C’était une belle journée d’été à Kiri. Michiki s’était réveillé à cause du soleil filtrant au travers des rideaux de la chambre. Il en fut dérangé sur le moment mais ce sentiment s’évanouit très vite. Lorsqu’il sortit de chez lui, personne n’était encore sorti. Il profita de ce moment de calme, propice à la solitude et à la réflexion. Il avait décidé de se promener un peu plus loin que d’habitude. Une promenade dans le but de trouver de nouveaux lieux d’entraînement et éventuellement des lieux où il pourrait voir des animaux uniques ou inconnus. Il sortit du village. Les gardes le regardèrent passer sans interrompre leur conversation. Les mesures de sécurité habituelles avaient été renforcées depuis la guerre contre Kumo. Ils conversaient à propos de la tempête qui avait eu lieu dans la nuit. C’est vrai que les bourrasques de vent avaient été fortes, même au beau milieu des terres, mais aujourd’hui elles avaient laissé place à un soleil aveuglant. Les trois shinobis racontaient que le spectacle qu’offrait la plage à ce moment-là avait dû être formidable. La remarque arracha une idée à Michiki.

Une heure plus tard, Michiki était sur l’étendue de sable blanc au nord de l’île du pays de la Brume. Des morceaux de bois avaient été rejetés sur la rive et le Kirijin ne put qu’imaginer quel spectacle fascinant la tempête avait dû offrir à cet endroit il y a plusieurs heures. Alors qu’il marchait, se laissant bercer par le ressac des vagues, Michiki aperçut une silhouette au loin. Il ne pouvait distinguer ses traits de là où il était mais il semblait s’agir d’un garçon assez musclé aux cheveux blonds. Un reflet attira l’attention du Kirijin. C’était le bandeau que le mystérieux arrivant portait. Il s’agissait donc d’un ninja. Plissant un peu les yeux, Michiki fit appel à son excellente vue pour tâcher de discerner de quel village venait cet homme qui lui faisait face.

Quel ne fut pas son effarement et sa surprise lorsqu’il distingua nettement les nuages qui caractérisaient le symbole de Kumo. La guerre avait beau être terminée, à ce qu’on disait au village, il y avait un Kumojin en plein pays de la Brume. Michiki se retrouva face à un dilemme. S’il privilégiait l’affront direct, il risquait de commettre une bourde que ses supérieurs lui feraient amèrement regretter. La diplomatie offrait le même genre de risques mais épargnait un combat. Préférant la facilité et étant plus diplomatique que bourrin, Michiki s’avança jusqu’au niveau du Kumojin. Une fois face à face, Michiki tendit nerveusement sa main et se présenta :

-Shinda Michiki, Kirijin. Pourrais-je savoir la raison de votre présence ici ?

Une entrée en matière que Michiki espérait ne pas regretter.

« S’il esquisse un mouvement suspect, mes cadavres se chargeront de lui faire regretter son geste malencontreux »

Cette solution semblait la meilleure. Restait à voir la réponse de son interlocuteur.

Cela faisait maintenant un moment que j’errai sur l’île sur laquelle j’avais atterri, toujours sans n’avoir aucune idée de l’endroit où je pouvais me trouver. Il n’y avait pratiquement personne ici, avec ça j’allais avoir vraiment du mal à obtenir des renseignements. Tous ce que je voulais, c’était parvenir à me situer précisément pour reprendre la route en direction de Hi no Kuni. Avec un peu de chance, le courant m’avais conduit à bon port, mais j’en doutais fortement, puisque quand je n’ai pas de chance c’est jusqu’au bout ! A force de marcher sous le soleil tapant, mes habits séchaient petit à petit, mais ils étaient toujours en aussi mauvais état, à savoir déchirés à certains endroits. Dommage, il faudrait voir si j’arrive à me faire recoudre tout ça… Bref, on s’en fout de mes habits.

