C’était une journée de décembre exactement comme je les aimais : ensoleillé et légèrement tiède, comme si l’hiver était déjà passée et que nous étions rendus au printemps. Hummm… le printemps. La fin des temps froids, le renouveau, la fonte de toute cette neige. J’en avais profité de la température idéale de la matinée pour prendre un peu l’air et faire un peu d’exercice à mes ninkens. Tout comme moi, ces derniers étaient peu enclins à montrer le bout de leur museau dehors. Cela m’étonna un peu de la part de Seimori, qui avait pourtant passé plusieurs hivers dans les forêts de Hi no Kuni, mais cela ne faisait que me faire constater à quelle vitesse il s’était adapté à ce nouveau mode de vie. Beaucoup plus massif qu’Aka, j’aurais cru que sa taille l’aurait indisposé dans l’appartement, mais il semblait aussi à son aise qu’un poisson dans l’eau bien que le restant de mon mobilier pouvait en dire autant. Ceux-ci n’avaient sans doute pas été conçus afin de supporter le poids d’un ninken aussi immense que Sei. Vraiment de fascinante créature, ces ninkens.

Comme si la météo s’était mise dans la tête de tout faire pour me contredire et ruiner mon humeur radieuse, une des rares rafales de la journée me frappa de plein fouet me faisant réaliser d’un coup que penser au printemps était illusoire. Mon corps se raidit sous le froid et résista à l’assaut glacial aussi longtemps qu’elle dura. Je laissai sortir un soupir lorsqu’elle s’estompa, laissant les rayons du soleil me réchauffer peu à peu, tout en maugréant pour moi-même contre le froid. Je n’étais pas bien parti, cela ne faisait que commencer et j’en avais déjà ma claque de l’hiver. Heureusement qu’il y avait des journées comme celle-ci pour rendre l’hiver un peu plus agréable et tolérable. C’était bien le moins que Dame Nature pouvait faire afin de rendre la pilule plus facile à avaler.

Je marchais lentement dans les rues bien moins achalandées de Konoha – peu ayant le même courage que moi d’affronter l’extérieur – ce qui laissait toute la place à mes chiens-ninjas. Ces derniers ne s’en privaient pas et couraient en zigzaguant d’un côté à l’autre de la rue, roulant parfois dans la neige ou même sautant l’un sur l’autre dans un combat amical qui durait quelques secondes seulement. Je les regardai aller, le sourire aux lèvres, me disant que j’aimerais bien parfois me joindre à deux. Je savais toutefois que même si je le faisais réellement je n’en tirerais pas le plaisir que je pensais en tirer, ma force étant loin de rivaliser avec la leur. Je me contenais donc de les regarder aller et de m’imaginer me chamailler avec eux comme si j’étais aussi fort qu’eux. D’une certaine façon, cela me satisfaisais. Lorsqu’ils prenaient un peu trop d’avance, je les rappelais à l’ordre et ils se rapprochaient, comme c’était présentement le cas.

-Aka! Sei! Revenez par ici!

Les connaissant, ils pourraient sans aucun doute avancer sans même regarder où ils allaient, me laissant en plan derrière à essayer de les retrouver. Bon d’accord, avec leur odeur cela ne serait pas très long, mais c’était tout de même inutile et facilement évitable. Alors qu’ils revenaient près de moi, je regardai autour et vis que nous étions non loin des Remparts. Soudainement, une odeur étrange emplit mes narines. C’était si fort que j’en fus momentanément étourdi avant que je ne secoue la tête pour reprendre mes esprits. Je repris quelques autres inspirations, plus courtes cette fois, et reconnus rapidement l’odeur même si je n’étais pas habitué à la sentir en hiver. Qui se promenait avec des pots peinture pendant l’hiver? Ouverts, en plus, sans quoi je ne les aurais pas sentis aussi intensément. Intrigué – et n’ayant rien d’autre de mieux à faire, nous allons nous le dire – je décidai de suivre l’odeur de peinture et trouver ce que la personne pouvait bien faire.

Mes recherches m’amenèrent, à ma grande surprise, sur le haut des Remparts. Pendant la saison froide, la garde était légèrement réduite afin de ménager les troupes, ce qui laissait la passerelle au sommet un peu moins active pendant l’hiver. Qu’est-ce que les gardes avaient concocté pour se divertir ou se garder au chaud? Aussi silencieux que possible pour ne pas vendre ma présence, je montai discrètement jusqu’en haut et suivis l’odeur de peinture jusqu’à… un gamin. Enfin, je ne devais pas sauter aux conclusions trop vite, il s’agissait peut-être d’un très petit shinobi, mais dans tous les cas une très petite personne aux cheveux noirs me faisait dos, concentré sur des pots de peintures tanguant dangereusement sur le bord du rempart. Immédiatement, je réalisai que c’était exactement ce que la personne voulait faire. D’un moment à l’autre, les pots tomberont dans le vide et se videront sans doute sur les gardes postés aux Portes un peu plus bas. En tant que Jônin, je ne pouvais laisser cette situation aller plus loin.

