Debout au milieu d’une ruelle, la Natsumi fixait un animal et ses progénitures qui trainaient au bord de la route un peu plus loin. Sachant ce qui pourrait se passer si elle poursuivait son chemin, c'est-à-dire quelque chose dont elle n’avait pas vraiment envie de faire, la jeune femme aux prunelles sanguines préféra marquer un arrêt. Sauf que les animaux qu’elle n’avaient point envie d’approcher ne semblaient pas vouloir s’en aller. Au contraire, les petits commencèrent à investir la rue comme pour lui faire comprendre qu’ils étaient sur leur territoire.

La Natsumi se trouvait bien bête de s’arrêter ainsi à cause des animaux que la plupart des humains ne craignaient guère. Au contraire, la majorité de la race humaine appréciait cette créature mais pas elle. Elle ne lui faisait pas peur mais la samouraï ne supportait pas leur présence. Elle était l'animal qui la répugnait.

Décidée à ne pas laisser la chatte et sa portée lui faire perdre son temps, la jeune femme aux yeux rubis s’avança sans hésitation s’apprêtant à dégager par un coup de pied le moindre chaton qui oserait l’approcher. Aucunement effrayée, elle évolua sans se presser mais ne quitta pas des yeux les créatures du diable. Elle réussit finalement à traverser le terrain miné de chat sans avoir eu à en démolir.

* * *

Mairu adorait les animaux mais pas n’importent lesquels. Si elle affectionnait particulièrement les bêtes sauvages, ce n'était pas le cas de celles qui s’étaient habituées à la présence des hommes, mis à part si elle les avait apprivoisés personnellement. Comme le cas de Gouik, son sanglier qu’elle avait dompté en étant complètement sauvage. Iyan, son panda nain, était une exception à la règle car c’était un animal un peu particulier. Outre son apparence peu banale, Iyan était autrefois un partenaire d’une Dôbutsu qui avait perdu la vie en violant la frontière de Taiyô no Kuni, pays que servait à l’époque la Natsumi. Comme tout shinobi qui franchissait la muraille qui isolait le Pays du Soleil du reste du monde, la Dôbutsu s’était retrouvée privée de son chakra et n’avait pas mis alors bien longtemps avant de tomber face aux forces des soldats de la mystérieuse Nation. Mairu n’avait pas participé à l’arrestation de la Dôbutsu mais elle y avait assisté depuis un arbre qui se trouvait non loin de l’unique porte de la muraille et où elle se rendait souvent afin d’espionner ce qui se passait à la frontière. Elle avait été donc témoin de la défaite de la Dôbutsu et de la fuite de son animal qui était si discret que les soldats n’avaient même pas remarqué la présence. Seule la Natsumi qui avait suivi avec attention le massacre de l’étrangère avait remarqué qu’une petite bête s’était cachée dans la nature environnante. Elle avait alors passé de longs moments à chercher l’animal puis plusieurs jours pour gagner sa confiance.

Aujourd’hui Iyan était devenu un des deux fidèles compagnons animaliers de la Natsumi mais contrairement à son sanglier, le panda nain restait un vrai mystère pour sa nouvelle maitresse. Le petit animal était très intelligent mais c’était aussi un vrai paresseux qui passait le plus clair de son temps à pioncer. Plus étrange encore, il ne tolérait pas la présence des inconnus et faisait le mort dès lors qu’un humain risquait de le surprendre. Peu de personnes connaissaient donc sa véritable nature alors que beaucoup le prenaient pour une simple peluche. Une peluche que la Natsumi trimballait dans ses cheveux car là était encore une des étranges habitudes d'Iyan. Il aimait se percher sur la tête de sa maitresse et se faisait passer pour une décoration de sa chevelure dès qu’ils étaient en public.

Actuellement à Kiri, seul le Mizukage était au courant de l’existence d'Iyan. Tous les autres, ne l’ayant jamais vu se mouvoir, le prenaient pour une simple peluche que la Natsumi aimait porter par extravagance dans sa chevelure. L’animal ne dégageant qu’une bien infime quantité de chakra - un mystère de plus qui entourait la petite bête supposée pourtant faire la paire avec un membre d'un clan ayant la maîtrise du chakra – il n’était alors même pas détectable par un être doué en sensorialité car son aura se faisait complètement effacer par celle de la personne sur qui il s’était collé.

