Apparence Natsu plus jeune:

Il était une fois, il y a de cela trois ans précisément, un certain incident retentit sur les terres du pays du feu au beau milieu de l’automne. À cette époque, la menace des Furyous faisait encore rage, donc comprenons que cet incident ne peut se mesurer en terme d’importance. À vrai dire, cette aventure n’a absolument rien de sérieux. Après tout, le destin du monde n’a jamais joué entre les mains d’un jouvenceau âgé d’une quinzaine d’années. Un Lutin, qui plus est ! Si la vie était gérée par les Lutins… Bah, en fait, le monde serait une bien meilleure place.

Le narrateur s’éloigne du sujet, alors retournons à nos moutons. Hi no Kuni, il y a de cela trois ans. Un village sans nom, tout aussi nombreux qu’ils sont, assez loin des frontières mais pas trop proche de la cité de la Feuille non plus. On l’aura compris : il s’agit d’un point sans grande importance sur la carte. Un bourg ordinaire sans attrait spécifique. Le seul élément intéressant à soulever est que la municipalité est entourée d’une épaisse forêt – la même qui parcourt l’intégrité de la contrée en fait. Autre que ça, tout ce qui se retrouve à l’intérieur et à l’extérieur de ce village est tout à fait commun. La vie que mènent les paysans de cette communauté est plutôt simple et traditionnelle.

Néanmoins, il y a toujours quelque chose qui vient briser le quotidien, fracasser cette monotonie si agréable. Des fois, ce quelque chose est en fait quelqu’un. Et ce quelqu’un, aussi surprenant que cela puisse paraître, n’est qu’un enfant si l’on en croît son apparence physique : un nain vêtu de vert d’une hauteur ne dépassant pas cent-dix centimètres à la chevelure blonde et aux oreilles pointues. Ce drôle d’énergumène, qui n’est nul autre qu’un ancien ninja au service de la Brume Sanglante, aujourd’hui un vagabond, s’est retrouvé dans ce village par pur hasard. Les citoyens blâment encore aujourd’hui la direction du vent pour leur avoir occasionné un tel malheur puisque c’est exactement ce que suivait le Kirijin lorsqu’il a atterrit en ce lieu paumé.

Mais qu’a donc fait cet adolescent aux airs de gamin pour mériter une telle amertume à son égard ? À vrai dire, rien n’est encore clair dans cette histoire. Il est dit qu’une vague d’hallucination a surgit dans ce petit village. De la drogue ? Des gaz hallucinogènes ? Rien d’aussi barbare, en fait. La cause de ces mirages n’était que le petit Lutin, ce dernier prenant un malin plaisir à mettre en œuvre son talent dans ledit domaine.

En deux jours, la cacophonie traversa le village. Des hommes qui se trompent de porte aux bains ; des citoyens courant dans les rues hurlant qu’un dragon survole la région ; d’autres croyant qu’ils se promènent en habit alors qu’en fait, ils sont en sous-vêtement ; des marchands croyant baigner dans des tas de billets d’argent alors que ce ne sont que des feuilles mortes. Bref, rien de bien méchant. Ces illusions n’ont mis en péril la vie de personne.

Erf…

Assis sur le comptoir d’une taverne vide en beau milieu de journée face à la porte, Natsu sirota doucement son quatrième verre de lait. A-t-il payé pour ces breuvages ? Bien sûr que non ! L’argent qu’il a donné au serveur n’était qu’une piètre illusion dans ce cas-ci, encore une fois. En réalité, il donnait des pierres trouvé sur le coin de la ruelle. Contrairement à la veille, la mine du jeune Lutin n’était guère joyeuse. Bien que bien divertit par ses manèges, son objectif principal n’a pas progressé. Ses compétences dans le domaine du Genjutsu n’ont point évolué. Peu importe le nombre de fois tente-t-il d’augmenter le niveau de ses illusions, le résultat ne dépasse pas le niveau intermédiaire. Quelle sorte de manipulation doit-il effectuer afin d’atteindre le degré souhaité ? La réponse semble si proche, pourtant si lointaine. Il ignore que faire afin d’améliorer ce talent. Il noie donc sa peine dans le lait, ce précieux liquide riche en calcium. Si seulement un sauveur descendu du ciel pouvait entrer par cette porte et lui donner la solution à ce problème, ma foi, bien fâcheux.

Aussitôt sa requête transmise, il semble qu’un quelconque être omniprésent ait décidé de répondre à cet appel. Usant de son pouvoir afin de produire une intervention divine, la porte de la taverne craqua, puis s’ouvrit. Est-ce un chevalier provenant d’une terre lointaine ? Une jolie demoiselle cachant sa puissance derrière un air naïf et innocent ? Un druide à l’apparence plutôt louche, mais possédant une force égale à la défunte démone des flammes ? Non, ce fut un albinos qui apparut par l’entrée principale du bâtiment – un gaillard possédant une crinière empruntant la même couleur que la neige et des perles de même teinte que le sang. Le commun des mortels réagirait certainement en voyant une telle apparence unique, mais le vagabond de Kiri n’arqua point un sourcil. À vrai dire, il était même déçu du nouveau arrivé. Des types au physique atypique, il a vu tous les cas possibles à l’époque où la Brume Sanglante tenait encore fièrement debout dans toute sa splendeur. Cet homme n’a rien de spécial et cela est dommage. Le Lutin émit un léger soupir, soulignant son sentiment intérieur. À quoi bon ? Il est évident qu’il n’y aura aucune surprise pour lui dans un coin désolé tel que celui-ci. Fini les âneries. Dès que son verre de lait sera achevé, il prendra ses bagages et reprendra la route. Malheureusement, ce n’est pas ici qu’il trouvera la réponse à ses ennuis.