- Bonjour, jeune homme. Cela semble assez précaire comme équilibre, tu n’aurais pas besoin d’un coup de main pour déposer toute cette peinture? On ne voudrait après tout pas qu’elle tombe sur les gens en bas…

Je parlais d’une voix calme, mais je lui faisais clairement comprendre que poursuivre avec ce plan signifiait de mauvaises nouvelles pour lui. Rassurez-vous nous allons lui faire aucun mal, même s’il le fait, mais cela n’irait pas sans conséquences. Maintenant qu’il était pris sur le fait et qu’on savait ses intentions, j’espérais qu’il arrêterait tout de suite cette mauvaise blague avant qu’elle ne dérape. Dans ce sens, je m’approchai lentement du jeune homme afin de l’aider à déposer les pots de peinture comme je l’avais proposé. Après tout, pourquoi ne pas réellement l’aider comme je lui avais proposé?

Le grand Bouddha a déclaré un jour que « celui qui sème l’injustice moissonne le malheur ». Ou peut-être n’est-ce pas Bouddha qui a dit cela. Ou peut-être personne n’a dit cela et que le narrateur de ce récit invente purement cette phrase à l’instant même qu’il écrit ces tirades pour ne pas se faire accuser de plagiat. Quoi qu’il en soit, peu importe les propos utilisés, la morale de ces citations reviennent toujours au même sens : si vous êtes mauvais, alors le Karma va vous enculer à sec et ce, sans merci. C’est devenu une connaissance générale comme quoi que si l’homme soit sans scrupule envers son prochain, alors une présence omnisciente sur Terre lui fera subir également un malheur, si ce n’est pire. Néanmoins, pour notre Lutin mythique, il est improbable qu’une quelconque divinité se charge de tous ses malheurs. Enfin, il ne croit pas à ce genre de connerie surnaturelle. Le destin, les points fixés dans le temps, les fantômes et passons, ce ne sont pour lui que des bêtises. Tout comme ce pavé qui semble s’éterniser pour aucune raison spécifique.

Bref. Vous l’aurez compris, piètre lecteur, le sombre Lutin souhaite savourer une douce vengeance. Envers qui, précisément ? Le superviseur de la garde du village de la Feuille, bien sûr ! Cet enfoiré se croit supérieur aux autres uniquement car il possède une autorité quasi-totale dans ce secteur. Résultat, il bouscule les Genins et Chûnins chargés de garder l’œil ouvert à proximité des titanesques murailles de la cité. Inacceptable ! Comment une vermine pareille a-t-elle réussie à décrocher une position si importante au sein de la hiérarchie avec un caractère aussi impertinent ? Pourquoi donc personne ne porte-t-elle plainte à l’égard de ce dégénéré qui abuse de son pouvoir afin d’assouvir ses désirs ? Ou bien est-ce simplement parce qu’Inaho est le seul qui se fait chier avec cet homme ? Probablement. Enfin, une certitude plutôt. Il est clair que l’autorité et le Yamanaka ne marchent pas main dans la main. L’éternel Genin accepte très peu de se faire ordonner par quiconque sortant de nul ne sait où.

C’est donc ainsi qu’il lui est venu cette charmante idée de se venger. Néanmoins, ses dernières activités dans cette matière lui ont values quelques reproches. Loin de lui de vouloir jouer avec la mémoire de quiconque avant un petit bout afin de ne plus nourrir des personnages âgées à l’hôpital. Cette atmosphère était bien trop morbide pour lui. Cette odeur de vieux qui s’apprêtent à mourir, la chair déjà à moitié décomposée… Ce n’est pas une image glorieuse à imaginer et ni de constater en direct. Donc, Inaho ne fera point un acte qui lui vaudra de nouveau une telle pénitence. Il allait garder cette opération innocente, enfantine. On lui reprochera certainement le coup, mais sans plus. On ne pourra l’envoyer nettoyer les chiottes des geôles pour cette raison, ce serait purement injustifié – à moins que Konoha se foute de la charte des droits et liberté universelles. Ce qui sera très probable à son encontre. Mais qui ne tente rien n’a rien. Il faut savoir prendre des risques dans la vie pour ouvrir un futur prometteur. Quoi que cette métaphore ne fonctionne guère dans cette situation.

En sa possession un seau de peinture de couleur bleu électrique – les manufacturiers de ce liquide opaque et dense n’ont vraiment aucune imagination pour les noms – Inaho scrutait les alentours de son perchoir, à savoir le sommet de la porte d’entrée. Son plan était bien simple : dès que le chef de la garde allait se pointer à l’extérieur, il allait verser le contenu du réceptacle sur sa tronche et s’enfuir. Grâce à ses capacités en sensorialité, la victime ne pourra détecter sa signature de chakra et ni le voir. Le brun camouflera son énergie ainsi que son apparence, tel un caméléon se fondant dans le décor. À cette pensée, un sourire narquois se dessina sur le minois du Lutin. Un plan machiavélique parfait. Désormais, il faut juste que personne ne le remarque et tout se passera crème… Et au moment où cette pensée traverse son esprit, il faut évidemment qu’une voix retentisse derrière lui.

Sans même se retourner, dès que l’homme derrière lui donna sous forme de sous-entendu l’ultimatum, Inaho roula les yeux vers les cieux tout en soupirant de lassitude. Incroyable ! Certes, il n’a pas cherché à dissimuler sa présence, ni à garder l’œil ouvert pour quiconque tentant l’approcher… Le Genin reconnut que ce fut une insolence de sa part. Un dernier regard vers le bas, Inaho vit soudainement sa cible ! Arg !! Que faire ? Il tourna la tête, croisant celui d’un roux… Qui ne tente rien n’a rien.

• Bah m’sieur, il n’y a pourtant rien dans ce pot !

