Natsuki ne savait pas vraiment quoi dire, aussi il resta silencieux pour le moment. Il venait de découvrir une nouvelle facette de son étudiante, un aspect qu'il ne lui soupçonnait pas. Il avait sentit tant de colère dans les mots de la jeune femme, au point que celle-ci avait prononcé des paroles vides de sens vers la fin. A-t-elle toujours été ainsi, se demanda intérieurement le Nara tatoué, ou bien était-ce là le résultat de la guerre sur l'esprit de Natsumi ? Des conflits et des ordres qui ne tendaient qu'à cultiver et faire croître la haine de l'Ennemi dans le cœur des soldats pour les rendre efficaces dans la seule tâche que l'on attend d'eux : tuer. Là était tout le paradoxe. Comment gagner une guerre si l'on n'est pas aussi impitoyable que son adversaire, mais comment concourir vers la paix lorsque l'on ne désire plus que tuer l'Autre ? Là était sans doute les interrogations que ruminaient bons nombres de dirigeants peut-être, et probablement même certains soldats. Ceux qui ne baignaient pas dans le sang de leurs adversaires en riant sur le champs de bataille en tout cas...

Les affaires qui le concernaient plus ou moins avec le cas de Sonoshee étant bouclées, il laissa cette dernière entre les mains expertes des ANBU chargés de la sécurité interne, et décida de se concentrer son attention sur Natsumi. Il n'approuvait pas particulièrement le comportement qu'avait eu son étudiante, même s'il ne pouvait au aucun cas lui jeter la pierre sur ce sujet. Lui-même avait eu des attitudes méprisables – contre son gré - ces derniers mois avant d'arriver à mettre un peu d'ordre dans sa vie brusquement chamboulée. Et quelque part, la réaction de la Yamanaka était naturelle, sur certains points tout du moins. Le mieux qu'il y avait à faire peut-être était de prendre le temps de discuter de tout cela avec elle. Nikkou, à l'époque où il avait été son... … mentor, avait rempli son rôle de façon extrêmement superficielle et négligée. Natsuki refusait même que l'on considère cet ancien Hokage comme ayant été son formateur un jour. Il ne voulait pas faire les mêmes erreurs que lui. Si un jour ou l'autre ses élèves auront besoin de sa personne, il voulait que ces derniers sachent qu'ils pouvaient compter sur lui. Tous les enseignements que pouvait dispenser un mentor n'étaient pas que techniques, loin de là. Parfois, un shinobi gagnait beaucoup plus en expérience à réfléchir un peu.

D'un Shunshui, le Nara se réceptionna à côté de Natsumi les mains dans les poches juste avant qu'elle ne bifurque dans une rue, et avança au même rythme qu'elle, comme s'il avait toujours été là.

« Tu sais Natsumi... » commença-t-il sur le ton de la conversation banale. « … c'est normal que tu ne l'ais pas amené au Village de ton plein gré. Si ça avait été le cas, Je t'avoue que je n'aurais pas comprit le sens de ton geste, et que le Village aurait vu cela d'un assez mauvais œil, pour rester dans l'euphémisme. Tu avais des ordres claires, et tu t'y es tenu autant que tu le pouvais, ce que j'apprécie. Imagine si chacun commençait à révéler à nos ennemis où se situe le Village de la Feuille ? »

Sortant une main de sa poche, Natsuki se frotta le bas du visage, avant de se dégager la bouche pour continuer.

« Cependant, la situation est parfois beaucoup plus compliquée que ce dont elle a l'air d'abord. Hum...Tu as dit que tu ne comprenais pas la relation que j'entretenais avec Sonoshee, et moi je n'ai pas vu ce qu'il s'est passé entre toi, elle et ce Kumojin. Alors que penserais-tu si nous prenions le temps de discuter tous les deux à propos de cette histoire ? Autour d'un repas pourquoi pas. A moins que tu préfères simplement rentrer chez toi et te reposer de cette longue journée que tu as vécu ? »

Le ton de Natsuki indiquait que, même s'il comptait respecter le choix de son étudiante, cela ne ferait pas de mal à cette dernière de lui accorder un peu de son temps. Elle pouvait potentiellement y gagner pas mal.

Qu’ils aillent tous se faire voir. Tout ce qui concerne Sonoshee et la guerre ne me concerne plus, du moins pour l’instant. Il est temps pour moi de me vider la tête dans un bon bain. Surtout que je dois prévenir mes parents de mon retour au village, eux qui doivent être morts de trouille. Et sincèrement il y a de quoi. Quand une pauvre genin à peine puissante tombe sur un monstre tel que Sonoshee, on a amplement le droit de s’inquiéter. Il me semble d’ailleurs qu’ils sont rentrés il y a de cela une ou deux semaines, donc ils devraient être à la maison. Cependant, alors que je marche tranquillement, un bruit que je connais bien se produit à mes côtés.

Je continue donc d’avancer, sans prendre le temps de me retourner pour voir qui c’est. De toute façon, je sais qui est la personne qui se trouve juste à côté de moi. Nara Natsuki. Celui qui ne doit pas s’être remis de ce que j’ai dit tout à l’heure sous ses yeux. Quand j’ai craché toute ma haine à la gueule de la sunajin. Le tout entouré d’ANBU, appréciant sûrement le spectacle à travers leurs masques. C’est alors qu’une voix m’arrive jusqu’aux oreilles, confirmant l’identité de mon interlocuteur. Que me veut-il ? Je ne suis pas trop ouverte au dialogue actuellement. Je veux juste retrouver ma famille et ma baignoire alors à moins qu’il veuille me suivre dans mon bain, il a intérêt à’être bref.

Pourtant, contrairement à ce que je pensais, il se range de mon côté. En effet il affirme que j’ai bien fait de suivre les ordres en ne l’emmenant pas directement au village. Encore heureux que j’ai bien fait ! Manquerait plus qu’on me reproche de suivre les ordres que mes supérieurs me donnent. Cependant, tout ceci n’était là que pour amorcer un discours un peu moins en ma faveur. La suite peut se résumer en deux phrases. En premier temps, il ne faut pas se fier aux apparences. Ensuite, il me propose de tout lui raconter autour d’un bon repas chaud. MAIS JE VEUX JUSTE VOIR MES PARENTS ET PRENDRE UN PUTAIN DE BAIN TRANQUILLE BORDEL ! C’est trop demander ou quoi ?! Je me retourne d’un seul coup en direction de Natsuki, arborant le même regard de tueur que j’ai lancé à Sonoshee tout à l’heure. À croire que ce regard est resté figé dans mon esprit.

- Ou alors je peux simplement poser ma main sur ton front pour tout te montrer, avant de me casser chez moi où mes parents m’attendent.

Ma voix ne tremble pas et mon ton est neutre. Mais à part mon regard de tueur, on croirait que je m’adresse à un supérieur que je viens de rencontrer. Or, c’est Natsuki, mon sensei. Pourtant, je n’arrive pas à me calmer. Toute cette agitation, toute cette histoire. Je pense qu’il me faut juste une bonne nuit pour me remettre de mes émotions. Après, si on s’amuse à me chercher avant que cela n’arrive, je ne me tiens pas responsable pour tout dégât que je ferais.

- En plus, j’ai pas faim.

Ou alors faut me donner Sonoshee à manger. Là, j’en laisserais pas une miette, histoire qu’elle soit rapidement rayée de la carte par mes sucs gastriques.

Natsuki posa pour la dernière fois un pied devant l'autre quand la jeune femme pivota vers lui, et s'immobilisa comme s'il arrivait au bord d'une falaise, et qu'il n'y avait rien d'autre à faire que d'admirer la vue. Sauf qu'il ne goûtait guère à ce qu'il voyait. Le regard qui se posa sur lui réveilla le monstre encré dans sa chair. En réponse, son sang commença instinctivement à bouillir, et une envie irrépressible de mutiler et tuer traversa ses veines en un flux continu vers son cerveau pour y exploser, décuplant ses désirs de mort. Le frisson le démangea jusqu'à dans ses cornes naissantes, qu'il parvenait encore à cacher sous ses cheveux. Une soif inextinguible de destruction assécha ses lèvres, mais un bref instant seulement. Ce n'était pas lui, jamais il ne réagirait de la sorte. Et il était hors de question qu'il perde le contrôle ici, en plein cœur de Konoha. Fermant alors les yeux, les sourcils froncés, le Nara tatoué pencha sa tête sur le côté, comme s'il cherchait à faire craquer les os de sa nuque, et reprit ses esprits deux secondes plus tard. Lorsque ses paupières ne furent plus closes, il n'y avait plus de haine à lire dans ses prunelles, seulement les dernières gouttes du sang qui s'était injecté dedans, et de la déception.

Il ouvrit la bouche, s'apprêtant à dire quelque chose, puis il se ravisa. D'une voix qui se voulait douce, et armé d'un très fin sourire de convivialité, il opta pour autre chose :

« Non, cela n'en vaut probablement pas la peine en réalité. Pas ainsi en tout cas. Mais tu as raison, tu as eu une très longue journée, éprouvante qui plus est. Tu as amplement mérité ton droit de te reposer. C'est ce qu'il y a de mieux à faire à dire vrai. Va donc rejoindre tes parents, ils ont dû s'inquiéter pour toi, et seront ravit de voir que tu es revenue de ton combat en un seul morceau. »

Il ne servait à rien qu'il tente de la prendre de front, pas ainsi. Et ce n'était pas son genre de toute façon. Malgré l'altération de ses tendances qu'avait provoqué le réveil de son sang damné, il évitait toujours de hausser le ton, et d'entrer dans des dialogues de sourds.

Après avoir pesé le pour et le contre mentalement, il ajouta une dernière suggestion. Inutile de dire que si l'on se concentrait uniquement sur le court terme, c'était le contre qui l'emportait : Natsumi n'avait clairement pas les idées claires, aveuglé qu'elle était par la colère et la fatigue, mais peut-être que ses mots feront écho plus tard.

« Si avant de partir, le conseil du jour de ton formateur t'intéresse, le voici : évite de laisser tes émotions déborder et prendre le contrôle de tes actes ainsi, que ce soit ici ou au combat. Cela pourrait coûter la vie de tes équipiers comme la tienne »

Des phrases en plus comme '' pour quelqu'un qui nourrit un projet comme le tien, tu provoques un peu facilement la Mort. '' ou '' et s'il ne t'intéresse pas, tu peux le mettre où tu veux '' n'auraient rien apporté, si ce n'était encore un peu plus d'huile sur le feu. Et il n'y avait nulle besoin de cela. Tout ayant été dit, il prit congé sans salutation et s'en alla dans la direction opposée sans jeter un regard en arrière.

Là je pense avoir été clair. Je ne suis vraiment pas disposé à discuter autour d’un repas, pas maintenant en tout cas. Je me retrouve donc là, face à mon sensei qui semble hésiter à me répondre. Peut-être se demande-t-il s’il faut qu’il insiste ou non ? Je ne sais pas et à vrai dire, ça ne changera rien. La réponse est non, et ça ne changera pas. Ah par me mettre encore plus en colère, insister ne fera pas avancer les choses. S’il a quelque chose à me dire, qu’il le fasse maintenant car là, je ne vais pas tarder à me casser tout droit chez moi, sans laisser personne m’en empêcher.

Étrangement, c’est un petit sourire amical qui vient orner le visage du Nara. Puis, d’une voix douce, il s’occupe à me répondre. Aleluia ! J’ai bien cru qu’il n’allait jamais me laisser partir. Pourtant, il me paraît un peu trop compréhensif justement… M’ouais nan, je ne vais pas chercher le pourquoi du comment. Cependant, avant de me laisser partir, il ajoute un dernier petit conseil. Enfin, ce n’est pas vraiment un conseil, mais plus un reproche. Immédiatement, mon sang ne fait qu’un tour. Alors qu’il s’est retourné pour partir de son côté, je prends soin de parler assez fort afin qu’il m’entende.

- Une fois immortelle, je n’aurais plus rien à craindre. Je ferais en sorte d’être assez puissante pour que rien n’affecte la vie de mes équipiers, sache-le. Après tout, j’appartiendrai à une race supérieure aux hommes qui ne craint pas ce genre de chose.

Puis, sans attendre de réponse, je m’en vais à mon tour de mon côté. Après quelques minutes de marche dans un silence macabre, j’arrive chez moi, seule. À peine ai-je ouvert la porte que ma mère me saute dans les bras. Mon père lui, ne tarde pas à nous rejoindre avec un regard soulagé. Ils se sont vraiment inquiétés pour moi…

- Tout va bien, je n’ai rien. Je suis heureuse de voir que vous aussi vous êtes rentrées en un seul morceau.
- Ta mère n’arrivait pas à dormir depuis ton départ pour le front… On s’est tellement inquiété.
- Vous savez, je ne suis qu’une genin, on ne me confie pas de grosse mission alors je ne craignais pas grand-chose ! Si vous voulez, je vous raconterais tout demain, là il faut que j’aille me prendre un bon bain suivi d’une bonne nuit de sommeil.
- Oui je te comprends, tu dois te reposer…

Au final, tout va bien. Mes parents n’ont rien eu, moi non plus et je suis actuellement dans mon bain. Une fois au calme, je me surprends à me repasser toute cette journée. Tant de chose en si peu de temps. Une mission toute simple qui au final m'a mené jusqu’ici avec une ennemie. Cependant, c’est la suite qui me perturbe le plus. Ma discussion avec Natsuki. Plus j’y pense et plus je regrette. En même temps, quelle idée de venir me parler alors que j’étais fatigué et énervé ? Surtout pour me proposer un simple repas. Quoique, Natsuki ne me connaisse pas encore bien alors ça peut se comprendre.

♦♦♦

Une fois le soleil levé, je me décide à me lever. Malheureusement, je n’ai pas autant dormi que ce que je voulais. Cependant, il est l’heure pour moi d’aller à la rencontre de Natsuki. Heureusement, j’ai vu il y a longtemps sur les papiers d’une mission, où est-ce qu’il habite. C’est donc dans l’optique d’aller le voir que je me prépare soigneusement mais rapidement. Une fois prête, je prends bien soin de laisser un mot à mes parents en leur disant que je serais de retour pour le déjeuner, où je leur raconterais tout. Vu l’heure qu’il est, j’ai largement le temps d’aller voir Natsuki.

Sautant de toit en toit, j’arrive très rapidement à destination. Une fois face à sa porte, une lueur d’hésitation passe dans mon esprit. Seulement, elle est rapidement chassée avec une grande inspiration. Puis, déterminé, je frappe deux coups sur la porte. Espérons qu’il soit déjà réveillé.

Six heures du matin, une nouvelle journée commençait pour Natsuki. Ses yeux s'ouvrirent d'eux même, mécaniquement, comme un automate programmé. Comme chaque matin, il épongea son front du revers de la main, chassa les restes de la nuit dans ses yeux, et quitta son lit trempé de sueur. Cela faisait trois mois que cela durait, et il avait renoncé depuis longtemps à l'espoir de profiter encore d'un sommeil paisible dans sa vie. Mais il n'allait pas sans plaindre, cela restait toujours mieux qu'une demi-année plus tôt, quand les visions atroces qui hantaient ses nuits ne lui permettaient même pas de fermer l'œil. Il n'avait été jamais été un adepte de la douche du matin, préférant largement laisser cela au soir pour conserver une literie propre, mais les altérations que son corps avait subit l'avait forcé à revoir ses critères de vie. Si seulement c'était son seul problème, songeait-il parfois. Mais il lui fallait faire avec, et continuer d'avancer. C'était le choix qu'il avait décidé, et qu'il devait maintenant assumer.

La maison était à sa disposition, comme souvent. Ses parents vivaient principalement à l'extérieur de Konoha pour ainsi dire, où ils enchainaient ensemble ou séparément des missions de long cours en extérieur. Et lui qui avait prit assez en grade pour adopter un mode de vie similaire, autant dire qu'ils ne se croisaient tous plus très souvent. Ils gardaient néanmoins contact entre eux par le moyen le plus simple du monde : des mots qu'ils se laissaient sur la table. Natsuki ne leur avait jamais avoué qu'il avait apprit la vérité sur ses origines, et qu'il savait qu'il n'était pas leur enfant. A quoi bon de toute façon ? Il ne venait peut-être pas de leur chair et de leur sang, mais il n'en était pas moins leur fils, et eux son père et sa mère. Il ne les voyait pas souvent, mais cela ne l'empêchait pas de les aimer. Du moins, avant que la malédiction qui coulait dans ses veines ne commence à dévorer chacune de ses émotions...

Se contentant d'un peignoir le temps du petit déjeuner, il laissa ses cheveux libres terminer de s'égoutter sur ses épaules couvertes. Hormis le bruit de ses pas, il n'y avait pas un son dans la maison, comme d'habitude. Enfin, la machine à laver tournait ce matin, histoire de tenir compagnie à Natsuki de ses battements de tambour. La solitude ne le dérangeait pas cela dit, surtout depuis son accident, car la tranquillité lui facilitait la tâche pour instaurer un climat de paix en son âme. Avec plus ou moins de succès. Le monde monochrome dans lequel il s'était enfermé commençait à retrouver de ses couleurs – encore fades, mais présentes -, et la nourriture de sa saveur. Il avait reprit un peu de plaisir dans le fait de boire un jus d'orange pressé le matin, plutôt que de simplement le considérer comme un liquide orangé qui apportait le nécessaire à son corps pour fonctionner efficacement. Il ne pouvait pas en dire autant de ses céréales, mais la faute ne venait ici pas de lui : le produit n'était déjà de base qu'une pseudo-mélasse sans goût réel. Maintenant qu'il parvenait à nouveau à percevoir l'arôme des aliments, peut-être était-il temps qu'il revienne à sa marque précédente. Sauf qu'avec la guerre contre Suna, il devenait difficile de se procurer des '' Captain Ukulélé '', ces céréales dont le Siège de production demeurait dans le Pays du Vent...

Deux coups sur la porte figèrent sa cuillère à une dizaine de centimètres de ses lèvres, suite à quoi elle replongea dans le bol avec son chargement. Outre le fait que Natsuki se demandait qui pouvait venir le voir de si bon matin, cela lui rappela surtout qu'il n'avait toujours pas changé la pile de la sonnette. Vu l'heure, il devait probablement s'agir d'un messager venu lui confier une nouvelle mission.

« Oui ? » questionna-t-il en déverrouillant puis ouvrant sa porte. « Oh. C'est toi Natsumi. »

Un sourire un peu plus amical que celui que l'on réserve au facteur se dessina sur ses lèvres.

« Tu es bien matinale dis-moi. Je peux faire quelque chose pour t'être agréable ? »

Natsuki se doutait bien qu'il y avait un rapport entre la visite de la jeune femme si tôt dans la matinée et l'incident de la veille, si l'on pouvait réellement le qualifier de tel, mais il n'en aborda pas le sujet. S'il lui tenait rigueur pour les mots crus qu'elle avait pu prononcer dans la soirée, il n'en montra pas le moindre signe.

« Viens entre, nous n'allons pas discuter ainsi sur le palier. » proposa-t-il en s'écartant de la porte pour lui laisser la voie libre.

Plus les secondes passent et plus mon stress augmente. Je ne sais pas comment agir avec lui vu comment que je lui ai parlé hier soir. Surtout que, à la base, ce n’était même pas contre lui que j’étais énervé. C’est cette… Sunajin de malheur qui en ait principalement la cause. M’humilier ainsi tout en jouant sa diva… Un jour je lui ferai regretter ce jour, soyez en sûr. En plus de ça, j’étais particulièrement fatigué suite à mon retour du front. Un mélange qui s’est avéré pas très bon pour mes relations…

Alors que j’appréhendais la suite, la voix parfaitement réveillée de mon sensei s’élève derrière la porte. Au moins je ne l’ai pas réveillé, voilà une chose de moins pour laquelle s’excuser. Puis, après avoir ouvert la porte, le visage du Nara s'embellir d’un petit sourire amical. Il doit sûrement se douter du pourquoi du comment je suis ici. Cependant, il n’aborde pas directement le sujet, préférant me demander la raison de ma visite. Je vois, il veut que ce soit moi qui lance la conversation au sujet d’hier soir. C’est compréhensible après tout, je suis la seule à être en tort dans toute l’histoire.

Sur le coup, j’avais envie de répondre. Pourtant, un détail détourna mon attention assez temps pour que Natsuki m’invite à entrer. Ce petit détail n’est rien d’autre que la tenue qu’arbore mon sensei. Un simple peignoir et les cheveux relâchés. Ils ont l’air de ne pas être tout à fait sec d’ailleurs. Le Nara est donc un adepte de la douche matinale, enfin je suppose. Enfin bref, ce n’est absolument pas le sujet du jour. J’ai bien mieux à faire que décortiquer précisément la tenue du jeune homme, comme une critique de mode en manque de commérage.

Comme pour me laisser la voie libre, Natsuki se décale légèrement après avoir formulé son invitation. En guise de réponse, je lui souris timidement avant d’acquiescer de la tête. Une fois à l’intérieur, je respire un bon coup sans faire attention à ce qui m’entoure. Certes on n’a pas tout le temps l’occasion de voir la maison de son sensei, mais disons qu’aujourd’hui, j’ai d’autre chose à penser. Comme par exemple, comment m’excuser pour mon attitude lamentable envers lui la veille. Oh et puis zut, des excuses restent des excuses, ce n’est pas en tournant autour du pot que ça va changer quelque chose.

- Excuse-moi pour hier… Je me suis un peu défoulé sur toi sans vraiment le faire exprès…

Instinctivement, mon regard se baisse pour ne pas affronter le regard du Nara.

- J’étais particulièrement sur les nerfs à cause de cette femme… Enfin, de cette journée en général. Sans compter la fatigue qui est venue se rajouter… Tout ça m’a vite poussé à bout.

Et quand je suis à bout, je me défoule sur la première personne que je croise…

- Cette journée est l’une des pires que je n’ai jamais passée, et me prendre la tête avec toi n’a pas vraiment arrangé les choses. Bien au contraire même.

J’ai vraiment l’impression de passer pour une conne, incapable de contrôler ses sentiments. Natsuki m’a même prévenu hier soir… Cela pourrait bien me perdre un jour. Non vraiment, j’ai été lamentable.

« Installe-toi dans la salle à manger, je suis à toi dans une seconde. » lui dit-il en refermant la porte après son passage.

En réalité, il lui en fallu six après s'être éclipsé pour revenir de façon plus présentable. Il avait troqué son peignoir contre ses vêtements de tous les jours, sombres de haut comme de bas, et attaché ses cheveux en son habituelle queue de cheval. Prenant place face à Natsumi, il considéra un instant le bol qu'il avait laissé. Mais avant qu'il n'ai le temps de songer à le débarrasser, son invitée entra dans le vif du sujet. Alors il l'écouta en silence, les doigts entrelacés sur la table. Et lorsqu'elle eu terminé, il répondit d'un simple sourire, laissant un peu de silence faire son office.

« Excuses acceptées alors. » lâcha-t-il d'un ton naturel, comme s'il n'y avait rien de plus à en dire.

En réalité, c'était le cas. Que pouvait-on réellement ajouter sans que ce ne soit en trop ?

« Je te sers un verre de jus d'orange ? » proposa-t-il en se levant, son bol à la main.

Armé d'un couteau qui semblait plus à sa place entre les mains expertes d'un tueur, il trancha d'un geste ses trois victimes riches en agrumes avant de les presser. Ce qui ne l'empêcha pas de parler.

« Tu as le droit de relever la tête et sourire, tu sais ? » lança-t-il par-dessus son épaule. « Je ne vois pas l'intérêt de ressasser ce qu'il s'est passé hier. Si tu t'en es voulu pour ton comportement, et que tu es venue me demander de te pardonner, c'est que tu as entendu le message que je voulais te faire comprendre. L'affaire est donc classée. De mon côté, je ne pense pas qu'il soit nécessaire que je te fasse la leçon, je ne suis pas ton père. »

Posant le verre de jus fruité devant Natsumi, il reprit sa place face à elle et entrelaça à nouveau ses doigts, sans se dépêtrer de ce sourire propre à ceux qui savent profiter des petits plaisirs de la vie – une chose qu'il s'efforçait de revivre comme avant.

« Cela dit, ce petit... incident de la veille m'a offert une perspective de progression intéressante pour toi, si tu vois où je veux en venir. J'ignore ce qu'il s'est passé pour te mettre dans un état pareil hier, bien que j'ai tout à fait comprit que Sonoshee en était la cause, mais j'ai pu y voir que la gestion du stress et de la colère n'était pas ton fort. Je ne t'en blâme absolument pas Natsumi, car il n'y a pas eu de conséquences – hormis peut-être le complexe de supériorité que t'alloueront maintenant tout ceux qui t'ont vu et entendu. Mais du coup, il serait peut-être intéressant pour toi de travailler sur toi-même cet aspect là. Ce n'est qu'une proposition bien entendu, pas un ordre, mais j'imagine que tu n'ignores pas que tu vas être de plus en plus confrontée dans ta vie à des niveaux de stress et de colère intenses. Ce ne sera donc pas un mal que de t'exercer à garder la tête froide en toute circonstance. »

Le Nara tatoué pencha légèrement sa tête sur le côté, et son sourire perdit un peu de son éclat.

« Tu as le droit d'être en colère Natsumi, tu as le droit de te sentir excédée et de laisser '' tout exploser ''. Mais tu dois le faire quand tu es seule. Tu ne peux pas laisser ces sentiments obstruer ton jugement, et mettre ton équipe autant que toi en danger. Je suis d'accord, cela changera peut-être si... quand tu deviendras immortelle, mais pour le moment, ce n'est pas le cas, et... »

Natsuki s'arrêta, et gratta sa joue avec un sourire gêné peint sur le visage.

« Zut, j'avais dit que je ne te ferai pas la leçon. Bien, ceci ayant été dit, je pense que nous avons fait le tour. Sauf si tu veux bien m'accorder encore un peu de ton temps, et me parler de ce qu'il s'est passé entre toi et Sonoshee. Je pourrai lui poser la question aussi, mais je pense qu'elle va être occupée ces prochains temps, et je préfèrerai entendre de ta bouche cette histoire. »

Dressant son index devant ses lèvres dont la fente élargit révéla ses dents blanches, il l'agita en signe de négation.

« Et avant que tu le proposes à nouveau, je refuse immédiatement que ce soit par transfert de souvenirs. Je tiens à ce que tu formules tout cela avec des mots. Cela ne te fera pas de mal, j'en suis persuadé. »

Il ne pouvait être plus dans le vrai. Le dernier Yamanaka a avoir établit un lien psychique avec lui par contact physique l'avait très mal vécu, tout comme lui. C'était il y a six mois, au début de ses crises, mais il préférait ne pas réessayer encore.

Et sous ce prétexte, il y avait du vrai : cela ne pouvait être que constructif pour elle de raconter avec des mots ce qu'il s'est passé sur le champs de bataille. Un bon début pour gérer des souvenirs encore vifs et hautement explosifs.

Avant que je ne puisse m’excuser, mon interlocuteur est parti se changer en quatre vitesses. Puis, une fois mes excuses prononcées et tout mon baratin déballé, Natsuki me répond d’une simplicité affolante. Comme si tout ce qui s’est passé n’avait absolument aucune importance et qu’au final, je me suis inquiété pour rien. Est-ce lui qui pardonne facilement, ou moi qui m’inquiète pour rien… ? Je ne sais pas. Puis, toujours avec son sourire amical, il me propose tout simplement un verre de jus d’orange.

- Pourquoi pas…

Suite à ma réponse positive, le jeune homme s’attaque à préparer le jus d’orange. Ah parce qu’il le fait maison en plus… J’ai étrangement l’impression de profiter de lui. Pas uniquement pour le jus d’orange… Mais disons qu’hier, je lui aie parlé un peu comme une merde et qu’à présent, il est en train de me préparer un jus d’orange maison. Voyez comment que la situation a changé en si peu de temps et le tout, en ma faveur. Non vraiment, Natsuki est vraiment quelqu’un de gentil. Trop même.

Alors qu’il s’occupe à trancher les agrumes, il relance la conversation en parlant directement de mon expression. Il est vrai que depuis que je suis arrivé ici, j’ai gardé la tête baissée sans vraiment le vouloir. Pourtant, son intervention ne fait que me mettre plus mal à l’aise face à la situation. Il ajoute ensuite que l’affaire est classée en ce qui concerne hier soir et qu’il ne compte pas me faire la leçon. Ouais m’enfin, là, il a pleinement le droit de me faire la leçon et vu que je suis complètement en tort, je ne pourrais que me taire pour l’écouter.

Une fois le jus de fruit prêt, le Nara se réinstalle face à moi. Portant le breuvage d’agrume à mes lèvres, j’écoute ce que mon Sensei a à me dire. Selon lui, il faudrait que je m’entraîne à contenir mes émotions et particulièrement la colère. Il n’a pas vraiment tort… Moi-même je ne savais que j’avais du mal à contenir mes émotions avant hier soir. Il finit par reprendre sur la même lancée, m’expliquant que je dois relâcher la pression quand je suis seule, pas comme hier soir en gros. Cependant, la fin de son discours manque de me faire recracher mon jus d’orange. Alors il a entendu… J’espérais qu’il n’avait pas entendu mes dernières paroles hier soir. Là, je me sens vraiment conne.

Pourtant, Natsuki lui aussi semble gêné à ce moment. En effet, comme il le dit, il avait dit qu’il ne me ferait pas la leçon et c’est pourtant ce qu’il a fait… M’enfin, le sujet semble clos alors passons à autre chose. Autre chose comme… La journée d’hier. Mon Sensei aimerait savoir ce qui s’est passé avec Sonoshee, sûrement pour comprendre pourquoi je la déteste tant. Plus que des mots, lui montrer toute l’action en quelques secondes reste plus simple et rapide. Oui mais non. Avant même d’avoir eu le temps de lui proposer ça, il m’indique qu’il ne veut pas de transfère de souvenir… Rholala.

- Laisse-moi au moins le temps de te le proposer ! Et puis je ne vois pas pourquoi tu ne veux pas… On croirait presque que tu es un partisan du « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué » !

Pour la première fois depuis mon arrivée ici, un petit sourire est apparu sur mon visage. Ces quelques secondes ont largement suffi pour que ma gêne s’envole.

- M’enfin bon… Puisque c’est ce que tu veux.

Portant mon verre à mes lèvres, j’avale une gorger du jus particulièrement délicieux. Puis, j’inspire un grand coup avant de commencer mon récit.

- Pour commencer, j’ai reçu comme mission de garder la frontière de Hi no kuni. Accompagnés d’un kumojin du nom de Dentô Akeno, nous devions faire en sorte qu’aucun ennemi ne passe la frontière. Bien évidemment, Sonoshee a débarqué en criant qu’elle voulait aller à Konoha et que si on l’en empêchait, elle passerait de force.

Rien qu’en pensant à cette garce, je ne peux m’empêcher de serrer les poings.

- Après un refus catégorique de ma part de la laisser passer, elle s’est mise à évoquer le nom de On’. Comme quoi elle venait en tant qu’alliée et que si on l’en empêche, on devra l’expliquer à l’Hokage. Le pire c’est qu’elle a vraiment cru qu’on allait la laisser passer uniquement parce qu’elle supposait connaître l’Hokage…

Faut vraiment être con pour penser passer la frontière juste avec ça comme excuse.

- Après un bref affrontement sans grands dégâts, elle a fini par nous donner un parchemin contenant une série de lettres entre elle et le Rokudaime. Même s'il y avait la signature du Myakudou, ça pouvait très bien être une simple copie. Du coup, j’ai proposé quelque chose de très simple : Lire dans son esprit pour voir si ce qu’elle dit est bien vrai.

Car oui, je sais aussi être un minimum généreuse. Ou alors j’ai été naïve…

- Bien sûr, madame la diva a refusé. Sans parler de toutes les autres conditions qu’elle aussi refusé. Le pire c’est que j’ai essayé de trouver un moyen qui conviendrait à nos deux parties, mais non. Cette connasse voulait le beurre et l’argent du beurre.

Et encore, le nom connasse est bien trop gentille pour tout ce que j’éprouve envers cette femme.

- Pour terminer, elle a littéralement démoli Akeno. Avec une force et une vitesse incroyable. Le Dento n’a pas eu le temps de comprendre ce qui lui est arrivé qu’il a valsé à plusieurs centaines de mètres. Et moi, comme une conne, il ne me restait plus qu’à l’amener à Konoha. J’ai été obligé de… faire la gentille avec elle pour espérer en sortir vivante. Elle a détruit ma fierté avec un plaisir non dissimulé.

Après un bref soupire, je termine mon récit par une simple petite phrase.

- La suite, tu la connais.

Natsuki ignora la remarque, et se contenta simplement de sourire. La jeune femme n'avait pas besoin de savoir pourquoi il redoutait autant le contact psychique avec les membres de son clan. Viendra peut-être un jour où ce ne sera plus le cas, et à ce moment là il n'y aura plus besoin de se poser la question.

Attentif, il l'écouta jusqu'au bout sans l'interrompre, sans relever ses débordements. Il l'observa, étudiant autant ses mots que son attitude lorsqu'elle les prononçait. Le corps parlait davantage que les lèvres, il suffisait de se montrer attentif. Quand Natsumi arriva finalement au bout, il garda encore un peu silence, les doigts liés devant lui pour former une pyramide de ses mains, et réorganisa tout ce qu'il avait entendu et vu dans son esprit.

« Merci d'avoir prit le temps de me raconter tout cela. » commença-t-il en croisant les bras sur sa poitrine, l'air pensif. « Je vois que Sonoshee a essayé d'utiliser la même méthode pour passer, même si je lui avais dit que la prochaine fois ne se fera pas sans accroc. »

Il soupira en faisant une moue contrariée, et pencha la tête sur le côté en fermant les yeux.

« J'ai aussi ma part de responsabilité dans tous cela. »

Il posa une main sur la table, et se focalisa un instant sur le battement de ses doigts contre le bois, comme pour mettre un peu d'ordre dans le fil de sa pensée.

« Je me répète vis-à-vis de hier, mais tu n'étais pas en tort. Tu avais l'ordre de ne pas la laisser passer, ni elle ni qui que ce soit d'autre, et tu t'y es tenu. Les lettres qu'elle t'a donné à lire ne constituaient en aucun cas une preuve : comme tu l'as fait remarquer, ce n'est pas difficile de les falsifier. Elle non plus n'était pas en tort en vous attaquant cela dit : vous étiez ses ennemis. Telles sont les règles de ce jeu stupide dans lequel nous avons été jetés. Et c'est bien là le problème de la guerre : l'Autre est devenu est ennemi à cause de sa naissance, et non de ses convictions. Quand nous sommes en missions, il nous arrive de nous battre et tuer nos adversaires, mais eux comme nous savons pourquoi nous sommes là, et pourquoi nous risquons notre vie. Dans le cas actuel, nous sommes poussés à craindre et à attaquer quelqu'un simplement parce qu'il porte le symbole de Kiri ou de Suna sur son front. Nous le détestons parce qu'il n'est pas né chez nous, et qu'il est rattaché à un Village que l'on nous a désigné comme ennemi. En bref, nous ne nous battons plus le temps d'une mission contre des ennemis définis, mais nous affrontons le peuple d'une nation entière jusqu'à ce que la guerre cesse, parfois longtemps après encore... Et dans ces conditions, comment en arriver à la paix s'il faut attaquer à vue ? Comment savoir quand lâcher du leste, quand la crainte de se faire arracher le bras en tendant une main amicale bloque toute envie de se montrer conciliant ? »

Natsuki attrapa son verre d'agrumes entre ses mains, et le fit glisser doucement en cercle sur la table pour en observer les remous. Mais rapidement, son regard se posa sur Natsumi.

« Hier mis à part, je n'ai rencontré Sonoshee qu'une seule fois, il y a plusieurs mois à Kawa no Kuni. Mes ordres étaient sensiblement les mêmes que les tiens, à savoir patrouiller et prévenir une invasion des forces militaires du Pays du Vent. Et comme pour toi, elle m'a demandé de ne pas lui barrer la route, de simplement la laisser marcher jusqu'à la frontière. Tu penses bien que j'ai refusé. Elle venait avec un message de paix, mais dans le contexte où nous vivions – et vivons toujours d'ailleurs – cela pouvait très bien être un traquenard. Je n'avais aucun moyen de vérifier la véracité de ses propos, tout au mieux je pouvais la dépouiller entièrement de ses affaires pour la trainer jusqu'à Konoha. Bien évidement, c'était hors de question pour elle. Comme elle voyageait à découvert, je lui avais simplement demandé de rebrousser chemin suite à une succession de négociations ayant abouties à un cul-de-sac, sans qu'aucun de nous deux n'ai besoin de recourir à la force pour faire valoir son opinion. C'est là qu'elle m'a sortie ce qu'elle gardait en réserve : sa fameuse correspondance avec notre Hokage. »

Il se pencha en arrière, pour écraser complètement son dos contre le dossier de sa chaise, comme s'il cherchait à prendre du recul dans ce qu'il disait.

« Je ne pense pas que tu avais une raison de croire à son courrier, mais dans mon cas, c'était différent. D'une certaine manière, j'ai été assez proche d'Onpu pendant quelques temps. Dire que je l'ai fréquenté serait exagéré, mais j'ai été en contact avec lui plusieurs fois. Et à force de l'observer, forcément... »

Ne sachant vraiment comment fermer la porte qu'il venait d'ouvrir, il préféra simplement laisser sa phrase tel quel, inachevée, et passa à la suite.

« Lorsque j'ai parcouru les missives, j'ai tout de suite su qu'elles étaient vraies. Non pas à cause des signatures, mais grâce au style. Aussi doué que soit le faussaire, il est impossible de reproduire la façon dont Onpu écrit. Il construit ses phrases comme il vit son existence, dans une tournure plus qu'unique. Si tu as déjà eu l'occasion de parler avec lui, tu dois voir ce dont je parle. Toujours est-il que j'ai cru à ces lettres, et j'y ai vu un espoir. Un espoir de paix, le premier pas possible vers un arrêt des hostilités. Qu'en était-il s'il y avait d'autres shinobis comme elle, même parmi les plus dévoués à leur cause, qui commençaient à douter de l'intérêt réel de cette guerre dans laquelle leur Kage les avait mené ? J'ai dû faire un choix. Et j'ai choisi de lui faire confiance, tout comme notre Hokage l'avait fait avec elle. »

Il marqua un petit temps de pause, et illustra ce qu'il s'était passé dans sa tête.

« Comme à chaque fois que je prends une décision, j'ai accepté toutes les responsabilités qui en découlaient, tous les risques que je faisais courir à chacun en ouvrant la voie à une Sunajin vers notre Village. Je voulais la guider en ayant parfaitement à l'esprit que tout débordement, toute conséquence possible me sera directement imputés. Je voulais le faire parce que je croyais à cette possibilité de paix avec Suna. »

Il soupira à nouveau en affichant une moue.

« J'étais prêt à l'accompagner jusqu'à Konoha, mais elle s'est désistée au dernière moment, sous prétexte qu'elle avait encore quelque chose à faire avant de rejoindre notre Village. Elle devait déjà savoir qu'elle n'en sortirait plus si facilement une fois entrée. Et moi je savais qu'en déclinant mon offre, elle aurait du mal à trouver un autre moyen de venir jusqu'à Konoha sans incident. La preuve en est. Néanmoins j'ai fait le choix de la laisser partir sans l'attaquer. Je n'avais pas de raison de le faire, outre celle qui découlait directement du contexte de guerre. »

Tapant du plat de la main sur la table, il marqua la fin de son récit.

« Tu sais maintenant quelle est '' la nature de ma relation '' avec Sonoshee, et pourquoi je n'étais pas particulièrement surpris de la voir aux Grandes Portes du Village de la Feuille. Même si, je t'avoue, je m'attendais davantage à la retrouver pieds et poings liés de force, ou même à l'état de cadavre – en sachant qu'elle même en aurait eu plusieurs sur les mains, ce qui n'aurait pas jouer en la faveur du message qu'elle prétendait porter. Je ne vois pas ce qu'elle espérait d'autre... »

Un soupire de plus marqua la conversation, suite à quoi il retrouva son sourire.

« En tout cas, même si tu es quelque part la victime de cette histoire, tu as pu voir par toi-même ce que cela donne, de la fierté mal placée. Je ne dis pas qu'il faut se laisser marcher dessus, loin de là, et je remets en question autant ton comportement que le sien. Je crois cependant qu'une grande partie de ce qu'il s'est passé est dû à la pression que le contexte de guerre exerce sur nous. »

Le Nara s'attaqua finalement à son propre verre de jus d'orange, dont il n'avait fait que regarder le contenu jusqu'à présent.

« Je pense que tout est dit sur le sujet. Mon conseil du jour, tu le connais déjà : ne laisse ni ta colère ni ta fierté te faire prendre de mauvaises décisions sur le coup de l'émotion. Se faire blesser ou tuer est une chose, mais cela ne sera jamais pire que d'avoir le sang de ses équipiers sur les mains. »

Natsuki n'étant pas du genre à terminer ses entretiens de la sorte, il le ponctua d'une note plus légère en guise de conclusion.

« Cela m'a fait plaisir que tu sois venu me voir Natsumi. » confia-t-il avec un sourire amical. « Même si tu t'emportes parfois, tu sais reconnaître tes erreurs quand tu en fais, et c'est un noble trait de caractère. Tu as peut-être d'autres impératifs, aussi je ne te retiens pas plus longtemps si tu dois partir. Sache en tout cas que tu es la bienvenu ici si tu désires passer à l'occasion. »

Si la jeune femme n'avait rien d'autre à ajouter, tout comme lui, alors n'avait plus qu'à la raccompagner jusqu'à la porte.

Pendant tout le long de mon récit, Natsuki est resté silencieux. Il a attentivement écouté tout ce que je lui aie dit à propos de ma rencontre avec Sonoshee. À présent, il devrait être en mesure de comprendre pour je la déteste tant, pourquoi j’étais à bout hier soir. Cela ne va bien sûr pas justifier le comportement que j’ai eu à son égard hier soir mais bon… C’est déjà ça quoi. Une fois tout ceci fait, il me remercie tout simplement pour avoir pris le temps de tout lui expliquer en détail. Puis, il m’annonce qu’il a lui aussi une part de responsabilité dans tout cela. Elle aurait utilisé la même méthode pour passer autre part... ? Je ne suis pas sûr de tout comprendre ce qu’il insinue.

Il reprend alors, sûrement pour m’expliquer pourquoi il a une part de responsabilité dans cette histoire. Je suppose déjà que c’est dû au fait qu’il a rencontré Sonoshee, mais après, je n’en sais pas plus. Il commence tout d’abord, comme il le dit lui-même, se répéter par rapport à hier. Comme quoi je n’étais pas en tort en suivant les ordres et que les lettres ne constituaient pas une preuve suffisante. Pourtant, il ajoute qu’elle aussi n’était pas en tort en nous attaquants. En effet, nous étions ennemis, et nous le sommes toujours d'ailleurs, donc quoi de plus normal que des ennemis qui se tapent dessus ? La suite de son discours, elle, est beaucoup plus philosophique. Traitant de la spirale infernale de la guerre. Malheureusement, on ne peut pas y faire grand-chose et ce n’est pas une petite genin dans mon genre qui va changer tout ça.

Je l’écoute sans dire un mot. Que dire de tout ça ? Tout est vrai et pourtant, ce discours ne reste que des mots. Personne actuellement n’a la véritable force de changer le monde Shinobi, même pas les Kage. La seule est unique façon d’atteindre cet objectif, c’est que tous les villages se réunissent sous une même bannière. Pas une alliance comme avec Kumo, non… Mais bel et bien une seule nation, un seul pays et surtout, un seul symbole sur les bandeaux. Certes l’alliance que nous avons avec le village caché des nuages est un bon début, mais jusqu’à quand va-t-elle durer ? Jusqu’à qu’un accident survienne.

Natsuki enchaîne sur un autre sujet tout aussi intéressant : Sa première rencontre avec Sonoshee. À ce moment, il avait les mêmes ordres que moi, à croie que tout ceci est lié. La sunajin s’est alors présenté à lui de la même façon qu’à nous, hormis un petit détail… Elle lui a dit qu’elle devait livrer un message de paix à L’hokage. Nous, elle ne nous a jamais parlé de paix. Quelle garce ! Comment peut-être croire qu’on va la laisser passer pour livrer un message si on ne sait même pas de quel message il s ‘agit ? Bon, ça n’aurait pas changé grand-chose au final mais bon, ça reste un détail important qu’elle oublie de nous présenter.

Il m’explique ensuite qu’elle lui a montré les lettres échangées avec Onpu. Et apparemment… elles étaient vraies. Du moins, c’est ce qu’en a déduit Natsuki vu qu’il connaîtrait pas mal l’Hokage et sa façon d’écrire. Natsuki l’a laissé passer. Il aurait vu en elle un espoir de paix… Et bah on dirait bien que c’est raté. Quoi qu’elle fasse, Kumo voudra sa tête pour ce qu’elle a fait à Akeno, ami avec l’Hokage ou non, message de paix ou non. Tiens, serait-il là l’accident qui brisera l’alliance avec Kumo ? Je ne sais pas, mais c’est possible.

En tout cas, Natsuki compte assumer toutes les conséquences par rapport à ses actes. Il a délibérément désobéi à un ordre qui au final à mener à… Toute cette histoire. En gros, tout ce qui s’est passé est quasi sa faute. Pas complètement, mais puisqu’il en assume les conséquences... Kumo risque de s’attaquer à lui en premier, sans parler de Konoha. Quoique, l’Hokage puisse faire s’arrêter directement l’affaire en assumant lui-même les conséquences. Enfin bref, quelqu’un va bien devoir rendre des comptes pour cette histoire, mais ça ne sera sûrement pas moi.

Son récit terminé, il me livre encore quelques conseils. En partie sur la fierté et les émotions, choses qui m’ont fait particulièrement défaut ces derniers temps. Puis, après de brèves politesses, il m’annonce que si je n’ai rien d’autre à ajouter, je peux prendre congé. Chose que je vais d’ailleurs faire puisque mes parents m’attendent.

- Merci à toi d’avoir été compréhensif vis-à-vis de mon attitude d’hier. Je suis contente qu’on ait pu discuter de toute cette histoire tous les deux et je te remercie pour tes précieux conseils.

Après une petite inclinaison pour le côté respectueux, je quitte la maison.

- Bonne journée Natsuki, j’espère te revoir bientôt !