Son breuvage arrivait à sa fin et l’étranger décida de prendre place directement à côté de lui. Parmi toutes les places disponibles dans cet endroit désert, il se tire une buche ici ? Messieurs, voilà le genre d’individu qui n’hésite pas à se mettre à côté de vous lorsque vous êtes à l’urinoir en train de vous occuper de vos propres affaires bien tranquille alors qu’il y en a quelques-unes de libre plus loin. Répugnant. Tout simplement dégueulasse ! Le petit adolescent s’apprêtait à faire un bond deux mètres plus loin pour faire comprendre à l’albinos à quel point ce genre de comportement n’est simplement pas permis dans le livre d’or des hommes, mais ce dernier ouvrit un portefeuille plein aux as et glissa un billet au serveur. L’énergumène se permit même de projeter du dédain à l’égard de notre protagoniste. Néanmoins, cela passa six pieds par-dessus sa tête –sans jeu de mots sur sa taille. D’aveuglantes étincelles visibles dans son regard de charbon, son attention était plutôt focalisée sur cette liasse de billets.

Pour un citoyen errant tel que lui, sans un sous en poche, cette monnaie le faisait déjà halluciner. Avec ça, il pourrait se payer un bon gros steak bien juteux avec des pommes de terre en accompagnement. Certes, cet argent lui servira également pour se payer un loyer pendant quelques temps, jusqu’à ce qu’il trouve un contrat sur lequel il pourra tirer une modeste récompense. Telle est la vie d’un Shinobi sans foyer. La vie est rude en ce bas monde.

Pour un type aux manières douteuses, c’est bien de l’argent, tout ça ! Avec tout ça puis ce gabarit, ma foi, tu dois être Shinobi, n’est-ce pas ?

Le Kirijin ne dissimula pas son intérêt envers l’argent de l’étranger. À vrai dire, ce serait stupide de tenter de le cacher après une telle réaction démesurée. L’albinos doit déjà se douter que l’idée de voler le portefeuille a déjà traversé l’esprit du Lutin et sera méfiant. Pour l’heure, l’on doit gagner la confiance du loup. Puis, que dis donc à Natsu que ce quidam est un ninja ? Pas seulement les raisons mentionnés plus haut, mais également son sixième sens ! Non, pas de la sensorialité, simplement son instinct… Quoi ? C’est une raison insuffisante ? Silence, misérables ! Ce n’est pas compliqué de reconnaître un ninja dans ce monde de fou.

Dis dis ! Si tu es vraiment Shinobi, j’aurais besoin d’un service. Certes, j’ai quelque chose à proposer en échange. Uniquement pour toi, en édition limitée… des cailloux !

C’est en effectuant un acte théâtral accompagné d’effets sonores en arrière-plan que le jouvenceau présenta quelques roches reposant dans sa paume. Était-il sérieux ? Pas du tout… Enfin. Avec Natsu, nous ne savons jamais. Pour preuve de sa bonne foi, il n’a point tenté d’infliger un Genjutsu à l’étranger.

Quoi ? Ce sont des cailloux que tu m’as donné tout à l’heure ?!

Une voix gronda derrière lui, lui causant un frisson le long de son échine. La grosse main du propriétaire des lieux arracha son verre non fini de ses mains et se jeta son contenu dans le lavabo. Ne voulant lever la main sur un gamin, le gérant ne fit que grogner avant de retourner à ses occupations. Mince, l’illusion n’a pas tenu suffisamment longtemps. Une mine boudeuse remplaçant sa gaité de plus tôt, il déposa son menton sur le comptoir et marmonna des plaintes inaudibles. Sa réaction enfantine passée, il se retourna vers l’albinos et reprit la parole.

Tu vois, je suis aussi paumé qu’un rat et j’ai besoin d’aide afin de perfectionner mes connaissances. Sans ça, je ne serais jamais capable de me faire engager afin d’accomplir des contrats. Je suis pire qu’un novice. Prend pitié, Sensei !

Bon, il y a maigre exagération derrière tout ça. Le Lutin n’est pas un débutant dans l’art ninja. Il est toutefois vrai qu’il a de la difficulté à améliorer ses habiletés. Sans enseignement, il ne pourra jamais marcher de l’avant, uniquement stagner. L’adolescent à l’apparence de gamin de dix ans joint ses mains ensemble, mimant la supplication. Il enchaîna en se pointant du pouce, un sourire béant affiché sur son fin minois.

D’ailleurs, je me nomme Natsu, de Kiri !

Parce que c’est si cliché de décliner son identité à ce stade dans une conversation chez les japonais.

Comment peut-on résister une demande d’un tel charmeur ? Bon, peut-être que les mauvais termes sont utilisés puisqu’il n’y a clairement rien de suborneur chez ce nain. Qu’il y a-t-il d’enjôleur chez un enfant – correction : un jouvenceau aux airs d’enfant. Ce qui est bien pire, en fait. Toutefois, un gamin peut user d’un atout particulier, c’est-à-dire l’innocence. Qui donc peut refuser une requête de la part d’un mignon chérubin ? Peu de femmes peuvent résister à un tel charme et les hommes se sentent souvent mal à l’aise de décliner sollicitation. Il y a tout à gagner chez un avorton. Du moins, il faut savoir utiliser ses airs enfantins efficacement… Ce que le Kirijin d’antan échoue piètrement à faire, point capable d’utiliser ce fameux privilège.

Néanmoins, il semble que l’étranger ait une idée en tête. Il se redressa et fit signe au Lutin de le suivre. Le rictus de ce dernier s’ouvrit béant. Natsu bondit du comptoir et envoya la main au serveur en guise d’au revoir. Certes, le sentiment n’est pas partagé. Si un regard peut foudroyer, le ninja aurait été électrocuté par plusieurs milliers de volts. Ne lâchant pas d’une semelle l’albinos, il le suivit en silence, imitant ce mystérieux quidam. Quittant l’auberge, le duo se dirigea dans la forêt entourant le minuscule bourg. Pourquoi un homme amène-t-il un avorton avec lui dans les bois ? Planifie-t-il de lui trancher la gorge hors de la vision de tous ou bien son dessein réside en une idée bien plus obscure et obscène que cela ? Peu importe ce qui se trame derrière la tête de l’homme, l’adolescent le suivit tout de même sans se soucier de ce qui peut l’attendre une fois à l’extérieur du village, bien trop naïf et chantonnant une mélodie au hasard dans son esprit.