En ayant marre de chercher, je m’étais, assis sur une pierre assez grosse et plutôt confortable en attendant je ne sais quoi. Je regardais la mer qui était face à moi, elle était bien plus calme maintenant, si j’aurais pu je serais reparti aussitôt. Mais bon, je n’avais pas de bateau, et je ne savais pas où j’étais. Je ne pouvais pas me diriger au pays du feu tant que je n’avais aucune indication quant à ma localisation actuelle. Surtout qu’en pleine mer, je n’avais pas vraiment de repères, je n’avais pas du tout l’esprit marin, ça c’est sûr. Alors que j’étais installé sur mon rocher, je sentis quelqu’un approcher. Ah ! Enfin ! Avec un peu de chance, il voudrait bien me dire où on était.

Suite à ce sentiment d’approche, je me levai et j’observais discrètement la personne qui approchait. Il s’agissait d’un homme que je ne connaissais évidemment pas. Je ne vois pas par quel miracle j’aurais pu tomber sur une connaissance ici. L’homme approcha, et je parvins à remarquer la présence d’un bandeau, arborant le symbole de la brume. Hmm… Un Kirijin, ici ? J’étais donc sur une des îles du pays de l’eau ? Rien d’encore sûr, ce n’est que des suppositions. Moi par exemple, j’ai beau être de Kumo et pourtant je ne me trouve pas au pays de la foudre. Une discussion avec cet homme m’aiderait à mieux me situer. En tout cas, même si je ne reprochais plus rien aux ninjas de Kiri, je savais que je ne pouvais pas tous leur faire confiance, il doit en être de même pour eux. C’est normal, on sortait à peine d’un conflit qui avait opposé nos deux villages, je ne pouvais pas me permettre de relâcher ma garde ne serait-ce qu’une seconde.

Le ninja de la brume vient se présenter en tendant sa main vers moi, et demanda que je m’explique sur ma venue. Mes doutes se confirmèrent, j’étais bel et bien à Mizu no Kuni, puisqu’il se permit de me demander ce que je faisais là. Néanmoins, je sentais qu’il n’était pas tout à fait à l’aise, c’était compréhensible après tout, pour lui il était tout à fait possible que je sois un ennemi, mais ce n’était pas le cas. Je lui tendis à mon tour ma main puis lui serrai la sienne avant de me présenter comme il l’avait fait.


- Kurayami Raiko, je viens de Kumo comme tu as pu le remarquer. Excuse-moi de te tutoyer de la sorte, mais tu ne sembles pas beaucoup plus âgé que moi alors bon… Tu peux en faire de même si tu veux.


Je n’aimais pas vraiment vouvoyer les gens, ça crée toujours comme une barrière entre eux et moi, autant briser la glace d’emblée de jeu.


- Je me dirigeais en mer vers le pays du feu, mais j’ai été pris en plein dans une tempête. Puis je me suis réveillé ici, sur cette plage… J’imagine qu’on est à Mizu no Kuni, non ?

Le Kumojin n’avait pas rechigné à se présenter. Il avait même demandé à Michiki s’il pouvait le tutoyer, en lui assurant que le nécromancien pouvait en faire de même. Le Kirijin voulut lui répondre mais le dénommé Raiko enchaînait déjà. Apparemment il était perdu. Ce qui expliquait sa présence ici. Michiki l’observa de la tête aux pieds. Des vêtements rapiécés qui concordaient avec son histoire de tempête. Un ennemi n’aurait pas été aussi à l’aise. Le Genin se relâcha donc un peu. Il restait un ninja d’un village avec lequel il subsistait des tensions mais cela importait peu.

Se rendant vers le pays du Feu, ce jeune inconscient avait été pris dans une violente tempête. Quelque chose de courant au large de Mizu no kuni. D’ailleurs il avait posé la question pour s’assurer de là où il était. Michiki lui répondit :

-En effet tu te trouves sur Mizu no kuni. Les tempêtes sont fréquentes au large, tu as eu de la chance de t’en sortir en si bon état. D’habitude les rescapés sont retrouvés entre les rochers.

Le pire avec ces tempêtes c’était de devoir se rendre sur la côte pour ramasser leurs membres échoués. Une mission qui pouvait tomber parfois et qui n’enchantait pas les Kirijins. Michiki n’était pas vraiment dérangé par ça. Il faut dire que son art l’habituait à de telles visions. Il lui en faisait voir d’autres même. Enfin bref, face à ce Kumojin délavé, Michiki éprouva un peu de pitié pour le pauvre gars. Lui aussi c’était retrouvé perdu chez eux une fois. Et on l’avait accueilli et on l’avait aidé à repartir. Aujourd’hui c’était une façon de payer sa dette en quelque sorte.

