♫:

Mon orthographe laissait vraiment à désirer. Bon ça je le savais depuis un bon moment maintenant mais je n'avais jamais jugé utile d'y remédier. D'une part parce que je prenais la plume uniquement lorsque je le devais et d'autre part car je n'en avais tout simplement rien à foutre. Mais depuis que j'avais décidé de me spécialiser dans l'utilisation des sceaux j'avais vite compris que je devais faire des efforts dans ce domaine si je ne voulais pas voir chacun d'eux m'exploser à la tronche car mal rédigés. C'était donc plus une nécessité qu'une véritable envie de m'améliorer. Les règles d'orthographe et de grammaire me passaient largement au-dessus de la tête et puis je n'étais pas réellement motivé par apprendre toutes les subtilités de notre langue...

Mais j'avais tout de même un peu honte du désastre que représentaient chacune de mes trop rares lettres et l'usage du Fuinjustsu ne me laissait désormais guère le choix. J'avais été m'acheter un livre sobrement intitulé: "Orthographe et conjugaison: comment éviter les erreurs courantes!". Et depuis je prenais sur mon temps libre pour en lire quelques pages chaque jour et ainsi progresser dans ce domaine si compliqué qu'était la rédaction d'un texte correct. Le soucis c'est que je ne retenais pas grand chose de ce que je lisais et je m'entraînais beaucoup moins que j'aurais dû le faire. Mais bon, je progressais tout de même à mon rythme et c'était toujours ça de pris.

Toutefois j'avais besoin de tranquillité pour me concentrer et l'agitation ambiante de Suna ne favorisait guère cet état d'esprit. J'avais donc décidé depuis quelques jours d'aller m'isoler dans le désert à chaque fois que je souhaitais améliorer mon écriture. Il y faisait chaud et ce n'était pas vraiment l'idéal pour étudier. Mais personne ne me voyait et, donc, pouvait se moquer de moi. Et puis cet océan de sable était calme et c'était précisément ce dont j'avais besoin. Pour peu que j'ai suffisamment d'eau pour m'hydrater et de quoi sustenter mes besoins les plus élémentaires, je me satisfaisais complètement de cette situation. Après tout j'étais un Akuzu et mon clan était réputé comme nomade avant que ce dernier rejoigne Suna. J'étais parfaitement dans mon élément...

Aujourd'hui j'avais ma journée de libre et avant de combattre en soirée j'avais décidé de me rendre dans un endroit que j'appréciais particulièrement, situé entre de hautes dunes de sables. Cachés à la vue d'éventuels et trop rares caravaniers, j'étais certain d'être en paix. J'avais déplié une couverture tenant plus du tapis sous mes fesses afin d'éviter le contact avec le sable brûlant. Quelques parchemins s'étalaient devant moi, me servant à apposer des esquisses de sceaux en développement ou simplement à écrire des textes que mon livre me conseillait. J'avais évidemment une bouteille d'alcool avec moi, on ne change pas une équipe qui gagne. Et puis une habituelle cigarette rehaussée d'herbe au coin des lèvres. Bon d'accord ce genre de drogue ne favorisait guère la concentration mais c'était ainsi, j'avais besoin de mêler plaisir et travail...

Un léger bruit de sable qui s'écoule attira mon attention et je tournai le regard vers un parchemin qui roulait vers moi avant de s'arrêter sur mon flanc. Remontant la trace qu'il avait laissé je tombai sur un gamin ou plutôt un adolescent qui semblait tout aussi surpris que moi de trouver quelqu'un ici. Vous avez déjà remarqué? C'est quand vous souhaitez être tranquille que le destin semble prendre un malin plaisir à faire en sorte que vous soyez dérangé. C'était sûrement ça qu'on appelait de l'ironie?

L'autre s'exprima avant moi et m'interpella d'une manière que la politesse réprouve. Je n'étais de loin pas un génie dans ce domaine mais j'avais tout de même quelques bases lorsqu'il s'agissait de s'adresser à un inconnu. Et spécialement lorsqu'il était plus âgé que moi et que la logique voulait qu'on se montre donc courtois. Un peu de respect ne fait jamais de mal, spécialement envers les inconnus. On ne sait jamais qui on peut offenser en agissant avec si peu de tact. J'étais bien placé pour le savoir, d'ailleurs. Je ne répondis pas de suite et haussai le sourcil surplombant mon œil valide sans quitter du regard le nouvel-arrivant. Ce dernier reprit la parole pour me demander... Non, m'ordonner de lui ramener son parchemin. Non mais il se prenait pour qui celui-là? Je n'étais guère tolérant et encore moins patient, même lorsque j'étais à peu près sobre.

Je me redressai lentement et jetai un regard à l'objet désiré par le gosse avant de me baisser pour le ramasser puis le soupeser. J'avais presque envie de l'ouvrir pour voir ce qu'il contenait mais d'un autre côté ce n'était pas mes affaires pas vrai? Je relevai le regard vers l'inconnu et levai le bras pour le tendre dans sa direction.

- "Tu le veux?" demandai-je par pure rhétorique. "Ben va le chercher alors!"

Je pivotai pour le lancer à l'opposé de la direction du nouvel-arrivant histoire de bien lui faire comprendre ce que je pensais de la prestation qu'il m'avait servie avant de l'observer de haut en bas. Il ne portait pas de signes distinctifs le reliant à un quelconque village mais ça ne signifiait pas pour autant qu'il n'était affilié à aucun d'eux. Moi-même je masquais souvent le symbole de Suna sous mon manteau à capuche. Donc bon...

- "Et je ne suis pas Celui qui n'est pas toi mais Shinji! La prochaine fois commence par te présenter et faire preuve de politesse si tu attends en retour un minimum de respect!" corrigeai-je rapidement. "Y'a plus de jeunesse!"

Bon du haut de ma vingtaine j'étais plutôt mal placé pour sortir ce genre de phrases. Je me rassis en tailleur sur ma couverture en réprimant un sourire. La situation m'amusait à vrai dire et j'étais assez curieux de voir comment le gamin allait réagir. Je rallumai donc ma pseudo-cigarette avant de reprendre le cours de ma lecture. Le tout en restant attentif aux mouvements du nouvel-arrivant. Il s'agissait de ne pas se faire attaquer sans voir venir le coup pas vrai? Et à en juger par le comportement agressif de l'enfant, un affrontement n'était pas à exclure...

L'univers aride de ces terres vit ainsi l’accueil sec d'un Sunajin. Il fit une arrivée tonitruante mais pourtant, Akage aurait pu trouver un brave comparse, un comparse agréable qui l'aurait immédiatement guidé vers la destination tant recherchée. Mère Destinée s'en était mêlé. Akage avait enduré la jungle aride, ce terrible environnement de sable et de mort. La rencontre qu'il fit avec ce ninja en fut chamboulée. Mauvais comportement. Mauvaise journée tout simplement. Akage avait pris position sur les hauteurs, et avait donc beuglé sur son nouvel « ami ». C'était loin d'être l'attitude qu'il avait par les temps habituels. Au contraire, le marionnettiste avait l'habitude d'être plus éloigné des affaires de ce monde, d'être froid avec l'ensemble des gens. Ce n'était que justice. Ils ne méritaient pas qu'on leur prête une attention profonde. Du moins, c'était vrai pour la plupart.

Akage était donc intervenu, après une journée épuisante, auprès d'un ninja mystérieux. Perdu dans les étendus désolantes du pays du vent, deux shinobis se faisaient officiellement face. Dans de nombreuses situations, une telle aventure se termine souvent par un combat, par un affrontement mortel pour une des deux parties. Ainsi, en connaissance de la nature humaine, le Chikamatsu se prépara mentalement. Peut-être aurait-il à sortir ses propres -ou plutôt son propre- atouts. Mais au final, au regard de son objectif, l'affrontement n'était pas souhaitable. Il le savait pertinemment. Mais la question avait le mérite de lui traverser l'esprit. Il fallait prendre en compte qu'il ne connaissait pas son comparse, mais il avait de lui-même compris que son attitude provocatrice et agressive n'était pas une bonne solution. Passer de longues heures dans une environnement hostile change les hommes, comme la guerre.

