J'étais à Kusa no kuni lorsque je fus témoin de la barbarie humaine. Alors que je marchais dans les plaines herbeuses de la région, au loin une immense fumée noire s'élevait. Compte tenu de la densité de cette dernière et de sa propagation, il ne pouvait s'agir que d'une seule chose, l'attaque d'un village. Il était peut être encore possible de venir en aide aux habitants, je devais faire vite. Une fois sur place, je me trouvais face à une horreur comme je n'en avais jamais vu. Un petit hameau de trois maisonnées avait été attaqué. Elles flambaient sans que personne n'intervienne. Il n'y avait personne pour intervenir. Une odeur de chair carbonisée, une odeur nauséabonde me montait aux narines. Plusieurs corps noircis gisaient sur le sol. La taille de l'un d'entre eux me dévasta. Comment était-il possible de faire cela à un être aussi jeune. Il était trop tard pour endiguer les flammes, je n'avais plus qu'à les laisser terminer leur sinistre œuvre. Tout en cherchant des survivants, je tombais sur le cadavre d'un homme. A en juger par son allure, ce n'était pas un paysan. Allongé sur ventre, un kama planté dans le dos, l'un des villageois avait réussi à se défendre. Pourtant malgré cela, il était encore en vie. Pas pour longtemps mais il lui restait assez de souffle pour supplier de l'aide. Accroupi à côté de lui, je lui proposais de guider son âme dans l'au-delà s'il m'indiquait les commanditaires d'une telle atrocité. En guise de réponse, il me tendit une feuille ensanglantée et froissée, laissant échapper un dernier mot "Kokuen". Malgré ses actes, son âme avait le droit à la rédemption, dans ses derniers instants il avait cherché le salut et pour cela, je lui adressais une dernière prière qui l'aiderait à traverser les nombreuses épreuves spirituelles qu'il allait devoir subir maintenant.

Bien que tâché de pourpre, le parchemin en restait lisible. Il était question d'un arbre qui brûlerait et de torches. Je n'avais aucune idée de la signification profonde du message mais j'y verrais surement plus clair en suivant les coordonnées inscrites en bas de page. Mes pas me menèrent au pays du Feu. J'avais prévu de m'y rendre à l'occasion mais surement pas de cette manière. Le rendez vous indiquait un endroit reculé de la forêt de Hi no kuni. M'y rendre n'était pas chose aisée étant donné ma méconnaissance des lieux. Une fois sur place, se trouvait de nouvelles instructions. Je ne sais pas qui avait préparé cette mise en scène mais il s'était donné du mal. Il n'y avait que quelques informations. "Suivre la piste", "Attendre", "Quand l'enfer tombera, Détruire". En quelques termes, tout devint plus clair. Une attaque sur Konoha était prévue. Je n'étais pas un bon pisteur mais pour l'heure je n'espérais qu'une seule chose arriver à temps, éviter que cette infamie ne se produise. Je n'étais pas affilié à Konoha, je n'y avais aucune attache, pourtant j'étais près à défendre ses murs afin d'éviter que le village caché de la Feuille ne subisse le même sort que le hameau de Kusa no kuni.

Il faisait nuit, j'étais au point de rendez-vous, il n'y avait personne aux alentours. Que devais-je faire ? Me présenter ainsi juste avant une attaque était-il la meilleure chose à faire ? Me croirait-on ? Pour l'heure, je devais attendre, et évaluer la situation avant d'agir. Mesurant l'impact de mes actions dans ma tête, je ne m'aperçu pas tout de suite de ce qui devait être à coup sur le signal d'attaque, une pluie enflammée rouge et verte. Bon nombres de mercenaires en profitèrent pour sortir de leurs cachettes. Je n'avais remarqué personne ... Avant que je ne bouge, à quelques mètres de moi, la silhouette d'un homme masqué se mit en route sans hésitation. C'était là ce qui me semblait être le comportement de quelqu'un déterminé. Je me décidais à le suivre, je verrais bien où mes pas me mèneraient.

Une fois en haut, un homme se tenait face au masqué, un konohajin sans le moindre doute. J'arrivais au moment même où il ordonna de nous identifier et de lui donner les raisons de cette attaque. Contrairement à tout ce que j'avais pu faire depuis ma découverte à Kusa, je décidais de prendre les devants pour cette fois. Je me décalais des deux hommes afin de former à nous trois un triangle et m'exprimais avant le mercenaire.

- Attendez, je ne suis pas là pour me battre avec Konoha. Au contraire. Je suis un moine de Maskine du pays du Riz. Nous sommes de fervents défenseurs de la Paix et aujourd'hui celle-ci est menacée. Lors de mon pèlerinage j'ai intercepté un message d'un homme qui venait de mettre à sac un hameau à Kusa no kuni.

