"Raburanke prit par la suite et à de nombreuses reprises la route de l'aventure afin de répandre la véritable Loi à travers les différents clans, et il allait s'y employer jusqu'à la fin de ses jours."

C'est à l'aube de ses quarante-trois printemps que Malaw prit l'initiative de commencer son périple. Malgré son âge dans ce monde de Shinobi, il avait l'habitude de voyager depuis maintenant plus de vingt ans. Tout commença a la fin de son parcours initiatique en tant que jeune Moine.

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Ta no Kuni, en bordure du Lac Tochiro. Malaw à 22 ans.

Le grand temple des Cinq dieux de Maskine est visible depuis la petite colline a l'Est du village, ici la communauté est grandement peuplé de Moines cherchant l'errance dans la méditation pour se repentir de leur péchés ou pour certain, trouver des réponses. Depuis des décennies les moines de Maskine s'efforcent de perpétuer leur religion.

Grand Temple, a l’arrière cours de la salle de méditation.

Le Grand Abbé prend le jeune moine à l’écart sous la coupe des Cinq dieux.

— Ta formation s'achève ici Malaw, la Loi des Cinq est désormais à ta portée, tu dois dorénavant la propager à travers le nouveau monde Shinobi. Les différents préceptes des Cinq doit être connu de tous et il semblerait que les dieux t'es choisi pour parler en leur noms. La tâche qu'ils t’affublent ne sera pas chose aisé, en as-tu conscience ?

— Grand Abbé. C’est le plus grand honneur que les Cinq puissent me faire. Je ne pars que pour trois ans tout au plus et serais vite revenu. Voyez cette branche de pin qui pointe vers l'Ouest Bienheureux comme pour m'indiquer la direction à prendre ; quand elle pointera vers l'Est, elle vous indiquera que je suis alors sur le chemin du monastère ; aussi guettez mon retour.

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Il fallut à Malaw en réalité plusieurs années -et non pas trois ans- pour revenir en terre sainte. Il avait parcourus bien des contrés et vu bien des guerres auxquelles il n’y prit aucunement part.

C’était a son tour de construire le fruit de son idéologie, un monastère de recueil en terres interdites.
Tout le prédestinait à s’établir dans la région de Kawa no Kuni, pays aux quatre saisons. Un long voyage et une longue route allait lui faire face, son ultime périple allait-elle prendre fin au bout de celle-ci ?

Après sa méditation du matin, l’heure était venu pour lui de quitté le Temple pour sa quête épique. Chez les moines de Maskine, les adieux ne se fêtent pas contrairement aux autres croyances et coutumes du grand monde. Seul le Grand Saint dans son éternel vertu le béni et lui dit une ultime prière pour qu’il puisse mener sa quête a bout et sans encombres. Malaw entama sa longue marche, vêtu de son habit traditionnel et d’un authentique sutra logé à l’intérieur de sa toge en tissu blanc.
L’élu était en marche, arrivant aux frontières de Kawa no Kuni, murmurant la parole des Cinq.

Un dernier moment de méditation s’imposait avant d’avancer plus loin en terres inconnus. Sous le soleil maintenant haut dans le ciel, Malaw se tenait assis en tailleur, laissant son esprit vagabonder dans les méandres du temps.

Kawa ou le pays des rivières. Voici une nouvelle destination que Tatsuki pouvait ajouter à la liste des contrées que nous avions traversé ces derniers mois. Moi, j'étais déjà venue ici, à plusieurs reprises que ce soit pour des missions, pour la guerre ou encore pour vagabonder, plusieurs années auparavant. Y remettre les pieds une énième fois ne faisait ni chaud ni froid. Comme d'habitude, et c'était une règle commune à chaque territoire que nous traversions; non rencontrions de nouvelles personnes, banales, et moins banales. Mais, je tablais plus sur la première solution. Il était en effet rare de rencontrer des individus de l’acabit de Setsuko ou encore de Tatsuki. Détail que je m'étais bien gardée de lui dire, entre autre chose.

Une autre constante ne changeait pas au fil de notre périple, le côté loquasse de la blonde. Si au début je l'écoutais, ou tout moins l'entendais et même parfois lui répondais; il me devenait de plus en plus difficile de lui prêter toute mon attention. Pas qu'elle était de moins en moins intéressante, au contraire je supposai, mais parce que la voix d'une autre personne monopolisait, la plupart du temps; une bonne partie de mon esprit. Izanami. Étonnement la déesse, elle aussi, se montrait bavarde. Depuis que j'avais rencontré War'ka en fait. L'esprit divin en profitait pour me dire toutes sortes de choses, Elle savait que je ne lui répondrai pas, pas devant la Senritsu. Ce qui me laissait penser qu'il faudrait, un jour, que parle sérieusement à la voleuse...

