Le chemin que j'avais emprunté depuis Suna avait été pavé de rencontres plus surprenantes les unes que les autres. Kaminari no Kuni fut un lieu assez propice malgré la présence sur ses terres d'un village ninja. En effet, ces derniers, les Kumojins, ne me posèrent guère de problème et l'image que j'avais donné de moi avait sans doute largement fait illusion à leurs yeux crédules. Une artiste, une peintre, une comédienne... Qui pouvait bien croire ça ? Etais-je une si bonne menteuse ?

Tout semblait le confirmer comme cette micro organisation, un gang plus qu'autre chose en fait, qui avait voulu me recruter. Des nukenin sans grande envergure que j'avais balayé d'un revers de mains. Ceux-ci avaient pour objectif de détrousser les voyageurs, et autres personnes de passage dans leur secteur. Malheureusement pour eux, leur dessein allait exactement à l'opposé de ma propre idéologie. Enfin.. Ce fut donc sans regret et bien au contraire que je quittai ce magnifique pays pour continuer ma route et rechercher d'éventuels futurs alliés.

Enfin, recherche était un grand mot. Je ne faisais en fait que compter sur la chance, sur le hasard. C'est quand on ne cherche pas qu'on le trouve non ? Quoi qu'il en fut, ma prochaine destination était le pays voisin, Shimo no Kuni. Ce pays que j'avait autrefois visité m'avait toujours fasciné. La rigueur et la persévérance de ses habitants m'impressionnaient, l'exemple que l'homme est toujours attaché à sa terre, à son pays natal...

Ils avaient de la chance quelque part, d'avoir des racines bien tangibles, bien définies et libres. On pouvait se demander pourquoi je vouais une telle admiration à cette nation qui n'avait pourtant rien pour elle entre ses marécages et ses terres gelées. Peut-être était-ce sa tranquillité ? Je ne pouvais me l'expliquer, alors l'expliquer à quelqu'un, c'était peine perdue. Après quelques jours donc de marche, la traversée d'une montagne et d'une vaste toundra déjà complètement glacée, je rencontrai enfin le premier signe de civilisation.

Au loin je pouvais voir quelques chaumières desquelles s'échappaient de longs filés de fumée blanche. Dans mes souvenirs, ce pays n'était pas aussi rude; j'en étais presque surprise. Mes souvenirs... Ceux-ci m'avaient laissé l'image d'un village modeste mais aujourd'hui il ressemblait bien plus à une ville qu'autre chose. Et plutôt grande d'ailleurs. L'évolution qu'avait connu cet endroit me rappelait que cela faisait un grand nombre d'années que je n'y avais pas mis les pieds.

Sans doute la dernière fois fut lorsque mon père était encore en vie. Cependant, une chose n'avait pas changé; la vie qui animait ses rues. Des marchands en tout genre emmitouflés dans leurs épaisses fourrures, quelques clients à droite à gauche et pas mal de badaud n'étant là, que de passage. Je me mêlai à l'épaisse foule, me frayant un chemin jusqu'à l'autre bout de cette rue un peu trop animée pour moi, et surtout à la recherche d'une auberge.

On me bouscula, mes lunettes tombèrent. Une personne les ramassa pour moi, une jeune femme, blonde, au regard fuyant. Je n'eus le temps de la remercier qu'elle avait déjà disparu. Sans y prêter plus d'attention, je fis quelques pas et sentis que quelque chose n'allait pas...

Une vie faite d'errance et de vagabondage, voilà la simplicité à laquelle aspirait la jeune Tatsuki. Les années passées à arpenter les différents pays et leurs villes lui permirent de perfectionner un art particulier, outre son don inné. La dérobade, le vole; étaient devenus sa profession, elle était une pickpocket hors-paire ou tout au moins très habile. Une autre de ses nombreuses et longues marches la mena tout droit vers une grande ville de Shimo. Ce pays... Elle ne l'aimait pas, il était de loin moins accueillant, moins beau que tous les autres qu'elle avait pu visiter et accessoirement dépouiller. Cependant, la première chose que cette ville montrait était son activité, sa fréquentation. Il y avait effectivement du monde, la foule et sans doute des dizaines de poches à faire.