* * *

Voilà un moment que la Natsumi sillonnait les rues de Kiri. Comme souvent, elle errait sans but quand elle n’avait rien de mieux à faire. Son errance lui permettait de connaître le moindre recoin du village caché qu’elle était à présent amenée à protéger. À force de la voir, certains riverains et marchands avaient même fini par l’aborder. Ainsi, parfois elle prenait le temps de bavarder avec ceux avec qui elle s’entendait le mieux sans oublier d’offrir un bonjour chaleureux accompagné d’un grand sourire aux autres.

Alors qu’elle discutait avec un groupe de shinobi en repos qui trainait dans une rue très animée, le regard de la Natsumi fut attiré, comme tant d’autres, sur un garçon qui se baladait avec un animal vraiment singulier. Le genre que Mairu pourrait très bien apprécier s'il n'était pas déjà apprivoisé. Ayant eu vent de l’arrivée d’un jeune Dôbutsu accompagné d’un lynx dans le village, Mairu supposa alors qu’il s’agissait certainement de ce jeune garçon.

Délaissant ses collègues, la jeune femme aux prunelles sanguines se dirigea vers le jeune Dôbutsu à qui elle s'empressa d'offrir un sourire de plus naturel pour ne pas l'effrayer alors qu'elle s'était plantée devant le jouvenceau.

- Il est bien beau ton animal. Puis-je le toucher ?

Bien qu'elle savait s'y prendre avec les animaux même les plus féroces, la Natsumi se méfiait de l'animal du jeune Dôbutsu car à l'image d'Iyan, il devait être bien plus intelligent et fourbe qu'un animal ordinaire …

Si on voulait parler de passion animale, rien de mieux qu'un Dôbutsu pure souche qui en porte le nom. D'autres ne le portent pas après s'être fait transmettre le don de communiquer et agir avec une race animale. Ce n'était pas mon cas... Mes parents avaient été de fervents dresseurs de lynx, et leurs parents avant eux. Une famille Dôbutsu parmi tant d'autres. Certaines choisissaient parfois de ne pas se consacrer à une seule espèce, le père faisait binôme avec un cerf, tandis que la mère se battait avec un lièvre, et le fils avec un singe. Par exemple. Dans la mienne, ce n'étaient que les lynx. Comme les Inuzuka qui possédaient un lien particulier avec les chiens et les loups, c'était pareil que ça. Je n'avais pas eu le choix de grandir entouré de félins de ce genre, ceux de mes parents et d'autres, il y avait toute une meute dont on s'occupait. Ce qui paraissait étrange puisque le Lynx est naturellement un chasseur solitaire, mais nous avions réussi à en faire une famille. C'est donc tout simplement que l'on me donna à un jeune âge le Lynx qui était mon compagnon actuel et avec qui j'avais grandi. Kumi était mon fidèle compagnon et lui et moi étions les seuls survivants de la famille Dôbutsu du Lynx. Nous ne savions pas si les braconniers avaient laissé en vie le reste des animaux, ni ce qu'ils en avaient fait aujourd'hui. Au fond nous espérions les retrouver pour réclamer vengeance et tout simplement tuer ceux qui avaient tué nos parents humains comme félins.

Cette petite introduction sur ma personne et ma passion acquise des félins terminées, me voici en train de marcher dans les rues de Kiri, les mains dans les poches confortables de mon manteau orange. Levé depuis 6h du matin, je venais de passer trois heures à m'entraîner à des attaques furtives en duo avec Kumi. Il fallait que nous nous surpassions comme jamais pour régaler et épater les supérieurs Kirijins. En prenant du galon, je pourrais assurément venir en aide à la cause animale de manière générale. Et puis... ils entendront parler du Dôbutsu avec son Lynx, combattant émérite de la nouvelle Kiri reconstruite ! Chasseur craint de tous ! Là ils sauront qu'ils ont du mouron à se faire tous ces gens qui s'en prennent aux animaux, dont ceux que je recherche.
J'étais actuellement sur la route pour rentrer chez moi casser la croûte, il était dans les dix heure du matin. Et sans prévenir, une femme vint m'interpeller qui avait l'air intéressé par Kumi. Bien beau mon animal ? Le toucher ? Mais... Il y avait des fois où je ne comprenais pas les gens et me disais que les animaux étaient plus simples. Je les comprenais souvent plus facilement car j'avais un côté animal.

