Une journée intéressante se profile. Je suis assignée à une mission de rang C en coopération. Honshū Kōsei. Je ne sais pas du tout qui c'est, mais une chose est sûre, il va rapidement savoir qui je suis ! Haha ! D'ailleurs, il a probablement déjà entendu parler de moi. Cela dit, soyons sérieux. Je dois m'infiltrer dans une croisière... Une croisière ! Probablement un des plus gros moyens de fuir notre misérable réalité pavée de guérillas ridicules, de haine et de tragédies. Un énorme bateau, d'énormes sommes d'argent, d'énormes personnes dont l'envergure physique n'a d'égale que la taille du porte-monnaie. Tout ça me dégoûte d'avance, mais je me remémore les mots de mon père.

- Concernant Kiri, reste dans les rangs et obéit. En douceur.

J'ai rendez-vous dans une heure à l'ouest du village pour l'embarquement. Nous sommes censés nous fondre dans la masse, car les voyageurs ne doivent pas savoir qu'on les protège. En effet, qui dit protection, dit danger potentiel et visiblement, crée un sentiment de peur est la dernière chose que la compagnie maritime désir. Ça les ferait pourtant renouer avec la réalité ce n'est pas si mal. C'est donc avec amertume que je cherche désespérément une tenue adéquate. Cinq minutes s'écoulent avant que je finisse par me décider. Je porte un gros pull en laine rose pâle légèrement cintré au col roulé, un pantalon en tissu bleu pastel qui s'arrête en haut des chevilles et des sandales blanches à talon moyen. Mais le plus dur reste à faire. Une croisière s'étalant sur plusieurs jours, je dois aussi remplir une valise entière... Ce labeur me semble durer une éternité. Quelque chose de simple, discret, banal. J'ai pas. Trente ans passent et je finis par fermer mes bagages. Je me rends vite compte du retard que je viens d'accumuler et me retrouve à sortir en trombe du manoir Orisa.

- Karin-chaaaaaaaaaaaaan !

Un demeuré avec qui j'étais en cours à l'académie me fonce dessus les bras en l'air dans l'espoir que je lui réponde. Sans un mot, je lui colle un coup-de-poing sur le dessus du crâne et continue mon chemin. Indifférente. Je suis déjà en retard, si en plus je dois me taper les dégénérés. Je passe les sentinelles du village et m'enfonce rapidement dans la brume de Mizu no Kuni en direction du port.

Me voilà enfin arrivée sur place et apparemment, le bateau est sur le point de partir. Tous les voyageurs sont sur la passerelle en file indienne et remplissent les cabines au travers des trois étages du paquebot. Je cherche mon coéquipier du regard, mais je me rends vite compte du caractère totalement INUTILE de la chose. Ne l'ayant jamais vu, autant chercher un brin d'herbe dans la pelouse. Je finis par me mettre derrière le troupeau et me présente devant l'officier chargé de vérifier les titres de transport.

- Il me faut votre titre s'il vous plait.
- Vous ne me connaissez pas ?
- Non.
- Bizarre. Je suis Orisa Karin !
- Ah !
- Vous voyez.
- En fait non.
- Je suis en mission pour Kiri ! Ne me dites pas que vous n'êtes pas au courant !
- Ah vous faites partie de l'équipe de Kiri très bien. Euh... Je m'attendais pas à... Enfin, vous voyez.
- A quoi ?! Qu'est-ce que tu insinues baka !

Vous avez compris. Le temps passe et le ton monte entre l'officier et moi. Surtout moi en fait. Ce crétin me prend une fifille incapable de faire quelque chose de ses dix doigts, il va vite comprendre à qui il a affaire ! Ce raffut force, bien sûr, tous les voyageurs et les passants à se retourner vers moi qui hurle sur cet ignorant de première.