Sans attendre, je sortais le parchemin de l'intérieur de ma tunique et l'envoyais au konohajin.


- Je n'ai pas l'expérience de la Grande Guerre, mais de tels mots sont assez équivoques. C'est clairement une déclaration de guerre. J'ai suivi les indications et malheureusement je n'ai pu arriver avant pour tenter de prévenir le village. Avant de mourir, l'homme à qui j'ai pris ce document a lâché deux mots "Fumée Noire". Je conçois qu'il puisse être difficile de me croire compte tenu de la situation critique que vous vivez actuellement mais jugez moi après ces évènements si vous le désirez. Pour l'heure, le plus important est d'éviter d'avantage de dégâts au sein de votre village et protéger vos citoyens.  Empêchons les pertes humaines.

Puis me tournant vers le nukenin, je continuais ma locution à destination du ninja de Konoha

- Quand à cette personne, je ne saurais dire qui elle est, c'est la première fois que je la vois. Elle est sortie au moment de l'assaut, je n'avais pas remarqué sa présence avant qu'elle ne bouge.

J’avais la nette impression que j’étais inutile dans cet affrontement qui n’était clairement pas de mon niveau. Etait-ce donc cela la force des shinobis ? Cette situation de combat réel était une première pour moi. Cela ne ressemblait en rien aux entrainements martiaux qui avaient bercés ma vie jusqu’à ce que je quitte mes pairs. Ce que j’avais fais n’avait pas vraiment l’air d’être utile, l’être mécanique ne semblant être intéressé que par mon allié de fortune et moi-même dans une moindre mesure.

Comme redouté précédemment, le fait que la machine se soit dégagé facilement de l’étreinte aquatique était un signe que je n’étais pas à la hauteur. Il fallait que je sois prudent sinon je serais d’avantage un poids pour le konohajin plutôt qu’une aide salutaire. Pourtant il n’était pas question que j’abandonne. Tous les shinobis de ce village que j’avais aperçus faisaient de leur mieux pour repousser les assaillants. Il m’était impossible, non, plutôt interdit de reculer.

Dos à mon second mur j’observais attentivement la scène qui se déroulait devant les yeux. J’étais d’accord avec mon coéquipier. L’automate avait l’air de pouvoir anticiper nos actions. Sans réelle expérience, j’allais devoir écouter attentivement les conseils et les ordres du ninja de la Feuille. Mais alors que je cogitais sur la meilleure manière d’agir pour moi, la machine se mit en œuvre restant de marbre aux questions répétés qui lui étaient assenées, comme si nous avions en face de nous une entité entièrement programmée sans libre arbitre. Si c’était le cas, son créateur devrait surement se trouver non loin de là. Qui laisserait son œuvre sans surveillance, malgré ses capacités flagrantes. Mais ce n’était guère le moment de songer à cela. Avant tout il était nécessaire de se débarrasser de notre ennemi commun.

Pendant que je songeais à ce que je pourrais apporter « Le Schiff » passa à l’attaque à son tour. Une pluie de projectiles fut propulsée entre notre direction. Les yeux vermeils dégageant une volute dorée, je m’apprêtais à esquiver une partie de l’attaque qui me ciblait quand à la copie aqueuse du konohajin vint se placer devant moi, me servant de bouclier contre les nombreuses explosions qui vinrent à bout de cette barrière de fortune. Quelle présomption de ma part. Je me targuais de vouloir protéger les personnes autour de moi et aujourd’hui c’est à moi que l’on venait en aide. Mon coéquipier m’interpella m’invitant à l’aider le moment venu.

- Je n’ai pas pour habitude de me battre. Comme je vous le disais, je suis un pacifiste convaincu, mais je vais devoir faire une exception aujourd’hui. Après nous notre ennemi n’est pas vraiment ce que l’on pourrait qualifier de vivant.

A peine ma tirade terminée qu’une boule de foudre fut propulsé au dessus de nous suivi de près par le signal tant attendu. Du coin de l’œil, j’aperçu le ninja charger la machine. Il en était de même pour ma part. En tant qu’ainé de Maskine mon répertoire était encore relativement restreint. Je n’avais qu’une seule marge de manœuvre, attaquer à mon tour au corps à corps. Pendant ma course vers notre opposant je concentrais mes forces dans mes poings les auréolant à leur tour d’une petite fumée dorée. Positionné à la gauche de la machine, je portais un coup que j’espérais suffisant pour endommager assez son bras mécanique. Sans attendre le résultat, je me tassais sur moi-même effectuant une dernière attaque rotative au niveau de ses jambes escomptant le déséquilibrer un minimum le tout auréolant mes jambes de la même manière que mes poings. Surement pas de quoi le faire chuter, mais j’espérais que ce léger déséquilibre donnerai une opportunité au konohajin pour réaliser quelque chose d’envergure.

