Garantir le soutien de nos alliés [Mission Nationale]

@Samui Kakeshuou:

Les parfums des différentes viandes et potages se mêlaient à celui des fleurs aromatiques, dansant par-dessus l'atypique odeur de bois qui tapissait l'intérieur de l'auberge, mise en valeur par le sous-bois à l'intérieur duquel elle était implantée. La cheminée centrale, reliant les différents conduits et surplombant seule le toit, crachait ses dernières vapeurs entre les feuillages qui se voyaient nimbées de multiples espèces de volatiles, attirés par un fumet qui semblait éveiller leur convoitise comme leur curiosité.

Avançant nonchalamment les mains dans les poches, le sabreur ne croisait que des personnes qui en sortaient. Le service était terminé, la pancarte à l'entrée du restaurant indiquait qu'il était fermé. Mikami poussa la porte, faisant tinter les clochettes qui y étaient pendues.
La dernière tablée présente se tut et tous les regards se tournèrent vers le shinobi qui enlevait ses chaussures. Un peu d'agitation se fit entendre depuis la cuisine...

- T'es en retard.

- J'ai du passer à Shozaichi, des missions impériales viennent de tomber.

- Le genre de choses qu'on aime pas entendre.

- Crois-moi j'ai hésité, mais tu seras sûrement le premier à reconnaître que j'ai bien fait de la prendre, Yubito. Faites-moi plutôt un résumé du debrief.

- Les demandes ont drastiquement baissés ces derniers mois. Les différents brigands et groupe de pilleurs des alentours ont compris que notre région devenait inaccessible, que passer entre les mailles du grand filet impérial ne suffisait plus.

- Il faut croire que le message est passé. Toute une zone de villages qui s'organisent pour assurer leur propre défense, ça ne passe pas inaperçu. Depuis que le tournoi n'est plus, les tensions avec nos voisins sont redescendues et nous pouvons nous entrainer dans une atmosphère bien plus saine.

- Niveau ressources c'est la même chose, notre proximité nous garantit l'auto-suffisance et le fait que tu nous ais aidé à mettre en place notre propre gestion de notre protection a mis fin aux missions demandées à Shozaichi. En plus d'accélérer leur accomplissement, ça fait plusieurs semaines qu'on a pas vu un impérial s'arrêter dans le coin. De plus, vue la prolifération de nos denrées et autres marchandises, le nombre de commerçants nomades a augmenté dans la région, ils nous permettent de nous tenir informés de ce qu'ils se passe et se dit autre part dans Tsuchi. Enfin, c'est relativement précis…

- Je suppose que le fait de ne pas avoir à produire pour Shozaichi nous facilite grandement les choses, il y a beaucoup de bouches à nourrir.

Le Yorurai souriait. Autour de lui étaient représentés différents villages d'une région s'étendant du Sud-Ouest de Shozaichi jusque dans la forêt au Sud de Tsuchi, bordant la frontière avec Kusa. Depuis qu'il avait rencontré la plupart d'entre eux lors d'une banale mission lors du tournoi du seigneur féodal du pays de la terre, plus de trois ans auparavant, il avait multiplié les contacts avec ces personnes, rendant service contre nourriture, transmettant son savoir guerrier aux différents patriarches et matriarches qui s'organisaient à nouveau de façon à ne plus dépendre des shinobis, de leur système et de leurs guerres. Bientôt quatre ans plus tard, c'était tout un vide administratif qui s'était installé vis-à-vis de Shozaichi et la passation de pouvoir entre les seigneurs et l'empereur avait permis de falsifier certains papiers indiquant le nombre réel d'habitants, limitant ainsi les taxes, favorisant leur développement et leur autonomie. Pour le moment, personne ne s'était encore rendu compte de la supercherie.

Parmi les villages concernés, quatre étaient des plus éminents : Enies'lobi, un village montagnard à la situation politique aussi délicate que celle de l'empire, non loin de Shozaichi dans les montagnes à l'Ouest, mais très difficile d'accès ; Grinuchita, plus au Sud-Est, bénéficiait du fleuve rejoignant la mer de l'Est pour irriguer un vaste et solide système d'agriculture qui faisait sa richesse matérielle comme spirituelle et soutenait la région toute entière ; Hoori et Hooderi, deux villages voisins et jumelées, à l'histoire commune d'abord difficile, leur offrant une continuité qui n'a fait que renforcer leur lien et ceux de leurs habitants.

Le chef finit par sortir de la cuisine, armé d'un copieux bol de nouille et de deux baguettes en bois. Il tendit le tout à Mikami et s'assit à la dernière place restante pour s'adresser au shinobi en train de baver devant ce qui à ses yeux était un présent dont la valeur n'avait d'égal que le feu d'artifice de saveurs qui se présentait dans ses narines. Il salua la tablée une larme à l'œil avant de se perdre dans les perles d'huile brillant à la surface du bouillon.

- Je t'avais mis ça de côté, je savais que tu allais venir. Alors, cette fameuse mission impériale ?

- …

- Mikami ?

- Hein ? Pardon ! Tenez, regardez-plutôt l'ordre.

Il y eut un instant de flottement au cours duquel tous se regroupèrent derrière le parchemin pour le consulter dans un silence quasi-religieux, perturbé seulement par les bruits que dégageait le shûkaijin en pleine prise alimentaire. S'arrêtant un instant, celui-ci fut interpellé par la pause que tous avaient pris…

- Garantir le soutien de nos alliés ? Pour vous ça veut dire ?

- Ça veut dire que l'empire veut se consolider de l'intérieur pour affronter les remous du monde extérieur. Il faut que ses contrées le suivent, quoi qu'il en coûte.

- Est-ce que c'est une bonne chose pour nous ?