« Euh, il n'aime pas ça et il ne vous connaît pas... »

Petit temps d'arrêt en reculant naturellement pour mieux contempler la jeune femme.

« Et moi non plus d'ailleurs. »

Mon lynx s'était déjà mis en position de méfiance et rugissait faiblement à l'intention de ce qui était un sanglier. Un sanglier dans la ville. Le sien ? Kiri était plein de surprises animales.

« Doucement Kumi, il a pas l'air menaçant contrairement à toi. »

Et ça il le savait en plus. Mais lui, le sanglier il aurait bien aimé le chasser plutôt que de faire ami-ami avec. Je m'en retournais vers mon interlocutrice :

« V'savez qui je suis ? Vous êtes qui vous ? «  demandais-je simplement pour savoir.

Mon ami lynx avait arrêté de faire le sauvage. Tant qu'à faire, autant faire connaissance avec une nouvelle personne. C'était peut-être une Dôbutsu du Sanglier ? Mais elle n'en pas l'air, non...

Loin était le temps où l’on m’avait rafistolé avec quelques bouts de métaux. Réussir à s’habituer et à s’adapter à ce nouveau mode de vie requiert patience et volonté. Ma formation au Temple Linji avait parée à toutes éventualités. La patience est mère de sûreté. Ainsi, en mettant ce temps à profit, je réussirais à mouvoir chaque partie de mon corps, qu’il soit cyborg ou humain… Car oui. Je suis mi-homme, mi- machine à mon plus grand des regrets. Je ne savais pas encore qui s’était chargé de mon escorte jusqu’à ce laboratoire, et encore moins qui fut le scientifique en charge de ce qui fut appelé « le patient 0 ». Un titre honorifique ou non que j’avais pu apercevoir sur un dossier que le chirurgien avait fermé devant mon œil encore valide tandis que je tentais d’en distinguer fonds et formes.

Désormais, j’étais de retour au pays. Mizu. Le seul pays où j’avais pu grandir mentalement, avant de partir effectuer cette quête spirituelle et grandir ensuite psychiquement. Cette quête fut la plus dure épreuve de toute ma vie. Des exercices de respirations éprouvants, de l’entraînement à la méditation longue et parfois interminable… Toutes ces choses étaient désormais ancrées en moi, et je pouvais, dès à présent, continuer cette quête avec les armes qui me furent donnés à la fin de mon initiation !

Je fus donc projeté dans les quartiers résidentiels de Kiri, retrouver les miens. Je ne les avais pas vus depuis tant d’années… Peut-être ont-ils changés ? Trouveront-il que j’ai grandis ? Changés ? Hum… Forcément. Je suis parti enfant, je reviens Homme. Et mieux encore, je reviens aussi machine ! Vais-je les dégoûter par mon apparence robotique ? Vais-je les effrayer ? Vont-ils croire que c’est moi ? Ne vont-ils pas penser que je suis un traître et engager une quelconque forme d’hostilité ? Beaucoup d’appréhensions. Enormément même. Je serais fixé lorsque je mettrais un pas dans ce qui était jadis, mon chez moi.

Sur le chemin, deux individus. De là où j’étais, je pouvais apercevoir une sorte de lynx, et je pensais la femme seule. Une conversation, tout ce qui semblait être du plus banal évènement de la vie ! L’Homme fit quelques pas en arrière avec son animal. Rien qu’à cela, on pouvait en déduire qu’il ne se connaissait pas… C’était en tout cas ce que je pensais. A vrai dire, je m'en foutais. Ce n’était que de la pure déduction histoire de ne pas penser à rien… Pourquoi ne pas aller les saluer ? Nous devions faire en sorte de donner une bonne image de Kiri, ce village étant nouvellement reconstruit, les premières impressions étaient les plus importantes.

Du haut d’un toit, je me laissais tomber pour arriver à quelques mètres des intéressés. Sans une once de violence, ou d’aura hostile, je m’approchais légèrement avant de les saluer humblement, avec un respect non dissimulé.