Sa technique était simple, entrer en contact involontairement, enfin, faire paraître, faire croire à une bousculade hasardeuse. Les dizaines de badauds déambulant de stand en stand formaient un écran parfait pour disparaitre ou même s'enfuir. Quelques minutes dans la foule et elle localisa sa première victime. Un homme bedonnant visiblement riche ou à défaut aisé. En une fraction de seconde sa main passa sur la ceinture et décrocha une bourse assez lourde contenant probablement une somme rondelette.

"Cette ville va me rapporter gros" se dit elle en glissant la bourse dans son baluchon. Elle aurait pu s'arrêter ici et profiter des ryos si chèrement gagnés à la sueur du front de ce grand et gras flâneur. Faisant mine d'observer les étales si agréablement fournies, elle cibla une nouvelle victime. Son regard s'était posé sur une forme assez banale mais néanmoins attirante. Rien de physique ou sexuel. Seulement, une personne dissimulée sous une cape noire devait forcément cacher autre que son corps, puis il ne faisait pas si froid que ça. Avant que cette nouvelle proie ne la dépasser, elle se mêla de nouveau dans la foule suivant du regard ce qui semblait être une jeune femme. Quelques secondes plus tard elle la percuta, pas trop fort pour éviter un esclandre mais suffisamment pour la distraire.

Le dosage fut juste. Sa jeune cible en perdit ses lunettes. Alors que Tatsuki les ramassa et se redressait elle infiltra sa main experte sous la cape noire et décrocha ce qui semblait être une sacoche. L'instant suivant elle avait disparu dans la foule. Elle s'éloigna et s'arrêta au détour d'une ruelle, elle fouilla dans la sacoche et en sorti un objet métallique. Son regard se figea instantanément. L'objet lui rappelait quelque chose. C'était une de ces plaques que portaient les Shinobi. Le symbole gravé à sa surface ne lui disait rien, mais elle était sûre de sa provenance. Se mettant un peu plus à l'écart, elle retourna le sac. Il y avait un encrier, une plume, des parchemins vierges et d'autres enroulés et scellés. Et enfin, un masque... assez étrange.

"Pas un seul Ryos" soupirait-elle...

Je me retournai rapidement. La jeune personne avait déjà disparu et avec elle ma sacoche. Je ne m'étais rendue compte de rien sur le coup, comment était-ce possible ? J'avais compris que notre collision avait été préparée à l'avance par ses soins; en fait j'étais sa cible. Alors, sans perdre une seconde de plus, je m'enfonçais à mon tour dans la foule; pensant emprunter le même itinéraire que la pickpocket. J'essayais de réfléchir comme elle, que ferais-je dans son cas ? M'éloignerais de la ville ? Non, non... Il y avait trop de travail ici pour perdre du temps puis elle ne savait pas qui elle avait dépouillé. Alors, Me mettrais-je à l'écart pour inventorier mon butin ? Probablement.

Il y avait un nombre conséquent de cachettes ici, entre les bâtisses et les ruelles; et la foule elle même; ma tâche serait ardue. Je marchais donc, calmement, scrutant les silhouettes et les visages; observant chaque ruelles. Je ne vis rien jusqu'à ce que finalement je joues de chance. Un homme à la carrure imposante, pas particulièrement attirant et qui devait charmer ces dames par sa richesse; grommelait à propos d'un vol. Un homme vint le voir et ils prirent une direction précise d'un pas assuré au milieu toujours aussi dense. Ils bousculèrent les passants incommodés et s'engouffrèrent dans une ruelle. J'allais les suivre, peut être cherchaient ils la même personne que moi, c'était plus que possible.