Une fois une clairière au bord de la forêt localisée, le binôme arrêta leur marche et l’enseignant du jour tourna les talons vers l’elfe. L’excitation chez ce dernier augmenta exponentiellement, atteignant son summum. Il y a longtemps que Natsu s’est entraîné sous le tutorat de quelqu’un. Le dernier étant Kitase Shinichi, la seconde Ombre de l’Eau et Shinobi de légende aujourd’hui disparu de la surface de la Terre comme bien d’autre. Certes, il est clair comme jour et nuit que ce type n’arrive pas à la cheville du talentueux Noble Lutin. Toutefois, un professeur qui le coach afin de l’aider dans son parcours ninja lui fait grandement plaisir.

Malgré tout, son bonheur fut coupé court. Les premières tirades de l’albinos n’étaient que des reproches. Adieu la bonne ambiance, bonjour la mine blasée. Ce n’est que pour lui faire la morale que ce personnage l’a amené tant à l’écart du village ? Quelle perte de temps. Le garçon aux longues oreilles allait répliquer avec des insultes – la base quoi – mais son environnement changea subitement. En un claquement de doigts, le champ de plus tôt fut remplacé soudainement par des dunes désertiques. Son regard de charbon balaya les alentours. Il n’y a aucun doute. Ce soleil éclatant ainsi que cette infinité de sable qui s’étend jusqu’à l’horizon, cela ne peut être que le désert du pays du vent. Du moins, cette supposition serait logique, mais voilà que le duo est à des kilomètres de la frontière séparant Hi no Kuni et Kaze no Kuni. À moins d’être bien versé dans les arcanes de l’espace et du temps – ce dont doute le Lutin – il s’agit plutôt d’un mirage, une illusion. Un monde parallèle reproduit dans son psychique.

L’albinos poursuivit sa leçon, ce dernier tentant de faire comprendre le mal dans les actes du jeune Lutin. C’est peine perdue de faire la morale à un Kirijin de pur-sang, à vrai dire. Certes, Natsu lui-même sait bien qu’il n’est pas très glorieux de s’en prendre à des innocents. Cependant, en sa défense, la possibilité de progression est peu exploitable pour un aventurier solitaire tel que lui. De plus, les Genjutsus utilisés n’étaient point fatal. L’on pourrait même les qualifier de blagues inoffensives – les cailloux en argent, c’était une question de vie ou de mort. Cet homme est un justicier dans l’âme, inutile de lui faire comprendre son point de vue ou même de lui dire que ce n’est pas si grave qu’il puisse l’imaginer.

Oui, je comprends mes fautes. Je sais que je suis dans l’erreur. Désolé, cela n’arrivera plus. Parole de Lutins.

Dit-il en levant les bras, coupable du crime dont il est accusé. Parait-il sincère ? Il l’espère. Quoi qu’il en soit, afin de flatter son bon côté, mieux ne vaut pas le froisser et flotter avec le courant… Ceci dit, il s’accroupit et empoigna le sable chaud à ses pieds avant de se redresser. Il laissa déverser les grains entre ses doigts, ceux-ci s’envolant au gré de la brise. Ce niveau de réalisme procura une joie chez l’adolescent. Le degré de température, la texture des éléments ainsi que le relief de l’environnement sont reproduit à la perfection. Voilà le niveau que souhaite atteindre l’ancien Genin de la Brume Sanglante. Malheureusement, il réalise que c’est un échelon qui sera difficilement accessible pendant un long moment s’il ne reçoit pas d’aide.

Tu es partant pour m’aider, du coup ? Cela tombe bien, j’ai justement besoin de quelqu’un qui serait volontiers d’être mon mannequin en chair et en os. Ou bien simplement pour me donner quelques conseils, hein.

Il demanda avec cette même expression joviale, un rictus bien étiré sur son faciès. Voilà qu’il agit comme si sa connerie de l’heure n’était qu’une affaire du passée. Une particularité des Lutins : l’on ne garde jamais rancune sans une bonne raison. Il y a une bonne raison dans cette histoire ? Ne vous faites donc pas d’illusions. Haha, ce jeu de mots.

Évidemment, rien ne se déroula comme l’espérait si fort notre jeune Natsu. Un monde parfait qui exauce tous les moindres caprices d’un tel existe uniquement dans les fantasmes des hommes. Si une quelconque entité astrale satisferait tous les désirs de chaque humain sur cette planète, il y a longtemps que l’humanité n’existerait plus. À vrai dire, il ne serait guère exagérer d’affirmer que le système solaire, ou encore, une partie de la galaxie, serait détruit à néant ! Malgré tout cela, le blond souhaitait tout de moins que son interlocuteur lâche la mise et obéit comme un chien à ses demandes. Cependant, cet homme est plus têtu que le Lutin lui-même. Voilà quelque chose qu’il ne croyait pas possible. Son bluff ayant échoué, l’intéressé n’ayant pas mordu à l’hameçon, ce dernier le regardait sévèrement et lui fit de nouveau la morale, racontant que notre protagoniste est encore bien trop jeune et a encore beaucoup à apprendre. C’est marrant, les adultes ont souvent ces mots à la bouche. Souvent, ce sont les parents ou encore les professeurs qui disent cela. Il y a une règle universelle en ce qui regarde ces propos : peu importe qui les dit, ça énerve toujours la personne concernée.

Blasé, le nain roula les yeux vers le ciel. Finalement, tout ceci est une perte de temps. Il n’y a désormais plus aucune raison de rester dans ce coin paumé. Il s’apprêtait à lui annoncer ses adieux et exiger qu’il le libère sur le champ. Toutefois, l’environnement changea subitement de nouveau. Le désert aride fut remplacé par une salle de séjour à l’ambiance cordiale où deux fauteuils se firent face, une table basse séparant les deux sièges. Un peu décevant, considérant la taille et la nature du précédent mirage. Tandis que l’ancien Genin testa la solidité du siège illusoire, l’hôte prit place et mima à son invité à faire de même. Chose qu’il ne fit pas, fixant l’étranger de ses perles de charbon, une mine interloquée lisible sur son minois. Ses mots qui résonnèrent dans son esprit confirmèrent son doute : il veut jouer au psychologue. Prenant place sur le canapé, il croisa les mains et ferma les solennellement les yeux. Il éclaira sa gorge avant d’entamer son récit

Très bien, monseigneur. J’ai vu le jour au pays du riz, lors d’un jour d’été où l’astre solaire était tout aussi radieux qu’aride. Mes parents étaient des – mais on s’en tamponne les coquillards !!