Quelle erreur de ma part, foncer tête baissée sur mon adversaire sans réfléchir. C’était une faiblesse qui faillit me coûter la vie. Tout cela parce que je manquais d’expérience, tout cela parce que trop attentif à la situation, au signal de mon coéquipier de fortune je n’avais pas analysé clairement la situation. Dire que c’était notre ennemi commun qui de part sa nature métallique hautement conductrice m’avait sauvé de quelques dégâts importants en absorbant l’attaque électrique. Je m’étais fait avoir une fois, je savais à quoi m’attendre maintenant. J’ai toujours vécu au sein des moines où l’individualité est une force qui est sans cesse développée dès le plus jeune âge. A contrario, j’avais bien compris que pour les villages, les jeunes enfants étaient éduqué ensemble, formant de nombreuses équipes afin d’apprendre à travailler à plusieurs, à compter sur les autres et à perfectionner leurs actions communes jusqu’à ce que cela devienne une chose habituelle. Cela me manquait cruellement, mais pour l’heure je devais faire avec. Si jamais Maskine avait décidé que mon destin ne serait pas scellé aujourd’hui, alors je sortirais grandis de ce combat.

Par chance, ce que j’avais tenté avait porté ses fruits. Son bras était encore intacte après mon coup mais pourtant mon coup de pied avait réussi à le déséquilibrer, suffisamment et suffisamment longtemps pour que le konohajin puisse y trouver une opportunité. Cette dernière était tout bonnement la réussite là où j’avais moi-même lamentablement échoué en frappant la cuirasse métallique. Un des bras de l’automate gisait à terre. Son corps projetait maintenant de l’air sous haute pression ainsi que de nombreuses lames. Ne sachant à quoi m’attendre, j’avais pris la décision de me reculer après mes coups, mais j’étais encore trop proche pour pouvoir éviter efficacement la mise en branle de la machine qui commençait à tournoyer violement vers le shinobi de la Feuille.

Surement bien plus habitué que moi aux affres des combats où chacun misait sa propre vie, il avait réagit bien mieux que ce que j’aurais imaginé et s’était reculé d’avantage, prenant les devants une fois de plus pour palier à l’attaque mécanique qui se profilait à l’horizon. J'étais bien trop lent en comparaison de ces deux combattant et ne put éviter efficacement les nombreuses lames projettées aléatoirement autour de l'automate. Mais ce n’était pas le moment de penser à mes blessures, de nombreuses autres personnes étaient dans mon cas, souffrant surement d'avantage. Avec quelques rictus de douleur, je retirais péniblement, les trois lames ayant percées ma chair, une sur l'épaule gauche, la seconde dans la cuisse droite et la dernière qui par chance avait butée contre le tibia de ma jambe droite. « Le Schiff » comme il se faisait appeler n’avait même pas prêté attention à ma personne, je n’étais rien à ses yeux, surement une menace sans importance compte tenu à la fois de ma faiblesse générale, renforcée par mes blessures ouvertes, laissant couler un léger flot de sang malgré mes compressions de fortune. Pourtant, je me devais de profiter de cette ultime occasion pour aider une dernière fois mon allié. Physiquement meurtris mais encore alerte, ma force spirituelle était elle au bord de sa limite. J’estimais pouvoir effectuer une dernière action. Je ne savais pas encore quoi mais j’étais près à tout pour sauver le maximum de personnes, aussi inconnues fussent-elles à mes yeux.

Le konohajin venait de me remercier, pourtant mon aide était vraiment minime. Je préférais ne pas relever, attendant de voir ce que la situation allait donner. Une nouvelle consigne, un nouvel ordre. A moi cette fois d’être d’avantage vigilant pour ne pas reproduire bêtement le schéma précédent. A quelques mètres l’affrontement entre les deux ennemis semblait inévitable. Des éclairs semblaient se profiler autour du ninja tendis que la machine tournoyante avançait toujours dans sa direction. C’était à moi de jouer. Je savais ce que j’avais à faire, comme le précédent coup, donner une occasion d’en finir à mon partenaire. Au fond de moi, ce que j’allais tenter était stupide mais si mon sacrifice était en mesure de venir à bout de l’automate alors j’acceptais ma destiné sans ma moindre peur, sans le moindre regret. Je concentrais une partie de mon chakra dans mes pieds, augmentant un tant soit peut ma vitesse de course. Chargeant sur ma cible, je laissais derrière moi une fine fumée dorée. J’en profitais également pour accroitre ma force. Je visais clairement un point de la toupie mortelle, son bras. J’espérais pouvoir bloquer son membre mécanique suffisamment longtemps, ralentir sa rotation. Epuisant mes dernières forces spirituelles, je m’enveloppais d’une armure, réduisant par la même occasion le suitement des mes blessures, espérant que cela soit suffisant pour me défendre, un temps du moins, le temps nécessaire pour venir à bout de cette monstruosité.