Il ne devait pas y avoir cinquante voleurs sévissant au même endroit, et les éclats de voix qui retentirent un peu plus loin semblèrent abondèrent dans mon sens. Je fis quelques pas, et de loin sans que l'on me voit, j'observais les trois hommes et la cible de leur vengeance. Je la reconnu immédiatement, cependant je ne pouvais pas -encore- voir si elle avait ma sacoche ou pas. Mais, je continuais d'espionner, d'écouter... Celui qui semblait être le chef, ou autrement dit le plus bedonnant parla à la jeune femme...

"Tu ne sais pas à qui tu t'en es pris gamine!"

Les deux sbires de cet homme influent sortirent chacun un katana, mais au moment où ils se jetèrent sur la détrousseuse je fis un signe et une nuée de shuriken fondit sur eux. Criblés de morceaux de métal, ils s'effondrèrent à quelques pas de la voleuse. Leur patron se retourna vers moi. Il semblait bien moins sûr de lui tout à coup. Peut être venait il de comprendre à qui Lui avait affaire. Bien que...

"Que faites-vous ?! Je suis le Conseiller du Daïmio, Akimura!"
"Conseiller, vraiment ? C'est dommage... Mais, malheureusement; je ne peux pas vous laisser faire du mal à cette fille. Elle possède quelque chose qui m'appartient, et cela fait d'elle quelqu'un d'exception, contrairement à vous. Dis-je en sortant un kunai."
"Non, ne me tuez pas, je vous donnerai de l'argent, des terres!"
"J'ai de l'argent plus qu'il n'en faut, et... mes terres sont ce monde..."
"Vous n'y êtes pas obligée!.. Vous aurez des problèmes!"
"Justement... Vous avez vu mon visage, vous savez de quoi je suis capable, vous avez vu le contenu de mon sac... Vous disparaissez, et personne ne saura faire le lien entre ce que vous avez vu et..."

Je fis un signe. Alors que mon kunai s'enfonçait dans le ventre gras du riche homme, les dizaines de shuriken figés dans les corps des deux autres manants s'extirpèrent et criblèrent celui du dernier témoin. Il s'effondra alors les yeux grands ouverts mais sans un seul autre son que celui de son dernier soupir. Derrière nous, la foule continuait de passer sans prêter attention à ce qui se tramait par ici.

Marchant alors dans le sang des trois hommes, je m'approchai de la jeune femme. Son regard exprimait quelque chose oscillant entre stupeur et frayeur, ou alors et feignait parfaitement le choc.

"Merci pour mes lunettes. Veux-tu bien me rendre ma sacoche, s'il te plaît. Ensuite, j'aimerai que nous parlions."

L'homme bedonnant qu'elle avait dépouillé se révélait en fait être une personne assez susceptible. En effet, qu'étaient ce que ces quelques Ryos pour lui ? Blessé dans sa fierté, il voulait donc se venger; comme si récupéré ce qui lui avait été si louablement dérobé n'était pas suffisant. Il l'avait retrouvée, accompagné de deux gorilles dont l'office ne faisait aucune doute. Tatsuki, aussi inoffensive pouvait elle paraitre, s'avérait être l'une des personnes les plus dangereuses que des types comme eux pouvaient rencontrer. Dénues de toute habilité au maniement du chakra, ils n'avaient hélas aucune chance. Elle les aurait empêché de remplir leur macabre tâche avec une facilité déconcertante, sans bouger, sans se salir ni même se fatiguer.

Ils avaient dégainé leurs armes, semblaient sûrs de leur coup. Cependant à cet instant précis une autre personne intervint. Une femme. Ou plutôt une fille, celle à qui appartenait tout le contenu du sac, un attirail sans valeur qu'elle aurait balancer avec les autres déchets. Ceci dit, si les trois hommes ne représentaient guère une menace; ce n'était pas le cas de la binoclarde. Elle pouvait ressentir d'ici son chakra. Elle réfléchit un moment, se demandant comment avait elle pu passer à côté de ça. Si elle avait su, jamais elle ne s'en serait approchée. Cette fois-ci, Tatsuki pressentait la fin arriver; elle savait qu'elle n'avait pas la force pour affronter un ninja si puissant.

