Noir.

Rien. Il n’y a plus rien. Mes yeux se sont fermés, pour ne plus se rouvrir. Je ne vois plus rien, le monde qui m’entoure me paraît si loin de moi. Désagréable est cette stupide impression de le quitter pour de bon.

Sombre.

Des formes, des silhouettes ; quelque chose se forme. Un univers sombre et imprécis, quelque chose de nouveau. Ou plutôt non : une sensation de déjà-vu, qui va bien vite se justifier.

Macabre spectacle, cauchemars récurrents... Réveil immédiat. Douleur.


- WAAAAAAAAAAH FAIS PLUS JAMAIS CA !


Interloqué par ce cri, j’en observe la provenance. Ah, c’est... Lui. Lui ? Oui, lui. Pourquoi lui ? J’aurais préféré quelqu’un d’autre que lui... Ouais quoi, parce que lui… Qui est lui ? Bah c’est lui. Aku. Un Jônin qui serait revenu il y a peu à Konoha. Je l’ai rencontré il n’y a pas très longtemps, alors que je commandais tranquillement une glace. Il s’était énervé car j’avais pris le dernier cornet restant. Du coup, il a voulu me déclarer la guerre, et m’a menacé de rejoindre sa collection de jouets... Au départ, je n’avais pas vraiment compris de quoi il parlait. Maintenant, je sais : des cadavres. Voilà ce qu’il a voulu que je rejoigne. Quand j’y repense, je me dis que ce n’est pas plus mal que je me suis soumis à son caprice, en lui cédant ma place, ainsi que les trois quarts de mon argent, c’est-à-dire plusieurs centaines de ryôs... Toutes mes économies quasiment sont passées entre ses mains. Maintenant, je peux positiver en me disant que j’ai la chance d’être encore vivant... Ma stupide tendance à m’écraser face aux autres m’a sauvé les plumes... Pour une fois.

Néanmoins, mon réveil a été un peu trop brusque, à tel point que j’ai bien vite ressenti de violents spasmes de douleurs me parcourir, ce qui ne manqua pas d’afficher une grimace sur mon visage. Pourquoi cela ? Tout simplement, car j’ai encore fini dans ce même lit d’hôpital. Oui, comble du hasard, il semblerait que j’occupe la même chambre d’hôpital que la dernière fois, sans les deux invités qu’il y avait autrefois. À la place je me tape... Ce nain louche et surdoué que je n’apprécie pas tellement. Je me demande d’ailleurs la raison de sa présence ici.


- Qu’est-ce que tu fais là... ?


J’attends sa réponse, tout en m’allongeant doucement de nouveau.


- Ton cri.
- Qu... Quoi ? Mon cri ?


Il me regarde, d’un air blasé.


- Bah oui, t’as crié. J’passais par là quand je t’ai entendu, du coup j’suis rentré voir si tout allait bien. J’fais tellement de bonnes affaires avec toi que je ne voulais pas te voir mourir !


Enfoiré. M’enfin bref, passons... J’aurais donc crié ? Pendant mon sommeil ? Ou plutôt, avant de me réveiller ? Ça, c’est la faute à ses foutus cauchemars, qui deviennent de plus en plus fréquents... Et surtout réalistes. Je ne sais pas ce que c’est. Dès que je perds conscience, que ce soit un peu ou totalement, j’en suis assaillis... Des morts, des monstres... Et surtout, l’impression qu’un être maléfique n’est jamais bien loin, juste à quelques pas. Pourtant, il n’y a rien. Et, c’est bizarre, mais même après être réveillé je le ressens toujours un peu, et cette sensation s’estompe progressivement au fil des secondes qui passent. C’est même de pire en pire.


- Cauchemars ?


Mon regard se pose sur lui, ou plutôt sur son seul œil présent. Puis, je secoue la tête, de haut en bas. Etrangement, son air devint tout à coup sérieux, allant même jusqu’à en croiser les bras, la tête rabaissée. Comme s’il réfléchissait. À quoi ? C’est une bonne question. À vrai dire, je n’en sais trop rien. Dans la tête de ce bonhomme, ça m’a l’air bien compliqué après tout. Il est du genre... Difficile à cerner, et plutôt imprévisible même. Alors quand je le vois comme ça, je m’inquiète un peu sur ce qu’il peut sortir. Quelque chose de sérieux ? Vraiment ? Ou bien une farce ? Allez savoir. Je ne peux pas prétendre pouvoir le comprendre. C’est bel et bien hors de ma portée. Je devrais plutôt me concentrer sur le fait de me comprendre moi-même... Après tout, depuis un moment, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Je ne sais pas quoi, mais quelque chose ne va pas. Cela empire même, tout ça depuis ce combat contre ce Nukenin au masque. Cette voix, puis ces malaises, des sentiments nouveaux, des visions, des cauchemars... Quelle allait-être la prochaine étape ? Nul ne doit être en mesure de me répondre.


- Très bien. T’as trois jours pour te remettre, sinon j’te coupe lentement les doigts au scalpel après t’avoir arraché les ongles à la pince. Pigé la mouche ? J’viens te chercher dans trois jours donc. Byyyyye !


Vraiment bizarre celui-là...

Le voilà donc. Avec juste sept heures de retard, mais le voilà. Il aurait dû venir me chercher en après-midi, et... Voilà qu’il fait nuit. Je vous laisse un peu imaginer le retard, et ce que cela implique.


- Et je fais comment pour sortir moi... ? Le personnel ne s’occupe plus de ça à une heure si tardive.
- Bah c’est simple... Faut tout t’apprendre à toi. T’ouvres la fenêtre, et tu sautes. C’est simple non ?


Je le regarde, d’un air assez surpris. Sauter par la fenêtre ? Une fugue ? Si les médecins de cet hôpital me chopent, je risque de passer un sale quart d’heure... Je ne sais pas trop quoi en penser.


- Euh...
- Tu te souviens de la menace de l’autre jour ? Tu sais, celle des scalpels et...


Sans avoir écouté la fin de sa phrase, j’ai déjà sauté.


***


Nuit noire. C’est sous ce ciel obscur, et parsemé d’une multitude d’étoiles que nous nous trouvons actuellement. Les terrains d’entraînement étaient nôtres pour le restant de la nuit... Et peut-être plus selon ce que ce stupide nécromancien me prépare. Je ne m’entends pas spécialement bien avec, mais je n’ai pas vraiment le choix. À vrai dire, il ne m’inspire pas confiance. Pire encore, il me fait assez peur. Son pouvoir est terrifiant... Le voir jouer avec des morts n’est pas ce qui me branche le plus. C’est même inhumain de jouer avec selon moi. Dans ce sens, je me demande de quoi il serait vraiment capable... Ai-je bien fait de le suivre ? Je n’ai pas trop eu le choix, mais j’ai bien peur de m’être mis dans une merde encore plus grande.

Le garçon à mes côtés se terra dans un silence macabre pendant de longues minutes. Je ne sais pas ce qu’il me prépare, mais... Je commence réellement à flipper. Je devrais peut-être rentrer avant que cela ne soit trop tard, non ? Là, ses yeux sont fermés. Il ne me voit pas. Tant il dort carrément. C’est peut-être un petit coup de pouce du destin... Non ? Je devrais en profiter, en effet...

Discrètement, je me retourne, prêt à m’enfuir. Sauf que dans la panique, je n’ai même pas remarqué qu’il y avait quelqu’un d’autre derrière moi. Ou plutôt, quelque chose... Maman c’est quoi ce truc... ?


- Tut tut tut. Fuite refusée.


Ce machin... On dirait un géant, un monstre constitué de chair en décomposition. C’est juste ignoble... ! Et ça bouge en plus ! Son bras a reculé tout à coup, pour laisser partir un coup d’une puissance inimaginable. Si je me prends ça, je suis cuit... Ai-je le choix ?

Par dépit, je plaçai mes bras devant ma tête, afin de limiter la casse, fermant les yeux par peur de voir le coup arriver.


- Quoi ? C’est tout ? T’es sérieux là ?


Voilà que maintenant, c’est Aku qui s’approche, alors que le poing du colosse s’était arrêté à quelques centimètres à peine de mes bras. Il posa sa main sur mon épaule, avant de reprendre la parole.


- J'veux te rendre plus fort, et surtout plus courageux. Tu vois un truc qui sort de l’ordinaire, et tu paniques. Tu m’étonnes que tu finisses tout le temps à l’hôpital. Y a plus de boulot que prévu... Bon. Changement de règles.
- Changem… HEE !


Sans crier gare, le colosse m’avait saisi les deux bras, afin de complètement m’immobiliser. Il m’est impossible de m’en dégager... Piégé. Il m’a eu.

D’un sourire sadique, ses mains se chargent en chakra. Cette concentration massive prend bien vite la forme de quelque chose d’assez inquiétant... Et surtout, dangereux.


- Les règles sont simples. Tu prends sur toi et tu te sauves, ou tu restes paralysé par la peur et je t’achève.


Quoi... ? Il est sérieux là ?? Oui, il semblerait. Il s’apprête réellement à me trancher net, avec ce qui s’apparente à des scalpels constitués de chakra. Et avec cette mise en scène, et son caractère un peu trop espiègle... Il peut très bien aller jusqu’au bout de son acte. Mais comment faire ? Je ne peux absolument pas bouger mes bras, et il me demande d’esquiver ? Je ne sais pas comment faire. En tout cas, il s’approche, encore et toujours. Et moi, je suis condamné à le voir s’approcher. Encore et toujours, sans ne rien pouvoir faire. Serait-il réellement prêt à me tuer ? Ou plutôt, qu’entendait-il exactement par "achever" ? Vu la personne qui me fait face, je dois bien avouer que je suis dans l’ignorance la plus totale. Dans un sens, il m’a l’air franchement dérangé, mais dans un autre... Il semble pas mal se préoccuper de ma personne, et a l’air de bien tenir à ce que je me débarrasse de tout ce qui freine ma progression... À savoir la peur.

Son bras droit s’allonge sur son côté droit, totalement horizontal. Un coup horizontal ? D’après la hauteur de son bras, le coup devrait me toucher vers la gorge. Irk. Si cette chose me touche là... Je pourrais dire adieu à ma petite vie. Pitié, que l’on me vienne en aide... J’ai besoin que l’on me secoure…

Encore. Toujours. Encore besoin d’aide. Toujours secouru. Et maintenant que je ne suis livré que plus qu’à moi-même... Qu’est-ce que je fais ? Je ne sais pas. À trop m’être reposé sur les autres... Voilà où j’en arrive.

Seul, je ne vaux rien. Seul, je suis sans défense. Seul... Je vais mourir. Tout ça car je suis incompétent, et incapable de me débrouiller tout seul... Ce n’est que maintenant que je le réalise, et c’est peut-être trop tard...

Ou pas.

Ayant la volonté de m’en sortir à tout prix, j’ai réussi à esquiver le coup. Il m’a suffit d’envoyer la tête vers l’avant, pour faire basculer le haut de mon corps vers le bas, et ainsi éviter le coup de scalpel d’Aku. L’arme de chakra vint alors taillader les deux bras de chair de sa propre créature, et la pression sur mes propres bras devint ainsi totalement inexistante. Un regard furtif vers le haut, et je vis que le nécromancien ne s’y était pas attendu. L’instant qui suivit fut bref, mais riche. Mon poing droit s’était refermé avec force, et cogna le torse du garçon. Tout en me relevant, un second coup de poing partit droit sur son visage, qui l’envoya valser un peu plus loin.


- Aie aie aie... Pouah, t’y es pas allé de main morte...


Maintenant qu’il le dit... J’ai absolument donné toute ma puissance dans mes deux coups... Surtout le second. Le visage en sang, à terre... Je sens que je vais passer un sale quart d’heure... C’est peut-être l’occasion ou jamais de fuir, et d’aller me cacher... ? Quoique. Trop tard. Il s’est déjà redressé, debout sur ses deux pieds.


- Eh bah voilà ! J’préfère ça. Ça va m’éviter d’expliquer la raison de ton décès.


Le voilà qu’il rit maintenant... Ah parce que c’est drôle ??


- Bref. T’as compris non ? Là si tu avais paniqué, comme tu le fais toujours apparemment, je ne t’aurais pas raté. Et en prenant sur toi, c’est l’inverse qui s’est produit. Tu vois la différence, hein ?


Il s’approche de nouveau, amicalement, et pose sa main sur mon épaule.


- J’ai moi aussi mes peurs, mais je ne les laisse pas paraître, ce n’est pas elle qui me freineront. Moi aussi, des cauchemars ont hanté mes nuits, ont fait naitre en moi des peurs incontrôlables, et c’est en les surmontant que j’ai réussi à progresser. Tu dois en faire de même, et je vais te guider vers cet objectif. Oui, tu vas encore me supporter un long moment, ne t’en fais pas.


Souriant, je hoche la tête. Je comprends où est-ce qu’il veut en venir, ce qu’il veut dire. Il n’a pas tort. Mes peurs m’ont souvent freiné... Il était peut-être réellement temps de faire une croix dessus, de ne plus les laisser m’empiéter. C’est plus facile à dire qu’à faire, mais... Il le faut. J’en suis capable. Comme là, tout à l’heure, si j’étais resté paralysé par la peur, je ne m’en serais pas sorti, du moins indemne. J’en ai les capacités... Et malgré sa personnalité assez étrange, il semblerait que je puisse compter sur ce nécromancien assez atypique. Advienne que pourra.


***


Les jours passèrent. Les semaines passèrent. Je me suis remis de mes blessures de guerre, et me suis entraîné avec le Jônin réintégré. Et, en tout cas, ces plusieurs jours d’entraînement m’ont été assez bénéfiques, aussi bien physiquement que mentalement. J’ai sûrement pris un peu de puissance, aussi bien physique que technique, mais surtout... Mentalement, je tiens bien mieux la route qu’auparavant. C’est encore frais, et tout nouveau pour moi, mais je suis bien plus armé qu’avant sur le plan psychologique...

Désormais, ça allait être différent. Je suis bien plus solide qu’auparavant... En espérant que cela dure, et que cela porte ses fruits.