« Chaque animal, même dressé, reste un prédateur dont le comportement est imprévisible. » Dis-je tout en m’inclinant légèrement. « Pardonnez mon intervention. Je me nomme Ingen Ryûki, Genin de la Brume. »

Assez étrange de voir un Genin doué d’une telle maturité. Cependant, je me savais assez intelligent et capable de rivaliser avec mes confrères de même rang. Mais nous étions partenaire avant d’être adversaire. Et si nous devions eux et moi mêler nos pouvoirs, ce ne serait pas pour nous affronter, mais pour s’allier à un ennemi ! C’est le secret même du pouvoir. Si deux pouvoirs s’associent, alors l’union des deux permettrait aux concernés de détenir la clé du succès !

« Je pensais qu’il était préférable de poser ma pierre à l’édifice, et de vous apporter ma façon de penser lorsque l’on se retrouve face à un animal. » Décidai-je de terminer avant de laisser homme et femme prononcer à leur tour le discours.

- Que fais-tu là ? Demanda Mairu à son sanglier qui l'avait suivi à son insu.

La présence du sanglier qu'elle avait pris pourtant soin d'enfermer dans la cour qui entourait son domicile signifiait que la bête avait dû défoncer la clôture qui isolait complètement l'endroit.

La samouraï ne tenait pas à ce que son suidé vadrouille tout seul car cela pourrait très bien lui créer des ennuis mais c'était un animal capable de défoncer un mur de pierre alors l'enfermer ne s'avérait pas une mince affaire, surtout qu'elle ne souhaitait pas l'enfermer dans une pièce fermée et encore moins dans une case.

La Natsumi avait investi exprès dans un domaine isolé du centre du Village Caché du Pays de l'Eau pluie avec une vaste cour pour que le sanglier puisse s'y épanouir mais l'animal avait été habitué à la suivre partout alors si elle ne désirait pas à ce que le même incident ne se reproduise, elle allait devoir renforcer la clôture pour pas que la bête si têtue ne puisse de nouveau s'échapper.

Sans oublier de surveiller son sanglier qui s'était rapproché pour renifler l'animal du jeune Dôbutsu alors qu'habituellement le suidé se tenait à distance des inconnus, Mairu reporta de nouveau son attention sur Oyama.

- J'ai juste ouï-dire de la présence d'un jeune Dôbutsu accompagné d'un lynx dans les environs et je crois fortement qu'il s'agit de vous deux. Du regard Mairu désigna le félin qui se tenait bien tranquille alors que le sanglier le reniflait de plus en plus près. Je me nomme Natsumi Mairu et lui c'est Gouik, poursuivit la samouraï tout en désignant cette fois si son animal. À quel point est-il dangereux ton animal ? Demanda Mairu, curieuse de connaitre le niveau du petit félin.

Ce fut un autre jeune homme, à l'allure quelque peu inhabituelle, qui répondit à la question. Avec politesse celui-ci se présenta.

- Vous semblez bien s'y connaitre en animal … Ingen, fit Mairu avec le sourire. N'arrivant pas à supposer l'âge de son nouvel interlocuteur à cause d'une grande partie de son visage refaite artificiellement, Mairu avait décidé de le vouvoyer. Moi, c'est Natsu …

Gouik qui fila à toute vitesse après avoir lâcha un couinement strident interrompit la Natsumi. Kumi, irrité de se faire sans cesse renifler avait cherché à griffer le sanglier qui, effrayé, avait pris la fuite comme à ses habitudes. Pris de panique, comme ses congénères, le suidé avait tendance à se précipiter à toute vitesse, défonçant tout ce qui se trouvait sur son passage.

- Puis-je solliciter votre aide pour l'arrêter sans le faire du mal ? Réclama la jeune femme aux deux jeunes gens qui se tenaient devant elle. Si on ne l'arrête pas rapidement, je crains fort qu'il aille soulever … Des premiers cris se firent entendre un peu plus loin … une panique générale, termina la Natsumi à voix basse.

Sans attendre la réponse des deux genin, la chuunin se précipita ensuite dans la direction où avait filé Gouik qui avait déjà disparu en bifurquant à une rue adjacente.

