La découverte de son ancien chez soi dévasté avait eu de lourdes répercussions sur le nécromancien. A peine un jour après cette sombre découverte, il était reparti sur les routes. Son objectif étant de rejoindre Kumo pour y chercher son plus fidèle allié. Mais pour l’heure, la nostalgie s’emparait de son âme.

Il était toujours sous le choc de ce qu’il avait vu hier. Il ne comprenait pas. Et puis rien pour le mettre au parfum. Aucun indice. C’était plus que déroutant. Il n’avait pas grand-chose à faire maintenant. Son seul espoir pour la suite était de retrouver son senseï. Il avait besoin de voir avec lui ce qu’il serait mieux de faire, et récolter des informations sur ce qui s’était passé. Un sourire timide lui vint intérieurement lorsqu’il pensa au mot « information ». C’était une expression du Gekei ça : L’information c’est le pouvoir. Il avait toujours prôné cette politique et elle l’avait mené à une place pas si dégueulasse !

Mais avait-il pu en obtenir sur ce qui s’était passé à Kiri ? N’aurait-il pas agi si ça avait été le cas ? Tant de questions auxquelles Michiki n’arrivait même pas à trouver de réponses cohérentes malgré l’évidence de certaines. Son esprit était bien trop embrumé. Encore plus que les terres sur lesquelles il avançait. Il avait quitté les plaines et les bois pour arriver dans les montagnes. Il avait besoin d’un air vivifiant pour l’aider à reprendre un peu de poil de la bête.

La route s’annonçait longue pour sa destination, il prendrait bien une pause de quelques heures pour se remettre de ses émotions. Il finit par trouver un plateau rocheux, un peu à l’abri des vents forts parcourant le paysage montagneux. Sur ce dernier, la paroi de la montagne offrait une anfractuosité creusée dans la roche. Il décida de passer la nuit dans cet abri de fortune. Il commençait à se faire tard et il ne fallait pas traîner dehors. Les températures pouvaient descendre bien bas.

Michiki se posa donc à l’entrée de la caverne. Elle semblait assez profonde mais il n’avait pas le temps de faire un peu de spéléologie. Si c’était le repère d’une bestiole, et bien il plaignait la dite bête qui finirait en trophée dans sa collection étendue. Il alluma un feu devant lequel il s’assit. Les mouvements aléatoires et chatoyants de l’âtre guidèrent l’esprit du binoclard vers des songes profonds.

Sa nation réduite à néant. Tous ceux qu’il avait connu ne devaient plus être. Ou alors ils avaient réussis à s’en sortir. Mais n’avaient-ils pu rien faire ?! Yoru, Masashi, Kyoji, Shinichi ?! Toutes ces personnes n’avaient elles rien fait face à ce qui avait ravagé Kiri ?! Difficile à dire. C’était dans ces moments qu’il regrettait son incapacité à exercer la sensorialité. Un truc qu’aurait pu lui apprendre Pô. Sauf que là, ça ne servirait plus à rien. Quoique, ça pourrait peut-être. Ne serait-ce que pour retrouver le ou les responsable(s) de cet acte. Et pour faire quoi ensuite ? Leur faire payer ? Quel intérêt puisque ça ne ramènerait pas Kiri ?!

La réflexion du nécromancien s’intensifia pour le mener plus loin dans le cheminement de sa pensée. Si Kiri ne pouvait être vengée, peut-être la reconstruire ? Mais pourquoi ? Si elle avait été détruite une fois, rien ne dit qu’elle ne le serait pas une seconde fois. Puis une troisième fois. Et une quatrième fois jusqu’à ce que les années érodent l’endroit ou que Mizu no kuni ne soit engloutie par les flots. Tout ceci ne servirait à rien. Le mal était fait pouvait-on dire. Et à moins d’un Jisetsu ultra puissant, Kiri ne serait jamais réparé. C’était la fin de la nation de l’Eau. Une éradication totale. Mais même si la vengeance n’animait plus tellement Michiki, cette fatalité provoquait en lui une volonté d’action.

Son village n’était plus, le privant plus ou moins de but. Il n’avait plus qu’à s’en retrouver. Pô pourrait l’y aider. Il se maudit lui-même de penser ça. Le polymorphe l’avait toujours guidé. Et il l’avait toujours suivi. Mais il était peut-être temps aussi de faire enfin quelque chose par soi-même. De mener à bien une œuvre signée de la main même de Shinda Michiki, le Fossoyeur de Kiri. Ce titre envoie du pâté il faut le dire. Mais il n’avait plus tout à fait sa signification. Plus de Kiri donc juste le Fossoyeur. Une idée qu’il aimait bien puisqu’elle lui correspondant à merveille. Il aurait pu rebâtir Kiri ceci dit. Le Fossoyeur aurait alors eu encore plus de signification. Mais cette idée ne l’enchantait définitivement pas. C’était plus une perte de temps et de moyen.