Jouer l’innocent est une chose. Néanmoins, Inaho exposa clairement l’intérieur du seau. Vide, alors qu’il était plein jusqu’au bord il y a quelques secondes. Une illusion ? En quelque sorte, oui. Le réservoir est bel et bien vide. Le tour de magie réside en fait dans la notion de temps chez le rouquin. Lui, pendant un moment, voyait le jouvenceau avec un simple seau. Cette image lui est restée imprégnée dans son cortex, sans qu’il s’en rende compte, suffisamment longtemps pour que le trouble-fête accomplisse son objectif.

• Raaaaaaaaah !!!!!

Un cri d’outre-tombe retentit au pied de l’énorme muraille. Feintant la surprise et l’inquiétude, Inaho jeta un regard au sol. La cible a été touchée, un nouveau sourire narquois s’étira sur son faciès. Il attendit que l’homme à ses côté focalise pleinement son attention sur le dégât causé aux portes avant de se volatiliser complètement. Le voilà invisible et son énergie effacée, prenant la fuite avec ses jambes à son cou en direction du centre-ville, bondissant de toiture à toiture.

Il ne manquait pas de culot, ça je lui donnait. Encaissant ma voix calme et autoritaire avec un phlegme impressionnant, même que mes paroles eurent presque l’air de rouler sur lui sans même qu’il ne s’en aperçoive. Ne retournant la tête que pour voir s’il avait réellement quelqu’un derrière lui, il avait l’air beaucoup préoccupé par ce qui se passait en bas que par ce qui allait lui arriver. C’est alors qu’il prit l’air le plus innocent qu’un adolescent peut prendre et me regarda avec des grands yeux où se lisait une fausse surprise. Il affirma ensuite avec le plus grand sérieux du monde qu’il n’y avait pourtant rien dans le pot qu’il tenait dans les mains et qu’il s’apprêtait à faire tomber sur les gardes en dessous. Comme pour appuyer ses dires, il pencha légèrement le pot dans ma direction et je vis, à ma grande stupeur, qu’il était effectivement vide. Comment était-ce possible? C’était l’odeur de la peinture qui m’avait mené jusqu’ici, comment cela se pouvait-il qu’en fin de compte il n’y avait rien à l’intérieur? Et pourtant, mes yeux ne me jouaient pas des tours : il était bien vide. J’avais le goût de lui demander ce qu’il faisait sur le haut des Remparts avec un saut vide, curieux de sa réponse, mais les choses devinrent étranges au même moment.

Je fixais le sceau vide du jeune homme lorsqu’en même temps j’entendis un cri d’horreur venant du bas des Remparts. Mais qu’est-ce qu’il se passait? Mon regard était fixé sur un adolescent avec un sceau vide et pourtant j’entendis de l’agitation en bas des grands murs protecteurs du village. Un sourire s’étira sur ses lèvres et je compris que quelque chose s’était passé. Je détournai le regard du jeune homme et l’envoyai vers le bas pour voir qui se passait, avec la légère impression que le petit fauteur de trouble y était pour quelque chose. Ce que je vis me laissa sans voix : une immense flaque d’un bleu intense s’était rependue partout. Comment cela se pouvait? Je ne l’avais pas quitté du regard et la peinture s’était tout de même déversée sur les gardes aux Portes. Peinture qui quelques secondes plus tôt avait également disparue du pot. Je mis peu de temps avant de réaliser que je m’étais fait rouler et m’empressai de sermonner le jeune homme quand je vis qu’il s’était volatilisé. Plus aucune trace de lui, qui était là quelques secondes plus tôt. Même Akamori ne pouvait se déplacer aussi vite, je compris donc qu’il s’agissait d’un autre de ses tours de passe-passe. J’ignorais comment il s’y prenait, mais il arrivait à se jouer de ma vision, me faisant voir ce que bon lui semblait. Ce qu’il ignorait, c’était que je n’avais pas besoin de le voir pour le retrouver.

Laissant les odeurs hivernales envahir mes narines, je laissai de côté l’odeur chimique de la peinture qui dominait autour de moi et me concentrai sur les odeurs animales, plus précisément humaines, qui flottaient autour de nous. Rapidement, mon nez capta une odeur qui se dirigeait rapidement dans la direction opposée d’où j’étais. Plus les secondes passaient, plus son odeur se faisait moins distincte; il prenait de la distance. Mon objectif de ne pas laisser cela aller n’était pas parti, il ne pouvait pas partir ainsi impuni. Gardant ma concentration sur son odeur, je partis à la course pour rejoindre le jeune homme, ninkens sur les talons. À la vitesse que j’allais je devrais bientôt rattraper le fautif malgré l’avance qu’il avait sur moi. Je n’avais pas non plus à perdre du temps précieux à le chercher puisqu’il laissait derrière lui une trace olfactive qui m’était impossible de manquer. Je le suivis donc sur les toits du village jusqu’à ce qu’il ne finisse par juger qu’il était assez loin de son méfait pour s’arrêter. C’était le moment de frapper. Enfin, façon de parler, je n’allais pas réellement lui sauter dessus. Je continuai d’avancer, décidant de m’arrêter que lorsque je l’aurais vu, mais j’étais seul sur les toits de Konoha. Son odeur ne le trahissait pas, toutefois, je savais qu’il était tout près. Il pensait peut-être que je me lasserais à force de ne voir personne, mais j’étais quelque de très tenace.

- Tu peux peut-être te jouer de mes yeux, mais mon odorat n'est pas aussi dupe.