Enfin, d'ici à ce que je puisse avoir cette discussion avec elle, du temps passerait. Au moins celui nécessaire pour traverser ce pays. Et vu comme c'était parti... Cela serait long. La Senritsu avait pris goût à l'argent que je lui donnais, et aussi au confort d'un vrai lit. Ainsi, chaque village que nous traversâmes avant de rejoindre la frontière de Kawa fut pour elle l'occasion de rallonger notre voyage. Et ce village-ci ne fit pas exception. Cependant, il n'était pas tard, pas l'heure de s'arrêter, ni même de nous restaurer. Alors, lorsqu'elle suggéra une pause...

"Tu peux t'arrêter ici, si tu veux."
"Tu ne viens pas avec moi ?"
"Non, je dois continuer, j'ai des choses à faire à Kawa, et j'aimerai passer la frontière avant la fin de la journée."
"Ah... Dans ce cas, je ferai l'impasse... Dit-elle en souriant sans pour le moins dissimuler sa déception."
"Tu peux même séjourner ici, si tu veux. Je veux juste que dans quatre jours tu m'aies rejoins à Higata, au Sud de Kawa."

Elle me remercia et je pris la direction de Kawa. J'aurais effectivement préféré qu'elle vienne avec moi, mais bon... Ce genre de chose était nécessaire à la kunoichi, comme pour la motiver. Puis je lui faisais confiance, je savais qu'elle parviendrait à me rejoindre sans trop de difficultés. Même si son sens de l'orientation n'était pas le meilleur du monde. Elle savait lire...

Après quelques nouvelles heures de marche, je parvins finalement à la frontière. Celle-ci était facilement repérable : une rivière coulant au fond d'une ravine de quelques mètres et un pont orné d'un panneau. Sur la route je rencontrai, ou plutôt croisai quelques personnes, des marchands pour la plupart, des voyageurs pour d'autres. Mais pas un seul shinobi. Ils devaient être occupés ailleurs... En fait, cela faisait quelques jours que je n'en avais pas vu...

Enfin, comme d'habitude, et afin de raccourcir mon voyage, je me décidai à couper à travers champs. Moins fréquentés, plus directs; ils offraient en plus de magnifiques paysages...

Ce fut à cet instant que j’aperçus, au loin et assis dans l'herbe; un homme à l'allure bien singulière. Trois solutions se présentaient alors. L'éviter, le rencontrer ou le tuer. J'aimais faire de nouvelles rencontres, et voir le potentiel de celles-ci. S'agissait il là d'un shinobi ? D'un voyageur ? D'un paysan prenant une pause entre deux laboures ? J'approchai donc rapidement, en silence; et à deux ou trois mètres à peine, l'observais.

J'avais déjà vu des hommes habillés de la même façon, mais où... Impossible de m'en souvenir. Izanami aussi l'avait déjà, mais elle, elle savait. Alors que je lui posais la question; la déesse confirmait.

"Que fait un homme assit au milieu d'un endroit comme celui-ci ?"
*C'est un moine, religion de pacotille. Tu peux l'éliminer si tu le souhaites, Zanshi.*
"Que fait un moine ici ?"

Je jetai un oeil à l'ombre me surplombant de tout son long et me ré-intéressai à l'inconnu.

Spoiler:

Si l'on veut atteindre un réel état de méditation, il faut éveiller l'énergie appelée Kundalini à l'intérieur de soi. Ce n'est pas une question de religion ou de croyances, c'est juste que le système humain est ainsi fait. Avec le support de la Kundalini, on est facilement en méditation sans avoir besoin de produire un effort quelconque. La Kundalini peut -quand les conditions sont réunies- s'éveiller et germer, et passer de l'état d'une graine minuscule à celui d'un arbre puissant. L'éveil de celle-ci connecte la conscience humaine au pouvoir tout-puissant de l'amour divin des Cinq.

Les moines de Maskine sont peu nombreux parmi la foule, mais on les distingue telle une branche fleurie dans une forêt calcinée, comme un grain de blé dans une meule de foin. Personne ne les connait, mais ils se connaissent entre eux. Ils sont à l'instar des sommets qui peuvent se voir et s'entendre les uns les autres, non point comme les cavernes sourdes et aveugles. Ils sont cette semence lancée dans le champ par la main des Cinq.

