Errant dans les larges passerelles de terre de Yu no Kuni, le Nouzagi s'avançait vers un petit village sans que personne ne sache pourquoi, ni même ne sache qui il est. Après tout, n'était-ce pas lui, l'être censé être le plus insaisissable du Shôraizen ? Pour les autres, c'était effectivement le cas, mais pour lui, non... L'être le plus mystérieux et le moins sondable n'était personne d'autre que le Dokuja, le Serpent et dirigeant actuel de l'organisation dans laquelle il c'était inscrit.

Il fallait le dire, les deux hommes entretenaient une relation particulière. Plus qu'une simple amitié conventionnelle, c'était avant tout un échange de passion mutuelle et d'obsession de la vérité qui avait mis les deux hommes sur le même chemin. Hiriko préférait lire entre les lignes de l'histoire, romançant les aventures qu'il ne vivait pas lui-même dans un esprit bien plus fin et calculateur que personne ne pouvait imaginer. Seitô préférant l'expérience pure que son corps pouvait ressentir, et la connaissance qu'il pouvait en retirer sur le terrain. Deux personnes se complétant, et apportant son expérience l'un à l'autre, sans que personne ne le sache.

Mais que faisait-il ici, proche d'une auberge bon marché d'un village quelconque dans un pays quelconque ? À son habitude, il se reposait pour lire entre les lignes de chaque histoire, mettant à l'écrit tout ce qu'il avait pu ordonner dans sa tête, et repassant sur le peu de passage flou qu'un Yamanaka pouvait avoir dans sa mémoire.

Entrant dans ce nouvel endroit qu'il n'avait jamais vu, l'homme était vêtu d'une tenue relativement habillée, de couleur dominante vert des bois, avec comme couleurs secondaires or et noir. Une longue veste de cette dominance, suivis d'une chemise blanche et de gant en soie, blancs immaculés. Observant la pièce, il vit alors quelque chose qui lui fit surprise : un homme en train de lire ? Ce genre d'endroit perdu étant rarement peuple d'intellectuel, il s'avança jusqu'à sa table, avant de pencher sa tête vers l'homme en question. Et bien qu'il ne vît plus avec ses yeux presque constamment fermés, il pouvait ressentir le moindre détail avec sa perception sensorielle, jusqu'au main rugueuse d'un combattant caressant la douceur des pages d'un livre.

« Il est rare de voir ici des gens assez calme pour prendre le temps de lire dans le bruit de la foule. Puis-je prendre place ? »

Le ton de voix qu'il avait posé était aussi clair comme de l'eau de roche, et ne laissait aucun place à un quelconque refus de la part de son interlocuteur. S'asseyant en face de lui, l'homme à tresse blonde lui fit un sourire gracieux, avant de poser ses mains gantées sur la table.

« Mon nom est Hiriko... Quel est l'objet de votre lecture ? Est-ce une histoire passionnante ? »

Le serveur apporta ensuite un repas, proposant à Hiriko de prendre quelque chose. Dans un geste poli, il acquiesça et prit un simple thé avec du lait, attendant la réponse de son interlocuteur.

Intéressant ? Effectivement, cela avait l'air d'être un livre intéressant. Toujours les yeux clos, Hiriko lui fit un sourire sincère, écoutant attentivement les explications sur le thème de ce livre.

« Effectivement, cela m'a l'air très passionnant et instructif. Malheureusement, ce sont généralement les victimes de guerre qui lisent ce genre de livre, et non ceux qui les provoquent... »

Déposant son propre ouvrage sur la table, il écoutait la suite de la réponse de tout ce qui avait l'air d'être un Samouraï plutôt atypique avec ce nombre plus qu'imposant de sabre. Un style de combat bien particulier et bien propre, ce qui faisait de lui un être relativement fascinant dans cette foule d'habitants et de citoyens ordinaires, se rejoignant le soir et fêtant la fin d'une dure journée de travail.

Il se nommait Takusanken. Un nom bien long, ce qu'il semblait reconnaître puis-ce qu'il demanda à Hiriko de l'appeler Taku. Chose qu'il ferait, bien évidemment. Tout cela, avant de lui répondre qu'il aimait le bruit d'une foule polie pendant la lecture, bien moins déstabilisant que le silence long et angoissant de l'absence de vie.

« Et bien c'est une question d'habitude j'imagine. Pour m'a part, j'ai peu de mal à lire dans un endroit en absence de son extérieur, hormis celui de votre imagination... »

Écoutant la suite du discours de sa nouvelle connaissance, Hiriko en profita pour boire une gorgée de thé. Ce dernier le questionna sur ce qui l'amenait ici, et sur sa tenue vestimentaire elle aussi, atypique, avant de s'excuser s'il allait trop loin. Riant, dans un rire clair et aspirant à la sympathie, Hiriko reprit.

« Ne vous inquiétez pas, cela ne me gêne en aucun point. Je vis bien ici, enfin, un peu partout mais je suis en séjour à Yu no Kuni actuellement. On peut dire que je suis une sorte de citoyen du monde qui aime observer et comprendre ce qui l'entoure, et ceux, principalement par la lecture mais aussi par l'observation. »

Lecture de livre, lecture des mouvements ou lecture d'esprit ? Cela n'avait aucune importance, il continua.