Son nouvel ami se releva doucement, lentement. Il ramassa le parchemin blanc. Ce dernier contenait « les trois perles », des marionnettes inutiles créées, quelques générations précédemment. C'était un des fameux trésors du clan Chikamatsu dont la valeur était inestimable bien qu'Akage trouvait ces pantins complètement inutile, car difficilement maniable pour un marionnettiste. Il n'en demeurait pas moins qu'elles étaient en route pour être confiées au village de Sûnagakure, et ceci en signe de participation du clan Chikamatsu. Ce dernier n'avait envoyé que peu de shinobi afin de gonfler les troupes militaires du pays, et il était apparu nécessaire de faire quelques sacrifices afin de justifier la participation -fut-elle légèrement désaprouvé-. L'homme jeta alors le parchemin, ôtant les pensées familiales de la tête de Akage. Ce dernier fut surpris d'une telle réaction. Le ninja avait-il jugé le parchemin sans valeur ? La réponse fut rapide.

« Sérieusement ? » Entre résignation et incompréhension, la réaction vocale prompte de Akage ne se fit guère attendre. Elle était le symbole de sa réaction à l'action, et à sa justification.

Akage n'en croyait pas ses yeux. L'homme déblatéra alors des balivernes. Ô combien de fois Akage avait-il entendu parler de respect.. Conception intéressante dans un monde violent. Le respect est inutile. Le respect n'est que sottise. C'était la vision d'Akage, lui qui avait tant entendu parler de ce fameux respect. Son père avait manqué de respect au clan. Son père avait perdu, était mort. C'était un manque de respect envers le clan. Inconsciemment, on se jure alors de ne plus respecter quoi que ce soit. C'était la personne qu'avait juré de devenir Akage. Il était hors de question d'être comme cet homme, de croire -et surtout d'attendre des autres qu'ils croient- en des valeurs aussi désuète, aussi inapte que le respect et la politesse. La seule vérité de ce monde, c'est que celui qui imposer sa volonté sera celle qu'on écoutera, qu'on plébiscitera. Il en résulta que désormais les « Trois Perles » étaient à terre.. encore. Le regard d'Akage se posa sur ce parchemin jeté à même le sable. Il pensa alors immédiatement aux vieux sages et à leur colère si jamais il devait apprendre le traitement infligé à ce trésor. Cette pensée lui glaça le sang. Ses yeux fixèrent alors son imbécile d'interlocuteur. Il le dévisagea et l'observa s'asseoir, faire comme s'il ne s'était rien passé. Il paraissait évident qu'il avait un sacré sang froid, peut-être était-ce une raison de le respecter, mais Akage n'était pas ce genre de personne.

« Respect ? Politesse ? Mais t'es un papy de soixante-dix ans ou quoi ? » Il fallait avouer que faire preuve de respect n'était pas la caractéristique primaire d'Akage. Son caractère indépendant et son attitude proche de l'égocentrisme ne lui laissaient guère de place pour ses considérations faiblardes. Village caché, paix souhaitée, c'était des bêtises pour Akage. Sa mère l'avait nommé « l'ombre du démon ». Dans ce monde, il fallait être fort, juste fort.

Malheureusement, la force ne suffisait pas. Les marionnettistes le savaient. Ils avaient tous acquis, principalement de force, une intelligence tactique avec leurs expériences. C'était nécessaire pour survivre. Mais intelligence tactique ne voulait pas dire intelligence. Et Akage se fit une joie de venir l'illustrer en parole.

« Attends une minute. » Akage marqua une légère pause. Il acta vraisemblablement une réflexion aussi poussée qu'un arbre dans le désert aride de cette contrée maudite. « Si tu n'es pas celui qui n'est pas moi.. » Le marionnettiste marqua une pause volontaire cette fois. « C'est que tu es moi. Tu es une sorte de mirage, ou t'es juste incroyablement stupide ?»

La réflexion d'Akage s'illustra -outre par sa stupidité- par son ton provoquant, ironique et sarcastique. C'était une provocation à peine dissimulée. Akage n'avait bougé d'un seul centimètre depuis les déclarations de Shinji, et il ne comptait pas bouger plus désormais. Il est difficile de voir les motivations derrière un tel refus, mais c'était évident qu'Akage avait quelque chose à se prouver.. ou alors, il n'aimait pas qu'on lui dise non. Quoi qu'il en soit, il était là. Ici, dans le désert.

« De toute manière, il n'y a aucune chance que tu puisses te repérer dans le désert.» Cette fois-ci, Akage n'imita point le comportement de son père décédé qu'il idolâtrait voilà quelques années. « T'es aussi perdu que moi ! Créétin ! »

Concluant sur cette magnifique provocation, Akage attendit la réponse de son adversaire verbal du jour. Son attitude s'était dramatisée. Il se tenait droit. Sa cape laissait le vent rebondir sur elle, et dans une bruissement agréable donnait une attitude charismatique à Akage. Ce dernier allait probablement se passer les nerfs sur Shinji, mais au fond il devait absolument l'amener à le conduire à Sûnagakure. Fort de son expérience avec les enfants insolents, il s'essaya à la même méthode, celle qui marchait si bien avec ceux qui réclame le respect de tous.. l'égo.

Le concept de respect semblait donc complètement passer au-dessus de la tête de ce gamin puisqu'il me demanda en retour si j'avais soixante-dix ans, cherchant visiblement à me piquer par cette remarque. Je ne m'attendais pas à ce qu'un enfant comprenne ce que ça mot impliquait ou même ce qui en découlait. Le respect était la chose la plus importante dans ce monde. Une manière de se faire apprécier ou même de convertir les gens à votre cause s'il était couplé au charisme. Sans respect c'était l'anarchie, la porte ouverte à la guerre ou à la violence. J'avais mis du temps à le comprendre et depuis que j'avais vu les ravages que des affrontements à grande échelle pouvait causer j'avais finalement saisi quelle importance ce concept avait. Plus que les bases d'une relation saine entre deux personnes, il représentait la meilleure façon de garantir la paix. Et si les tyrans gouvernaient par la peur, les dirigeants les plus avisés érigeaient le respect en dogme. Il n'y avait rien de plus puissant qu'un Kage qui se faisait obéir par son peuple grâce au respect que celui-ci lui vouait et non par la crainte qu'il leur inspirait.

*Te voilà bien philosophe aujourd'hui... Ça ne te ressemble pas!* songeais-je alors avec un léger sourire au coin des lèvres. *Peut-être que cette herbe est plus puissante que tu ne le pensais finalement!*

Quant au gamin, j'estimai qu'il était préférable de ne pas lui répondre. Je m'occupais d'enfants à peine moins âgés que lui et j'avais raidement compris qu'il ne fallait guère tomber dans leur jeu. L'obstination de ces adolescents à obtenir le dernier mot était telle qu'ils sortaient bien souvent vainqueurs. Non car leurs arguments ou remarques étaient plus judicieuses mais bien parce qu'ils n'abandonnaient pas avant d'atteindre ce qu'ils considéraient comme une victoire: l'abandon de leur interlocuteur. Et puis j'avais passé l'âge de me prendre la tête avec un prépubère...

Je ne levai donc pas les yeux de mon livre et poursuivit ma lecture - ou plutôt je fis semblant de la poursuivre - car avoir ce briseur de tranquillité à côté de moi ne favorisait guère ma concentration. Néanmoins si je faisais semblant d'être animé par le sang-froid le plus absolu et que je faisais de mon mieux pour donner le change, ce gamin commençait à m'irriter. Et je n'avais rien contre le fait de distribuer quelques claques pour obtenir une certaine forme de... respect! J'avais presque tendance à oublier qu'il se méritait et n'était pas indu. Mais d'un autre côté il pouvait se gagner de bien des façons! Et une correction physique était l'un de ces moyens...

L'autre se lança dans une réflexion quant au fait que si je n'étais pas celui qui n'était pas lui, j'étais forcément lui. Il n'avait pas tort si l'on cherchait à rester terre à terre mais je savais qu'il avait compris ce que je cherchais à dire. Ce n'était qu'une manière de plus de me pousser à bout comme s'il cherchait absolument à me pousser à bout. À ce rythme il allait rapidement arriver à ses fins, à n'en pas douter. Mais il aurait alors sûrement le temps de regretter d'y être parvenu lorsque mon poing s'écraserait sur sa tronche. Je levai les yeux vers lui et haussai un sourcil comme pour lui témoigner mon manque d'intérêt alors que j'avais de plus en plus envie de me lever pour lui botter les fesses. À défaut je tirai une longue bouffée sur ma cigarette avant de cracher la fumée dans sa direction.