Peu importe où il était réellement, j’étais sûr qu’il m’entendrait. Peu importe qui il était, il devait connaître les Inuzuka et leur flair infaillible; il ne pouvait pas espérer jouer au chat et à la souris indéfiniment. Quand il entendrait cela et verrait que cela ne servait à rien de rester cacher, j’étais sous l’impression qu’il laisserait tomber le camouflage. J’avais vu qu’essayer de lui forcer la main ne menait à rien, j’en avais moi-même fait les frais. Ce n’était pas le fait qu’un adolescent ait été capable de me duper qui me gardait ici – bon, il y avait peut-être une infime partie pour cette raison – mais simplement parce qu’il ne pouvait pas déranger le travail des gardes de telle façon. Je devais avouer que les menaces sur Konoha s’étaient faites maigres ces derniers temps principalement grâce aux nouveaux systèmes de défense mis en branle, mais cela n’était pas une raison de manquer de vigilance. Ce genre d’incident créait des failles dans notre couverture des Remparts, c’était exactement ce que nos ennemis attendaient. En attendant qu’il se montre, je commençai à chercher mes mots afin de lui faire comprendre, sentant qu’il serait coriace et que je devrai bien choisir mes mots.

La mission – si l’on peut permettre le Lutin de la nommer ainsi – s’est presque transformé en scandale et en un pitoyable échec. Néanmoins, grâce à sa présence d’esprit et sa rapide adaptabilité, l’éternel Genin sut accomplir son objectif en utilisant divers atouts qu’il possède sous sa manche – qui sont principalement des tours de passe-passe uniquement possible par la magie du chakra. Son œuvre achevée, Inaho déplora cependant le court instant qu’il eut pour savourer sa vengeance. Si seulement ce rouquin ne serait pas apparu de la soixante-douzième dimension pour jouer au fier agent de l’ordre et la justice, il aurait pu déguster ce délicieux plat qui se mange froid et cru – le seul qui n’inflige point d’empoisonnement alimentaire lorsque mangé dans cet état ! Coupé court dans sa joie, il dû prendre ses jambes à son cou et filer hors du lieu du crime. Néanmoins, maintenant que le garçon repense aux récents événements, a-t-il utilisé la meilleure option ? Ce Shinobi est assurément un soldat de classe moyenne au strict minimum. Genin, Chûnin ou Jônin, il va assurément faire un témoignage sur ce qui s’est produit. Il a vu son visage, il sait à quoi ressemble le trouble-fête. Dès qu’il décrira le fautif, l’Hokage débarquera chez lui de nouveau pour lui donner un sale sermon ainsi qu’une nouvelle punition.

Il cessa sa course, bondissant sur le toit d’un restaurant quelconque au milieu du centre-ville. En bas, les ruelles sont toujours aussi abondantes malgré le temps hivernal. Sa main frotta son menton tel un philosophe profondément en réflexion. Doit-il faire demi-tour et retourner sur les lieux du crime, repérer l’importun et effacer les souvenirs spécifiques le concernant ? D’un autre côté, il est certainement trop tard. Cet homme a sûrement été porté secours à la piètre victime… Ou peut-être pas. Son sixième sens titilla. Son flux de pensées bloqua net et il sauta derrière un système de réservoir d’eau pour se cacher. Quelques secondes plus tard, le même adulte à la chevelure rousse apparu, cherchant du regard le criminel. Le Yamanaka pesta intérieurement, mordant sa lèvre inférieure avant de jeter un œil sur sa propre personne. Son chakra épouse bel et bien sa peau et ses vêtements, reflétant la lumière et le rendant invisible. Ce mec a-t-il usé de capacités sensorielles avancées pour le retrouver, dépassant le sien ? Ou bien avait-il repéré tant bien que mal les traces de pas dans la neige ? Avec précaution, Inaho jeta un œil sur son poursuivant. Remarquant les deux crocs carmin sur ses joues, il comprit à qui il avait à faire.

Un Inuzuka. Cet homme-chien n’avait pas usé d’un jutsu à base de chakra pour le retrouver, mais bel et bien de son flair. Le Lutin roula les yeux vers les cieux parsemés de nimbus tout en soupirant d’agacement. Même son plan d’évasion a échoué. Il est inutile de se camoufler et d’effacer sa signature d’énergie, il n’a pas les atouts appropriés pour éliminer son odeur. Les dires du roux confirma qu’il avait beau s’enfuir comme il le souhaite, il sera toujours à ses trousses. Une idée traversa l’esprit du brun. Il peut toujours utiliser un Genjutsu pour berner le fin odorat de cet individu… Une délicate opération qu’il laissa en suspens pour le moment, préférant plutôt jouer. Une décision qu’il pourra regretter plus tard.

• Alors cessons de jouer à cache-cache, j’imagine.

Il fit un pas hors de sa cachette et laissa tomber ses dissimulations. Son corps repris des couleurs, dévoilant l’adolescent à quelques mètres du héros du jour, mains dans les poches de son jean d’ébène. Ses lèvres étaient étirées en un rictus qui peut être perçu comme malicieux ou narquois.

• Je dois avouer que l’odorat des Inuzuka est un sacré atout. Faudrait que j’étudie ça de près un jour. Ça peut toujours servir.

Sur ces mots, il frotta le bout de son nez à l’aide de son index avant de reporter sa dextre à sa position initiale.

• Juste pour cette fois, tu ne voudrais pas faire comme si tu n’avais rien vu ? Comme ça, t’évites de perdre ton temps avec des bêtises et moi, je ne risque rien. On a tout à gagner, camarade.