Si je te rattrape, tu seras un animal rôti ! Lâcha violemment intérieurement la samouraï qui pensait déjà aux conséquences qu'elle allait devoir assumer à cause de son benêt de suidé …

Natsu. Elle était charmante. Sa douce voix ainsi que son assurance naturelle la rendait si attrayante. J’aurais pu m’asseoir et l’écouter durant des heures. Néanmoins, son animal de compagnie – un animal peu commun qu’est le sanglier – se fit griffer par le lynx de l’autre personnage qui ne m’avait prêté aucune attention. Dès lors, et certainement pris de panique, je n’avais pu répondre à Natsu sur mes éventuelles connaissances et elle sollicita notre aide pour capturer son suidé sans lui faire de mal. L’initiation à la Lumière de Maskine nous apprend déjà d’être humains envers quiconque possède une âme en lui. Nous ne pouvons sans réel motif, nous battre contre une personne sous prétexte que son visage ne nous revient pas. Nous sommes doués de sagesse, doués d’une humanité certaine.

C’est avec cette humanité que j’acceptai d’aider Natsu, un simple signe de tête en guise de réponse. Elle bondit en avant avec rapidité. Pourrais-je la suivre ? Je n’en avais aucunement les moyens. Toutefois, je ne pouvais me dégonfler, et je la suivis dans son saut malgré la distance qui nous séparait petit à petit. Elle tentait de rejoindre son animal, j’étais en soutien derrière. En soutien car certaines personnes – parfois âgés – se firent bousculés dans la panique de ce pauvre sanglier. Je m’arrêtai assez souvent, relevant les dames par le bras. Elles me remercièrent souvent, et c’était la meilleure des récompenses.

Dans la rue adjacente, le désert. Il n’y avait personne. On distinguait au loin qu’un amas de poussière qui s’élevait dans les airs au fur et à mesure que le suidé fuyait. Il était là-bas ! Où en était Natsu ? Pour le coup, je ne me posais la question que de façon versatile. Ma mission était d’arrêter cet animal coûte que coûte, sans que mal ne lui soit fait ! Ce ne serait pas une mince affaire. Son animal semblait réellement puissant. Comment l’arrêter sans avoir recours à la Lumière de Maskine ? C’était trop tôt pour l’utiliser. Je pouvais me blesser, et peut-être tuer son animal… Ce n’était pas l’objectif ! Une attaque ninjutsu contrôlé ? Je n’étais pas personne à employer de tel recours contre un animal simplement pris de panique !

La dernière option… L’arrêter de mes propres mains… Je rattrapais le suidé tant bien que mal. J’esquivai les obstacles qu’il me mettait sur mon chemin suite à sa fuite. Droite, gauche… Dans ma course, je fus obligé de sauter et courir sur le mur situé à ma gauche afin d’éviter une caisse en bois qui faillit me faire chuter. C’était le moment ! Il se peut que je rate mon coup, mais j’aurais essayé. Je concentrai un maximum de chakra dans la paume de mes pieds avant de me projeter en avant. Le dos du sanglier fut ma cible. Et j’atterris en plein dessus ! Mes bras vinrent l’enlacer au niveau du cou pour tenter un léger étranglement capable de le stopper. C’était sans compter sur ses coups de pattes en arrière et ses bonds ! Je volais dans tous les sens mais je continuais de tenir bon !

Jusqu’à ce que je lâche prise. L’un de ses bonds fut si puissant, qu’il me projeta contre une étable d’un commerçant. Ce dernier recula de quelques pas, observant avec tristesse son gagne-pain réduit à néant. Sans rancune, il m’aida malgré tout à me relever après avoir tendu sa main vers moi. Un geste qui m’allait droit au cœur ! Tant de gentillesse malgré ce malheureux accident…

Une fois relevai, je pouvais voir le sanglier, plus loin. Il s’était calmé. Que s’était-il passé entre le moment où je fus projeté sur cette étable, et maintenant ? Natsu aurait-elle réussi à faire ce que je fus incapable de réaliser ? Il fallait que je m’en assure.

