J’y étais allé de soir. La raison était toute simple, le jour, j’étais occupé. J’essayais de me détacher le plus possible de la paperasse inutile, une tâche qui me semblait moins importante que lors du règne de Nikkou, probablement à cause de la disparition du Conseil, mais le temps alloué restait conséquent. Le soir, le second avantage, c’était que moins de gens me croiserait. Il fallait avouer qu’avec un ANBU qui me précédait, je préférais ne pas trop me faire remarquer. Sa présence s’expliquait par ma crainte des attentats, non pas que j’étais peureux, mais je désirais montrer aux éventuels intrigants que l’échec de la dernière fois m’avait appris ma leçon. J’étais venu dans la base de l’ANBU, avait demandé un homme au hasard, pour être certains qu’un assassin ne pourrait pas préparer son coup. J’avais des défauts, mais j’osais croire que la bêtise n’en faisait pas partie.

La situation me semblait quand même ridicule devant cette maison. Une grille noire, une allée de rocaille et un petit jardin. Je voyais un balcon pour prendre l’air, plutôt confortable. L’ANBU hésitant, se demandant visiblement ce qu’il faisait là. Il avait un manteau, on voyait un peu de fourrure sur les manches et le col. Je me contentais de désigner la main en écartant le bras, l’air froid pénétrant dans mon manteau. Une fine couche de givre recouvrait le sol. Je portais une simple veste par-dessus mes habituels vêtements et des gants. Mes bottes étaient un peu plus chaudes que mes souliers. Le vent faisait probablement frissonner les gens, mais pas moi, mes nerfs meurtris ne me permettaient pas de réagir comme les autres. Je savais qu’il faisait froid, mais vu la température, je risquais peu d’en souffrir.

L’ANBU cogna à la porte après une nouvelle hésitation, je le suivais. Nous attendions que la jeune femme vienne ouvrir. Dès que la porte la dévoila, je saisis l’épaule de l’ANBU et fit une légère pression pour lui faire signe de reculer. Il s’exécuta et me laissa passer. J’enlevais mes gants sur le pas de la porte, avant de les fourrer dans ma poche, un léger mouvement du haut du corps vers l’arrière, rappelant celui d’un ivrogne, accompagnant le geste.

- « Tu as une seconde ? Je voudrais te parler. »

En la regardant, je souriais en coin. Elle était jeune, plutôt agréable à l’œil. Il y avait sur ses traits un étrange impression de sourire, les marques sur la peau, d’infimes détails que personne ne remarque, mais que mes études sur le corps m’avait permis de découvrir. Une femme probablement souriante, j’imagine, à moins que ce fût le hasard de la génétique. J’attendis qu’elle s’écarte ou me fis signe d’entrer. En entendant, je me contentais de me retourner vers l’ANBU et de lui présenter ma main levé, paume face à lui, pour lui dire qu’il devait rester de garde à l’extérieur. Pas la peine d’envahir sa maison et le Shinobi était bien habillé pour l’hiver, plus que moi.

Quand elle me fit entrer, je me contentais de la suivre. Sans sourire, j’examinais la maison avec curiosité. Définitivement, sans être luxueuse, elle était confortable. Étonnant pour une femme aussi jeune, surtout vu son grade. Elle avait eu des ressources ailleurs probablement. Je me laissais guider jusqu’au fauteuil et je me laissais tomber dessus sans rien dire. Elle enleva la couverture de sur ses épaules et la déposa sur un meuble. À sa question, je semblais revenir à la réalité. Je me contentais de sourire bêtement en me frottant les mains.

- « J’ai une furieuse envie de fumer… Alors, pour faire passer, si tu avais quelques choses avec du goût, peu importe quoi, et de chaud, ce serait largement suffisant. »

Je la regardais s’éloigner pour faire sa « recherche ». Après quelques secondes, je me levais du fauteuil et cherchait des yeux un peu de bois. Je me penchais devant la cheminée, pour prendre une des bûches et les déposer dans le foyer. Je me redressais en faisant un rapide tour de la pièce du regard. Dès que je l’aperçus, je me dirigeais vers le tisonnier. En me relevant, l’outil à la main, j’eus un léger balancement vers l’arrière, semblable à ceux des ivrognes, puis je plaçais un peu le feu. Je remis l’outil à sa place. J’entendis quelques secondes le retour de la jeune femme, mon manteau toujours sur le dos, changeant souvent de place sur le fauteuil pour trouver une position confortable. Quand je l’aperçus, je me contentais de sourire en coin.

- « Madame Kamikoru, j’ai ajouté du bois, ça vous évitera de vous réchauffer avec une couverture. »

En parlant, je désignais vaguement le foyer du doigt. C’était surtout le ton ironique, un peu moqueur devant toutes ces formules de politesses et les services de la principale intéressée qui ressortait. Je la laissais se positionner, prenant prudemment une gorgée du breuvage, pour éviter de me brûler à cause de mes petit « problèmes » de santé. Une fois rassuré, je pris une gorgée. Je déposais l’objet sur le bras du fauteuil, le tenant d’une main pour éviter qu’il ne se renverse.