Dit-il en souriant de plus belle, feignant l’ignorance d’un enfant de nouveau, joignant ses mains ensemble comme pour supplier - sans l'attitude qui vient normalement avec. Franchement, Inaho sait déjà que cet homme refusera son offre. Dans le cas contraire, il n’aurait pas été à ses trousses depuis tout ce temps. Cependant, il n’a cependant rien à perdre de tenter son coup et de voir où va mener cette discussion. Et cela lui donne le temps de préparer quelques plans de secours.

Face à quelqu’un qui semblait très bien maîtriser les illusions, c’était des paroles bien audacieuses quand on savait qu’il pouvait tout aussi bien tromper ma vue que mon odorat, mais mes paroles semblèrent atteindre le jeune homme qui décida finalement d’arrêter de se cacher. Pas sans me faire légèrement sursauter lorsqu’il apparut à peine à quelques mètres de nous. Il avait été aussi près et je n’avais même pas été en mesure de le savoir? Était-il déjà trop tard pour ne pas être pris dans l’un de ses pièges? Le large sourire qu’il affichait, comme s’il était particulièrement fier de son coup, n’arrangeait vraiment pas les choses et me faisait encore plus redouter que je venais de me faire avoir. Heureusement pour moi, ses paroles me firent comprendre que je m’étais trompé et que j’étais toujours en contrôle de mes sens. Je ne tressaillis pas lorsqu’il fit mention de mon clan puisque cela ne prenait pas la tête à l’Hokage pour déduire que j’étais un Inuzuka et ne pus m’empêcher de sourire légèrement devant les louanges qu’il nous faisait. Le fil de ses pensées était toutefois un peu plus inquiétant. J’ignorais pourquoi, mais j’avais le pressentiment qu’il n’utiliserait pas toujours ces connaissances à bon escient.

Comme s’il pensait que la flatterie allait le sortir de ce mauvais pas, ce dernier poursuivit aussitôt en me demandant de bien vouloir détourner l’œil de ce petit incident. Ce n’était pas parce qu’on complimentait mon odorat que je devenais aveugle à tout devant moi. Son sourire innocent qui trahissait un peu trop d’expérience n’eut aucun effet ni sur moi ni sur mes ninkens. Il se trouvait justement que j’étais totalement libre aujourd’hui, j’avais donc tout mon temps pour m’occuper d’un jeune faiseur de troubles qui dérangeait le système de défense du village. Il ne fallait toutefois pas monter sur nos grands chevaux, il n’avait que lancer des pots de peintures après tout; pas la peine de lui imposer la peine capitale. Néanmoins, il fallait tout de même qu’il comprenne que ce n’était pas comme ça qu’il rendait service à son village.

- Tu as l’air d’être futé, tu sais certainement que je ne peux pas simplement faire ça. Les gardes font un travail très important pour Konoha, tu devrais le savoir. Tu es quoi, Genin? Chûnin? Peu importe, à voir comment tu utilises le genjutsu tu dois être un shinobi. Un jour cela risque d’être toi qui va surveiller les Remparts.

Le but n’était pas de le sermonner, il avait clairement passé l’âge pour ça, mais plutôt de lui faire voir les choses d’une nouvelle perspective. Il était un petit coriace, ce n’était pas la première fois qu’il se retrouvait dans une telle situation j’en mettrais ma main au feu; je savais donc qu’il faudrait une approche différente si je voulais qu’il comprenne ce que je voulais lui dire. Si je voulais que cette rencontre n’aboutisse à quoi que ce soit, il fallait trouver un moyen pour qu’il en ressorte un tant soit peu gagnant, il fallait que cela lui rapporte quelque chose. Cette approche, mes amis, s’appelait le compromis.

- Cependant, je peux comprendre que notre plaisir fait parfois le déplaisir d’autres. Qui plus est, on va s’entendre pour dire que même si ce n’est pas très sympa ce n’est pas le pire qui tu aurais pu faire, hum? Je lui jetai un regard entendu. C’est pourquoi je te propose un marché pour mettre cet incident derrière nous : je te montre un peu de quoi à l’air le flaire d’un Inuzuka et en échange je peux compter sur toi pour ne plus déranger les gardes pendant leurs rondes. Qu’est-ce que tu en dit?

Certains diront que le jeune homme à beaucoup plus à gagner que moi dans cette histoire et que je n’ai aucune garantie qu’il allait réellement cesser ces activités une fois que nous nous serions séparés, mais j’avais tout de même la conviction que je le convaincrais d’arrêter. C’était aussi pourquoi je ne lui monterais pas tout ce que je savais, évidemment. Au pire, si je doutais de sa sincérité j’irais moi-même faire quelques tours afin de m’assurer que les gardes n’étaient plus importunés ou je pourrais m’arranger pour qu’il fasse partie des auxiliaires à la garde. Mais ce n’étaient là que des manières fortes que je n’utiliserais qu’en cas de nécessité si je voyais que mon marché n’avait pas été respecté, je préférais essayer la méthode plus diplomate avant toute chose. Regardant le jeune homme, je me demandai s’il réfléchissait sérieusement à ma proposition. Sans doute que le prospect de plonger dans un domaine aussi peu connu et qu’il désirait particulièrement étudier lui faisait envisager la chose. J’espérais que cela soit suffisant pour lui faire changer ses habitudes.