D’un pas prudent, et méfiant, je m’approchai de la bête. Lentement. Sans geste brusque. Je ne voulais pas attiser la crainte du suidé… Les conséquences pouvaient être terrible et je ne pouvais me permettre cela…

En réalité, la Natsumi n'avait aucunement besoin d'aide pour rattraper puis calmer son suidé mais son côté joueur et un tantinet enfantin n'avait pas pu résister à l'idée de "s'amuser" à sa façon avec les deux jeunes gens qui se tenaient devant elle. Il faut dire que la jeune femme s'ennuyait un tantinet durant ses jours de repos dont elle ne savait pas comment disposer. Se reposer était un luxe que son corps rejetait farouchement. Pour mieux se sentir il lui fallait de l'action, il fallait qu'elle s'active seulement elle avait déjà fait le tour des distractions qui pouvaient lui plaire dans Kirigakure no Satô. Aucune des activités qu'elle avait entrepris d'essayer n'avait d'ailleurs réussi à l'exalter au point de vouloir renouveler l'expérience. Alors, pour tuer l'ennui, la moindre rencontre, le moindre prétexte pouvait devenir sujet d'amusement pour la jeune femme. Venant d'une personne qui allait sur ses vingt huit printemps ça en était presque navrant mais il fallait la comprendre. Une sauvageonne - créature dont était en réalité la Natsumi - ne serait jamais totalement civilisée à l'image de Gouik, son animal de compagnie bien singulier. Une femme jamais domptée et qui n'en ferait qu'à sa tête hier comme aujourd'hui, voilà qui était Natsumi Mairu. Elle savait bien se comporter mais dès qu'elle ne voyait pas l'intérêt d'entretenir cette image de femme "digne" - qu'elle se complaisait pourtant à endosser - elle se lâchait jusqu'à tomber dans des enfantillages.

Présentement, l'entreprise de la samouraï n'était pas cependant pur fruit d'un enfantillage car par le biais de celle-ci, elle voulait également avoir un aperçu de la personnalité de chacun des deux jeunes gens. Dans quel intérêt ? Juste pour assouvir sa curiosité personnelle.

Grâce à sa capacité de sentir l'aura de chaque être, la Natsumi pouvait suivre les yeux fermés l'avancée de son suidé mais au lieu de suivre son animal, elle se cacha dans une ruelle adjacente. Le jeune Ryūki ne tarda pas à la dépasser sans l'avoir remarqué. Un sourire amusé en coin, elle regarda un moment le jouvenceau s'éloigner puis en quelques bonds, la jeune femme monta sur un toit avant de poursuivre son chemin, s'avançant de toit en toit en direction de celui que prenait Gouik.

Usant toujours de son aptitude assez aiguisée en sensorialité, elle analysa le chemin qu'empruntait le suidé avant de bifurquer pour prendre un raccourci alors que la bête avançait tout droit dans une longue ruelle. Évoluant le plus rapidement possible, la samouraï réussit à atteindre la rue que longeait Gouik qui venait dans sa direction.

Un nouveau sourire se dessina sur le faciès de la Natsumi alors que debout sur un toit, elle assistait à une scène qui lui rappelait un passé pas si lointain, ces nombreux jours qu'elle avait passé à dompter Gouik, récoltant des coups et blessures.

Jugeant qu'elle devait cesser son jeu enfantin avant que des blessés graves ne soient recensés, Mairu siffla cet air familier qui fit calmer aussitôt le suidé lorsque le son parvint aux oreilles de l'animal. Ayant capté la présence de sa Maîtresse, Gouik courut dans sa direction mais calmement alors qu'Ingen s'approchait avec méfiance.

Le sanglier s'arrêta juste en dessous du toit où était perchée la Natsumi qui sauta ensuite juste à côté de son animal qui la réclamait en grognant tout en reniflant vers le ciel.