« J'aime marcher sans vraiment avoir de but, et me diriger vers des endroits nouveaux que je ne connais pas encore. La soif d'apprendre, que voulez-vous ! D'autant plus que je suis en train de suivre une histoire passionnante... »

Le Nouzagi lui fit un sourire, avant de demander à son tour.

« Et vous, que faites-vous ici ? Je dois dire que votre équipement est bien lourd pour que vous soyez un simple citoyen... Vous êtes à la recherche de quelque chose en particulier ? D'un travail ? Peut-être êtes-vous mercenaire ? »

Une suite de questions qui demandait en réponse une certaine... Argumentation.

Le repas continu alors que Hiriko m’explique qu’il est à la fois de la région et un nomade. J’acquiesce, sans en demander d’avantage, dévorant ma soupe entrecoupant le tout de quelques lampées d’alcool.

« Oh, non, pas un mercenaire, » dis-je en laissant apparaître un sourire amusé. « Je suis membre d’un groupe promouvant la paix et aidant les gens nommé le Zen’Ryou. Donc, accepter n’importe quoi comme mission n’est pas réellement dans mes valeurs! »

Je hoche rapidement de la tête.

« Non, je suis ici pour investiguer sur une rumeur! Vous voyez, mon village est maintenant détruit, mais les habitants qui y restaient seraient peut-être en vie. En fait, j’ai la certitude que certaines d’entre eux le sont! Je dois les retrouver! Donc, la rumeur est qu’ils soient cachés quelque part dans une grotte. Mais, des montagnes, il y en a beaucoup! Ainsi, je cherche la source de la rumeur qui, semblerait-il, est un homme du coin. Il s’agirait d’un marchand ambulant qui fait la route jusqu’à Kumo et Konoha. »

Je sors un morceau de viande encore plus gros que les autres et en déchire un morceau avec mes doigts avant de le mettre dans ma bouche. Je m’essuie aussitôt les mains et les coins des lèvres. Délicatement, je repousse mon plat, attrape la coupe, fait tourner un peu le vin et en prends une gorgée.

« Dites-moi, monsieur Hiriko, restez-vous dans cet établissement pour un moment? J’aime bien parler et découvrir de nouvelles personnes! Aussi, j’aimerais en apprendre sur vos voyages! Les aventures des gens m’intéressent tout autant qu’en avoir moi-même! »

Je marque une pause durant laquelle je me replace sur le banc.

« Si vous voulez, je peux demander une nouvelle bouteille! »

Je le fixe, mais son regard ne semble pas comme le mien. Il semble perdu dans ses pensées ou regarder quelque chose que ma personne. J’ai l’impression qu’il cherche à comprendre plus loin que simplement mes paroles. Néanmoins, gardant le sourire, j’attends sa réponse.

Il n'était donc pas mercenaire, mais plutôt d'un groupe portant le nom de Zen'Ryou. Un des multiples groupes probablement à petite échelle, qui prônait la paix dans ce monde. Ce genre de groupe, relativement pacifiste, et donc sans réelle incidence sur le monde, dont la principale faiblesse était le manque d'action. Où plutôt, la peur d'agir pour cause des répercussions. Faiblesse que n'avait pas le Shôraizen, simplement car celui qui était à sa tête n'avait pas peur de se salir les mains, ni de voir son image entachée à vie.

Il voulait en savoir un peu plus sur lui. Après tout, pourquoi pas. Hiriko avait le temps. Actuellement, il se passait une guerre entre le Shôraizen et l'épée du Dragon. Pour sa part, le Nouzagi n'y participait pas. Ce n'était pas un homme d'action comme Seitô, mais un homme de réflexion. Après tout, n'était-il pas celui qui complétait le mieux le Sabakyô ?

« Ne vous inquiétez pas, j'ai tout mon temps ! Et bien, pourquoi pas vous racontez le voyage que je suis actuellement ? »

Il laissa s'échapper un simple rire, avant d'accepter l'offre de son interlocuteur.

« Et bien pourquoi pas un bon rouge ? »

Après avoir commandé et se voir servir le rouge dans un beau verre à vin, Hiriko prit un ton clair, comptant son histoire.

« C'est l'histoire d'un enfant. Sa mère, la mort, l'avait mis au monde avec son père, un Ange aspirant à la Justice, et ce petit être fut envoyé sur Terre afin d'accomplir le dessein de son créateur. Mais voilà, bien qu'il aspire à la paix et à l'amour, son côté d'ange déchu le mène inévitablement à la mort... Aujourd'hui, je la suis avec une certaine attention. Il faut le dire, j'aime beaucoup cette histoire ! Et je ne suis pas arrivé encore au dernier tome ! »

Puis, il se figea un instant. Une sensation de reconnaître et de sentir chaque membre du Shôraizen dans son cœur, dans sa tête, dans son âme. La profondeur d'une blessure si forte, et l'apparition d'un mauvais présage. Son verre à thé se fissura sans réelle raison, tandis qu'il se leva avant de se diriger vers la sortie...

« Je suis désolé, je dois vérifier quelque chose. Merci de votre compagnie, elle fut agréable... »

Et il partit, lentement en direction du Shôraizen.

Hep: