L’Ecarquillement soudain de mes yeux est signe de mon réveil, de la délivrance de ce cauchemar ennuyant qui m’incarnerait, et me tenait sous son joug. Accompagné d’une violente quinte de toux, un souffle roque, bruyant et saccadé tiraille mes poumons. Mais aussi d’un soubresaut, une convulsion qui conquiert mon corps avec force, et le soumet à d’inutiles mouvements pour supporter la douleur. Jamais de ma vie je n’avais enduré pareille souffrance physique, à tel point que je ne pensais y survivre. Toutefois, j’y survécus. J’étais de retour après avoir vécu le néant. Mais combien de temps Seki Raiken pourra stabiliser son état, d’entre les vivants et les morts. Avoir trouvé ce moyen m’avait semblé une éternité, mes réserves de chakra en témoignaient. A priori, il ne me restait guère autant de temps que je ne l’avais espéré. Je me redressais, mais contre toutes attentes, je le fis en flottant dans les airs. Je n’avais pas le temps d’obtenir toutes les réponses qu’imposaient les questions de cette expérience. Je me dirigeais sur Kumo sans plus attendre.

Au survol d’un lac, le ciel se reflétait sur la pellicule de l’eau. Tel un miroir, je m’y vis, comme une entité de chakra. Sans réel corps mise à part cette énergie, mais surtout, sans tête. Les douleurs que j’avais ressenties s’adressait-elle directement a mon âme, car j’eu été décapité ? Arrivant à manipuler le chakra qui semblait entièrement spirituel, j’arrangeais ma structure pour m’en donner une, avec les souvenirs que j’avais de mon visage. Je ressentais à nouveau. Le vent, la chaleur sur ma peau. Je voyais à nouveau. L’éclat du soleil, le bleu immaculé du ciel, de magnifiques paysages et vies qui y vivaient. J’entendais à nouveau l’harmonie des innombrables mélodies, et je sentais à nouveau les différents parfums de notre monde. Je vivais à nouveau. Mais toutes ces saveurs, avaient un gout maussade et fade. Je sentais ma mort venir, ma mort définitive. Mais la raison était tout autre. Toute mon existence, qui ne durera hélas guère longtemps, j’avais eu à faire des choix. Parfois des choix difficiles, parfois impossible. Parfois, et de tous ce sont les plus durs, des dilemmes. Aujourd’hui, ces choix m’apportaient autant de fierté.. Que de regret.

J’allais disparaitre certes, mais pour mes proches, je l’étais déjà. Ryuuku Namiko, mon meilleur ami depuis que Kumo fut construit, une complicité et une confiance aveugle. Otoka Froturak, le nukenin aux idéaux complexes, confrère et ami de voyage. Naoko Haku, une amie attirante. Hakushi Mihawk, l’homme de raison aux conseils avisés, quand cela ne le concernait pas. Gecko Shin, mon sensei novice devenu expert, a l’image de notre relation bancale puis solide, qui devint par la suite mon sempai. Mes élèves. Bakusho Noy, le jeune garçon a la passion et a la rivalité fugueuse. Hakushi Shizen, le noble et sage d’esprit. Kadoria Yui, cousine du Shodaime, mais surtout ma promise. Kadoria Uriô, l’homme que je respecte et admire autant que mon défunt père. Yashira Mugen, mon supérieur direct du Satoru. Seki Datsuro, l’amnésique. Seki Feng, nommé chef par moi-même, m’ayant tenu pour responsable de la tragédie du village. Seki Hiruko, celui qui m’aida dans ma quête à donner un rôle a notre clan au village. Seki Ryûsai, mon regretté cousin, le plus proche de tous.

Je pourrais continuer des heures durant, surtout ceux portant mon nom. Toutes ses personnes étaient chères pour moi. Elles me manquaient énormément, et mon absence devait creuser leurs cœurs autant que le mien. Mon corps, ou du moins son substitut, avançait machinalement vers ma patrie. Comme attiré par mon vrai chez moi. J’avais passé trop de temps à jouer à un jeu, à faire l’espion. Enfin, je me retrouvais. Pas entièrement, car je ne pourrais plus jamais vivre aux côtés de ceux que j’aime. Oui.. De tous mes regrets, de tous mes choix, il n’y en avait qu’un à blâmer. J’avais choisis de quitter cette vie pour protéger Kumo. Etouffant mes sentiments qui m’avait toujours donné cette puissance que l’on redoutait, mais m’éloignant de mes êtres chers, jusqu’à me séparer définitivement d’eux. Voila ce qui avait causé ma véritable perte. Ne pas être avec eux. Ne pas être resté a Kumo, combattre.. Côte a côte. Ensemble. Au final, il n’y avait que cela qui comptait. Rire, pleurer, vivre, mourir main dans la main. Je ne venais que de le réaliser, alors que j’avais toujours vécu ainsi. Seulement, l’avoir fait plus tôt aurait empêché tout cela. J’aurais pu tenir mes promesses. Entièrement. Celle de revenir. Celle de devenir le premier Shodaime Sennin des Nuages. Celle de combler Yui.

Je n’aurais rien. Je ne laissais rien. Mise à part des doutes, de la souffrance et du déshonneur. Une perle humide se forma, se laissant tombé par la gravité, traversant une feuille qui je l’aurais cru, aurait brisé sa course. Ainsi, je n’avais plus d’emprise sur ce monde, prisonnier entre celui des morts et des vivants. Mais à cela, le monde m’offrit sa réponse. La goutte emplie de sentiment d’amertume fracassa le sol, et une lumière d’argent baigna doucement mon corps. Les oiseaux prirent peur, s’écartant de mon passage. Le monde me voyait de nouveau. Phénomène autant marquant que j’arrivais aux célèbres montagnes de Kiminari no Kuni : mon pays. Une seconde chance s’offrait à moi. Je n’allais pas que me contenter de regarder ce village que je pleurais tant. J’allais, l’espace d’un instant, en refaire parti, et communiquer avec mes semblables. Plusieurs kilomètres durant, aucune silhouette ne se dessinait a l’horizon. Cependant, lorsque les deux premières apparurent, j’eus le reflexe de me cacher et de m’approcher, comme ayant encore peur de ma position de nukenin. Dévisageant discrètement ces deux hommes, mes souvenirs vinrent me piquer. Attiré, je sortais de ma cachette de fortune avant d’annoncer d’une voix tremblante, chargée d’émotion.

S..Se..Seki.. Mon dieu, jamais je n’aurais cru revoir des membres de ma famille. Vous avez tant grandit. Zennosuke. Hasaki. Combien d’années se sont écoulées ? En quel an sommes-nous ? J’ai l’impression d’avoir raté tant d’événements. Le village se porte-t-il bien ?