Gagner du temps pour être en mesure de préparer un plan de secours au cas où cette situation tourne au vinaigre, là est l’option pour laquelle a opté l’éternel Genin. Néanmoins, alors qu’il parlait et tentait de détourner l’inévitable, son esprit de génie – ceci dit avec maigre exagération – ne conçu rien d’exceptionnel pour éviter ce qui l’attend plus tard. Fuir n’est clairement pas une option intelligente puisque ce rouquin a la capacité de le traquer via son odorat. Il ne sent pas mauvais, pourtant ! Il prend une douche tous les matins, comme tous les adolescents de son âge. Il frotte bien sa peau avec une débarbouillette savonnée. Il nettoie même ses jambes, nom de Dieu ! Généralement, les gens laissent l’eau couler sur le reste du corps en espérant que cela suffise. Ou ils ont la flemme tout simplement et ne juge pas cela important de laver les membres du bas à chaque jour. Bref. Cela démontre bien la précision des glandes olfactives du clan des pouilleux. L’autre option est d’effacer les souvenirs du concerné, mais cette délicate opération demande de l’enfermer dans un puissant Genjutsu et, pour être franc, Inaho n’est pas le meilleur chirurgien psychique dans le coin. Les conséquences pourraient être sévères.

Dans tous les cas, il sent bien qu’il est dans le trouble et que s’il tente de s’en sortir, ce sera plus qu’une simple fessée hebdomadaire qu’il recevra de la part des autorités. Possiblement l’Hokage en personne si cette histoire pousse plus loin. Non pas qu’il ait peur de la nouvelle Ombre du Feu en place, mais il aimerait bien éviter de se farcir une punition plus cruelle qu’aider les infirmières aider les patients au centre hospitalier de la cité. Quoi qu’il en soit, il se rend à l’évidence : s’il ne trouve pas un moyen de mettre cet Inuzuka de son côté, en marchandant, bluffant ou autre, il va passer un sale mauvais quart d’heure. Certes, il peut toujours l’emprisonner dans un Genjutsu et supprimer ses souvenirs. Mais comme spécifié plus haut, n’étant pas le meilleur dans ce domaine, il risque fort bien de faire bien plus que d’effacer les cinq dernières minutes de sa mémoire… Il faut vraiment qu’il commence à s’entraîner là-dedans. Ce tour de passe-passe peut s’avérer sévèrement utile dans une situation telle que celle-ci.

Évidemment, le maître canin répondit par la négative à la proposition du Lutin. Toutefois, ses propos sont marrants. Il se questionne sur le grade et la puissance de notre jeune fouteur de trouble. Cette remarque étira légèrement ses lèvres, il pouffa délicatement dans son souffle, une nuée de buée expirant de sa bouche dû au froid de la saison. Bien que Genin seulement, ce n’est pas la puissance qui lui manque. De plus, il est évident que cet homme est apte de sensorialité. Ne peut-il simplement pas mesurer sa puissance en utilisant son sixième sens ou bien juge-t-il cela une perte de temps ? Quoi qu’il en soit, c’est la suite de son monologue qui prit une tourne intéressante. Il annonça que ce n’est clairement pas la pire connerie qu’aurait pu faire notre héros. Ah, ça ! S’il l’aurait voulu, il aurait totalement détruit le psychique de chef de la garde. Il aurait appelé son contact dans la Mafia et organisé un plan pour saccager sa maison, wesh. C’est en suivant cette optique que le tatoué proposa à son tour un marché : lui transmettre le savoir sur le flair d’un chien en échange de ne plus déranger les gardes.

Grattant son menton et sa barbe inexistante, Inaho réfléchit sérieusement à la proposition. Cette tournure est douteuse. Très suspecte, même ! Techniquement, le Jônin n’a rien à gagner dans tout ça. Et tout ce qu’il obtient est une promesse. Est-ce un piège… ?

• C’est chelou, ça. Très chelou... Boarf ! Pourquoi pas. J’accepte !

D’un bond, le Konohajin se rapprocha de son professeur temporaire. Il a cédé avec une facilité déconcertante. S'il s'agit véritablement d'un piège, il agira en conséquence. Techniquement, il n’aurait pas besoin que quelqu’un lui apprenne à utiliser ses narines pour détecter les différentes odeurs. Néanmoins, cela prendrait plus de temps et de patience. S’il existe un raccourci, alors autant prendre avantage de cette option. Il faut être intelligent dans la vie. Le Yamanaka leva sa dextre haut dans les airs et exclama sa promesse.

• Moi, le Grand Inaho, promet de ne plus déranger les gardes pendant leurs rondes. Parole de Lutin ! Et un Lutin ne trahit jamais sa parole.

Et ce n’est pas un mensonge. Dorénavant, il n’embêtera plus qui que ce soit pendant qu’il effectue son travail... Il attendra patiemment que sa cible termine son chiffre. Car il a seulement promit de ne plus déranger les gardes pendant leurs guets. Eh ! Ce n’est pas comme s’il fait chier la populace uniquement parce qu’il en a envie. S’il emmerde un individu en particulier, c’est parce que ce dernier le mérite amplement. Faut arrêter de penser que le brun est un enfoiré qui frappe sans raison. Bref.

• Allez, par quoi on commence ? Un échauffement ? Ou on tape direct dans le vif du sujet ? J’suis chaud patate, là.