Si cette discussion était animée comme une série à la télévision, l’on verrait un petit avorton soulever la table basse de toutes ses forces, celle-ci virevoltant dans les airs d’une manière qui défie les lois de la gravité. Légèrement énervé, l’errant bondit sur le canapé et pointa le mystérieux personnage de son index.

Mon histoire ? Je te l’ai déjà dit. Je suis de Natsu, de Kiri ! C’est tout ce qu’il y a à savoir. Certes, aujourd’hui, ce titre ne veut plus rien dire. Mon village – ma famille – n’est plus. Mais marque mes mots : le Brouillard ne se disperse pas aussi facilement. Un jour, la Brume renaîtra !

Il n’y a rien à savoir sur l’adolescent. Ce qui s’est passé avant qu’il trouve un foyer au pays de l’eau n’a plus d’importance. Il a tourné la page sur cette époque. Il apposa la paume de sa main sur sa poitrine dans le but de se désigner.

En tant que fier Kirijin, je n’ai rien à prouver à quiconque. Je ne m’abaisserais pas à cela même si j’ai quelque chose de bien à y gagner à la fin.

Sa résolution est ferme. Même s’il y perd le chemin du savoir afin d’obtenir ce qu’il désire à l’heure actuelle, il en trouvera un autre dans le temps… Un autre pas si loin que ça. Un rictus présomptueux s’étira sur son faciès.

Et puis, tu m’aides déjà, à vrai dire. Je n’ai jamais eu l’occasion d’être prisonnier d’une illusion de ce calibre et voilà que tu me donnes deux exemples à analyser. Je commence à comprendre. Le concept est si simple que je me sens stupide de ne pas l’avoir saisi plus tôt. Dans ce cas-ci, un monde parallèle, tu as affecté mes cinq sens. Là était mon erreur et mon incompétence. J’ai toujours pensé qu’une simple décharge d’énergie dans la tête de ma cible était suffisant, mais il en demande en réalité une certaine finesse.

Son index toucha à plusieurs reprises sa tempe, désignant son encéphale, organe qui est toujours la cible des Genjutsus. Afin de tromper l’esprit, il suffit de manipuler la vue, le toucher, le goût, l’odorat et l’ouïe. Il comprend plus ou moins la théorie. La pratique sera-t-elle un succès ? Avec de l’entraînement, oui. Il n’est pas aussi con que ça le Natsu, non ? Quand il veut, il peut. Il ne reste plus qu’à savoir ce que compte faire le vilain de cette histoire. Continuera-t-il son chemin ? Est-ce qu’il prendra enfin le manteau de professeur et s’avérer utile ? Ou bien bloquera-t-il la route à notre héros ? À voir.

Le Kirijin semblait de toute évidence agacé par le ton moralisateur que j’avais pris tout au long de notre conversation. Il semblait bien malgré moi trop jeune et trop immature pour comprendre tout ce que ses actions pouvaient engendrées et je me retrouvais toujours devant le même dilemme, sans qu’aucune des trois options auxquelles je pensais ne me satisfassent. Son comportement trahissait ses pensées. Lassé de la conversation, il ne prêtait guère attention à mes propos si ce n’est pour obtenir ce qu’il souhaite tant : du pouvoir. Mais le pouvoir, contrairement aux apparences, ne peut s’obtenir sans contrepartie et il s’agit là des responsabilités qui vont avec. Natsu refusa mon invitation à s’assoir et commença à employer un ton provocateur. Un comportement auquel je m’attendais, fus-je surpris de ne pas avoir pu l’observer avant. Laissant de côté ses paroles mondaines, je tentai de lire entre les lignes du l’histoire qu’il me contai. Né au pays du riz, Natsu était un Kirijin et souhaitait faire renaître son village aujourd’hui détruit. Un tas de cendre qu’il était mieux de voir ainsi. Les kirjins étaient des êtres assoiffés de puissances et de sang et l’une des meilleures choses qu’il était arrivé en ce monde était sa destruction. Cependant, je doutais des capacités de Natsu à réaliser son ambition : si le village devait renaître de ses cendres, ce serait de la part d’une grande puissance leur ayant tendu la main et d’un meneur d’homme, pas d’un simple adolescent trop imbu de sa personne et de ses origines pour comprendre le monde dans lequel il vivait. Le peu d’empathie dont j’avais pu faire part envers lui avaient tôt fait de disparaître. Je n’avais pas le temps ni l’envie de ramener ce jeune homme dans le droit chemin et mes obligations m’appelaient. Je décidai donc de l’aider, mais ce ne se ferait pas sans certaines contreparties.

« Bien. Je vais t’aider à parfaire ta maîtrise du Genjutsu. Comme tu t’en doutes tu es proche du but. Cependant, si j’agis ainsi, je serai responsable des actes que tu pourrais commettre par la suite. Sache que si un jour, j’entends ton nom raisonner comme celui d’un criminel, je me mettrai à ta poursuite et donnerait tout pour t’arrêter. »

Mes mots sonnèrent comme un avertissement. D’un ton grave, j’inscrivais ainsi dans le marbre mon engagement envers lui.

« Il ne s’agit pas d’affecter les cinq sens, contrairement à ce que tu as l’air de penser. Les Genjutsu pouvant ainsi affecter tous les sens sont ceux de très haut niveau. De plus, il ne s’agit là que d’une excuse à la médiocrité d’une illusion. Un bon Genjutsu peut parfaitement fonctionner en n’affectant qu’un seul sens, sinon, c’est que ton illusion n’est pas crédible. Tu dois donc faire preuve d’intelligence et de créativité, encore plus que les autres arts. S’entrainer sur soi-même est bien plus efficace que de s’entrainer sur d’autres personnes. »

Je l’invitai à nouveau de s’assoir, d’un geste de la main et attendit cette fois-ci qu’il s’effectue pour continuer mes explications.