- « Je ne te ferai pas perdre plus longtemps ton temps, Krystal. Tu connais de nom Kuroi, c’est l’Ambassadeur de Suna à Konoha. Il est responsable d’amasser des informations sur les Nukenins, pour nous aider à combattre Makka. Sa présence provoque des tensions et je souhaiterais que tu travailles avec lui pour s’assurer que tout se passe bien. »

Je pris une inspiration et écarta mollement les bras. Je portais le breuvage à mes lèvres pour prendre une gorgée et attendre les éventuelles questions. Elle en aurait certainement, j’avais d’autres choses à dire, mais il valait mieux progresser une étape à la fois.

Elle fronça les sourcils, un bref instant, visiblement en pleine réflexion avant de poser quelques questions. Il y avait des inquiétudes, c’était visible et compréhensible. Je me contentais de rire un bon, visiblement, elle ne savait pas trop où se positionner dans tout cela. Parfait, je lui donnerais mon avis et elle pourrait en faire ce qu’elle veut. Il ne fallait pas lui mentir, elle restait un Genin, c’est-à-dire, « physiquement » assez faible par rapport aux menaces, mais son rôle était bien autre que juste servir de garde du corps.

- « Tu n’ignores pas que deux ANBU ont tenté de m’assassiner il n’y a pas si longtemps. Il existe de l’amertume face à notre reddition, mais les anciens membres du Conseil, certains Clans, ont perdu des avantages économiques et politiques énormes. Ils peuvent alimenter cette tension. Disons que faire une victime parmi un Konohajin pour atteindre l’Ambassadeur va être plus dissuasif qu’une armée de gros bras. »

Je souris largement. J’avais conscience que ce n’était pas très flatteur pour elle. Je pris le verre, bu une dernière gorgée et me pencha lentement pour me rapprocher de la table. Les dossiers du DataBook sur Suna traînaient, du moins, des copies et des résumés. Je déposais le verre à côté, l’alcool forte ne me dérangeait pas, je tenais bien la chimie, mais je préférais ne pas sous-estimer le temps que je passerais ici. L’ANBU en faction dehors pourrait s’en plaindre, mais, la vérité, c’est que je préférais ne pas l’avoir en observateur. Les restes du Conseil pouvaient avoir le bras long.

- « De Kuroi, je crains très peu de chose, en fait. L’Ambassadeur est un homme qui a foi dans ses idéaux, des idéaux qui sont loin d’être nuisibles. Il veut la paix, la conversation avant la guerre, du moins, sauf dans des cas extrêmes. À tel point que je me demande si le Kazekage ne l’a pas envoyé ici pour l’éloigner de Suna. Cependant, je ne suis pas à l’abris d’une erreur… »

Je souris en coin avant de rire, un peu bêtement, en m’adossant de nouveau dans le fauteuil. L’idée de faire une erreur ne me semblait pas ridicule, loin de là, mais elle m’excitait. Les erreurs nous permettent d’en apprendre beaucoup. Une expérience réussie, dont les résultats sont prédits par la théorie, c’est un acte de vérification. Si l’expérience échoue, il faut revoir la théorie. C’était exactement ce qui se passerait si je me trompais sur Kuroi. Il valait mieux vérifier tout de suite et rapidement. Je cessais de rire en la regardant, étouffant mon rire.

- « Ton rôle, ce sera tout simplement, avec tes rapports lors de ton aide, de vérifier qu’il nous donne les mêmes informations qu’à Suna, afin que ce dernier ne prenne pas l’avantage. Tu n’es pas tant une baby-sitter qu’une mesure de sécurité très importante. Tu pourras gérer comme tu le souhaites, tu pourras apprendre de Kuroi, tu auras beaucoup à y gagner personnellement. »

Il y avait peut-être d’autres questions, mais la situation me semblait claire pour le moment. Je me penchais de nouveau pour prendre le verre. En me relevant pour m’adosser encore une fois, mon corps eu un léger balancement du torse vers le côté, comme un ivrogne. Je trempais mes lèvres et posa le verre sur le bras du fauteuil, attendant les questions et les réponses. Drôle de portrait que je faisais là, on aurait pu me croire bourrer si on ne savait pas que j’étais à mon premier verre.

Je regardais et écoutais la jeune femme. Elle était vive, elle comprenait rapidement ce que je lui disais, mais elle avait quelques erreurs à son actif. Elle ne comprenait pas tous les détails, toute la situation des relations dans le Village de Konoha. Je ne pouvais pas dire que c’était un grand reproche, moi-même, je devais ignorer nombre de détails et, pour elle, sans les rapports et la surveillance, ce devait être encore plus difficile. Je me contentais de rire doucement, puis de sourire en coin. L’ANBU… Oui, j’avais bien fait de faire sortir celui qui nous accompagnait. Elle posait des questions, je lui répondrais.