Mais, alors que tout semblait perdu; les paroles que tint la jeune fille raisonnèrent dans son esprit. Elle ne savait qui elle était, ne le connaissait pas; elle l'avait même volé. Et pourtant, cette victime de son larcin la qualifiait d' "exception". Même à bonne distance, le regard azuré de Tatsuki croisa celui de la mystérieuse jeune femme. Et la scène qui s'en suivit appuya ses mots. Plus rapidement encore, les deux gardes tombèrent, fauchés par une volée d'étoiles ninja et leur patron, lui, ne tarda pas à suivre. La Kunoichi à capuche s'était rapprochée, à hauteur du gros qui quémandait pitié; et les shuriken ensanglantés s'enfoncèrent dans son dos. Il s'effondra dans une marre naissante de son propre sang.

"Merci pour mes lunettes. Veux-tu bien me rendre ma sacoche, s'il te plaît. Ensuite, j'aimerai que nous parlions."

Elle regarda le sol où étaient éparpillés les affaires de l'étrange fille, et d'un mouvement tremblant de main fit tout glisser dans la sacoche avec en prime quelques gravillons, une capsule et de la poussière. La Senritsu tendit le sac d'une main chancelante et fixa son interlocutrice. Elle se disait que cette personne aurait pu la tuer, mais que non; elle semblait trop... précieuse. Mais pourquoi ?

-Merci de m'avoir... "protégée". Vous avez dit... Je ne veux pas faire la prétentieuse ni rien. Rigolait elle nerveusement.
-Que j'étais une personnes... d' "exception" ? Je sais bien faire une ou deux choses, mais je suis plus une voleuse qu'autre chose...

La blondinette ne semblait pas vouloir nier ce qu'elle avait fait, en même temps elle était prise la main dans le sac; lequel elle me rendit d'ailleurs. Je ne vérifiai pas s'il manquait quelque chose, il n'y avait rien de valeur enfin, pour elle. La bourse qu'elle tenait encore dans son autre main indiquait qu'elle recherchait de l'argent sonnant et trébuchant; des Ryos. Ceci dit, les parchemins qu'elle avait eu entre les mains avaient bien plus de valeur que tout ce qu'elle avait pu voler jusqu'aujourd'hui. Je m'approchai davantage, assez calmement pour la mettre en confiance et lui tendis une main pour l'aider à se relever. C'était plus un symbole qu'une assistance.

Dans d'autres circonstances, elle aurait fini comme les trois autres là; mais la façon dont elle avait pu me dérober des biens si précieux m'avait impressionné. Elle était certes une voleuse, mais je sentais qu'autre chose se cachait derrière cet apparat de bassesse. Un voleur ordinaire...

"Je ne doute que tu aurais pu te défendre toute seule. Dis-je en la fixant. Tu sais, ou imagines ce dont je suis capable; alors tu dois bien te douter qu'un voleur ordinaire n'aurait pas pu me dérober ce sac. J'aimerai savoir comment tu as fait. Ne me dis pas que seule ton habilité te l'a permis, il faut plus que ça pour me duper."

Je ne détachais pas mon regard du sien. Je savais qu'elle n'était pas une gamine ordinaire ne volant que pour survivre, car malgré mes capacités je n'étais pas parvenue à sentir sa main, je n'avais rien entendu ni même vu. Si j'avais eu quelques compétences dans le domaines de la sensorialité, j'aurais pu assurer mes dires... Mais dans ce cas ci, je devais essayer de lui faire dire la vérité; et parvenir à un tel exploit face à une voleuse qui doit, qui plus est, être habituée à mentir; ne serait pas une mince affaire. Cela dit, j'étais moi aussi une très bonne menteuse. Et puis...

"Tu peux me dire qui tu es véritablement, en dehors d'une voleuse habile. Hum... Je m'appelle Umi Ji. Commence donc par là."

Elle pouvait mentir, bien entendu. Pour se protéger. Mais si elle avait un minimum de jugeote, qu'elle avait retenu ce qui venait de se passer; elle savait déjà que je n'étais pas du genre à plaisanter. D'autant plus qu'elle connaissait maintenant mon nom, et mon prénon. Enfin, celui de Ji; tout au moins.

