Elle avait été choisi mais cette victoire au sein de son clan avait un goût amer : les personnes avec qui elle aurait voulu fêter cette étape n’étaient pas présentes. Soit elles l’avaient déçue, soit elles étaient mortes en cours de mission. Elle passa cette première soirée avec une jambe étendue, immobilisée, un verre de sake en main, une plume d’une autre, et un coude posée sur une table où trônait une feuille. Elle avait beaucoup de choses à régler, à écrire, à faire … elle soupira d’avance, et davantage lorsqu’elle était consciente de son destinataire. S’il y avait bien quelqu’un dont elle ne voulait plus rien savoir, c’était bien Kibo. Leur dernière rencontre n’avait guère était amicale, ayant poussée Tsukiko à tout bonnement briser tout lien d’amitié avec. Hormis des liens « professionnels » - ou « militaires » - rien ne la liait à lui, se disait-elle.

Citation :

Kibo-san,

Suite à des raisons personnelles, ma nièce Kawaguchi Mizuki ne souhaite plus faire partie de mon équipe et désire bénéficier de votre entraînement, au sein de votre équipe. Ainsi donc, si vous l’acceptez, je souhaiterais que vous accédiez à sa requête et lui apportiez ce dont elle a réellement besoin – et non ce qu’elle juge nécessaire. Seize ans est un âge où nous changeons, et où nos désirs ne sont pas équivalents à nos besoins, j’espère que vous le comprendrez aisément.

N’hésitez pas à vous tourner vers Kawaguchi Suno pour toutes questions relatives aux entraînements pour les membres de notre clan, ou pour y trouver un guide pour l’orientation de ma nièce.

Pour finir, je souhaiterais souligner un point important : malgré des différents personnels, et malgré son choix, elle reste ma nièce. Je compte sur vous pour la protéger, la soutenir, et ne jamais l’abandonner. Si vous la blessez d’une quelconque manière, ou si vous n’apportez pas l’enseignement adéquat pour qu’elle vive, sachez que la faute ne sera pas la sienne ni totalement vôtre, mais la faute à vous et à moi. A vous, pour avoir accepté une tâche qui vous dépasserez, et à moi pour vous avoir confié cette nièce qui m’importe réellement dans cette vie. Comprenez mon inquiétude, et mes doutes, et ne prenez pas à mal chacune de ces dernières paroles.

En comptant sur votre compréhension, veuillez agréer, Kibo-san, toutes mes sincères salutations.

Kawaguchi Tsukiko,

Chef des Kawaguchi.

La signature et le sceau de son clan apposé, elle convoqua sans tarder un des gardes, confia la lettre, et ordonna sa distribution au petit matin. Il n’y avait guère besoin d’embêter quiconque à une heure aussi tardive. Elle en profita aussi pour avoir des nouvelles de sa nièce, par ce ninja qui suivait plus ou moins discrètement de temps en temps la fugueuse. Il semblerait que la blondinette et l’orpheline adoptée vivent dans la maison d’une connaissance, et qu’elles n’étaient pas exceptionnellement à plaindre – un toit, un repas et un lit, c’était suffisant pour un militaire. Elle remercia, congédia, et continua à boire en solitaire sa bouteille d’alcool.