Cela fait maintenant dix minutes que Malaw est plongé dans un état de méditation totale. Il fait Un avec la nature environnante et perçois le chant des cigales ainsi que celui des oiseaux. L’harmonisation est parfaite.
Une présence ce fait cependant ressentir, difficile a percevoir. Ne présageant aucun danger, Malaw reste plongé dans son état léthargique là où tout est possible, loin de l’impossible.

L’Elu des Cinq, les yeux toujours fermés, prend la parole.

— La complétude est ce à quoi aspire notre cœur et là où nous conduit notre âme.

Il ouvre les yeux doucement et reprend.

— Il est impossible d'être en accord avec soi-même dans l'ignorance de soi.

La position en tailleur de l’Elu s’efface, le laissant reprendre appuie et ainsi se remettre debout. Il continue alors.

— Aucun de nous n'est complet en lui seul.

Il lance un petit sourire au voyageur qui eut le respect de ne pas interrompre sa méditation, puis fini.

— Laquelle des trois options choisissez-vous ? Voyageur.

Le mystère nous entoure à chaque instant et Malaw cherche juste à savoir avec qui il à faire. Semer le doute ou la raison est un bon moyen pour lui de commencer cette rencontre.

L'homme toujours assis devant moi ne bougea, ma présence ne sembla pas l’inquiéter un seul instant et pourtant que quelqu'un se trouve ici au même moment, dans cet endroit hors des sentiers battus aurait dû le mettre sur ses gardes. Ceci-dit, je ne connaissais pas grand chose des moines, ni de leur philosophie. Enfin, les quelques mots qu'il prononça; quatre phrases plus exactement me permis d'entrevoir une partie de sa personnalité. Il s'était relevé. Il était assez imposant. Je l'observais un instant et réfléchis à ce qu'il venait de dire. Ce genre de choses, les énigmes, m’horripilaient depuis le plus profond de mes entrailles. J'aimais les choses claires, directes; même si je ne l'étais pas toujours moi même.

"Aucunes de ces options n'a vraiment d'intérêt... Soupirais-je."

Quelle étrange rencontre. Pour le moment je n'irai pas à dire qu'elle était intéressante; j'avais rencontré des illuminés un peu partout dans le Yuukan, alors un de plus un de moins... En attendant, il ne représentait pas vraiment une menace alors peut-être que le laisser là où il était et reprendre ma route était la meilleure solution. Je ne savais pas si il s'attendait à avoir une conversation philosophique ou spirituelle avec moi. Je connaissais ce monde, je vivais dans le réel et les longues palabres implicites n'étaient mon fort. Même si je pouvais maintenant communiquer avec l'intangible j'étais loin d'être de ceux pouvant broder dans le vide, pour ne rien dire.

"Ravie d'avoir fait votre connaissance. Je pense donc vous laisser à vos méditations sur ce qui est, la complétude et l'ignorance. Et reprendre mon chemin. Finis-je avec un certain scepticisme."

Je croyais bien en quelque chose de particulier mais je n'avais vraiment pas de temps à perdre avec les divagations d'un religieux... J'avais déjà bien assez à faire avec les miennes. Ainsi je m'éloignais de lui en faisant signe d'au revoir de la main.

L’individu masqué se tenant devant Malaw ne semblait pas vouloir en savoir d’avantage sur sa personne, il se contenta de répondre poliment. Signe d’une grande sagesse ou d'un certain scepticisme ?
Quant à Malaw, dans son infinité sagesse rétorqua.

— Hm, l’empreinte d’un homme sur un autre est éternelle, aucun destin n’a traversé le nôtre impunément, voyageur.

Un moment de doute s’installa après ses mots. Le moine tourna des talons pour faire dos à l’étranger et scruta le firmament avant de continuer.

— Lorsque vous vous aimez vous-mêmes et que vous cessez de vous torturer à penser devoir avoir quelqu’un qui vous est chère, vous êtes alors en mesure d’accepter ce que quelqu’un vous offre. Il vous faut absolument avoir assez d’estime envers vous-mêmes pour ne pas vous contenter d’un amour factice. Si vous décidez de choisir un partenaire ou de vibrer avec quelqu’un, et que vous ne recevez pas ce que vous voulez, ne vous plaignez pas à cette personne, ne la harcelez pas ou ne vous renfrognez pas dans le but de l’obliger à se changer pour satisfaire vos besoins. Si vous vous établissez une valeur comme but à atteindre et que vous n’y parvenez pas, alors changez simplement votre réalité et poursuivez votre route en solitaire jusqu’au jour où vous rencontrerez quelqu’un qui corresponde à vos valeurs. Pendant ce temps, vibrez dans l’amour du soi, honorez le soi, et comprenez que le voyage ici-bas est une découverte de soi à travers la relation avec d’autres personnes. Le but du voyage est d’apprendre à honorer votre corps physique et l’unicité du soi dans vos contacts avec la vie.