- "Ça ne se voit peut-être pas mais j'essaie de lire! Si je suis venu ici c'est pour être pépère, pas pour me taper la causette avec un jeune freluquet qui n'est même pas capable de garder un parchemin dans ses mains pleines de doigts. En d'autres termes ça veut dire quelque chose comme dégage, fous le camp ou encore hors de ma vue!" fis-je en gueulant cette dernière proposition. "À toi de choisir ce qui te convient le mieux!"

Mais l'autre ne semblait pas décidé à me lâcher la grappe et je sentis peu à peu mes maigres réserves de patience fondre comme neige au soleil. Aussi lorsque ajouta que je n'avais aucune chance de pouvoir me repérer dans le désert, ajoutant que j'étais perdu et me gratifiant d'une insulte, je refermai d'un claquement sec mon livre et me redressai face à lui. Pourtant ce ne fut pas un coup qui parti mais bien un sourire carnassier qui s'afficha sur mon visage qui n'avait plus rien de neutre.

- "Félicitations, tu as touché le gros lot! Puisque tu veux jouer, on va jouer!"

Je tendis mon bras en direction du parchemin toujours sur le sol et ce dernier se mit à s'allonger de manière à ce que je puisse le récupérer sans bouger de ma position. Je rétractai ma chaire une fois que je l'eus en main avant de le soupeser à nouveau puis passer mon regard de ce bout de papier à mon interlocuteur.

- "Si j'étais perdu tu penses que je serais tranquillement assis ici à fumer un pétard et à lire un livre au lieu d'essayer de trouver un oasis ou quelque chose qui soit susceptible de me sauver la vie? Mais puisque tu sembles convaincu que c'est le cas je te propose un petit défi!"

Je fis sauter plusieurs fois le parchemin dans ma paume de manière à ce que le gamin ne puisse s'en emparer si toutefois c'était dans ses intentions. Je ne savais pas vraiment s'il tenait à son bien mais puisqu'il avait semblait agacé lorsque je l'avais balancé ce devait être plus ou moins le cas. Je terminai mon pétard d'une dernière bouffée avant de l'éteindre puis le glisser dans ma poche. Puis j'expliquai enfin ce que j'avais en tête:

- "Donne-moi n'importe quelle destination à l'intérieur des frontières de Kaze et si je t'y mène et que j'ai raison tu me donnes ce truc en échange! Si je me trompe je veux bien reconnaître que je suis perdu et te le rendre! Refuse et je le réduits en pièces dans l'instant! À moins que... tu t'excuses à genoux, tête contre le sable! Dans ce cas j'étudierai la possibilité de te donner ce qui t'appartient! Enfin, peut-être..." proposai-je avec un air amusé. "Sinon il y a évidemment une troisième option: tu peux toujours essayer de me le prendre de force! Mais entre nous je te le déconseille. Si tu tiens à continuer à marcher en tout cas! Dans le cas contraire sens-toi libre de m'attaquer..."

C'était une chose d'user de l'insolence et une autre de l'assumer. Les adolescents profitaient souvent de leur jeune âge et de la morale qui réprouvait qu'on les frappe pour se montrer incisifs. Mais je n'étais pas de ceux qui se laissaient marcher sur les pieds et ce quel que soit l'âge de l'indélicat. Puisque le nouveau-venu avait opté pour la confrontation verbale il était temps de voir s'il était de ceux qui allaient jusqu'au bout ou qui baissaient le regard quand les choses s'envenimaient. J'étais assez curieux de voir sa réaction et surtout de connaître son choix...

Insolence. C'était le mot. Akage avait été insolent. Il était traditionnellement irrespectueux, parce qu'il détestait l'idée même du respect. Il voyait tous les jours ce que ce mot signifiait. Guerre. Violence. Répudiation. C'était une notion abjecte, et elle n'était pas digne d'un monde qui prônait la paix. Néanmoins, Akage savait faire preuve de respect quand il le fallait, lorsqu'il y était obligé. Nul ne pouvait se permettre d'être irrespectueux à l'égard de tout le monde. Mais cette notion même d'irrespect à l'égard du monde qui l'entourait, elle était avant tout justifiée par son histoire personnelle. Akage avait assisté à la déchéance du nom de son père. Éminemment respecté de son vivant, il avait vu les vautours du clan cracher sur le nom lors de mort. Le respect était une idée qui engendrait des affrontements, et souvent Akage avait « refait le portait » aux enfants de sa génération qui crachait sur le nom de Shimatôki Chikamatsu. Il n'avait jamais hésité à serrer le poing, et il était pourtant le premier à reconnaître la décadence de son père, fut-il vivant ou mort. Il en demeurait qu'en vertu du respect, ou du manque de respect, Akage avait déjà dû faire preuve de violence. Et c'était ainsi qu'allait le monde..

C'est ainsi que Shinji « Dieu seul sait son nom » reprit sa position accueillante de départ. Il avait pris le soin de se débarrasser du rouleau contenant un des trésors du clan Chikamatsu. Assis sur une sorte de couverture, Shinji lisait. Akage ne put s'empêcher de penser que c'était une occupation digne, mais dans le désert c'était un peu inutile. Akage veilla alors que son « nouvel ami » ne puisse trouver la concentration, et très rapidement, il ferma son livre dans un bruit retentissant. C'était une victoire pour Akage, au moins une. Il eu alors droit à une violente réplique lui demandant de partir. Akage se demanda s'il pouvait, à ce moment-là, crier sur Shinji en retour comme quoi il ne savait pas où aller. En même temps, et cela relevait du bon sens, si le ninja sunajin prenait le temps de le guider, les deux ninjas seraient gagnants. Mais le bon sens semblait avoir été immédiatement anéanti par ce qui semblait être de la colère. Assez ironiquement, la rencontre en les deux jeunes gens avait été source d'un profond ressentiment l'un envers l'autre.

Shinji, toujours assis dans sa position de lecture -mais avec le livre fermé-, étira soudainement son bras. Son bras, tendu et allongé, attrapa rapidement le parchemin qu'il avait envoyé valser quelques instants plus tôt. Serrant l'objet divin, il le ramena vers sa personne, ce qui ne manqua pas de faire réagir Akage.

« C'est vraiment dégueulasse comme technique. »

Petite réaction de dégoût, Akage compara rapidement la technique à celle d'un serpent. Les techniques corporelles étaient donc de cette nature ? En tout cas, il la trouva répugnante. Elle lui fit néanmoins également penser à toutes les marionnettes dont certaines parties étaient extensives. Il avait mis, lui-même, longtemps à comprendre le fonctionnement des parties extensives. Malgré tout, dans le cadre d'une marionnette, l'extension était artistique ; dans le cadre d'un humain, c'était juste dégoûtant.

Shinji, le ninja de Sûna, se permit alors de poser un défi. Akage n'en fut absolument pas intéressé. Il posa alors immédiatement son gros parchemin, celui qu'il tenait jusqu'à présent sur le dos, directement sur le sable. Le bruit fut sec, et l'attitude laissa transcrire un intérêt digne d'un grand charlatan. Akage voulait récupérer son bien. Il avait beau être qu'un parchemin sans valeur pour lui, il restait évident que c'était un cadeau à l'intention des hautes sphères du village caché. Le vieil homme à la tête du clan, le « Grand Sage » des Chikamatsu, avait confié une mission simple à Akage. Il se devait d'apporter le parchemin contenant « les trois perles » dans le village caché des Sables, SûnaGakure no satô, afin de transcrire officiellement la fidélité et la participation du clan Chikamatsu au projet des sables. Pour se faire, Akage avait été choisi. C'était inexact. Il s'était imposé, et l'opportunité de le voir quitter les siens fut l'élément probant qui convainquit le Grand Sage. Ainsi, il avait dû voyager dans le désert, et l'orientation n'était pas son fort. Toujours est-il que parier sa mission sur la capacité d'un autre à se repérer pouvait paraître dangereux.

Akage songea alors à accepter le défi, et à éliminer Shinji en cours de route. Néanmoins, il raya cette optique de son petit cerveau en ébullition. Non seulement, il reviendrait à la case départ, mais il ignorait véritablement l'identité de Shinji. Avec sa chance, le ninja pouvait être le fils d'un grand personnage, respecté dans tout le pays; et avec l'animosité avec les notables des Chikamatsu personne ne pourrait le protéger. Vivre en déserteur était une perspective que ne l'attirait que peu. L'élimination de Shinji n'était donc pas une solution, d'autant plus que l'homme semblait fort. C'était un plan qui pouvait se montrer à double tranchant. Le défi, en l'espèce, était donc inacceptable.