La voleuse accepta volontiers l'aide de la fille à la tignasse noire. Tout comme elle accepta sans broncher de l'écouter. Avait elle seulement le choix ? Tatsuki, face à cette illustre inconnue avait la désagréable impression d'être un poisson prit dans le filet du pêcheur. Un méandre de maillons formés par ses mots et son charisme -bien qu'inattendu- desquels il était impossible de dépêtrer sans risquer de se blesser. Résignée, la jeune Senritsu se demanda; avant de répondre, si la dénommée Umi Ji avait deviné son petit secret. La réponse semblait plutôt évidente. Non. Peut-être n'avait elle même jamais entendu parler d'un Senritsu... Alors, elle se risqua.

-Tatsuki. Je m'appelle Tatsuki... Sen.. Senritsu Tatsuki.

Voilà une faute qui pouvait trahir le secret, montrer qu'elle cachait quelque chose... Ou alors, qu'elle était impressionnée. Quoique, pourquoi le serait elle plus à cet instant que quelques secondes plus tôt. Son interlocutrice devait déjà avoir compris qu'elle n'était pas la plus impressionnable des personnes. Du coup, un silence gênant s'instilla entre les deux kunoichi. Il devait d'ailleurs être plus gênant pour Tatsuki que Ji. Alors, pour éviter que la fille encapuchonnée ne parle à nouveau et lui pose davantage de questions; elle opta pour une solution radicale : parler. Cela pouvait paraître simple, comme ça, mais à cet instant; pour Tatsuki, cela s'avérait très délicat.

-Non non, vous vous trompez; je ne suis qu'une... voleuse ? Sourit-elle faussement.

Un sourire si faux ne pouvait qu'attiser la curiosité et la soiffe de connaissance d'une personne dans le genre de cette Ji, déjà qu'elle la qualifiait d'exception. A vrai dire, Tatsuki n'avait jamais rencontré d'autres voleurs, donc elle ne savait pas vraiment ce qu'elle valait. Enfin, si. Elle ne mourrait pas de faim, dormez rarement à la belle étoile... Beaucoup d'honnêtes gens ne pouvaient pas en dire autant, malheureusement. Voyant que la bibliothécaire ne la lâchait toujours pas de son regard sanguin, elle perdit son sourire; comprenant qu'elle ne buvait aucunes de ses paroles. De nouveau, elle se résigna.

-Bien, puisque vous insistez. Je maitrise le son! C'est pour ça que personne ne me détecte! Ni même vous, qui êtes visiblement... Soupira-t-elle.

Subitement une autre idée lui vint, un peu saugrenue.

-Mais vous... il y a quelque chose qui ne correspond pas... Vous paraissez jeune, mais vous avez un discours de vieux... C'est sans doute pour ça que je n'arrive pas, malgré tous mes efforts, à vous tutoyer...

Cette jeune femme qui me faisait ne semblait pas avoir la langue dans sa poche. J'aurais imaginé que devant la personne l'ayant tiré d'un si mauvais elle aurait fait preuve d'un peu plus d'humilité, mais visiblement cette qualité n'était pas son point fort. Néanmoins sa remarque n'était pas dépourvue de sens. Je n'en attendais pas moins d'une voleuse, fine observatrice, fort esprit de déduction. Ceci-dit, le décalage entre l'âge et le vocable employé ne pouvait rien être d'autre qu'un... décalage, à ses yeux. Enfin, maintenant que je pouvais mettre un nom et un prénom sur ce visage, les choses ne pourraient aller qu'en s'améliorant; comme apprendre qu'elle était douée de certains dons génétiques.