- Toi, je vais devoir t'enfermer si tu fais encore des bêtises ! Lâcha la Natsumi d'une voix grave tout en tâtant pourtant son benêt de suidé avant d'accorder son attention à Ryūki qui avait fini par les rejoindre. Quelle bravoure jeune homme ! Votre tentative de l'arrêter me rappelle un lointain souvenir, fit la Natsumi d'une voix teintée de nostalgie. Je vous remercie de votre aide. Le jeune Dôbutsu a préféré poursuivre son chemin contrairement à vous ! ... Ha oui ! Je n'avais pas terminé de me présenter tout à l'heure. Je me nomme Natsumi Mairu et cet idiot s'appelle Gouik, ajouta la jeune femme tout en désignant le sanglier qui était à présent bien calmé … Êtes-vous un chuunin du village ? Finit par demander la samouraï, curieuse d'en savoir davantage sur l'Ingen qui lui paraissait bien sage pour un jeune de la Brume Sanglante …

Ce fut un échec. Le suidé semblait être doué d’une force impressionnante. Mais je savais que si l’on discutait de force pure, je pourrais lutter ! Peut-être étais-je trop sûr de moi, mais je gardais espoir en mes performances… Natsu arriva rapidement tandis que je me dirigeais vers son animal. La complicité entre eux était remarquable. Je n’avais pas pour habitude de voir ce genre de spectacle qui – pour elle – devait être d’une banalité sans nom ! J’étais agréablement surpris. Son charisme seul arrivait à faire obéir la bête !

C’est alors qu’elle décidait de me parler à nouveau après avoir réprimandé – avec humour certes – son sanglier. C’est avec surprise qu’elle m’apprit que ma tentative d’arrestation lui rappelait un lointain souvenir. Je souriais derrière ce masque métallique qui camouflait totalement la moindre émotion. Seul les rides au niveau de mon œil encore valide pouvait la mettre sur la voie. Je compris rapidement qu’elle fut à ma place, jadis. Peut-être a-t-elle essayé cette même tentative, et que le résultat fut le même que pour moi ?

Je fus rapidement coupé dans mes pensées lorsqu’elle me demanda si j’étais un Chûnin… Forcé d’avouer que cela me donna des frissons. L’un de mes premiers projets, à court comme à moyen terme était justement de pouvoir passer Ninja de Moyenne Classe, et pouvoir apprendre la Lumière de Maskine a de jeunes moines en quête d’initiation ! Oui. Cela me faisait réellement plaisir. J’avais encore beaucoup à faire avant de passer Chûnin. Je devais faire mes preuves ! Mon œil jeta un regard rapide à Gouik, le sanglier de Natsu. Malgré le fait qu’il m’ait envoyé dans le décor, il était attachant. Et je voulais remettre ça rapidement… Jusqu’à ce que je puisse l’arrêter plus aisément !

« Je suis enchanté, Gouik ! » Dis-je d’un ton amical. Je considérais les animaux comme de réelles personnes, doués de sentiment et d’émotion ! « Je suis Ingen Ryûki ! » C’était bête… Mais je me présentais aussi… Puis je continuai pour répondre à la Dame. « Ce n’est nullement de la bravoure. J’ai simplement réagit à l’appel d’une femme en détresse. » Dis-je en ne cachant pas l’ironie de la situation. « Si j’avais su qu’en réalité, vous êtiez bien plus forte que ce que vous laissez bien paraître, peut-être aurais-je réfléchis à deux fois avant de me faire envoyer dans le décor. » Un léger rire gêné se dégagea de ce maudit masque. « Mais sans rancune, ce n’est que partie remise ! »

Ma main gratta l’arrière de mon crâne. Ce qui prouvait clairement que je n’étais pas à l’aise sur la trempe que je m’étais prise par cet animal. Mais comme je l’avais dit plus haut, c’était sans rancune, et la prochaine fois je réussirais à l’arrêter bon an mal an ! Ma main s’avança lentement vers le groin du suidé, puis sans que je ne fasse attention à ce qui pouvait advenir de cette main, je continuais de répondre à Natsumi Mairu !

« C’est flatteur, mais je ne suis que Genin à l’heure actuelle. J’envisage naturellement de passer chûnin rapidement. L’enseignement étant l’une de mes priorités ! »

Pourquoi ? Les personnes les plus expérimentés sont celles qui enseignent aux débutants. Puis les débutants deviennent ensuite les plus expérimentés, qui prennent à leur tour des débutants pour les former… Le cycle de la vie ! Nous pouvons en tirer une conclusion simple : il n’y a pas de mauvais élèves, seulement des mauvais professeurs. Le but principal d’un enseignant est de tirer le meilleur parti d’un individu… Sans réussir cela, l’enseignement ne peut se dérouler dans des conditions optimales !