Inaho commença à étirer son bras gauche, impatient de débuter son entraînement. La créature elfique est rarement aussi fervent de travailler que maintenant. Normalement, c'est toujours une corvée qu'il est dans l'obligation de faire dans l'intention de devenir plus puissant. Il inspira longuement l'atmosphère glaciale de l'hiver, satisfait de sa situation. Il n'aura pas à se farcir une amende et une fessée de la part des hautes instances de Konoha. Comme quoi la vengeance a tout sauf des défauts. C'est comme si une divinité invite les humains à suivre leurs instincts bestiaux et les récompense par la suite. Prochaine fois, il détruira un village juste pour rire... Nah, il ne faut pas abuser. Et il ne faut pas déconner non plus. Raser un village de la carte, ça demande trop d'effort et d'énergie.

Pour être suspect, on pouvait définitivement dire que mon marché était suspect. À son regard et de la façon dont il se mit à se frotter le menton en signe de réflexion, je sus tout de suite qu’il pensait que quelque chose se cachait derrière cette proposition. En effet, pour la plupart je ne faisais que lui donner un autre outil de plus, mais en réalité j’établissais un lien de responsabilité. Oui oui! Même si je lui donnais une capacité des plus pratiques, j’étais persuadé qu’il ne l’utiliserait jamais mauvais escient. Il ne pourrait s’empêcher d’oublier la promesse qu’il aurait faite et la culpabilité le prendrait. Si jamais un tel farceur pouvait ressentir la moindre culpabilité envers ceux qu’il piégeait. C’était une chance que je prenais la chance de prendre… Attendez, quoi? C’était un risque que j’étais déterminé à assumer – voilà c’était beaucoup mieux – puisque j’avais foi en mes autres Konohajins. Si je ne pouvais même pas faire confiance aux autres membres dans mon village, de quoi aurais-je l’air?

Les quelques secondes de silence qui suivirent furent un peu angoissantes pour être honnête puisque je ne savais vraiment pas quoi d’autre lui proposer s’il n’acceptait pas mon marché. Je ne voulais pas lui foutre une colle pour ce genre de choses, mais si nous n’étions pas capables d’arriver à un terrain d’entente… Pour rajouter à mon angoisse, ce dernier commença par affirmer que c’était très inhabituel comme proposition avant de finalement accepter. Mes épaules se relâchèrent un peu et je soupirai intérieurement d’avoir réussi à lui faire agréer à notre compromis alors que le jeune homme faisait les derniers mètres nous séparant d’un bond. Puis, prenant un air solennel, il leva une de ses mains et donna sa parole de lutin de ne plus embêter les gardes pendant leurs rondes. Il s’empêtra dans quelques détails inutiles qui me titillèrent qu’il y avait anguille sous roche, mais je laissai tomber. Il fallait savoir quand choisir ses batailles et j’étais plutôt satisfait des résultats que j’avais obtenus; je ne voulais pas faire tomber ça à l’eau en voulant pousser le bouchon trop loin. Si je pouvais au moins l’empêcher de les déranger pendant qu’ils sont occupés à veiller sur le village, ils s’occuperaient bien de leurs propres problèmes une fois qu’ils n’étaient plus en service.

- D’accord, parole de Lutin acceptée.

Je n’avais aucune idée de ce qu’était une parole de lutin ou si elle avait la moindre valeur, mais je devrai m’en contenter en espérant qu’il la tienne. Impatient de commencer, il me demanda sur-le-champ la suite des choses alors qu’il s’échauffait déjà physiquement. Un échauffement? Quelque chose de plus poussé? Pour tout dire je n’en avais aucune idée. J’avais eu cette idée de génie et l’avais sortie sans vraiment y réfléchir, mais c’était la première fois que je partageais mes connaissances avec quelqu’un; j’ignorais comment j’allais m’y prendre. Ce fut à mon tour de réfléchir longuement avant de répondre au jeune Inaho – j’avais pendant notre conversation réussi à glaner son nom – puisque je devais penser à toutes les étapes que je comptais lui faire prendre. Après tout, je devais aussi prendre en compte qu’il n’était pas Inuzuka, cela rendrait sûrement les choses un peu plus compliquées.

- Ce n’est pas un échauffement à proprement parler, mais cet exercice va jeter les bases sur tout ce qui va suivre. Premièrement, je veux que tu fermes les yeux. Tu dois sûrement savoir que couper de l’un de ses sens, le cerveau compense avec les autres; chez la plupart des gens c’est avec l’ouïe, chez les aveugles notamment. Nous, les Inuzukas, c’est avec notre odorat.

Je m’arrêtai quelques secondes pour lui laisser le temps de traiter l’information. Je ne pensais pas lui apprendre rien de nouveau, mais je tenais tout de même à ce qu’il comprenne bien qu’apprendre à déceler les différentes odeurs n’était pas une mince affaire, qu’il ne fallait pas simplement respirer plus fort et qu’il fallait y mettre autant de dévotion qu’un aveugle qui essaie de s’orienter dans un monde inconnu. Et puis, c’était toujours classe de faire une pause en plein monologue.

Quand tu auras fermé les yeux, j’aimerais que tu essaies de te concentrer sur ton odorat au lieu de sur ton ouïe en prenant de grandes inspirations. Ton cerveau est programmé pour se fier secondairement à l’ouïe pour récolter ses stimuli du monde extérieur, cela risque donc peut-être de prendre un peu de temps, mais malgré tout ne te presse pas. Continues de prendre des grandes inspirations et laisses l’air emplir tes poumons.