- « L’ANBU, ce sont des Shinobis compétents avec une structure qui évite qu’on les fasse chanter. Ce qui leur permet de s’occuper des détails plus sensibles de Konoha. Ils ne me sont pas tous dévoués. Personne n’est complètement dévoué, sauf à soi-même. »

Je me tus, une secondes. Je levais l’index, pour lui faire signe de patienter une seconde avant de me pencher sur la chaise. Se faisant, je mis mon verre sur mes genoux, toujours une main dessus, et je parlais un peu plus bas, sans que ce soit n véritable murmure. Je singeais l’habitude du secret, car ce que j’allais dire, c’était un secret de polichinelle, n’importe qui se donnant la peine de réfléchir pouvait le comprendre.

- « Ils peuvent certainement de souffler comme une poussière, Krystal. Sauf que, déjà, ils vont laisser un témoin. Deuxièmement, si ce sont des habitants civils, disons… Hum , hum… Lambda, ils vont se faire battre par Kuroi. Si je peux éviter qu’ils ne se lancent pour « t’épargner », ce sera déjà ça. »

En parlant et en disant « lambda », je portais mon poing à ma bouche et toussa dedans, secouant un peu la tête, pour désigner que ce n’était pas le terme le plus approprié et que je ne considérais pas les civils comme moins important, mais qu’en terme de puissance militaire, ils n’avaient pas le même impact. Je me redressais ensuite, jugeant que j’avais répondu au plus gros de sa première question. La deuxième, plus personnelle, méritait aussi une réponse. Je pris une gorgée avant de commencer à m’expliquer.

- « C’est vrai, je pourrais envoyer un ANBU, mais l’Ambassade à sa propre sécurité et ce ne serait pas apprécier que j’impose la mienne. L’autre chose, c’est, disons-le comme ça, un ANBU aura très peu à apprendre d’un Shinobi expérimenté comme Kuroi. Alors que toi, tu peux apprendre beaucoup de lui, prendre énormément d’expérience. »

Je redéposais le verre, la fixant une seconde, pour voir si elle avait d’autres questions. Je souriais en coin, franchement satisfait et amusé. Elle était assez impressionnante et, beaucoup plus jolie que je ne l’avais cru aux premiers abords. Même si elle n’était pas mon genre, il fallait être objectif.

À sa demande, je haussais un sourcil. Je pris une gorgée du breuvage, puis je la fixais, quelques secondes, la tête penchée de côté. Solaris, Solaris… Ce nom ne me disait rien. Les évènements devaient avoir eu lieu avant mon arrivée ou étaient passées à la trappe. Pourquoi voulait-elle se dossier ? Elle avait une filiation avec ce Clan et elle voulait le dossier. Elle était très jeune, elle vivait seule, pourquoi ? Je trouverais sans nul doute des réponses dans ce dossier. Je souris largement, avec une impression presque carnassière.

- « Pas tout de suite, je vais faire quelques recherches avant. Si ça peut te rassurer, ce nom n’a rien d’actif ni de marquant, mais je peux vérifier. Je te dirai ce que je vais y trouver. »

Je fixais un instant son expression. Elle était mise dans une drôle de position probablement. Elle voulait découvrir une vérité ou s’assurer qu’il ne lui manquait pas un détail, une chose à savoir, et la voilà qui devait prendre les informations à travers une tierce personne. J’étais curieux de voir sa réaction ou son expression sur son visage. Je restais ensuite silencieux, quelques secondes, puis, je me penchais pour déposer le verre sur la table. Je passais rapidement ma langue sur mes lèvres, pour chasser les dernières gouttes d’alcool, ressentant à peine leurs saveurs, bien que j’aie conscience de leur présence.

- « Si tu as d’autres questions, j’imagine que nous nous reverrons. Je pourrai t’y répondre plus facilement. »

J’attendis, une brève seconde, attendant une réaction de sa part ou autre chose. Je m’approchais de la porte, y faisant face, je frappais dessus comme si je cognais pour demander la permission d’entrer. On répondit rapidement en donnant un petit coup sur le bas de la porte. J’ouvris la porte et l’ANBU se retrouva juste à côté de la porte. Je mis mes gants en sortant, la buée se formant déjà devant ma bouche. Je jetais un regard par-dessus mon épaule et me retourna vers elle. Je souris en coin.

- « Ne t’inquiète pas, je vais faire les recherches. C’est seulement pour m’assurer qu’il n’y ait pas des informations connexes sur les opérations militaires. Je te remercie de ton accueil, je vais bientôt communiquer avec toi pour te présenter à Kuroi. »

Cette fois, c’était vrai, il fallait partir. J’étendis la main, avec un sourire moqueur, pour lui faire signe de passer devant. Il fallait retourner au Palais immédiatement, j’étais curieux d’en apprendre plus sur cette histoire de Solaris. Ça m’offrirait un meilleur portrait de la situation. Et puis, après tout, j’étais un homme de parole, il fallait faire les recherches.

[Très court et médiocre]