dire qui t’a contacté pour l’infiltration et pas de détours. »

« J’avais pas le choix ok ?! Ils ont menacé de s’en prendre à ma famille si je refusais ! »

« Qui ?! » Répliquai-je d’une voix autoritaire que je prenais rarement.

« Les hommes engagés par le groupe industriel placé à Kiri depuis peu ! On leur a demandé de saboter le commerce maritime du pays pour obliger les commerçants à vendre leurs affaires ! »

« Décris-les, quand t’ont-ils contacté ou plutôt combien de fois ? »

« Ils sont toujours habillés en noir et puis j’ai jamais vu leur visage, ils sont plusieurs ! Ça fait une bonne dizaine de fois, et je suis pas le seul ! Tous les incidents survenus au port c’est parce qu’ils nous forcent la main ! »

Agacé, je soufflai bruyamment du nez, on n’arriverait à rien avec si peu d’informations !

« Eh, attendez, l’un d’eux a laissé tomber un truc ! Dans la poche droite de ma veste ! »

Je laissai ma camarade se charger de récupérer la chose en question. C’était un bracelet pourvut d’un petit crâne rouge. Si mes souvenirs étaient bons, il était porté par une bande de mercenaires bien connue. Là, on avançait ! Certains d’entre eux étaient carrément fichés, d’où la raison pour laquelle ils avaient commencé à dissimuler leur visage.

« Je pense qu’on en apprendra pas plus Nami, il n’est qu’une victime dans l’histoire... Ils visent les affaires qui marchent encore, ils ne retaperont pas au port, ça va justement attirer l’attention des autorités, et ils en profiteront pour frapper ailleurs. Et je pense avoir une idée de leur possible prochaine cible... » Finissais-je d’un regard sombre.

Nous finîmes par lâcher l’homme et l’emmener au poste de contrôle, et effectivement, il n’était pas le seul à avoir essuyé des menaces. Une fois dehors, j’expliquai plus en détail à ma coéquipière.

« Il y a quelques semaines je bossai pour Morikawa, c’est là que j’ai connu Rinkyu d’ailleurs. C’est un assez riche réapprovisionner, il tient une usine de livraison de marchandises en tout genre, et que je sache, il n’a pas encore été visé, mais ça ne saurait tarder. On devrait discrètement surveiller l’endroit et les commerces alentour qui sont tout aussi fructueux, qu’est-ce que t’en pense ? »

Si elle était d’accord, alors nous pourrions nous mettre d’accord sur notre prochaine stratégie, ils ne passeraient surement pas à l’acte dans la même journée, ça nous laisserait du temps.

... Et ne faisait que commencer... Comme Nami l’avait dit, deux options s’offraient aux mercenaires, frapper durant les dernières heures de livraisons, ou après la fermeture. Étant donné leurs actes plutôt dans l’après-midi, je penchai beaucoup pour la première option, mais impossible d’en être sûrs. Les hommes à qui nous avions affaire étaient connus un peu partout et complètement indépendants, ne possédant aucune attache, alors au final, ça ne m’étonnait pas vraiment qu’ils soient sur le coup !

Dissimulés sur le toit d’un des magasins du quartier commercial, nous attendions patiemment. Je pensais que s’ils se montraient Morikawa serait leur cible principale, mais le grassouillet n’était pas le seul à faire vivre l’économie de l’archipel. C’était frustrant de devoir attendre comme ça, la patience n’était pas vraiment mon fort, et l’immobilité totale encore moins ! Il devait être pas loin de dix-huit heures, l’entreprise de mon ancien employeur se fermaient dans environ trois heures... Un bruyant soupir s’échappa de mes lèvres en réalisant le temps qu’il restait, que c’était barbant purée, je préférai encore une bonne baston, quitte à finir dans un sale état.

« J’espère que j’ai raison, sinon on perd du temps pour rien... » Murmurai-je doucement à ma coéquipière.

Accroupi derrière le petit muret du toit, j’avais en vus le magasin en contre-bas, et pouvait apercevoir les livreurs s’atteler à leur dur labeur. Les bras chargés de caisses, de sacs, certains étaient plus chanceux et possédaient un chariot. Comme si cet ogre n’avait pas assez d’argent pour en acheter pour tous, à croire que le meilleur moyen de faire de l’argent était d’être radin, même avec ses propres employés. Ce type me dégoûtait de la tête aux pieds ! Bref, j’avais intérêt à penser à autre chose, ce soir il était une potentielle victime – pour une fois -, bon d’accord c’était plus facile à dire qu’à faire de mettre mon avis de côté. Ce serait plus simple en regardant ailleurs tiens. Je balayai la zone du regard à la recherche d’un quelconque mouvement inhabituel ; je connaissais bien l’endroit, alors ce genre de détail m’aurait tout de suite sauté aux yeux.

Malheureusement au bout de deux heures rien ne se passa. Je me mis à me déplacer dans la plus grande discrétion afin de voir une plus large zone. Ils n’avaient quand même pas prévu notre surveillance... Nan ça m’étonnerait, peut-être que je me trompai, ou alors ils attendaient que la soirée avance davantage. Mais leur but était de faire pression alors ils perdraient en impact s’ils ne côtoyaient pas le proprio.

« J’en ai marre là... Et j’ai la dalle aussi ! » Pestai-je pour moi-même.