-Il y a un port de l’autre côté de l’île. Des bateaux en partent toutes les heures à destination du continent. On pourrait en trouver un qui t’amènerait à destination si tu veux. Je serais ton guide.

Effectivement, j’étais bel et bien au pays de l’eau. Un endroit que j’aurais préféré éviter au vu de la situation actuelle, mais j’avais eu la chance de tomber sur un Kirijin n’ayant visiblement aucune mauvaise intention. Il pouvait toujours mentir dans ses propos, et c’est pour ça que je restai tout de même sur mes gardes. Je ne faisais vraiment pas confiance aux ninjas de la brume, mais je ne les mettais pas tous dans le même sac. Le peu que j’avais rencontré m’avait déçu, il ne restait plus qu’à espérer que ce « peu » n’était pas une généralité. Michiki avait également parlé de quelque chose d’assez spécial : certains malchanceux ayant été dans une situation similaire à la mienne, aurait fini dans les rochers sur la côte. Je vois… Dans mon malheur, j’ai eu un peu de chance tout de même. J’aurais très bien pu finir comme ses autres victimes. Et puis, j’aurais aussi pu tomber sur quelqu’un me voulant du mal, de par mon appartenance à Kumo. Un côté humain qui passe avant le devoir d’un shinobi, j’appréciais des mentalités comme celles-ci, en espérant que le Kirijin n’essayait pas de me tromper, en me faisant croire qu’il allait me venir en aide.

La tension semblait descendre progressivement, ça se sentait. Ce n’était pas plus mal. Même si on ne se faisait peut-être pas entièrement confiance, c’était déjà plus agréable comme atmosphère. Il finit par m’expliquer d’ailleurs que je pourrais trouver un port à l’autre bout de l’île sur laquelle on était. Traverser l’île hein… Les chances de croiser d’autres Kirijins étaient bien présentes, tout dépendait de l’activité de l’île sur laquelle j’étais. Si c’était une des principales c’était assez risqué. C’est peut-être pout ça qu’il était allé jusqu’à se proposer de m’y guider. Honnêtement, je ne pensais pas qu’il en prenne l’initiative, je m’attendais à une simple de réponse de sa part. Mais on peut dire que ça m’arrangeait, je n’étais pas contre un peu d’aide, du moment qu’il ne tente rien à mon encontre. Bon, je n’avais pas vraiment le choix, c’était un risque à prendre, mais en territoire ennemi je préfère ne pas rester seul.


- Merci de te proposer pour m’aider. Je te suis !


C’est avec un petit sourire aux lèvres que j’avais parlé. C’était aussi une occasion pour découvrir une partie de Mizu no Kuni, pays que je n’avais encore jamais visité. J’imagine que les paysages doivent être bien différents de ceux du pays de la foudre, pratique pour changer un peu d’air, je conseille à tout le monde de se prendre une tempête et d’avoir ma chance, celle de ne pas finir démembré dans les rochers. Enfin… Sérieusement je ne devais pas oublier que ce n’était pas qu’une ballade de santé. Je n’étais pas à l’abri d’éventuelles menaces. Mais grâce au ninja de la brume qui était à mes côtés, j’espérais échapper à ces problèmes.

Seulement, quelque chose me travaillait depuis sa proposition… Etait-il sincère ? Non pas que je sois parano, mais le doute est permis ! Il est vrai qu’à sa place, j’aurais surement aidé l’homme s’étant perdu, même si il appartient au camp ennemi. Kiri et Kumo sont ennemis, pour les ninjas des deux camps c’était une autre histoire. Possédait-il une vision similaire à la mienne ? C’est ça qui me travaillait… Pourquoi ?


- Dis-moi… Pourquoi me venir en aide ? Tu dois surement connaître la situation actuelle de nos deux villages, et pourtant tu t’es toi-même proposé pour me guider jusqu’au port. Tu ne considères pas les ninjas des nuages comme tes propres ennemis ?