« Assez parler de moi ! J’ai envie d’en apprendre un peu plus sur vous ! » Mon regard se déplaçait vers le commerce sur lequel je m’étais étalé comme un bleu. « Vous me devez bien ça humpf ! »

- Il n’y a rien de mal de venir au secours même d’une personne plus forte que soi jeune homme ! Au contraire, c’est très louable de ta part et celui qui te blâmerait pour ton acte, même si tu échouais, serait bien ingrat. En tout cas, je te suis sincèrement reconnaissante, fit la Natsumi avec le sourire.

Dans d’autres circonstances, elle se serait certainement vexée pour l’aide apportée parce qu’en réalité la Natsumi était le genre d’être qui n’appréciait pas vraiment qu’on lui portât secours et cela ne venait point d’une fierté trop haut placée. Disons plutôt que la jeune femme n’était pas habituée à se faire aider mais avait pour habitude de se débrouiller seule. Livrée à elle-même dès son plus âgé, elle s’était habituée à s’extirper toute seule des situations même les plus délicates. Un conditionnement qui avait fini par traduire la moindre aide qu’on lui apportait comme une faiblesse de sa part et quelle personne sensée apprécierait qu’on lui reflète sa propre défaillance ?

N’étant pas une égoïste, Mairu était cependant capable de témoigner de la reconnaissance envers la personne qui lui portait secours même si elle aurait préféré qu’on la laisse s’en sortir toute seule, quitte à mourir. Comme le cas autrefois avec Shinda Michiki qui l'avait sauvé par deux fois d’une mort certaine il y a deux ans de cela. Trop accablée par son infortune, il y avait eu un moment où la Natsumi avait même prié que le nécromancien la laisse mourir dans un gouffre dans lequel elle était tombée mais aujourd’hui elle lui était plus que reconnaissante de ne pas l’avoir abandonné dans cette grotte qui aurait pu devenir sa tombe.

- Au vu de ta sagesse et de ton courage, j’aurais cru que tu étais un chuunin. En tout cas, tu me sembles avoir les bagages nécessaires pour espérer en devenir un rapidement, fit la samouraï avec sincérité. Quant à moi, je ne suis qu’une simple samouraï au service du Rokudaime Mizukage.

La jeune femme aux prunelles sanguines n’était pas du genre à parler d’elle et face à un étranger, elle se contentait généralement de décliner son simple nom voire même un faux nom ; le sien pouvant lui porter préjudice à cause des faits de son défunt grand frère Haru Natsumi, un personnage qui avait marqué, négativement ou positivement, des nombreux shinobi.

- Lui, Mairu désigna du regard Gouik qui reniflait la main tendue du jeune Ingen, c’est ma fidèle monture. C’est un véritable froussard mais il m’a sorti des sales situations plus d’une … Gouik ! On ne le lèche pas les gens ! Cria soudain la Natsumi alors que le benêt de suidé léchait avec une certaine avidité la main de Ryūki.

Chose qu’elle savait être désagréable y ayant souvent droit. La langue de l’animal était râpeuse mais aussi bien moite et souvent sale car le sanglier mangeait de tout et à n’importe quel moment. La Nastumi avait beau le nourrir convenablement, le suidé trouvait toujours le moyen de se goinfrer avec tout ce qu’il trouvait.

- On dirait qu’il t’apprécie ! C’est vraiment rare ! S’étonna Mairu qui voyait pour la première fois son animal se rapprocher aussi vite d’un humain.

En général, Gouik se tenait toujours à l’écart des inconnus et déguerpissait dès qu’on tentait de l’approcher.

- Je vais lui donner à manger avant qu’il ne te mange tout entier, fit Mairu sur un ton plaisantin. Je suis certaine qu’on se recroisera Ingen Ryūki, ajouta la jeune femme avant de s’éloigner avec son animal.

Sur le chemin de retour la Natsumi prit le temps de s’excuser auprès de ceux que Gouik avait bousculés et promu de dédommager les préjudices causés. Une fois de plus, elle allait vider son compte à cause de Gouik. Exécuter sa menace de faire rôtir le sanglier lui enlèverait tant de tracas mais la jeune femme n'était point disposée à se débarrasserait de son benêt de suidé auquel elle tenait comme à la prunelle de ses yeux …