Je m’arrêtai là, lui faisant implicitement comprendre qu’il pouvait se mettre à la tâche. Avant de pouvoir lui apprendre quoi que ce soit, je devais habituer son nez à faire plus que respirer. S’il voulait voir de quoi avait l’air le flaire de notre clan, il faudra réveiller la seconde nature de son odorat. Comme quelqu’un qui devenait subitement coupé du monde, il devra apprendre à se fier à son nez afin de pouvoir se repérer autour de lui. Ce n’est que lorsqu’il aura fait ça – et croyez-moi il le saura lorsqu’il l’aura fait – que je vais pouvoir le guider à travers cette surcharge d’odeurs qui lui emplira subitement les narines.

Le rouquin dit accepter la parole de son élève temporaire. Évidemment qu’il accepte ! Après tout, n’est-il pas celui qui a proposé ce marché en échange d’une promesse ? Des mots envoyés en l’air comme ceci et cela, des sons générés par de multiples muscles et organes dans la gorge et la bouche. Franchement, il faut être absolument naïf de croire uniquement la parole d’un humain. L’Homme est un animal corrompu qui détruit et dévore ce qui l’entoure. L’histoire ne fait que supporter cette triste réalité. Néanmoins, face à l’adulte est un Lutin. Et un Lutin ne trahit jamais sa parole, comme l’a énoncé plus tôt notre protagoniste. Ou plutôt, un elfe ne retire jamais ses mots à moins d’avoir une excellente raison, soit en cas d’extrême nécessité. Dans ce contexte, il est difficile d’imaginer une situation logique et cohérente qui puisse correspondre à ce qui est décrit présentement. Enfin. Avec Inaho au centre de ce piètre univers, l’on ne peut jamais être trop prudent. Qui sait quel genre de problématique farfelue qui puisse survenir à un moment quelconque ? Essayons cependant de rester à l’intérieur des frontières de la logique et de la rationalité autant que possible.

Quelques secondes s’écoulèrent. Seuls la brise hivernale et les murmures dans la ruelle à proximité brisèrent ce silence. L’on dirait bien que le rouquin a de la difficulté à concocter un entraînement particulier pour ce genre de technique. Ne peut-il simplement pas suivre les mêmes étapes qu’on lui a apprises pour affiner son sens de l’odorat ? Ou bien les membres de ce clan possèdent effectivement un don particulier dans ce domaine et ont plus de facilité qu’un individu ordinaire à détecter les diverses odeurs. Cette explication est logique. Après tout, face au Yamanaka n’est pas un homme régulier, mais plutôt une bête à l’apparence humaine, si l’on puisse dire. Mi-homme, mi-chien, apte d’entrer en parfaite symbiose avec des animaux canins. Un concept un peu étrange à saisir pour un solitaire tel que le brun. Bref, là n’est pas l’intérêt du sujet. Il devient évident que ce Jônin improvise. À un tel point que si l’on était dans une animation japonaise, l’on percevrait une gouttelette de sueur sur le front de l’éternel Genin. Il n’assure pas, c’est clair. Est-il sérieusement capable de lui apprendre quoi que ce soit ? Ce ne serait pas étonnant que cette séance de leçon se résulte en un cuisant échec. Et si échec il y a, le marché tombe malheureusement à la poubelle. Alors ce mec est mieux d’assurer.

Il prit finalement la parole, déclarant que le Lutin allait débuter par un échauffement, si l’on peut ainsi dire. Il expliqua que le cerveau de l’être humain compense avec les autres sens lorsque l’un des cinq sens manque à l’appel. Effectivement, il n’a pas tort. C’est ainsi que certains aveugles sont aptes de se déplacer dans une salle en se fiant uniquement aux sons. Néanmoins, cette capacité est limitée. C’est donc ça, l’exercice ? Couper son sens le plus important – la vue – afin de donner un maximum d’efficacité à ses organes olfactifs ? C’est assez basique comme logique, mais c’est probablement la voie la plus importante. Après tout, l’on obtient un maximum de concentration lorsqu’on médite les paupières closes. Il résuma son explication, demandant au jouvenceau de se concentrer à prendre de grandes inspirations. Et les mots clefs sont « prendre son temps ». Car il est clair qu’utiliser efficacement ses narines ne se réalise pas en quelques minutes.

• Fermer les yeux et respirer. D’acc. Easy shit.

D’un bond, son fessier atterrit sur le sol blanc comme neige et il ferma les yeux. Suivant les instructions de son professeur improvisé, il prit d’amples respirations. Il focalisa toute son attention sur cet exercice. Enfin, il est plus facile à dire qu’à faire. Difficile de ne pas être distrait par les multiples voix surgissant des ruelles environnantes. Et après deux ou trois minutes à ne respirer que l’air glacial de la cruelle saison froide, il détecta une fine odeur de poulet. Le Yamanaka ignore quelle heure il est, mais les restaurants doivent déjà préparer le dîner qui est au coin de l’horloge. Se concentrer avec toutes ces distractions n’est guère une tâche aisée. Toutefois, il se résignât à pleurnicher et poursuivit l’épreuve. Même s’il commence déjà à s’ennuyer et que l’ennui lui tape généralement sur le système.

• Et donc... J'dois faire jusqu'à quand, exactement ? Un signe serait bien.

C'est bien de respirer, mais Inaho n'est pas au milieu d'une séance de yoga. Et il n'est pas certain qu'exhaler ainsi pendant des heures l'aidera à affiner son ouïe. Enfin, que sait-il de ça ? Ce n'est clairement pas lui l'expert dans domaine.