Par le passé, j'avais connu un manipulateur du son. Un Hokage. Étrangement, je ne me souvenais plus de ce qui lui était arrivé. Était il mort ? Avait il prit sa retraite ? Qu'importe. Une Senritsu... C'était la première fois que je rencontrais un membre de ce clan, je les pensais disparus pendant la grande guerre, mais non apparemment. Onpu, lui, n'en était pas un. Comme moi, je n'étais pas une Kinzoku... Ah... Le monde que nous a laissé ce bon vieux Rikodu était plein de surprises et de bizarreries plus étranges les unes que les autres. Et on se demandait pourquoi les Habashi n'avaient pas les mêmes croyances que la plupart des habitants du Yuukan... Enfin, le moment n'était pas vraiment propice pour m'engager dans une telle réflexion...

"Et bien, ravie de te rencontre, Tatsuki. Donc... Si j'ai bien compris, tu emplois tes pouvoirs, et tes dons de pickpockets pour quelques Ryos ?"

Je ramassai les bourse que le conseiller ou je ne savais plus quoi avait lâché, et la soupesai. La petite poche de tissus était bien pleine, et à en juger par le son elle ne contenait pas que des pièces ou des billets. Une bonne affaire en somme. Je la lui lançai d'un simplement mouvement de balancier et repris la parole.

"Tu gaspilles tes talents, et perds ton temps... Tu n'en as pas marre de devoir voler pour te nourrir et te vêtir ?"

Lui adressais-je avec un léger haussement d'épaule. Je reconnaissais ses capacités dans ce domaine et je ne pouvais pas dire qu'elles étaient inutiles, bien au contraire.

"Il y a des choses qui valent bien plus le coup de prendre des risques qu'une ridicule poignée de pièces. Enfin... Je vais reprendre ma route, et si jamais tu veux faire autre chose de ta vie, et de tes compétences; tu n'auras qu'à rejoindre la sortie de la ville, à la tombée de la nuit; peut-être que j'y serai toujours."

Je fis demi-tour, la laissant en tête à tête avec sa pochette pleine de richesse. Avec ce qu'il y avait là dedans elle pouvait acheter un billet pour les îles et y acheter une petite propriété recluse sans avoir encore à se soucier de ce qu'elle mangerait. Mais je doutais qu'elle puisse envisager cette solution, ce que j'avais vu et entendu ne pouvait que confirmer ce que je pensais...

Quelque chose d'intriguant émanait de cette jeune femme. La voleuse n'arrivait pas à détacher son regard surpris de la silhouette quasi quelconque qui s'éloignait peu à peu pour finalement disparaître au coin de la ruelle. Cette rencontre était surréaliste, et la scène autour d'elle l'était autant si ce n'était plus. Elle observa les cadavres baignant dans leur sang et revit son intervention. Son visage était doux, son regard intense; mais ce dont elle était capable était à l'exact opposé. L'habit ne fait pas le moine lui correspondait parfaitement. Mais comment tout ceci était possible ? Comment avait elle fait pour survivre ? Etait ce son seul nom qui l'avait fait l'épargner, ou alors la pitié ?

Des pas vinrent dans sa direction. Elle reconnaissait le son distinctif des hommes en arme, des frottements des pièces de métal de leurs cuirasses. La peur l'envahissait subitement. La peur... C'était tout aussi étrange. Face à elle elle n'avait pas eu peur, mais faire face à ces hommes lui faisait pousser des ailes! Alors qu'il n'y avait pas photo entre elle et eux; cette Ji lui paraissait bien plus effrayante. Puis, elle ne voulait pas affronter des soldats, elle ne voulait pas user de ses pouvoirs pour causer du tort, pas encore une fois. Il s'en fallut de peu, mais lorsque la milice arriva, la voleuse avait disparu. Seuls ne gisaient plus au milieu de l'étroite ruelle les trois cadavres encore chauds.

La rejoindre pour ne plus avoir à voler, pour ne plus craindre d'être arrêtée ? La jeune femme n'était pas dupe, si elle la suivait; elle devrait certainement faire d'autres choses. Mais en même temps... Elle ouvrit la bourse tout juste dérobée et l'ouvrit. Elle contenait bien plus que de simples piécette, des choses de plus grande valeur. Assez pour être tranquille un moment. Mais... Les pierres précieuses étaient aussi dangereuses que lucratives et quelqu'un voudrait probablement les récupérer un jour ou l'autre. Elle les revendrait, et elle retournerait entre les mains du successeur de ce mafieux. Oui, c'était une belle prise mais trop empoisonnée. Les ryos, eux, ne laissaient aucune trace.