« Je décline ta proposition. »

Ainsi, Akage se contenta de refuser la proposition, sans rien préciser. Mais dans sa tête, il lui paraissait évident qu'il devait calmer le jeu. L'animosité ambiante commençait à lui jouer un drôle de tour. Que faire ? La question se posa à de multiples reprises dans la tête du ninja des sables, enfin du futur ninja. Il n'avait pas le choix. Il devait convaincre Shinji de lui prêter sa force pour qu'il puisse accomplir sa mission, et cela sans paraître vaincu.. Il avait sa fierté après tout.

« Sais-tu ce qu'est ce parchemin ? »

Akage avait choisi son cheval de bataille. Il lui paraissait extrêmement mauvais, mais il était à court d'option. Le jeune ninja avait peut-être laissé le soleil lui taper sur la nuque, et il était probablement en mauvaise posture. Il comptait alors faire peur à son nouvel ami, espérant obtenir son appui.

« C'est une possession du clan Chikamatsu. On m'a confié la tâche de le donner aux hautes sphères du village caché des Sables. » Comme son père en avait l'habitude, Akage marqua une petite pose. « Peux-tu te permettre de voler ce bien ? »

Akage usa de la peur, et il espérait réellement que la perspective d'être vu comme un voleur par les hautes autorités du Pays du vent suffirait à faire tourner le vent en sa faveur. Akage abattit alors sa dernière pièce.

« Tu pourrais également m'aider à amener ce dernier au village. Je veillerais à ce que ton nom soit cité dans l'accomplissement de cette tâche. »

Après la peur, c'était au tour de l'avarice d'être usé. Il espérait que l'appât du gain motiverait suffisamment Shinji afin qu'il lui prête son sens de l'orientation. Désormais, il fallait être humble.

J'étais parti du principe que le gamin allait accepter le défi que je lui lançais et pas qu'il refuserait. Je lui avais pourtant indiqué que je n'hésiterais pas à réduire en miette son précieux parchemin s'il déclinait la pseudo-offre que je lui avais soumise. Est-ce qu'il était sincère? Avais-je surévalué son attachement à son bien? Ou alors c'était une sorte de test pour voir si j'étais capable de mettre mes menaces à exécutions! Peut-être croyait-il que je bluffais et il voulait me prendre à mon propre piège. C'est possible, allez savoir! Les enfants de cet âge son particulièrement retors.

- "Bon ben si tu refuses je vais devoir détruire ton parchemin! Rappelle-toi que je t'avais laissé le choix quand tu en récupéreras les morceaux sur le sol mon pote!" répondis-je en haussant les épaules. "Et ne viens pas te plaindre, surtout! J'ai horreur des pleurnichards..."

Je m’apprêtais donc à détruire le rouleau quand l'autre me demanda si je savais ce que c'était. Hé bien à vrai dire, non! Je m'en foutais d'ailleurs! Mais au final il s'agissait peut-être d'un trésor qu'il valait mieux que je garde pour moi! Si je pouvais en tirer un bon prix ce serait dommage de le réduire en pièces, non? Je marquai donc un temps d'arrêt dans mon mouvement avant de hausser un sourcil.

- "Je n'en ai pas la moindre idée!" avouai-je. "Mais je suppose que tu vas me le dire? C'est un truc rempli d'images cochonnes ou quelque chose de ton âge?"

J'en avais un à son âge en plus! Mais mon oncle me l'avait confisqué en arguant que ce n'était pas digne d'un futur shinobi. Ha, je l'aimais moi ce parchemin grivois. Mais maintenant j'avais passé l'âge de m'imaginer des choses perverses puisque je les faisais! Donc bon... Bref! L'intéressé m'expliqua qu'il s'agissait d'une propriété du clan Chikamatsu et qu'il devait le remettre aux plus hautes sphères du village. Qui donc? La Kazekage elle-même? S'il se montrait aussi insolent en présence de ma senseï qu'avec moi il risquait fort d'avoir des problèmes le gamin. Un instant je fus tenté de le lui rendre juste pour le voir recevoir la raclée de sa vie mais je me ravisai. Peut-être qu'il bluffait, impossible d'en être certain! J'aurais sûrement agi pareil en des circonstances similaires.

- "Chikamaquoi?" répétai-je en fronçant les sourcils! "Connais pas! Et oui, je crois que je peux me permettre de t'en dépouiller! En admettant que tu arrives à te repérer, à éviter la mort par déshydratation et à rapporter à Suna que je te l'ai volé et bien... il faudrait encore le prouver! Et entre un jeune freluquet qui se fait un devoir d'être insupportable et un élève de la Kazekage, tu penses qu'on croirait qui juste par curiosité?"

En fait je mentais à moitié! Ma culture générale n'avait certes pas de quoi faire pâlir la plupart des gens et si je connaissais le désert comme ma poche il n'en était pas de même pour les clans mineurs du village. Néanmoins j'avais déjà entendu ce nom sans réellement arriver à me souvenir en quelles circonstances. Je n'avais jamais été bon élève et les cours théoriques n'avaient que rarement retenu mon attention. Mais le doute s'était insinué dans mon esprit au moment où il me proposa de l'amener au village à deux et de révéler mes mérites dans cette histoire. Intéressant!

J'avais une sale réputation au village, notamment car j'avais refusé il y a peu mon grade de Chûnin. Quoi que ce soit qui puisse un tant soit peu redorer mon blason était bon à prendre et pouvait infléchir l'opinion des gens à mon sujet. Si ce parchemin était si important on verrait alors mon action comme une bonne chose. Je baissa le regard sur ce parchemin en me demandant s'il valait mieux suivre mon envie ou plutôt la raison. Le choix était plutôt compliqué mais je finis par choisir la seconde option. Si le gamin mentait je n'aurais qu'à tout de même détruire son bien et ce serait réglé. Et dans le cas contraire je récolterais une partie des lauriers, me posant même en sauveur de cet insolent. Mais pour cela...

- "D'accord, faisons ça! Je vais te conduire au village! Mais quand je l'aurai décidé!" répondis-je finalement. "Les... hautes sphère du village peuvent bien attendre et puis elles ont très bien survécu sans se parchemin jusqu'ici! Donc je vais terminer ce que je suis venu faire ici et on partira en début de soirée!"

Je lui décochai un regard qui signifiait bien que ce n'était pas négociable avant de reprendre place en tailleur sur mon tapis.

- "Ha et je vais évidemment garder le parchemin sur moi tant qu'on sera sur le désert! Des fois que tu aies envie de me fausser compagnie ou poursuivre ton petit périple à l'aveugle dans le désert! Mais si tu veux continuer ton chemin ne te gêne surtout pas hein? Tu es libre après tout..."

Je glissai donc le parchemin dans ma sacoche à côté de mes kunaïs et autres armes de jets. Ce n'était pas par méchanceté que j'agissais ainsi mais plutôt car je n'étais guère enclin à laisser un gosse marcher vers sa mort même s'il était insupportable. C'était une façon de lui rendre service même si évidemment l'intéressé ne devait pas voir les choses de cette façon. J'avais prêté serment de protéger le peuple, même s'il était parfois chiant! Aussi il était de mon devoir d'agir ainsi!

J'entrepris de rouler un nouveau joint avant de l'allumer et reprendre le cours de ma lecture. Il pouvait bien faire ce qu'il voulait en attendant le soir mais il fallait qu'il reste plus ou moins silencieux tant qu'à faire. Sinon on retournait à la case départ. Aussi je cru utile d'ajouter quelques mots:

- "Ha et ça ne change rien au fait que je veux de la tranquillité! Alors je vais mettre en place un tarif! Tu parles, c'est une claque dans la gueule! Tu reparles, c'en est deux! Et ainsi de suite, pas besoin de te faire un dessins je suppose! Va jouer avec le sable ou trouve un autre truc pour t'occuper tant que c'est en silence!"