« Le genjutsu est l’art de contrôler le flux de chakra alimentant le système nerveux de ta cible. Pour faire simple, tu dois altérer le flux chakratique de ton adversaire pour les perturber et ainsi modifier la perception de ses sens. Pour se faire, tu dois parfaitement contrôler le chakra Yin, qui vient de l’énergie spirituelle alimentant l’imagination. Ton problème est que tu ne parviens pas à pleinement contrôler ce chakra et que tu le mélanges avec ton Chakra Yang. Ce n’est pas en quelques jours que tu parviendras à corriger cette erreur, mais en t’entrainant, tu y parviendras. Ces deux énergies sont dures à différencier pleinement, c’est pour cette raison qu’il est difficile de maîtriser l’art du Genjutsu. Tu dois toi-même être persuadé de la véracité de ton illusion. De même, ton contrôle de ton chakra Yin doit être parfait. »

Je me relevai et rompis mes deux Genjutsu. Alors qu’il s’était déroulée plus d’une heure dans l’illusion, il ne s’était passé que quelques secondes dans la réalité. Un léger vent vint s’infiltrer dans le col de mon manteau. Dissimulant toute gêne, je m’approchai du Kirjin et me plaçai à un mètre de lui.

« N’oublie pas, je garderai toujours un œil sur toi. »

Mon ton et mon regard de braise ne laissait aucune part au doute. J’étais décidé à faire payer Natsu pour tous les actes qui iraient à l’encontre de ma mise en garde. Sans un mot, je me mis en marche vers le centre du village. Tourmenté, l’idée de relâcher ainsi ce gamin dans la nature ne m’enchantait guère. Mais j’espérais ainsi faire cesser les tourments de ces pauvres gens.

Spoiler:

Peut-être que son acte théâtral eut l’effet souhaité sur son interlocuteur. Appelons cela de l’honnêteté ou du chantage, qu’importe. Lorsque l’adulte accepta de donner un petit cours sur l’utilisation des illusions à notre adolescent, sa mine arrogante fut aussitôt remplacée par une joie sans précédente. Que vaut donc ce revers de la situation ? Que signifie de changement ? Pourquoi le duo perd-t-il son temps depuis plusieurs minutes à tourner autour du pot s’il aboutit finalement à ce résultat ? Natsu cessa de chercher plus longtemps. À quoi bon ? Si l’étranger est prêt à partager son savoir, ne serait-ce que pour une raison ou une autre, autant l’écouter et fermer sa bouche avant de dire une connerie supplémentaire. Lui qui était si certain qu’après son manège impulsif de plus tôt, il avait ruiné toutes ses chances afin d’évoluer plus rapidement. Au lieu de ça, il est récompensé pour sa témérité et son impolitesse. Les jeunes de nos jours ont la vie facile, ceci dit ! Blague à part, le jeune garçon était fin prêt à écouter attentivement les paroles de l’homme en face. Il plaça ses mains derrière ses oreilles pointues afin de mieux capter le son pour ne pas manquer la moindre information.

Bien qu’aussi attentif qu’un élève modèle, il ne comprit pas totalement les propos de son enseignant. Au minimum, ce dernier confirma la théorie initiale de notre protagoniste avant de le menacer. Si un jour Natsu devient un criminel par n’importe quel malheureux incident, cet homme se chargera de le traquer. Sur quoi le nain arqua plus qu’un sourcil. Lui, un danger publique ? Certes, il sera le premier à admettre qu’il n’est certainement pas le meilleur des citoyens, mais contrairement à la rumeur, le Kirijin est en fait un allié de la populace. Jamais il ne lèvera la main sur une personne innocente. Bon, les illusions de ces derniers jours n’aident pas sa cause, mais de son point de vue, il s’agit tout simplement de blagues. Il n’a fait de mal à personne.

J’ignore pourquoi tu penses que je puisse représenter une menace, mais si ça peut te rassurer : je promets de ne jamais devenir un criminel. Parole de Lutin.

Et un Lutin ne trahit jamais sa parole. Sur ce, l’albinos poursuivit son monologue. Il expliqua qu’un bon Genjutsu n’a pas besoin de viser tous les sens, mais seulement un. Il suffit de parfaire sa maîtrise et sa finesse. L’homme dévoila également que l’entraînement dans cet art est plus efficace en se prenant soi-même pour cible plutôt que de viser des individus extérieurs. Une révélation qui sidéra notre elfe. Cette idée de s’infliger lui-même ses propres illusions ne lui a jamais traversé l’esprit. Il faut avoir un penchant masochiste pour penser à une telle chose. Est-il sérieux ou cherche-t-il à lui faire payer pour ses actions jusqu’à présent ? Il confirmera cela plus tard. Pour l’heure, il voulait simplement en apprendre plus.

Cette fois-ci, Natsu répondit à l’invitation de son hôte et prit place sur le canapé individuel. Ceci fait, il continua son explication. Et là, on entre dans des termes compliqués. Perturber le flux d’énergie dans le système nerveux de la cible afin de modifier ses perceptions ainsi qu’une histoire de chakra Ying et Yang qu’il ne parvient pas à maîtriser pleinement selon son professeur. Bien qu’aussi attentif que tant tôt, si ce n’est pas plus, le Lutin ne capta pas totalement l’entièreté des concepts mentionnés. Il a bel et bien mémorisé le discours, mot pour mot, mais ne comprend pas. Est-ce que cela signifie qu’il va devoir mettre le pied dans une bibliothèque et étudier pour aider sa compréhension, et de ce fait, parfaire sa maîtrise ? La simple image le fit déglutir. Voilà un sacrifice de taille qu’il devra effectuer.