L’Elu des Cinq esquissa un léger sourire une nouvelle fois mais l’étrange individu ne le vit pas. De la compagnie ne lui faisait pas de mal après toutes ces années de voyage à traverser les quatre coins du monde. Vaste monde.

Se tenant droit comme un ‘’i’’, Raburanke —de son surnom— se retourna en direction de son interlocuteur qui ne semblait plus lui prêter attention depuis un moment. Quelques secondes s'écoula avant que Malaw ne réalise qu'il venait de s’être fait snober pendant son beau discours.

— HEY MAIS REVENEZ ! VOUS ALLEZ OÙ COMME CA ? s'exclama-t-il en courant rattraper l'individu masqué.

Alors que je m'apprêtais à reprendre mon chemin le moine reprit la parole, je m'attendais à de nouvelles divagations, mais étonnement les propos qu'il tint furent plus... Accrocheurs ? Je me reconnaissais dans cette phrase, quelqu'un qui avait laissé son empreinte ouais... Ils étaient nombreux en fait... Mais après quelques secondes je repris mes esprit et décidai tout de même de partir. Ce ne serait ce genre de vérité qui me retiendrait, le genre qui peut correspondre à tout le monde et à personne à la fois. De grandes généralités... Je profitai qu'il se retourne pour m'éclipser.

Je soupirai encore. Cette rencontre avec cet étranger était plus qu'insolite. Et le pire dans tout ça, fut sans doute que je l'entendais discourir au loin, tout seul. Visiblement cela allait durer, peut-être suffisamment pour que je puisse une bonne distance entre lui et moi. J'avais déjà perdu assez de temps comme ça, puis ce n'était pas comme si un moine pouvait m'apporter quelque chose d'autant plus qu'il ne me semblait pas être très aguerri... Pensant être débarrassée, je retirai mon masque afin de respirer l'air frais. Izanami flottait toujours au dessus de moi.

La déesse observait derrière moi, elle semblait intéressée par cet homme alors qu'elle m'avait "autorisée" à le tuer. Ou alors peut-être plaisantait-elle ? Je ne savais pas vraiment si Izanami disposait encore d'un sens de l'humour, ni même si elle n'en avait jamais été dotée d'un. Éliminer une personne parce qu'elle ne pratique pas la même religion que moi ? Oui, cela ne pouvait être qu'une mauvaise blague. Puis, j'entendis sa voix monotone...

"Hum... Je crois qu'il a remarqué ton départ, Zanshi."
— HEY MAIS REVENEZ ! VOUS ALLEZ OÙ COMME CA ?

Je n'eus pas le temps de replacer mon masque que déjà le moine m'avait rattrapé. C'était un rapide. Il marchait maintenant à côté de moi, et je soupirai. Puisqu'il était là...

"J'ai entendu ce que vous disiez, et je ne crois pas que vous correspondiez à mes valeurs. D'ailleurs, je ne crois pas que je sois compatible avec beaucoup de personnes dans ce monde. Puis je ne crois pas non plus que je sois une personne avec qui il faut marcher en dehors des sentiers battus. Ajoutais-je en observant le moine. On ne vous a pas appris à vous méfier des étrangers là d'où vous venez ? Et des étrangers masqués non plus, je suppose ?"

C’est en soupirant que l'individu marchait au coté de Raburanke, sans se connaître, sans s’être révélé leurs identités respectives. Il salue d’un hochement de tête la réplique de -ce qui semble être- une jeune femme et l’observe avec attention. Elle était désormais prête à partager un bout de chemin avec lui, le solitaire.

— Les valeurs sont les convictions que nous considérons comme particulièrement importantes pour nous, celles qui constituent nos repères essentiels, qui nous servent pour effectuer nos choix les plus cruciaux et qui orientent donc pour une large part nos actions et notre comportement. Nos valeurs sont les éléments les plus stables de notre personnalité. C'est le moteur qui nous fait agir et nous donne de l'énergie pour entreprendre. En somme, c'est le socle de la confiance en soi. Et cela peut importe notre éducation, notre milieu socioculturel ou notre religion. Au contraire, je pense que nous partageons exactement les même valeurs.

Un sourire se dessine sur le visage de L’Elu.