L'attente était souvent difficile pour les jeunes, j'en savais quelque chose. Je ne savais pas si ça le dérangeait ou pas mais je n'allais pas tarder à être fixé. C'était une manière de lui faire payer sa manière d'être sans pour autant refuser de l'aider. Il fallait bien que je trouve quelque chose pour me venger, pas vrai? Restait à voir si ça fonctionnait...

Les heures s'écoulèrent et je progressais plutôt bien dans ma lecture! De temps à autre j'écrivais sur mes propres parchemins pour mettre en pratique ce que je lisais ou alors je faisais une pause pour me rouler un nouveau joint. Entre ces deux principales occupations le temps passa plutôt vite et le soleil commença à décliner dans le ciel, annonçant l'heure du départ.

- "Ok, on bouge!" lâchai finalement en rangeant mes affaires. "T'en veux un peu?"

C'était bien un joint que je lui tendais. Déjà parce que ça ne me dérangeait pas de partager mais aussi parce qu'en étant drogué il allait peut-être se montrer plus sympathique ou carrément se taire. Ceci fait on prit la direction du village tandis que je me questionnais sur le clan de l'adolescent en essayant de me souvenir où je l'avais entendu. N'y parvenant pas je me tournai alors la tête dans sa direction:

- "Parle-moi un peu de ton clan tu veux bien? Vu que tu te dirigeais vers Suna je suppose qu'il n'y réside pas?"

Une manière comme une autre d'essayer d'apaiser les choses et de rendre le trajet plus agréable...

Un refus. Voilà quel fut l'élément déclencheur de la suite des actions. Il paraissait évident que le pauvre shinobi ne s'attendait pas à ce que son défi soit refusé, et pourtant il ne pouvait en être autrement. Le brave Akage était, par nature et par éducation, quelqu'un d'indépendant. Refusant de faire face à un compromis, il refusait naturellement les propositions extérieures qui ne le favorisait pas. C'était bien le cas ici. Néanmoins, les menaces de destruction du fameux parchemin laissèrent Akage de marbre. Il n'y réagit pas, comme si c'était de moindre importante. Il avait toujours supposé que c'était un sceau, un unique sceau à ré-écrire. Le « vieux sage » avait écrit une première fois ce sceau, donc ne pouvait-il pas recommencer ? Akage se posa la question quelques secondes avant de se désintéresser de la chose. Si Shinji voulait détruire le parchemin, alors cela serait déjà fait. Du moins, Akage essaya de s'en convaincre.

Toujours est-il que Shinji, ce brave comparse un poil horripilant, dans le calme assourdissant du désert, jacta. Akage l'écouta en conservant sa froideur habituelle. Il ne bougea point. Il ne parlant point. Mais il pensa. Les pensées vinrent à lui comme l'eau venait à une plante arrosés. Elles s'infiltraient partout, lui laissant l'occasion de se taire. Akage garda donc le silence, et il apprit des choses sur le dit Shinji. Elève de la Kazekage.. Passe-droit ? Non. Dans la tête d'Akage, cela devait être le contraire. En tant qu'élève de la Kazekage, la fameuse « ombre du vent », elle devait être implicitement lié à toutes les actions de Shinji. Donc, si il y avait une rumeur -même infondée- selon laquelle Shinji avait volé un clan aussi ancien que le désert de Kaze no Kuni, alors l'action de Shinji retomberait immédiatement sur cette fameuse personne. Puis, au fond, il savait immédiatement ce qu'il se passerait au clan Chikamatsu. Les vieux du Conseil cherchaient depuis bien longtemps une ocassion de se retirer de ce projet du vent, de cette idée de village. Ils aimaient leurs libertés, et ils savaient que plus Sûna Gakure serait puissant, plus les clans perdraient leurs utilités. Ils cherchaient naturellement un moyen d'éviter ça, un point de vue non partagé par la jeune génération des Chikamatsu. Néanmoins, si le clan Chikamatsu se retirait, cela pourrait-être un signal aux divers clans partageant ce point de vue -ou voulant se retirer pour une autre raison-. La cause à effet pourrait avoir un effet ravageur. C'est ce qu'imagina Akage, probablement pour se rassurer. Mais c'était de l'ordre de l'imagination. Juste de l'imaginaire.

Heureusement pour lui, Shinji accepta finalement de l'aider. Cet accord refroidit toutes ses pensées hypothétiques. Le regard impérieux du ninja fit immédiatement comprendre à Akage qu'il avait obtenu de l'aide, mais sous certaine condition. Il ne vînt donc pas à l'esprit de ce dernier de remettre en cause ces dispositions. Akage fit donc silence, en signe d'acceptation. Il détourna les yeux, et observa le désert. Il n'avait pas changé. C'était toujours cette étendue de sable fin, vide et chaotique où les vagues de sable semblaient voir leur vie dicté par la puissance majestueuse du vent. Assez bizarrement, Akage y vit une sorte de métaphore de sa propre situation. Il était le sable, faible et chaotique, Shinji y était le vent majestueux. Cette idée le fit sourire. Il savait mieux que quiconque que le sable pouvait être un allié -ou un adversaire- gênant lorsqu'il se mêlait aux engrenages complexes. Ainsi, et en dépit de cette idée, les conditions du ninja Sûnajin étaient simples : Attendre.

Attendre. Attendre. Encore attendre. Akage s'impatienta très rapidement, mais il connaissait ses prégoratives. Il n'y avait rien à faire dans ce désert, strictement rien à faire. Il avait préparé son voyage à l'avance. Il savait qu'il devait s'installer dans une maison déjà occuper par quelques Chikamatsu à Sûna, et il avait demandé à Kogârashi si un commerçant pouvait y transporter ses affaires. Le clan Kogâ avait sponsorisé le transport. Les Kogâ étaient toujours de précieux alliés en ces temps troublants. C'était aussi d'excellents commerçants. Akage écouta alors à nouveau Shinji, et souri lorsqu'il vit le rouleau être glissé dans sa proche. Il ne voulait point remettre en cause l'autorité de Shinji puisque ce dernier n'avait pas l'air d'être si compréhensif. Néanmoins, l'idée de voler le parchemin, à titre de défi, effleura le cerveau de Akage. Il se débarrassa immédiatement de l'idée. Akage se décida alors à occuper son temps. Il ignorait dans combien de temps le soleil allait se coucher.

Akage s’essaya, faisant glisser son énorme parchemin à côté de lui. Ce dernier contenait bien évidemment « Shirôrô ». Mais il était hors de question de s'entraîner au maniement du pantin. Il ignorait de quel ressource physique il aurait encore besoin. Akage se contenta de dévisser la partie inférieur du parchemin, de laquelle il retira un parchemin nettement plus petit, de la taille approximative des « trois perles ». Akage fit sauter l'écrin qui empêcher le rouleau de s'ouvrir et le déplia. Le parchemin contenait des schémas que nuls ne pouvait lire, si ce n'est lui même. Les écrits -et les dessins techniques- étaient si chaotique qu'on aurait presque dit un code. Toujours est-l qu'Akage se passionna immédiatement pour le parchemin, allant jusqu'à ignorer son environnement second. Impressionnant. Il n'y avait plus rien qui existait.

Soudain, Akage leva la tête. Le ciel commençait à s'assombrir. Cela paraissait être le moment de partir. Il commença à replier son parchemin, à refixer l'écrin de sûreté et à signaler le moment à Shinji. Ce dernier lui coupa l'herbe sous le pied, ou plutôt le sable -si tenté qu'il est possible de couper le sable-. Ordonnant à ce dernier de se mettre en route, Akage rangea ses affaires. Ce fut une affaire de seconde. Il se leva, et attendit le commandement de Shinji. Il en fut rien. Ce dernier lui proposa un joint, une tendre proposition qui nécessitait une réponse.

« Non.. »

Akage ne s'attendait pas à un voyage particulièrement vivifiant ou agréable. Non pas qu'il abhorrait Shinji, mais leur rencontre n'avait pas été particulièrement amicale. Ainsi, Akage s'attendit à un mauvais coup, le mettant sur la défensive en permanence. Il prit soin de marcher à une distance acceptable de Shinji, sans pour autant s'éloigner de lui. Il se contenta de laisser deux distances d'hommes entre eux. La méfiance était de rigueur. Puis ce dernier s'interrogea sur le clan Chikamatsu. C'était une question qu'Akage n'aimait pas. Il détestait répondre à une telle interrogation. D'une part, il était évident que la question troublait la fierté d'être un Chikamatsu.. La fierté. Encore un concept qu'Akage trouvait ridicule. Mais d'autre part, c'était bien la méfiance qui l'amena à s'interroger sur la réponse à donner à cette question.

