J'avais traversé les différents chemins, plus ou moins sombres, de Konoha. Cela fait quelques temps que les questions se bousculent dans ma tête comme le rassemblement de plusieurs branches au fond de la rivière. Cette satanée mélancolie me collait toujours à l'esprit. A moins qu'elle soit le produit d'une maladie, au coeur? Ce mal-être récurent n'avait pas lieu d'être et pourtant il perdurait comme une tâche désagréable et collante dure. Je ressens un bonheur fade et plus dû à un conditionnement qu'un réel sentiment humain lorsque je croise des amis, des connaissances, même ma famille. Il me semble percevoir en un point clé de mon coeur toute la noirceur de notre monde. Alors que j'accomplis de futiles missions, d'autres crèvent le fer dans la paume, les yeux vitreux et la bouche ouverte.
Je fais souvent un rêve, celui du majestueux soldat aux cheveux couleur ébène, il porte l'armure des anciens. Celle des combattants de l'âge des clans, rouge foncée. On n'aperçoit clairement les traits de son visage tiré et pourtant le flou règne sur ce faciès inconnu. Je n'en ai jamais vu de tel, à vrai dire. Et lorsqu'il me regarde, dans cette illusion des nuits, je peux percevoir toute la tristesse des êtres dans ces yeux qui s'effacent à vue d'oeil. Je le crois aveugle. Souvent, il me regarde et ses pupilles me disent de continuer le travail. Puis il part, les talons tournés, et s'éloigne accompagné des bruits de vacillements du fer des armes qu'il porte sur sa taille. Puis, je n'ai plus qu'à le suivre de mes yeux d'enfants fragiles face à ce guerrier marqué de toutes parts. Son ombre reste et sa silhouette s'efface doucement dans un éclair lumineux au loin.
Si je parle de ce rêve, c'est car il est l'unique motif d'émotions et de sentiments. Je me sens si plein face à ces visions nocturnes que, parfois, j'aimerai me voiler l'esprit de genjutsu capable de rendre éternellement vivant ces images, ces sons et sensations.
J'ai entamé maintes recherches après ça. Personne dans les livres que j'avais lus, que j'étais susceptibles d'avoir croisé, ne correspondait au schéma de l'Homme. Les légendes écumées, les livres d'histoires fouillés, alors que j'allais me résigner, je pris la décision d'aller voir ailleurs que dans les pages froissées de quelques bouquins. C'est la raison pour laquelle je me trouve ici, face à ces statues majestueuses.
-Qui suis-je? Entouré d'énormes monuments à l'image de nos dirigeants et grands Hommes, je me sentais l'âme d'une feuille, petite et insignifiante mais bien présente parmi les grandes âmes. Je m'arrête devant la statue du Rokudaime, je ne pus m'empêcher de le saluer, stupide salue auquel nous sommes si attachés. J'étais conditionné et je le réalisais, par les signes militaires et la vie en guerre, et pourtant que savais-je de la vie? Cette agacement perpétuel n'avait de cesse de m'écorcher l'âme. D'un coup, je lève les yeux au ciel et imagine la mort.
Voilà, j'ai passé les grandes têtes et personne ne m'inspire. Malgré ma politesse légendaire, je me dis que ça faisait vraiment chier d'être malheureux et de ne pas trouver de réponses à la petite chance qu'on a de découvrir un but dans sa vie.
Pour la situation dans laquelle j'étais, se réduire à visiter les étages inférieurs n'avait rien de dégradant. Alors j'y vais, tout en me remémorant du mieux que je peux ce rêve. C'est assez sombre, du moins c'est la perception que je m'en fais. Ce qui me frappe, c'est qu'ici la nature n'a plus les droits. Ce Colisée géant, vide pour l'instant, où je suis seul face à des statues sans vie mais chargée d'aura, me donne l'impression de connaître l'histoire. Je passe devant une statue, une autre, une troisième un peu plus classe mais tout aussi inintéressante quand on sait la raison de ma présence ici. Puis, comme un symbole, un petit rayon lumineux s'échappa du dehors pour frapper de son éclat une armure, tout au fond. J'en approche. Alors que mes pas se font, ma vision me révèle de plus en plus le monument. Il est marqué quelque chose, très dur à lire. C'est lui. Je courbe l'échine et tente de déchiffrer son nom. Samidare Teichirô. Je lève mes yeux vers sa figure fière, mes cheveux penchent en arrière, une sensation de chaleur m’envoûte alors. Stoïque car en cristal couleur de bronze, j'avais enfin un nom sur le combattant qui s'en va, chaque nuit nourrie d'illusions.
Rien d'autre n'était noté, mais son nom suffisait déjà. Je me sentais revivre l'espace d'un instant, voire deux.
-Qui es-tu? 