Patiemment, j’attendais une réponse de sa part pendant qu’on marchait. Selon sa réponse, je pourrais me faire une image un peu plus positive de leur village, et surtout connaître ce qu’il le motivait à agir ainsi.



Spoiler:

Raiko n’avait pas rejeté la demande d’aide que lui offrait Michiki. Il avait mis un moment avant de répondre. Ce Kumojin devait douter des intentions du nécromancien. Il n’avait pas réellement eu d’arrières pensées en lui proposant cela. Il était certes un Kirijin mais la politique ne l’intéressait que très peu. Il avait rejoint les rangs de Kiri pour perfectionner ses techniques qui ramenaient les êtres de l’au-delà. Il était donc Kirijin pour son propre intérêt et sa loyauté prendrait certainement fin quand le village n’aurait plus rien à lui offrir. Pour l’instant, celle qui l’avait recueilli comme une mère défendait ce pays et il en ferait de même par amour pour elle. Il ignorait encore à ce moment qu’il ferait plus tard la rencontre d’un Jônin de la brume qui le prendrait comme élève et qui lui montrerait quelles richesses abritent Kiri et à quel point il était important de le défendre. Mais cela n’était pas le cas actuellement. Pour l’instant il était un simple Genin en balade qui venait de trouver un garçon d’à peu près son âge. Comme autrefois avec Rikku, il allait l’aider. Le sourire en coin qu’avait affiché le Kumojin confirmait que la tension qui s’était installé au début était redescendue.

Comme Raiko avait répondu positivement à la proposition du Kirijin, ils avaient commencé à marcher. Mais le Kumojin restait vigilant. Michiki le sentit et il essaya de se mettre à sa place. Ce gars était un peu paniqué à l’idée d’être attiré dans un piège ou quoique ce soit d’autre. C’était normal quand on tombait sur l’apparence de savant fou de Michiki. Pourtant il n’était pas d’humeur à faire un coup en traître. Il voyait cette rencontre comme un moyen de rendre l’ascenseur à Kumo. Un de leurs habitants l’avait aidé il y a longtemps et c’était l’occasion de rendre la pareille. Afin de mettre vraiment à l’aise le dénommé Raiko, Michiki resta sur la plage. Ils longeraient par la côte, sur la plage. En s’enfonçant dans les terres, la tension qu’accumulerait Raiko deviendrait désagréable pour eux deux. Et Michiki serait vite tenté de le balancer aux autorités si cela le gonflait.

-On va prendre par la plage. C’est peu peuplé et, même si le trajet est plus long, on risquera moins de tomber sur un Kirijin moins compréhensif que moi.

A peine le nécromancien avait-il prononcé ces mots que Raiko enchaînait avec une question. Elle devait le travailler depuis un moment et il n’avait pas pu la garder pour lui plus longtemps. Il tenait à savoir pourquoi Michiki proposait son aide. Il lui demanda également s’il était au courant pour la situation entre leurs deux villages. Il termina sa question par une interrogation sur la vision que Michiki pouvait avoir des Kumojins. S’il les voyait comme ses ennemis. Michiki ne répondit pas tout de suite. Il avait conscience de devoir afficher un air sérieux et pensif mais il voulait formuler une réponse qui concorderait parfaitement avec ce qu’il pensait. Le Kumojin patientait sans rien dire. Après quelques minutes de silence entre les deux shinobis, Michiki finit par s’exprimer :

-Je ne m’intéresse pas à la politique. J’ai entendu parler de ces tensions mais je t’avoue que je m’en fiche. Je laisse ça aux politiciens et je ne fais confiance qu’à moi. Et puis je dois une fière chandelle à un Kumojin. C’est l’occasion de rembourser ma dette.

Il s’arrêta là. Il était satisfait de sa réponse. Elle témoignait de chaque facette de sa pensée. Il ne comptait pas non plus étaler sa vie privée à cet inconnu. Il espérait juste le rassurer. Il ne comptait pas le livrer aux autorités du pays. Une décision qui n’aurait pas eu lieu quelques temps plus tard après la rencontre de Michiki avec celui qu’il appelait dorénavant senseï.