« Le clan Chikamatsu.. » Akage marqua une pause, courte afin de se donner le temps de trier les informations à donner. « C'est un clan de marionnettiste. Notre fondateur a inventé l'art en réalité. Enfin, c'est ce qu'on dit. Mais ça n'a pas vraiment d'importance.. »

Fier de lui, Akage venait de donner des réponses génériques qu'il devait être possible de retrouver dans un livre un minimum fourni sur l'histoire du pays du vent. Néanmoins, voilà bien des années, voir des décennies, qu'aucun Chikamatsu n'avait marqué l'histoire. Il était assez inconcevable pour l'adolescent que certains clans puissent accorder de l'importance à une famille guerrière qui déclinait autant. C'était la raison pour laquelle, quelques années auparavant, « le vieux sage » avait accepté de se joindre au projet du pays du vent, celui de créer Sûna Gakure. Il y avait apporté son soutien, et fît don de quelques ninjas. Aucun d'eux n'avait briller, et il avait dû se résoudre à envoyer une nouvelle escouade.. Akage en faisait parti. Conscient d'avoir été légèrement froid dans sa réponse, il se corrigea en souriant.

« Je dois devenir ninja du vent. C'est la seconde tâche qui m'a été confié.»

Etant honnête, et presque chaleureux dans sa réponse, le marionnettiste sembla recouvrir une légèreté inhabituelle. Peut-être était-ce lié au fait de rencontrer un futur compatriote ? Non. La camaraderie avait ses limites. Plus calculateur, Akage sembla davantage enclin à parler de lui que de son clan, avec lequel il avait quelques difficultés d'ordre sociale. Il s'avança alors un peu plus vers Shinji. A la réflexion, il s'était peut-être dit qu'avec son pouvoir d’étirement, il était inutile de se placer à distance d'homme normal. Akage s'interrogea par la suite sur Shinji.

« Et toi ? Ta technique dégoûtante, c'est une sorte d'héritage familial ? »

Il n'avait que peu d'information sur son sauveur. Il savait qu'il était l'élève de la personne la plus importante de Suna Gakure, un détail qui sembla lui faire ni chaud, ni froid. Il connaissait également son prénom, Shinji et son attitude désagréable. En temps normal, ces détails auraient suffit à éloigner paisiblement Akage. Mais il semblerait que le voyage était plus long que prévu.

Les Chikamatsu étaient donc un clan de marionnettistes voir même celui qui avait inventé cet art si étrange. Je ne connaissais pas grand chose de ces manieurs de pantins puisque j'en avais rarement vus à l’œuvre. Je trouvais bizarre de se battre de cette manière même si je ne pouvais pas vraiment renier l'efficacité de ces étranges poupées. C'était donc peut-être l'une d'entre elles que le gamin portait dans son dos. Intéressant! J'avais toutefois un peu de la peine à respecter ceux qui se cachaient derrière ce genre d'artifice au lieu de combattre directement. J'aimais le contact de la chair contre la chair, le corps à corps étant pour moi l'expression de la virilité.

- "Hum, je vois!" répondis-je en haussant les épaules. "Jamais entendu parler!"

De nouveau ma culture générale avait de sérieuses lacunes aussi ce clan était peut-être important finalement. Mais s'il ne vivait pas dans l'enceinte de Suna c'était peut-être pour ça qu'il ne me disait rien ou que je l'avais oublié. Si j'avais plus écouté pendant les cours de l'académie peut-être que j'aurais su alors que le jeune homme m'exposait des faits communément reconnus. Quoi qu'il en soit je ne vois pas pourquoi il me mentirait d'autant plus qu'il avait été plutôt succinct. Il enchaîna ensuite en me disant qu'il comptait devenir ninja du vent. Je tournai à nouveau le regard vers lui en hésitant entre l'amusement et la stupéfaction.

- "Ninja du vent, toi?" relevai-je avec un sourire au coin des lèvres. "Faudrait déjà que tu apprennes la politesse alors, ce serait un bon début! J'imagine bien la tronche de ton éventuel futur senseï si tu te comportes comme ça avec lui! Enfin remarque on m'a bien accepté, moi! J'imagine que tu as tes chances..."

S'il se comportait de la même manière qu'avec moi envers son futur maître il risquait d'avoir de sérieux problèmes. Bon après il y avait des gens qui se comportaient différemment en présence de leur senseï et j'en faisais parti. S'il se montrait impoli envers un inconnu ça ne signifiait pas pour autant qu'il allait faire pareil avec un supérieur. Il fallait savoir mettre de l'eau dans son saké lorsque c'était nécessaire! Ce n'était pas de la lâcheté ou quoi que ce soit de ce genre, simplement du bon sens... Je décochai ensuite un regard sceptique à l'adolescent lorsqu'il me demanda si ma technique dégoûtante était une sorte d'héritage familial. Dégoûtante? Non mais ho! Ça n'avait rien de dégueulasse!

- "Dégoûtante, dégoûtante..." répétai-je en ronchonnant. "Ouais, c'est une particularité des Akuzu dont je fais évidemment parti! Notre peau a des propriétés élastiques et c'est plutôt pratique tu peux me croire! On est l'un des clans principaux du village, tu en as sûrement entendu parler je suppose?"

Je n'avais guère envie de m'étaler sur le sujet, spécialement avec un gosse qui ne semblait pas saisir toute la beauté de notre pouvoir héréditaire. Il aurait pu saisir à quel point ce dernier était pratique s'il avait continué sur la voie de la confrontation quelques heures plus tôt. Et en plus de le juger dégoûtant il l'aurait sûrement évalué comme dangereux s'il en avait fait les frais. Mais puisque nous semblions entrés dans une nouvelle phase de pseudo-coopération il était inutile de ressasser le passé et devions plutôt nous concentrer sur l'avenir.

J'étais assez curieux de voir comment il allait exposer aux gardes du village la raison de sa venue. Non qu'elle ne soit pas louable ou représente un danger pour le village. C'était plutôt sur la forme que je m'interrogeais que sur le fond. S'il manifestait autant d'énergie à irriter les gardiens de la voie illusionnée il risquait de faire connaissance avec Ergastule assez rapidement. Mais nous n'allions pas tarder à le savoir puisque quelques dizaines de minutes plus tard nous nous trouvions face aux massifs remparts de Suna. Je présentai mon insigne de shinobi à la poignée de sentinelles même si elles me connaissaient déjà. Les regards se tournèrent ensuite vers l'adolescent et j'exposai une partie de la situation à sa place:

- "Ce morveux dit appartenir au clan Chikamatsu et être envoyé ici pour donner un parchemin de grande valeur aux autorités! J'irais pas jusqu'à dire qu'il est avec moi mais disons qu'il n'est pas étranger, c'est déjà ça! Enfin, je crois... Mais il vous expliquera tout ça bien mieux que moi!"

Je reconnus l'un des senseurs du village dans le groupe qui gardait l'entrée. Ce dernier était en mesure de déceler le mensonge et le jeune homme dont je ne connaissais toujours pas le nom avait meilleur temps de dire la vérité s'il souhaitait entrer dans le village. Que ce soit au niveau de son identité ou de la raison de sa venue. Me roulant une cigarette je m'effaçai donc sur le côté pour lui laisser le loisir de s'exprimer et mériter ainsi d'entrer à Suna. Allait-il faire preuve d'autant de politesse qu'avec moi? J'étais assez curieux de voir ça...

Marcher. Marcher. Encore marcher. La consigne était toujours la même. Avancer. Suivre. Akage s'était fait mission de suivre Shinji le plus loin possible dans ce désert. Il répondit à ses questions, honnêtement, et se permit de lui en poser une sur ses propres habiletés. Bien qu'intéressé très moyennement par l'homme, il n'en n'était pas moins curieux. Toujours est-il que ses pas s'enfonçaient avec amertume dans ce désert sordide. Akage avait vécu toute sa vie dans un désert, mais sa position géographique enviable le rendait moins uniforme, plus agréable que cette étendue de sable. Plus que le désert, il jugea que les considérations et remarques de Shinji pernicieuses. Et dire que c'était ce même ninja qui lui avait parlé de politesse plus tôt. C'était très culotté de sa part, mais très honnête.. une qualité qu'Akage ne considérait pas. C'était une bonne chose, au vu de toutes les considérations négatives qu'il avait. Il résulta des deux remarques, vicièrement blessantes pour toute personne ayant une fierté familiale, un véritable mauvais regard. Shinji avait sans doute du mal à le percevoir vu sa position, mais Akage, l'espace d'une seconde, jeta un regard néfaste à Shinji.