- Pour vous, en particulier, vu que c'est moi qui me suis lancé sur cette mission, ça ne devrait rien changer. Vous pouvez continuer de vivre sans avoir de comptes à rendre à Shozaichi.

- Haha je comprends… Mais je suppose que notre cas est loin d'être une généralité.

- Exactement. C'est pourquoi j'aimerais imposer cet ordre du jour : il est temps de mettre au courant les autres régions de ce qui se passe ici. Quelques villages ont du mal à supporter le rythme de production demandé par Shozaichi. Cette mission doit avoir pour but de leur rappeler à quel point il est important de continuer de participer à l'effort collectif. Notamment pour les villages miniers qui permettent la production d'armes destinées aux shinobis. Nous allons profiter de l'occasion pour passer un message à ceux qui sont le plus en difficultés : « Votre situation n'est pas une fatalité ». Dans le même temps, ça nous permettra d'avoir une vue d'ensemble sur le positionnement des différentes régions de Tsuchi vis-à-vis du nouveau système impérial, on pourra ensuite faire en conséquence. Nous devrons faire en sorte que les marchandises continuent d'affluer à Shozaichi pour ne pas attirer l'attention sur nos futures actions, tout en leur transmettant notre forme d'organisation au moins pour l'auto-défense. On ne peut se projeter plus loin pour le moment malheureusement...

Il laissa un silence. À travers la mission qui avait été confiée à Mikami, tous pouvaient trouver l'opportunité d'étendre l'indépendance des peuples de Tsuchi, plutôt que l'étau des besoins de Shozaichi ne se referme sur eux. En plus de ça, ce serait la parfaite occasion pour eux de connaître plus exactement les désirs de la capitale et ses rapports avec les populations civiles. Ils se regardèrent, s'entendirent de plusieurs échanges de regards, puis acquiescèrent.

- Bien. Il faudrait que nous formions deux groupes, d'environ cinq personnes.

- Ça tombe bien, je commençais à avoir envie de voyager, il faut que j'échange quelques sacs de graines contre de nouvelles variétés.

- Ça marche, mamie et moi pourrions garder ta ferme pendant ce temps là.

- Non mais tu rêves mon garçon ! Garde la tout seul ! Si à mon âge je me refuse à toute aventure, autant déjà me considérer comme morte et c'est simplement hors de question.

- Dosuna connaît du monde à la ville portuaire de Gifu, si nous nous joignons à vous, nous pourrons commencer par là-bas.

- Oui… je pourrai voir la mer et Nobumasa commercer avec des marchands du monde entier ; du moins, selon les relations du shûkai.

- Parfait, Yô'ken, tu viens avec nous ?

Ce dernier, bras croisés, se contenta d'acquiescer d'un signe de la tête, songeant à tenir sa forge fermée et au rôle de combattant qu'il devrait assumer lors de cette expédition. S'il s'était toujours refuser à devenir un ninja malgré ses compétences particulières, il était ces derniers temps devenu plus laxiste sur la fabrication d'arme et leur utilisation, aussi entre ses mains. Et ç'avait aidé majoritairement dû à sa participation à l'indépendance de son village à travers l'auto-défense. Ce ne fut pas avec le plus grand des enthousiasmes qu'il accepta, mais il voyait aucune raison qu'il y ait d'affrontement alors que sa petite clique apparaissait déjà comme des plus prometteuses.

- Super. Alors d'un côté on a les tourtereaux Dosuna et Yubito, avec Yô'ken, qui accompagnent Nobumasa et Mamie Churo vers la côte. Vous pourrez rendre visite aux villages à l'Est de Tsuchi pour savoir comment ils se portent. Il faudra un autre groupe qui viendra avec moi voir le Sud-Ouest. Quand nous en aurons tous terminé, nous nous rejoindrons à Jukusui, au pied du mont Namikazan. Là-bas, selon ce que vous aurez recueilli, j'aviserai si un passage d'un émissaire de l'empire (autrement dit, moi) est nécessaire selon le type de soutien qu'ils considèrent apporter à celui-ci. Ensuite nous verrons comment nous nous organiserons pour rendre visite aux territoires du Nord et de l'Ouest. N'oubliez pas, il faut que vous vous contentiez en priorité de vous tenir informés de la façon dont les populations soutiennent l'empire, s'ils le soutiennent et l'encouragent ou s'ils y obéissent et s'y soumettent, et dans quelles proportions. Il ne faudrait pas qu'il y ait des fuites sur nos activités parce qu'on a mal jugé de leur positionnement vis-à-vis du shûkai militaire. Vous risquerez de croiser d'autres shinobis alors prenez garde à ce que vous direz et où vous le direz.

Tous étaient d'accord là-dessus. Ils passèrent le reste de l'après-midi à régler quelques détails et discuter de tout et rien, de leur situation en général, de leurs broutilles dans l'insouciance comme du mouvement de la Nation et de ses controverses. Ils définirent aussi l'équipe qui accompagnerait Mikami. Le lendemain matin, après une nuit passée à l'auberge. Les deux groupes se séparèrent en remerciant le chef pour son accueil.

L'équipe de Yô'ken se servirait des cargaisons de graines de Nobumasa comme prétexte pour joindre les responsables des ports de commerce et s'enquérir du soutien que les villages portuaires et leurs alentours accordaient à Shozaichi, en terme d'échanges de marchandises et de rapports humains.
L'équipe de Mikami passerait directement par les chefs des villages au Sud-Ouest, en tant qu'émissaire impérial en mission et représentants des villages civils du Sud de Tsuchi, présentant directement son parchemin pour aller rencontrer les responsables et discuter de leurs relations avec l'empire… La première ville pour eux fut celle de Doa, avoisinant le temple Joukaku no Kurou.

Spoiler:

Tsuchi

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