À l’instant même où je prononçai ces mots, une agitation commença à se faire entendre, justement tout près du magasin de Morikawa, et peut-être même dedans ! Rapidement, je revins sur mes pas pour rejoindre le lieu, finalement j’avais bien vu, il fallait faire vite pour mettre la main sur eux avant qu’ils ne s’enfuient !

Ma petite escapade sur les toits pour vérifier les alentours n’avait pas plu à Nami, qui ne se cacha pas pour me le faire comprendre. Je connaissais mon défaut et mon manque de patience dans ce genre de moment où l’attente était de mise. Et je n’ignorai pas non plus le caractère de ma coéquipière. Bien qu’au premier abord elle pouvait paraître comme un petit bout de femme fragile, la jeune femme possédait un fort caractère, dur aussi. Mais même si j’étais moi aussi pourvu d’un fort tempérament, je ne comptai pas répliquer, elle avait raison, je me contentai d’une moue digne d’un enfant qu’on aurait disputé.

« Désolé, désolé... »

Alors que j’allais reprendre ma position, un cri étouffé et provenant d’une voix qui ne m’était que familière retentit et brisa le silence de la nuit tombée. Morikawa, un de ces fameux cigares hors de prix dans la main, se faisait violemment accoster par deux hommes encapuchonnés. J’avais toujours détesté cette odeur de cigare envahissant toute la boutique sans laisser un seul recoin respirable. Vraiment, ce travail ne me manquait pas du tout ! Mais plus important, les deux hommes étaient armés et s’en prenaient au gérant. De beaux lâches, ils me rappelaient les mêmes imbéciles d’amis du fils du propriétaire.

Ma coéquipière ne tarda pas à mettre une petite stratégie au point, apparemment elle avait encore envie que je la balance sur nos ennemis. Moi qui pensais que Nami n’avait pas apprécié que je le fasse plus tôt ! Son plan était bon mais à une exception prête, l’intérieur du bâtiment. Si les portes étaient assez larges pour que je passe en repliant légèrement les ailes, le plafond lui...

« Ok, plus qu’un largage, on va plutôt leur rentrer dedans, le plafond est bas. Prépare-toi, je prends de la vitesse ! »

Sur cette information, mes doigts se mêlèrent en des signes composés un nombre incalculable de fois, puis j’entourai mes bras autour de la taille gracile de l’eiseinin, tandis que mes reconnaissables ailes noires se déployaient dans mon dos. Je pris un léger virage pour accélérer, le vent déplacé par mes battements me fouettant les joues, avant de descendre subitement en direction des portes ouvertes. Grâce à la vitesse emmagasinée, je pus continuer sur ma lancée même en refermant mes ailes. Ma prise sur la taille de Nami se raffermit et je l’amenai rapidement sur l’homme tout mince, retirant mes bras une fois sûr qu’elle le renverserait littéralement. Le mur du fond se rapprochait dangereusement de moi, je pris appui sur ce dernier à l’impact, et exerçai une poussée pour prendre le grand baraqué à parti.

Nous roulâmes sur quelques mètres puis d’un salto arrière je mis de la distance entre nous. D’un coup d’œil j’aperçu mon ancien patron bien amoché, dans une autre situation je m’en serais foutu, mais pour le coup, ça me dégoutait ! Le costaud, déjà sur ses pieds, me tira de mon observation, de son pas lourd, il courait vers moi, le sabre levé et s’égosillant. Je fis rapidement quelques signes et me servit des plumes de mes ailes pour lui en envoyer de particulièrement tranchantes grâce à mon chakra. Quatre d’entre elles allèrent se loger dans ses cuisses, stoppant net sa course. Il tomba à genoux, son regard fusillant planté dans le miens, s’il avait pu me tuer avec... Une grande balafre lui barrait la face en diagonale, lui donnant un air d’autant plus barbare. Soudain, son sabre fusa dans ma direction, surpris, j’eu à peine le temps de l’éviter et il me coupa au niveau du biceps droit. Je sentis un liquide chaud me couler le long du bras et poussai un juron.

Je composai une série différente de signes, jusqu’à former une petite tornade, soulevant par la même occasion la poussière accumulée à l’intérieur. Le tourbillon se dirigea ensuite sans hésitation sur le balafré, le frappant de plein fouet, de quoi le calmer pour un moment même s’il restait conscient. Pas le temps de se réjouir, son acolyte tenta de me taillader mais je le vis arriver du coin de l’œil et déviai son bras. Il continua ainsi pendant plusieurs secondes comme un acharné. Son dernier coup à l’horizontal coupa mon haut et frôla ma peau, de quoi laisser une belle marque rosée et boursouflée.

Profitant de ce léger flottement, j’envoyai une minuscule plume se planter dans sa main, lui faisant lâcher son arme. J’encastrai avec force mon pied dans sa cage thoracique, il heurta le mur et suivit le même sort que son ami. Sonné par une salve de balles d’airs, son dos glissa le long de la paroi de béton, jusqu’à ce qu’il rencontre le sol. Je secouai mon bras droit parcouru de fourmis et pressai ma blessure, visiblement son sabre m’avait touché plus que je ne le pensais. J’en fis cependant abstraction et me tourna vers ma coéquipière.

« Il va bien ? »