- Voilà ma dernière carte, ne vous souciez plus de moi, achevez cette machine, sauvez vos citoyens, sauvez votre village.

Comme je me l'imaginais, au moment même où j'avais pris la décision de me lancer sans peurs et sans regrets à corps perdu sur la machine, je signais là ma dernière action, ma dernière et surement vaine tentative pour venir à bout de l'automate que rien ne semblait réellement ébranler. Même moi, malgré mon manque d'expérience j'avais nettement conscience que ce combat qui se déroulait sous les cieux enflammés de Konoha n'était en rien comparable à ceux entre shinobis. Cette fois il était impossible d'évaluer concrètement la portée des coups qui lui étaient assénés. Malgré une carapace métallique défoncé et un bras tranché net, il ne semblait pour le moins du monde impacté, continuant de manière quasi automatique ses assauts d'une force redoutable.

Une fois de plus le konohajin et moi nous étions coordonnés afin d'agir au mieux. Il serait bien plus judicieux de ma part de dire que sous les ordres et le conseils de mon compagnon de fortune j'avais apporté mon support sans trop le gêner. Pourtant notre enchainement avait eu raison de l'automate qui dans une dernière action, ou dans un dernier commandement de son créateur s'était autodétruit dans une explosion impressionnante, une explosion comme il ne m'en avait jamais été donné de voir jusque là. Cette dernière par chance ne m'occasionna que peu de dommages. Quelques brulures sans gravité, des vêtements en piteux états et quelques égratignures dues aux projections de la carcasse. En revanche, c'est une toute autre action qui était à l'origine de mon état pitoyable. C'était certes le même personnage qui en était l'instigateur mais quelques secondes précédent le coup fatal porté par mon allié de fortune.

Ma dernière action était simple. Bloquer, plutôt tenter de bloquer la machine suffisamment longtemps pour que le shinobi puisse en venir à bout. Sans grande difficulté, je rattrapais la toupie à quelques mètres de moi. Et pourtant, malgré la force que j'avais réussi à déployer dans mon état, souffrant encore des blessures précédentes, mon emprise sur "Le Schiff" ne tint que l'espace d'un instant, un fugace moment précédent l'impact sans commune mesure qu'il m'assena au niveau du thorax. C'était un coup puissant, brutal, n'ayant pour but que celui de me briser. Par chance, inspiré ou guidé par Maskine, au choix, mon armure me fut salutaire, à minima pour le moins, réduisant fortement la puissance de l'impact. La force était-elle qu'elle se brisa nette, la fin de la course du poing me propulsant au loin, loin du combat qui se terminait devant mes yeux embrouillés par la douleur. Au final, c'est l'un de mes précédents murs, érigé pour nous isoler du reste des combattants et accessoirement éviter trop de dommages collatéraux qui amortit ma chute, implosant lorsque mon dos le heurta violement, synonyme d'un coup qui m'aurait été fatal sans ma protection éphémère.

J'étais là, à demi couché sur le sol dallé, froid et humide. J'avais mal, mon épaule gauche ne soutenait plus mon bras qui se balançait péniblement au grès de mes mouvements. Quant à ma jambe droite, elle supportait péniblement le poids de mon corps. Eviter de trop forcer dessus était surement la meilleure chose à faire. Pour le reste, quelques brulures, quelques coupures. Finalement, avoir été éjecté si loin m'avait en quelque sorte sauvé la vie. Je n'étais pas certains que malgré mon armure, l'autodestruction ne m'aurait pas été fatale. Mais peut importe, là n'était plus la question.

Le konohajin m'adressais maintenant quelques mots. A moitié conscient de la réalité qui m'entourait je n'avais pas saisi la moindre de ses paroles. Et avant que j'ai pu dire ou faire quoi que ce soit, un shinobi s'afférait autour de moi. Je me laissais alors envahir d'une douce torpeur, un sentiment de bien être et puis le noir, un sommeil profond, sans rêves.