L’enseignement achevé, l’homme se leva et rompit son illusion. Le duo se retrouva de nouveau dans la clairière au lieu d’un salon ou un désert. Ils étaient de retour dans ce trou minable, perdu dans les tréfonds du pays. Ou plutôt, ils n’ont jamais réellement quitté cet endroit. L’étranger se rapprocha de notre héros et lui fit une dernière mise en garde avant de tourner les talons et se diriger vers le village. C’est con. Comment compte-t-il garder un œil sur lui s’il y a une infime chance que leurs chemins se croisent de nouveau ? C’est un grand monde dans lequel ils vivent, alors autant profiter des rencontres que l’on croisent sur la route ! Il rejoignit à pas de course son tuteur, un grand sourire affiché sur son fin minois.

Hey. Au moins, laisse-moi te remercier. D’ailleurs, c’est quoi ton nom ? Tu viens d’où ? Pourquoi tu es dans les parages ?

Agit-il comme une peste ? Peut-être. Là n’est nullement son intention. Il souhaite vraiment en apprendre sur ce drôle de gars.

Alors que je m’éloignais progressivement du Lutin, j’entendis les pas de ce dernier se rapprocher de moi. Arrivé à mon niveau, il m’assaillit de questions auxquels je ne pouvais répondre en raison de ma mission. Une absence de réponse aurait jeté des doutes quant à la raison de ma présence en ce lieu. Ma fausse identité me faisait passé pour un civil et je ne pouvais donc pas l’utiliser, au risque de me faire démasquer. Enfin, lui dévoiler la vérité était surement la plus stupide des idées. Ma vie ne tenait que sur un fil, si les Konohajins découvraient mon identité, qui sait quel sort ils me réserveraient. La mort serait préférable à une torture qui n’aurait pas de fin. Il fallait donc que je trouve une solution, et vite.

« Je m’appelle Izaya et suis un Shinobi apatride, errant de village en village. Je cherche à aider quiconque serait dans le besoin et qui n’aurait pas de mauvaises intentions. »

Je m’étais alors arrêté. Me retournant, j’observai ce jeune garçon. Son apparence était tout sauf commode, de même que son comportement. Jamais je n’avais rencontré un tel Kirijin, ces derniers étant plutôt occupés à tuer qu’à discuter. Je commençai à mieux cerner son caractère, qui s’apparentait parfaitement à celui d’un lutin farceur, comme l’on pouvait en lire dans les comptes et les récits fantastiques.

« Et toi ? Que viens-tu faire ici ? Tu n’as surement pas fait autant de chemin pour t’entrainer, mmh ? »

Spoiler:

Enfin, un nom peut être lié à ce mystérieux personnage : Izaya. Drôle de prénom, pensa aussitôt l’adolescent. Voilà un mot qui est tout sauf commun. Est-ce sa véritable identité ou fait-il marcher le nain ? Sans possibilité de cerner la vérité ou non, Natsu n’a nul autre choix que de jouer le jeu. Toujours selon lui, le Shinobi est un vagabond voyageant le monde sans destination, souhaitant uniquement aider les gens dans le besoin. Ce n’est pas impossible puisqu’il joue le rôle du justicier depuis la dernière heure. Toutefois, ce mode de vie semble plutôt décevant aux yeux du garçon aux oreilles pointues. Errer d’une extrémité du continent à l’autre uniquement dans le but d’aider la populace, ce n’est pas amusant. Le blond admettra qu’il s’agit d’un acte altruiste et honorable. Il n’y a guère place pour la critique là-dessus. Néanmoins, cela reste bien trop amorphe à son goût. Le Kirijin ne pourrait guère suivre cette voie à la lettre. Cela demande bien de la discipline ainsi que la volonté d’aider les autres. Sur ce dernier point, le jeune garçon n’est pas tout à fait l’humanoïde exemplaire.

L’albinos tourna les talons et jaugea de la tête aux pieds notre protagoniste. Ce dernier fit de même avec bien plus d’exagération, soulignant l’impolitesse de son interlocuteur ! Il questionna finalement son élève d’un jour, lui demandant ce qu’il fait dans les parages, comment est-il arrivé ici. Le nain âgé de quinze piges haussa les sourcils. Est-il sot ou bien fait-il exprès ? Natsu est certain d’avoir dit à quelques reprises d’être un ancien membre de la Brume Sanglante. Ça ne prend pas le cerveau d’un génie pour comprendre que, depuis la destruction du village du Brouillard, il est laissé à lui-même.

Tout comme toi, j’erre à gauche et à droite. Kiri est détruite, donc je n’ai nulle part où retourner.

Cette discussion prend une tournure plutôt triste et émotionnelle d’un point de vue extérieur. Dans l’esprit de Natsu, cela fait mouche puisqu’il tient fermement espoir que le phénix renaîtra de ses cendres. Le village élu ressuscitera, alors pourquoi pleurer alors que l’inévitable surviendra ? Enfin. Trêve de bavardage. Il est inutile de s’éperdre plus longtemps sur le sujet. Le Lutin est un patriote, c’est clair comme eau sur roche.

Tu voyages vraiment à travers le monde afin d’aider les gens ? Qu’est-ce qui te pousses à faire ça ?

Demande-t-il, talonnant toujours son professeur alors que le duo se dirige lentement vers le petit bourg. Cet homme est fascinant en un sens. Jusqu’à présent, il n’a fait preuve d’aucun sens de l’humour. Un sérieux implacable et un calme olympien, voilà tout ce qu’il a démontré jusqu’ici. Il possède une certaine ressemblance avec le dernier Chef des Épéistes : même couleur de cheveux, un caractère plutôt similaire et le pigment des yeux est à moitié identique – Yuuki Setsuna possédant un regard hétérochrome, rouge et bleu. Qu’est-ce qui peut pousser un homme à vouloir tout laisser derrière lui afin d’aider son prochain ?