— Les Cinq nous guiderons, car ils voient tout. Ce n'est pas un hasard si nos chemins se sont croisé. Là d'où je viens, on dit que l'eau trop claire est sans poissons et que l'homme trop méfiant est sans ami. Mais sachez que la méfiance à l'égard des autres est à la proportion de l'illusion que nous nous faisons de notre importance.

Malaw avance d'un pas soutenu et poursuit.

— L'homme est moins lui-même quand il est sincère, donnez-lui un masque et il dira la vérité.

Le moine s’arrête promptement en croisant les bras, regardant attentivement la kunoichi.

— Selon Maskine, nous sommes liés par la nature, mais étrangers par l'éducation.

C’est sur ses mots que les yeux de Malaw fixait l’Est en direction de Ta no Kuni, un pays qu’il entrevu des années auparavant durant sa formation. Le pays des Rizières, cette sous-unité se caractérisait, dans un premier temps, par son absence de limite marquée. Une réelle impression de paysage infini. Cet horizon parfaitement plane, sans limite apparente, donnait aux rizières une image d’océan de verdure. Seuls, quelques canaux venaient quadriller l’espace en lui donnant une dimension qui semblait se perdre, elle aussi dans une perspective lointaine.

— Et si vous le souhaitez, vous pouvez commencer à m’en dire plus sur vous, voyageur. Car l’amitié n’est pas moins mystérieuse que cette chose confuse qu’est la vie.

"Les même valeurs... Souris-je."

Malgré moi, je continuais de l'écouter. Pour le moment, il ne me dérangeait pas et écouter ses égarements philosophiques et spirituels rompaient le silence qui d'ordinaire m'accompagnait lors de mes marches, ou courses; solitaires. Izanami était à part, je ne considérais pas sa présence, simplement. Elle faisait maintenant partie de moi, et moi d'elle. Finalement, nous n'étions qu'un à peu de chose prés qu'elle ne pouvait que me suivre, et l'inverse était faux.

Malgré moi, je ne pouvais m'empêcher de lui répondre. Prouver à un tel individu qu'il se trompait sur quelques, ou plutôt que rien n'était complétement inscrit me procurerait un minimum de satisfaction. Bien que; j'imaginais qu'il aurait là encore une réponse. Les cinq... je doutais très clairement de leur existence, et de leurs préceptes.

"Pas un hasard ? Le destin vous voulez dire ? C'est l'argument le plus simple que l'on puisse trouver à toutes les questions, et à tous les maux du monde... Le destin. Notre rencontre n'est que le fruit du hasard, rien de plus qu'une vulgaire coïncidence; un imprévu. Parce que j'agis selon mes plans, selon mon expérience. Emprunter les chemins détournés plutôt que la route est une question de logique plus que de destin. Que vous fusses sur mon chemin... Si... Si. Ce n'était que le hasard."

Rien n'était dû au destin, tout ne reposait que sur des choix et au mieux; sur des intuitions. Deux aspects des hommes et des femmes construits sur l'expérience et la connaissance de soi. Pas imposé par le destin. Si le destin existait réellement, alors qu'étais-je dans tout ce dessein supérieur ? Une anomalie ? J'avais le choix de mourir et laisser place libre à une déesse démoniaque d'une religion éteinte ou de continuer à vivre en disposant de la force de cette sombre présence... Quel destin dans tout ceci ? Lorsque l'issue de deux choix pouvait me satisfaire avec une équivalence parfaite, pouvait on parler de destin ? Non. Cette notion était erronée.

"Parfois les personnes portent un masque simplement pour ne pas être reconnue, pour agir avec une certaine impunité. Et d'autres, parce qu'elles aiment. La vérité que je prodigue sera toujours la même, que je sois dissimulée; ou pas. Voulez vous la destruction de ce monde, de cette société ? Ce sont mes valeurs, aujourd'hui. Autant dire que je n'en ai pas. Rigolais-je. Pensez-vous vraiment que nous ayons des valeurs communes ? Dis-je en le fixant de mon regard écarlate. Si vous marchez aujourd'hui à côté de moi, c'est simplement parce que vous ne faites pas partie du plan. Une chance pour vous."

Je pouvais lui parler de tout ça sans problème, à priori. J'étais presque sûre qu'il allait interpréter ce que je disais d'une façon ou d'une autre. Mais la destruction, quelque soit le sens qu'on lui donne, restera toujours la destruction. Ce sont les choses immuables de la nature humaine dont une part est profondément enfuie au creux de nos entrailles, que j'ai su extirper et sublimer au travers des années, pour arriver finalement ici, devant ce moine. Peut-être était cela, la destinée ? Non plus... Ce n'était que le résultat logique d'un long parcours...