Elle laissa alors, à contre cœur, la bourse sur le lit de l'auberge et quitta la chambre. Elle se rendit à la sortie de la ville, se faisant toujours très discrète; et constata que la dénommée Ji n'était pas là. Il était trop tôt en fait. Mais peu importait, elle allait attendre ici, jusqu'à ce qu'elle arrive. Soit plusieurs heures à observer le Badaud passer, entrer, et sortir de la ville; à être observée et peut-être même à ce qu'on l'accoste une ou deux fois. La proposition de Ji restait encrée dans sa tête. Peut-être était ce la meilleure chose à faire, peut-être pas. C'était comme confier sa vie à un inconnu. Oui, c'était même exactement ça. Mais sa curiosité était bien plus forte que tout le reste, elle devait savoir comment elle pourrait faire pour vivre sans voler...

Sa patience paya. Le soleil c'était couché depuis quelques minutes, et la lune s'apprêtait à prendre sa place. Un homme, équipé d'une perche surmontée d'une flamme, allumait tous les lampions qui faisaient office de lampadaires, donnant à la ville une autre allure, plus mystique, plus chaleureuse. Dans la lueur des lampions, Tatsuki vit une autre personne s'avancer vers la sortie de la ville; mais cette silhouette qu'elle trouvait quelques heures plus tôt assez quelconque sortait finalement du lot; sa platitude était en fait sa plus grande originalité. Cette platitude qui alliée à la force qui se dégageait de sa personne la rendait si effrayante... Tatsuki se releva alors et posa son regard azur sur l'adolescente.

-Je suis là. Mais avant tout, je veux savoir ce que je devrais faire pour ne plus avoir à voler! Je ne veux pas utiliser mes capacités pour faire du mal à des personnes...

La nuit était rapidement tombée sur la petite ville de Shimo, plus vite que je ne m'y attendais. Le temps aussi semblait s'être écoulé plus vite si bien que je pris la direction de la sortie avec une bonne demie heure de retard. Ce n'était pas grave, la jeune femme m'attendrait à notre point de rendez si vraiment elle était intéressée par tout ce que je lui avais dit. Le soleil couché donnait aux rues que j'arpentais un tout autre visage. C'était simplement attrayant, beau à regarder. Après une courte marche je rejoignais Tatsuki. Elle avait donc décidé de me rejoindre ? Sa phrase d'accueil confirma mon hypothèse, ceci-dit je m'étais pas vraiment attendue à la suite. Des conditions ?

"Contente de te revoir. Bien, je n'ai jamais dit que tu n'aurais plus à voler; c'est justement ce talent qui m'impressionne, et m’intéresse. Tu ne pensais qu'en même n'avoir qu'à me suivre... Non, En échange de tes services et de ta discrétion; je te donnerai de quoi vivre aisément."

J'esquissai un léger sourire en l'observant. Penser qu'elle avait pu croire que j'étais une âme charitable m'amusait, elle m'était surtout redevable pour lui avoir sauvé la vie, d'autant qu'elle ne semblait pas être encline à ôter la vie d'autres personnes. Peut-être devais-je lui préciser ce détail, le fonctionnement d'une dette et ses modalités ?

"Tu sais, tu m'aies redevable, Tatsuki. Je ne te demanderai donc pas de tuer trois personnes pour me dédommager des risques que j'ai pris. En revanche, oui, voler pour moi. Mais si tu ne veux pas voler, ni tuer; nous aurons un problème. D'ailleurs, avec tes dons tu pourrais facilement devenir une guerrière hors paire."