Il était un Chikamatsu. Son clan n'était plus rien, et il était parfaitement conscient de ce détail. Mais il aimait cet emblème. Il aimait son nom. Il aimait son art. Lorsque Shinji se permit de remettre en question ainsi la reconnaissance mondiale des Chikamatsu, Akage senti son tanto le titiller. Mais Akage avait cette fichue qualité d'avoir des priorités, et bientôt.. il ferait en sorte que le nom de Chikamatsu soit reconnu par tous. Shinji était une sorte de marche vers cet objectif. Il se tût alors, et laissa le ninja médire sur son clan. C'est à ce moment précis que le visage d'Akage s'illumina. C'est comme si l'air chaud, envahissant, lui avait fait perdre son calme. Un coup de soleil mal placé ? Peut-être. Mais, aujourd'hui précisément, Akage semblait être dans un jour mauvais. Il prenait les remarques personnellement, et même les comportements candides semblaient l'irriter. Est-ce qu'il sentait une once de pression monter en lui ? Et si on le rejetait à l'entrée du village, qu'on lui annonçait qu'il y avait suffisamment d'effectif dans le pays du vent et qu'on le renvoyait la queue entre les jambes dans son village ? Akage attrapa alors ce qui semblait être une gourde et se répandit un peu de son contenu sur le visage, comme pour le purger. L'eau coula d'une douceur certaine, permettant à Akage de redevenir peu à peu plus froid à l'égard des réflexions externes.

C'est à ce moment-ci qu'il se décida de répondre à la dernière remarque de Shinji, sur sa capacité à devenir un ninja du vent. Il en avait les capacités. Il avait largement les aptitudes pour devenir un aspirant, et le potentiel pour être plus qu'un simple « genin ». Il le savait. Le vieux le savait. Et avec de la chance, les administrateurs s'en rendraient compte. Néanmoins, Shinji tapa en plein sur ces craintes. Sa plus grande peur était d'être jugée inconforme, et d'illuminer de honte le nom de Chikamatsu. C'est ainsi que la remarque du shinobi fit mouche. Bien décidé à ne pas être cet Akage-là, le marionnettiste se permit une remarque, un commentaire provocateur à l'égard de Shinji. Il ne devait plus être à un près.[/justify]

« Je peux être poli.. tant qu'on me demande pas de l'être avec de parfaits crétins. »

La réplique n'était-elle pas parfaitement adaptée à Shinji. C'était clairement une petite pique verbale, une réponse défensive à ses propres craintes. Le futur ninja songea alors à la méchanceté de son comportement. Il n'était pas question de faux comportement, de politesse ou bien de fierté. Il songea que le shinobi le guidait, et ce malgré leur altercation.. C'était une preuve de bienveillance, une bienveillance qui toucha Akage. Il savait qui si les rôles avaient été inversés, jamais il aurait pris la peine de guider un freluquet de ce genre. Il n'avait pas cette commisération. Il pensait d'abord à lui, les autres venaient ensuite. C'était le résultat direct d'une ère de conflit, et des conséquences qui en découlaient. Le faible meurt. Le fort survit. Mais aussi fort soit-il, le grand ninja peut ployer s'il décide de soutenir les faibles. Ne valait-il pas vivre, au lieu de mourir seul ? Ainsi, le comportement de Shinji l'amena à réfléchir sur ses propres prérogatives. Au fond, avait-il bien compris ce qu'impliquait être un ninja, être un soldat ? Akage en doutait maintenant, mais il se convainquit rapidement que cette réflexion n'était que l'effet du soleil, grand et brillant, affectant un pauvre nomade qui ne s'était pas suffisamment préparé.

De ces réflexions, Akage s'interrogea alors sur la fameuse famille -et ses attributs génétiques- de Shinji. Le marionnettiste avait jugé la technique absolument dégoûtante, voir répugnante. Elle lui fit immédiatement penser à un serpent qui se dresse face à sa proie, qui laisse cette dernière s'adapter à sa taille pour finalement observer, fatalement, que le serpent possède une allonge plus mortelle que prévue. Dans le sable, le brave adversaire du serpent est seul. L'obscurité tend à emporter son âme, faisant de ce dernier un voyageur au côté du Dieu tout puissant, celui de la fin. Cette maudite pensée l'attrista spontanément. Mais il pensait au serpent, et à la capacité de Shinji. Ce dernier lui répondit rapidement.

« Non.. Jamais entendu parler !»

La réponse fut franche et directe. Contrairement aux dernières répliques, le ton était calme et il n'y avait aucune provocation dans l'air. En vivant loin de ces contrées, Akage n'avait jamais entendu parler des autres clans du pays. Seuls ceux que les Chikamatsu avaient affrontés avaient trouvé une place de choix dans son esprit. L'éducation des combattants avec pantins n'était jamais basée sur la connaissance des autres clans. Le nom d'Akuzu flotta dans les airs sans être véritablement perçu par Akage. Mais il grava celui-ci en mémoire. Il ne l'oublierait pas de sitôt.[/justify]

Et c'est sur ces pensées que le duo de fortune arrive à Sûna Gakure. Alors que l'immense forteresse naturelle ne sembla faire ni chaud, ni froid à Shinji. Akage s'arrêta une poignée de secondes, enivré par la magnificence de la forteresse du pays du vent. Voilà quelle était la plus puissante fortification de tout le pays du Vent, de tout le désert. De cette cité, un air de domination imprégnait le ciel. C'était comme si le village avait une emprise sur les éléments naturels. Akage en était retourné. Il n'avait jamais vu de bâtisse si puissante. En observant la bâtisse naturelle, et plus précisément ses grands murs si solides, qu'il adressa un regard à son guide. Ce dernier avançait naturellement vers les gardes de la porte. Akage se mit en mouvement et força son allure afin de rattraper Shinji. Ce dernier s'imposa rapidement aux portes, et laissant Akage se dépêtrer avec les autorités, il s'accouda au mur.

« Tu m'as conduit à bon port. Merci beaucoup Shinji-san. »

Marquant pour la première fois le coup avec une marque de respect -ce qui n'était pas rien pour un garçon comme Akage-, le marionnettiste s'inclina respectueusement devant son bienfaiteur. Était-ce vraiment du respect, ou Akage jouait la comédie devant le ninja senseur ? Bonne question. Si la présence du senseur avait joué un petit rôle dans ces remerciements, ils étaient tout de même sincères. Akage se sentit néanmoins un peu bête de n'avoir pu trouver le village, si imposant, seul. Après ses remerciements si particuliers, Akage se retourna vers le ninja qui lui faisait face. Sa mine sévère irrita légèrement le marionnette qui n'en tînt pas compte. Sans que ce dernier n'ait à dire mot, Akage s'empara de la parole.

« Je suis Chikamatsu Akage.. » Il fallait noter qu'il donna plus d'information sur sa personne en une poignée de seconde qu'il en donna en plusieurs heures à Shinji. « Je dois me présenter à .. .. Attendez une minute ! »

Mouvement de panique. Akage oublia momentanément le nom du ninja auquel il devait se présenter. Le pauvre marionnettiste n'arrivait pas à se souvenir. Aucun mot ne venait. Il sentait, pourtant, l'air sévère du ninja gardien se porter sur ses maigres épaules. Le ninja eut alors un instinct de génie. Akage fit glisser au sol son parchemin imposant. Il souleva à cette occasion le sable qui s'éparpilla au sol comme un flocon de neige. Il dévissa lentement l'embout pour en sortir un autre parchemin, plus petit portant le symbole des Chikamatsu. Il tendit respectueusement ce dernier à son interlocuteur qui ne pipa mot. Ce dernier attrapa le parchemin et commença à l'ouvrir, alors qu'Akage était toujours incliné respectueusement.