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J’avais reposé ma question dans un but précis et je ne fus pas étonné de voir que l’adolescent ne l’avait pas compris. Me dévisageant de haut en bas, comme je l’avais fait plus tôt avec bien plus de retenue, il me ressortit son discours sur la destruction de Kiri et son errance à travers le Yuukan. Si son village n’était plus que ruine, n’y avait-il plus qu’à le reconstruire ? Je n’avais pour ma part aucune envie que ce village de brute ne renaissance de ses cendres, c'était, comme je l'avais dit, une des meilleures choses qui soit arrivé à ce monde. Cependant, sa destruction avait laissé la place aux opportunistes qui profitèrent de ces instants de paix et de calme pour donner vie au Shukai, un Empire tyrannique n’hésitant pas à écraser tous ceux se dressant contre lui, avec à sa tête le clan dégénéré des Samuis dont l’honneur était maintenant perdu à jamais. Ce clan majestueux qui avait fait la renommée de Kiri faisait maintenant la déchéance de l’Empire. Je voyais dans la résurrection de Kiri une force supplémentaire qui se dresserait contre le Shukaï. Les habitants du pays de l’eau étaient également pourvus d’honneur et de l’envie de liberté, valeur faisant défaut à l’Empire Samui.

Toujours silencieux, j’écoutai le lutin me questionnait sur les raisons qui m’avaient poussé à faire un tel voyage. Puisqu’il m’était impossible de me débarasser de lui, je l’invitai à me suivre jusqu’à un bosquet situé en bordure du champ qui donnait sur le village. Le vent s’était levé, caressant délicatement les herbes du pré. Le ciel s’assombrissait peu à peu tandis que la nuit le soleil commençait à se coucher. Placé sur mon rocher, je fixai à nouveau son regard et prit un ton solennel.

« Que fais-tu ici ? »

Disais-je simplement sans détourner mes yeux de ses pupilles noires.

« J’ai bien compris que tu erres de ville en ville depuis que ton pays a été détruit. Mais dans ce cas, pourquoi n’es-tu pas là-bas pour le reconstruire ? »

Le ton que je pris reflétait ce qui me paraissait être comme une évidence. Je levai mon bras en direction du sud, pointant là où se trouvait l’ancien village de la brume sanglante.

« Ton peuple a besoin de ton aide, non ? Toi qui semble tant tenir à ces gens, pourquoi n’es-tu pas là-bas en train de les aider ? »

Une vieille histoire me revint en tête : celle de la création du clan Kinzoku. Au centre de mon village se dressait une stèle représentant un homme levant contrôlant du métal. Sur le socle de statue était gravé les mots suivants : Avant de construire des armes, construit un toit pour ton clan. Le sens de cette phrase avait été perdue depuis bien longtemps par ma famille, mais elle avait malgré tout raisonné dans mon esprit pendant toutes ces années loin de ma patrie.

« Je suis ici je me suis volontairement éloigné des miens, qui ont perdu la voie il y a bien longtemps de cela. Plutôt que d’essayer de sauver ceux qui ne peuvent plus l’être, j’ai décidé d’aider ceux qui méritent encore qu’on leur en apporte. »

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Tu es sérieux ou bien tu fais exprès ?

Interroge-t-il d’un air légèrement à la fois insulté et énervé. Mains sur les hanches, le jouvenceau jaugea de nouveau son interlocuteur de la semelle des bottes jusqu’à l’apex du crâne. L’ayant suivi jusqu’à un bosquet, l’albinos s’étant installé sur un rocher faisant office de siège, ce dernier demanda de nouveau ce que fait ici le jeune garçon aux oreilles pointues malgré qu’il venait tout juste de dire que, comme lui, il est un Shinobi errant éperdument du nord au sud et de l’est à l’ouest. Il n’y a pourtant rien de compliqué à comprendre dans ces mots, n’est-ce pas ? Toutefois, le dénommé Izaya poussa son interrogation plus loin : si Natsu désire plus que tout au monde de reconstruire son village, alors pourquoi n’est-il pas parmi les siens afin d’accomplir ce projet ? Le Kirijin renifla du nez tel un taureau, ne cachant pas son tracas fasse à ses propos. Il y a une part de vérité dans ces propos, mais l’apatride oublie quelques détails importants et ne regarde que la surface du problème. Après avoir respiré un bon coup pour calmer ses ardeurs, il se décida de lui expliquer pourquoi cette option n’est pas possible.

Si seulement c’était aussi simple. Attends, je vais te montrer.

Natsu chercha une branche d’arbre et débuta un graffiti dans le sol. Le bâton déchiffrant l’herbe sur son passage, le dessin commença à prendre peu à peu une forme familière : le monde Shinobi cartographié à ce jour. Du moins, s’il est capable de comprendre qu’il s’agisse d’une mappemonde puisque la réplique est loin d’être similaire. L’ancien Genin du Brouillard est tout sauf un artiste réputé. Une fois cela fait, il entama un monologue et pointa à plusieurs reprises des endroits sur sa carte improvisée.

Il était une fois, des cinglés ont détruit Kirigakure. Ses résidents ont trouvé refuge au pays de la Terre. Une mesure temporaire, disait-on. Malgré tout, au lieu de concentrer leurs efforts sur la reconstruction de la Brume Sanglante, ils ont décidé de bâtir une nouvelle puissance sous le nom de l’Alliance des pays neutres – on sait tous aujourd’hui ce qu’est devenu cette fameuse Alliance. Pour ce qui est de Mizu, à l’heure actuelle, c’est le chaos total. Le pays est plongé dans la piraterie et toute autre forme de criminalisation. Tu ne dois pas lire le journal, toi.

Le gnome se redressa et expira d’exaspération. Il enchaîna son discours, parlant haut et fort, tel un enseignant fasse à une classe.

Ce qu’il faut comprendre ! Je ne suis pas à Mizu puisqu’il n’existe plus aucune forme d’autorité pour réprimer les bandits et les gangsters s’étant installé sur notre cher archipel. À mon niveau, y aller seul serait un suicide assuré. Je ne suis non plus au Shûkai puisque je n’ai aucune envie de service un village autre que Kiri. Donc, pour répondre plus précisément à ta question, Izaya : je vagabonde dans le monde à la recherche d’anciens Kirijins voulant me rejoindre afin de rétablir la paix dans notre pays. Et non, il est inutile de demander de l’aide à l’Empire. Pendant toutes ces années, ils n’ont démontré la moindre envie de reconstruire notre village. Ils ont tourné la page et ont préféré profité d’un nouveau départ.