Maitriser le son était pour moi un atout très précieux. Si je pouvais les manipuler à ma guise, beaucoup de choses seraient plus simples. L'infiltration, le meurtre, la soumission; tout un tas de perspectives s'ouvraient à moi et je me demandais quelles étaient les siennes. Jusque se contenter de dérober, de voler ? D'ailleurs, était elle capable de faire autre chose que manipuler les sons ou farfouiller dans les affaires des autres avec ses mains baladeuses ? Puis, elle maniait le chakra, elle était donc une kunoichi, elle était issue d'un clan assez connu mais dont je ne savais rien... En dehors de ce qu'avait bien voulu me raconter Onpu.

"Je sais que tuer des personnes n'est pas plaisant; mais je me demande ce qui contraint une kunoichi comme toi à... s'abaisser devant de vulgaires hommes.

Ji se révélait aux de Tatsuki un peu plus chaque instant. La Senritsu commençait à comprendre à quel genre de personne elle avait affaire. Comprendre était un grand mot. Disons qu'elle avait compris que cette fille était complexe et dissimulait ce qu'elle était. Avec une certaine nervosité, elle écouta chacun des mots qu'elle lui adressait. La Kunoichi manipulatrice de métal était intéressée par sa dextérité en tant que voleuse ? Ce fut la première fois qu'elle entendait ça, et en plus elle voulait la rémunérer ? Et bien qu'à cela ne tienne. Cependant un doute persistait dans l'esprit de la blondinette. Comment pouvait elle la payer alors que sa sacoche était vide ?

Oh oui elle sentait l'entourloupe à plein nez, c'était un coup à se faire manipuler. Elle allait rejeter l'offre de la brune lorsqu'une autre donnée entra en jeu. Ça, il n'y avait pas pensé. Elle avait contracté une dette. Comme dans toutes les autres situations similaires, elle n'avait qu'à prendre la fuite. C'était aussi simple que ça! Tatsuki la toisa l'espace de quelques secondes et se rétracta une nouvelle fois. S'esquiver à de simples civils était facile, mais celle là... Elle n'était pas vraiment comme les autres. Lui échapper serait ardu, si ce n'est mortel.

-Je...

Le piège se refermait lentement. La constatation était facile, sans échappatoire. Tatsuki soupira en guise de réponse aux vérité que débitait la mystérieuse ninja. Elle était faite comme un rat et devait reconnaître que cette femme était plus forte qu'elle même. Ceci dit, la proposition finale de Ji semblait malgré tout intéressante. Après tout, elle l'avait sortie d'un mauvais pas, lui avait laissé le choix de se présenter ici et dans le fond Tatsuki sentait qu'il s'agissait d'une opportunité inouïe, sans compter qu'à ses côtés elle serait en relative sécurité.

La voleuse observait maintenant Umi Ji, sa réponse pouvait déjà se lire sur son visage. Malgré ses suspicions à l'encontre de sa pseudo sauveuse, un sourire impossible à retenir s'était formé entre ses lèvres rosées. Elle tendit la main vers sa nouvelle patronne et répondit d'une voix affirmée.

-Une guerrière... J'ai déjà été obligée de tuer des personnes avec... ça, mais uniquement pour me défendre... J'aurais pu m'en sortir toute seule tout à l'heure! Je sais me battre! Mais je préfère voler. Disait elle en levant un doigt pour accentuer ses mots. Et je ne vole que des riches, et des gens... Comme toi. Sauf que tu n'avais pas d'argent, bizarrement.

Étonnamment, la pickpocket se montrait plutôt loquace. Elle se surprenait. Sans connaître plus que ça celle qui lui proposait un marché à son avantage, elle dévoilait nombre de choses sur sa personne, rien de bien palpitant encore mais toujours plus que Ji. Tatsuki avait envie de lui faire confiance, et finalement elle se disait qu'elle n'avait plus grand chose à perdre; puis partir à l'aventure, tout ça...

-C'est donc d'accord, je vais te suivre Ji. Je ferai ce que tu demanderas, tant que tu me payes. Par contre, il faudra qu'on parle, qu'on apprenne à se connaître, tu vois ? Que je sache un peu qui tu es...

Ajouta-t-elle en serrant la main de Ji, comme pour signer leur contrat...