Que faire alors de sa vie ? Le vagabondage l’avait presque réduit à l’état d’ermite impotent ne sachant plus rien faire. S’il ne retrouvait pas d’objectif, il retomberait dans la médiocrité. Son voyage lui avait permis de se développer un tant soit peu. Mais il craignait que le fait de retrouver cette vie pour une durée définitive ne le renvoie au grade de Genin, si ce n’est pire. Si seulement il s’était tenu informé…

Le Gekei serait là, il lui taperait sur la tronche en lui beuglant qu’il lui avait toujours dit. Ses mots prenaient enfin un sens. Même si le nécromancien ne réalisait que trop tard, c’était déjà ça. L’information servirait à quoi maintenant, si ce n’est à retrouver les responsables ? Ce qui ne serait au final pas si mal même si Michiki ignore parfaitement ce qu’il en ferait. Peut-être les tuer oui pour la forme mais ensuite ? L’information représentait-elle réellement le pouvoir ?

En y réfléchissant, oui c’était le cas. Puisque si l’on revenait un peu en arrière, un réseau suffisamment important aurait pu être mis au courant bien avant que Kiri était sous le joug d’une terrible menace. Et les Kirijins auraient pu agir en conséquence. Pour qu’autant de dégâts aient pu être faits, Kiri n’avait pu qu’être pris par surprise. Il y aurait sinon des traces de combat acharné vu l’esprit Kirijin. Un sourire sincère monta ses lèvres. Ce n’était pas faux donc, l’information offrait le pouvoir.

Mais aurait-elle la même valeur aujourd’hui sans Kiri ? Bien sûr que oui en fait ! Ce n’est pas parce que la Brume avait disparue qu’il ne restait plus rien en ce monde ! Qu’était-il advenu des autres villages ? Et puis qu’est-ce qui les protégeaient du même sort que la Brume Sanglante. Absolument rien. Sans réseau mondial, le monde shinobi était à la merci de n’importe qui et de n’importe quoi. Tel en était la fatidique conclusion.

Aucun réseau de ce genre n’existait. Aucune personne ne pouvait emmagasiner une banque de données aussi importantes. Un sinistre rouage se mettait en place dans l’esprit tordu du nécromancien. On pouvait presque en entendre le cliquetis régulier. Une personne ne saurait jamais autant de choses. Qu’en était-il de plusieurs ? Couvrant la surface du globe ? S’informant à droite et à gauche des points de vue de chacun ? Ce serait alors envisageable. Mais était-ce assez ? Non sûrement pas. Il faudrait également connaître avec précision les potentiels de chacun, se tenir au courant de la politique des uns et des autres tout en s’informant des forces présentes en ce monde. Une telle idée semblait impossible. Et pourtant, pourquoi le serait-ce ?

Michiki n’avait personne à ses côtés. Pour le moment. Il n’était pas à l’abri de retomber sur son ancien maître. Cet homme avait le talent de s’entourer d’alliés de confiance. Ils seraient susceptibles de l’aider dans cette noble cause. En repensant à son senseï, Michiki élargit encore son sourire. Ce sale serpent avait bien des plans en tête. Il réalisait seulement lesquels il pouvait avoir s’il était encore vivant. Et il serait sûrement en train de sourire l’air béat s’il assistait à la réflexion du nécromancien. Ce dernier soupira. Il était incorrigible décidemment.

Toutes ces pensées avaient suscités un important besoin de nicotine. Michiki y céda. Après quelques bouffées de tabac, il en revint à ses réflexions. Tout ceci se tenait parfaitement. Ce serait possible. Un minimum de volonté et d’ambition pourrait faire de ce projet une réalité. Le nécromancien resta un très long moment à ressasser tout cela dans son crâne. Il enchaînait les cigarettes jusqu’à que deux éléments ne le tirent de ses rêveries : le paquet vide et les rayons du Soleil. Il avait passé toute la nuit à planifier son projet. Il en fut légèrement surpris. Mais il était plus qu’amusé. Il plia bagage et quitta son antre. Il resta un instant à observer la vue depuis le plateau. L’endroit offrait un panorama sur une partie du pays. On pouvait même discerner l’ancien emplacement du village de la Brume Sanglante.

Michiki se retourna pour regarder son abri de la nuit. C’était un excellent spot ici. Si ce projet pharamineux prenait vie, il faudrait un centre d’organisation. Une base pour diriger tout cela. A défaut de mieux, le Fossoyeur sourit face à cette grotte. Et pourquoi pas après tout ?! Un bâtiment avec un panneau de pub devant serait inapproprié pour ce genre de choses. Alors que…

Au moment où il pensa ça, il frappa du pied, faisant appel à son chakra de nature Dôton. Un lourd rocher tomba pour venir s’écraser devant la caverne, bloquant l’entrée. Michiki s’approcha de la roche. Il posa sa paume sur un coin. Lorsqu’il la retira, un sceau était dessiné. Il se déplaça et en disposa d’autres de chaque coin. L’énorme caillasse était maintenant décorée de quatre sceaux formant un carré. Il fit de nouveau appel à sa maîtrise du Dôton. Mais cette fois, impossible de faire bouger le caillou. Son sourire de démon égaya ses joues. Il avait déjà une partie de son idée mise en place. Ne manquait qu’une chose primordiale maintenant. La plus importante même. Il lui manquait les armatures principales de cette toile que ce nouveau groupuscule tâcherait de tisser par le monde. autrement dit, il lui fallait trouver des hommes de confiance.