« Quant au parchemin en question.. » Un sourire pernicieux se dessina sur la figure d'Akage. Puis, soudainement, il pointa Shinji avec son pouce alors que celui-ci était doucement accoudé au mur. « C'est lui qui l'a. »

Dénonçant immédiatement Shini, Akage pointa du pouce le ninja pendant une poignée de secondes. Il n'y avait rien de vraiment insultant dans son geste ou dans ses paroles. Il prit soin d'éviter de sous-entendre que Shinji lui avait pris de force. Il se contenta d'indiquer juste un fait. Il se demanda alors si Shinji ne prendrait pas mal ses actions.

Puis, soudainement, Akage sentit une présence fortement hostile. Il connaissait cette impression. Respectueusement penché, il se baissa pour observer ce qu'il se passait derrière le ninja senseur. Une femme marchait vers lui. La mine sévère et les poings fermés, cette dernière laissait transparaître tout son énervement. Akage sentit des sueurs froides glisser le long de son dos.

« Hikari ! »
« Akage ! » La femme montra un peu mieux son visage. Elle était à peine plus âgé qu'Akage et devait avoir l'âge de Shinji. « Shizan-sama avait peur que tu ne prennes pas soin du parchemin, et m'a envoyé.. »

Akage observa sa mine sévère et se releva, lui qui était alors respectueusement incliné. Akage observa Hikari. Il ne l'avait point vue en trois bonne année. Elle avait été envoyé, quelques années plus tôt, au village du sable en signe de participation du clan, mais elle n'avait jamais fait de vague. Elle ne faisait pas honneur au nom de Chikamatsu, mais elle ne lui faisait pas honte non plus. Hikari donc, montra à Akage l'ordre du vieux sage, Shizan Chikamatsu. Il y avait bien le sceau du conseil des Chikamatsu, et Akage ne pu qu'observer que c'était un vrai. Elle lui arracha alors la lettre des mains, puis sans rien présager, la brûla immédiatement à l'aide d'un briquet. Ce mouvement fit légèrement paniquer Akage, qui balbutia..

« Ne pas prendre soin du parchemin ?! Allons.. C'est notre héritage. »

Akage chercha ses mots. Hikari ne lui avait jamais peur, même si elle était de trois ans son ainé. Pour dire, il était probable qu'Akage soit supérieur à elle en matière de Kugutsu. Toujours est-il que la jeune femme, qui revêtait le bandeau du village caché du Sable, était venue l'accueillir. Les raisons de cette « cérémonie » étaient mauvaises, le parchemin comptant plus qu'Akage mais ce dernier ne pouvait que constater que la prestation de la jeune femme le sortait d'un immense problème dans lequel il s'était fourré. Cette dernière, en venant justifier la présence d'Akage, lui permettrait probablement de passer les portes. Puis, dans tous les cas, le parchemin du vieux Shizan qu'il avait remis au ninja senseur était accompagné d'une autorisation délivrée par les autorités de Sûna. Il n'avait qu'à espérer qu'il n'y avait pas eu de coup d'état depuis ce temps-ci, changeant de fait l'ordre établi. Respirant bien fort, et cherchant à se justifier envers celle qui représentait les Chikamatsu à Sûna, Akage argumenta.

« Je l'ai même confié à un des plus valeureux ninjas de ce village, l'élève du Kazekage en personne ! Pas vrai Shinji-san ? »

Et c'est ainsi que les regards se retournèrent vers Shinji, le fameux Akuzu qui était en possession du parchemin. L'avenir d'Akage était entre ces mains. Il était, en effet, préférable que le vieil homme, Shizan Chikamatsu, ne soit pas au courant du traitement rugueux que le shinobi avait infligé à la relique. Néanmoins, le shinobi senseur devait sentir une immense perturbation du flux de chackra d'Akage. Il en était ainsi. Un petit mensonge de temps en temps ne faisait pas de mal.

Je ne m'attendais pas à recevoir des remerciements de la part du gamin pour l'avoir mené à bon port. À vrai dire ce n'était pas non plus par pure bonté d'âme que j'avais agi ainsi et nous le savions tout deux. C'était avant tout pour que mon nom soit lié au retour de ce parchemin à Suna et pour redorer un peu mon blason auprès du peuple, de l'armée ou des autorités. Et dire qu'il en avait besoin était un euphémisme. Au point où j'en étais la moindre petite chose susceptible de m'aider dans ce domaine était bonne à prendre.

- "Bah écoute il n'y a pas de quoi!" répliquai entre deux tafs, haussant les épaules. "À ce propos n'oublie pas ce que nous avons convenu!"

Je le laissai ensuite discuter avec la garde tout en tirant un kunaï que je me mis à polir, clope toujours au coin des lèvres. J'étais assez curieux de voir de quelle manière l'adolescent allait se comporter avec ceux qui autorisaient l'accès - ou non - au village. Et effectivement il se montra clairement plus conciliant qu'avec moi en plein milieu du désert. Bah, je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir après tout. Nous agissions tous de manière conciliante avec des gens dont nous espérions quelque chose pas vrai?

Ainsi donc Akage déclina son identité avant de marquer une pause lorsqu'il sembla ne plus se souvenir de la personne à qui il devait se présenter. Je haussai un sourcil avec scepticisme en me demandant s'il avait vraiment oublié une information si importante. Après tout être attendu par une personne du village donnait largement plus de crédit à sa requête et, surtout, facilitait la procédure d'admission. Avoir quelqu'un qui répond de soi à l'intérieur des murs donne pratiquement l'assurance d'être accepté au sein du village.

L'adolescent déplia au sol son imposant parchemin et je tournai le regard dans sa direction, curieux de voir ce qu'il s'y trouvait. Il en tira un autre plus petit et le tendit au senseur. C'était certainement son ordre de mission ou quelque chose comme çA, un écrit consignant ce qu'il devait faire et à qui il devait s'adresser lors de son périple. Il me désigna ensuite du doigt en arguant que c'est moi qui avait en ma possession le parchemin qu'il devait livrer aux autorités.. Ce que je confirmai en le tirant de ma sacoche et en le faisant sauter plusieurs fois dans ma paume.

- "Je confirme!" fis-je simplement avant d'écraser ma clope sous mon talon. "Vu qu'il l'a laissé tomber en route je me suis dit qu'il valait mieux que je me charge de le transporter! On sait jamais, c'est vite perdu ces petites choses!"

Une femme de mon âge vint alors à la rencontre de l'enfant et ils échangèrent quelques mots, signe évident qu'ils se connaissaient. Je n'avais jamais vu cette demoiselle mais elle était plutôt mignonne dans son genre. Elle expliqua qu'un certain Shinzan avait peur qu'il ne prenne pas soin de l'héritage de leur clan, ce à quoi l'intéressé répliqua qu'il avait évidemment pris toutes les précautions nécessaires. Ou quelque chose dans le genre...

Je ne pus m'empêcher de me racler la gorge pour marquer à nouveau mon scepticisme. Après tout n'avait-il pas laissé ce précieux rouleau s'échapper de ses mains devant mon nez ou presque? Drôle de façon de prendre soin d'une chose sensée être si importante. Mais mon intervention visait aussi à faire remarquer ma présence. Suite à quoi Akage expliqua qu'il me l'avait confié, me qualifiant au passage de l'un des ninjas les plus valeureux du village. La bonne blague...

- "Heu... Oui oui, en effet! Il a fait tout son possible pour éviter que ce parchemin se fasse réduire en miette, je vous le confirme! Avec un certain brio d'ailleurs! Je suppose que vous pouvez être fier de lui!" renchéris-je avec un léger sourire au coin des lèvres. "À ce propos... Attrapez!"

Je lançai à la jeune femme l'objet comme s'il s'agissait d'une chose sans valeur. Faut dire qu'à mes yeux c'était effectivement le cas. Ce traitement ne sembla guère l'amuser et je fus gratifié d'un regard noir qui glissa sur moi. Je me fichais pas mal de leur rouleau. Maintenant que j'avais rempli ma part du contrat et qu'Akage avait fait de même en vantant mes mérites presque inexistants, je n'avais aucune raison de m'attarder ici!

- "Bon ben et bien tout est bien qui fini bien alors? Ce fut un... heu... plaisir Akage! Sur ce, excusez-moi mais j'ai des choses à faire! À plus!"

J'empruntai alors la voie illusionnée pour rejoindre mon appartement et me préparer pour les combats de la soirée. Qui sait, peut-être que nous nous recroiserions à l'occasion. C'était même probable si l'adolescent rejoignait les rangs des shinobis de Suna...