Une nouvelle fois, le petit homme vêtu de vert soupira. Faire face à la triste réalité est une tâche ardue. Avec ce long dialogue ininterrompu et assez détaillé, Natsu espère que son professeur d’un jour lui lâche les semelles avec les questions idiotes. En bref, il n’est présentement pas possible de reconstruire Kirigakure puisque le pays est dans la déchéance, très peu de gens veulent contribuer à cette tâche et personne n’a les ressources nécessaires pour réaliser ce projet. Le Lutin est donc dans une impasse et n’a que comme seule option de rechercher de vaillants larbins ayant le même rêve que lui.

Ayant vidé son sac, ce fut au tour de son compatriote du jour de parler. Mais la réponse offerte n’étancha pas sa curiosité. Les rôles s’inversent donc. Le Lutin lui a demandé qu’est-ce qui le pousse à vouloir aider les gens. La rétorque n’était pas tout à fait convaincante, mais bon. Contrairement à lui, le Kirijin ne pousser pas le bouchon plus loin. Des fois, c’est dans la nature humaine de désirer le bonheur d’autrui tout simplement.

Hm. Je vois. Dans ce cas, si tu veux aider les gens, pourquoi ne pas m’aider à nettoyer le tas de rat qu’est devenu le pays de l’Eau ? Ce serait un service pour le monde entier. Ce serait également l'occasion pour toi de t'installer.

Qui ne tente rien n’a rien. Il doute déjà de sa réponse, mais sait-on jamais. Après tout, un job comme celui-ci peut bien attirer les fantaisies héroïques d'un allié de la justice.

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Je n’avais éprouvé jusqu’au où le nain me confia totalement les raisons de son errances aucune pitié ou tristesse à son égard. Kiri avait disparu et c’était pour le mieux. Mais à l’époque, j’étais très différent de celui que je suis aujourd’hui alors j’écris ces lignes que vous lisez.

Natsu me résuma brièvement l’histoire de la destruction de Kiri et celle de la création de l’Empire. Histoire que je connaissais déjà parfaitement. En tant que Juunin, il était de mon devoir de me connaître l’histoire du monde et pourquoi les frontières étaient ce qu’elles étaient. Mais plus encore je devais me tenir au courant de l’actualité politique de tous les pays. Les informations passaient peu entre le Shukai et Kumo, en guerre depuis sa création, les deux grandes puissances n’ont cessé de nourrir la discorde qu’il existait entre eux. La création de Shukai était une aberration et il fallait s’en débarrasser, ma loyauté à l’égard de Kumo et des raisons qui poussaient nos dirigeants était aveugle. A l’époque je me fourvoyais lourdement et la chute qui en suivit bien des années plus tard ne fut que plus grande.

Mizu était devenu le repère des gangs et pillards en tout genre. Les mers du sud n’avaient jamais aussi dangereuses que depuis sa destruction. Malgré les souffrances que ce village apportait, il parvenait néanmoins à canaliser toute la brutalité de son peuple. Exaspéré par mon comportement, Natsu continua son discours en expliquant qu’il ne pouvait plus retourner à Mizu à cause du chaos présent. Fuir plutôt que de combattre, c’était tout ce qu’il faisait. Ainsi il vagabondait à la recherche d’autres Kirijins qui auraient la même volonté que lui : reconstruire leur village et ramener l’ordre dans leur pays. Il marchait là où ses pas le menaient et attendait que la chance lui sourît. Ces propos me mirent hors de moi. Car au fond, je me sentais comme ce jeune homme. J’avais moi aussi fui ma patrie pour me réfugié à Kumo. Je m’étais échappé de Shimo no Kuni et servait maintenant une autre cause. Au fond de moi je savais que je me berçais d’illusion et que je n’aidais en rien ma terre natale et mes frères et sœurs de sang. Mais… A l’époque j’étais trop aveuglé par ma colère et mon désir de puissance. Ma faiblesse ne résidait pas dans ma maîtrise boiteuse du métal, mais dans mon regard envers moi-même. Je me pensais faible et je me comportai comme tel.

« Pfff. »

Exaspérant. C’était le seul mot qui me venait à l’esprit.

« Donc plutôt que d’essayer de régler la situation là-bas tu te balades dans tout le Yuukan et prie pour y rencontrer des Kirijins qui auraient le même désir que toi ? C’est comme prier pour que le repas du jour apparaisse devant toi alors que pour se faire tu dois le cuisinier. Rien ne nous ai donné. Il faut se battre pour défendre ce que l’on aime. »

Ce jeune homme était parvenu à me faire sortir de mes gonds, mais également de laisser transparaître qui j’étais vraiment. Au fond de moi, je savais qu’il était trop tard mais j’étais alors trop énervé pour m’en rendre compte.

« Car ce pays est justement un tas de rat. Un tas de rat qui a embrasé le monde et qui, s’il est reconstruit l’embrasera à nouveau. Enfin, ces rats se sont déjà enfuis et ont construit l’Empire, qui est encore pire que ce que Mizu a pu être. »

Peu après être arrivé à Kumo j’avais combattu le pays de la brume dans la grande guerre qui nous opposait à eux. C’était une organisation Nukenin du nom de An’Tei qui était parvenu à mettre fin aux combats. Si ça ne tenait qu’à moi à l’époque, je les aurais tous tué au nom de ma prétendue justice.

« Jamais je n’aiderai ton pays. Jamais je ne t’aiderai. Et notre chemin se sépare maintenant. »

Je fis alors volteface et descendit de mon rocher. Le Natsu derrière moi, je ne pris même pas la peine de lui adresser un regard et partis en direction du village. Je ne comprenais alors pas pourquoi j’étais si en colère contre lui et je n’ai compris que bien plus tard que c’est parce que à travers Natsu, je me voyai plus jeune. A travers Natsu, je comprenais à quel point tout ce que j’avais entrepris jusqu’alors était futile. J’avais tourné le dos à ma partie et fermé les yeux sur mon passé. Il est facile de fermer les yeux devant la souffrance et passer son chemin, difficile de s’en approcher et de la regarder en face.

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