Le Taisa avait filé de son appartement si tôt la missive reçue. Au programme, un réseau de combats clandestins et un gamin. Le cartel à la tête de ces matchs clandestins serait l’objectif du bretteur tandis que l’enfant ne serait ni plus ni moins que son « senseï ». Cela faisait quelques temps qu’il n’avait pas vu le Sairyo. A tel point que Fuka le pensait mort. Mais il semblerait que le garçon avait plus de ressources qu’il ne le soupçonnait.

Il faut dire que pour en arriver à son grade à son âge, il était évident qu’il avait certains talents. Mais depuis leur première rencontre, il fallait bien admettre que le Sabreur avait du mal à le reconnaître en tant que tel. Son respect des règles militaires ne l’empêchait pas de tutoyer celui qui avait sa charge. Même si face au duo, le spectacle offrait tristement la vision inverse. Le Taisa en tant que chef d’équipe et Hiko comme étant son élève. Un élément qui pourrait néanmoins les aider dans leur travail. Ils verraient ça en temps voulu.

La course de Fuka l’amena jusqu’aux portes où l’attendait justement son accompagnateur. Un simple sourire et une remarque typique du gamin accueillit le Taisa. Il ne put s’empêcher de sourire ironiquement de la situation. Mains sur les hanches, il baissa le regard vers son senseï qu’il gratifia d’un :

- Désolé chef j’étais parti te chercher des bonbons.

Ce qui était à moitié faux ! Fuka tira un paquet de son barda qu’il jeta au petit bonhomme. Une attention qu’il avait prise étant donné qu’ils ne s’étaient pas vus depuis longtemps. Et l’accueil aimable du garçon était si évident qu’il avait pris la précaution de ne pas arriver les mains vides pour justifier son retard. Une attention qui avait provoqué chez Peau-de-Requin une exaspération profonde. A tel point que l’épée en restait silencieuse face à ce triste spectacle. Le fait de voir son porteur ainsi délégué à un vulgaire enfant n’était pas de son goût. Ce n’était pas totalement ce à quoi Fuka s’était attendu en rejoignant le Shûkai non plus mais il ne s’était pas arrêté à ce détail.

Rapidement le duo prit la route. Et devant la mission qui les attendait, il fallait mettre au point une stratégie. Fuka en avait déjà une en tête mais il ignorait si elle plairait à Hiko. Il lui laissa donc la main, en tant que chef d’équipe, et en profita pour l’interroger là-dessus :

- Dis-moi alors. Quel est le plan patron ? De toute évidence on va devoir la jouer subtilement à ta manière. T’as une idée de comment procéder ?

Très vite Hiko exposa son plan. Il était simple mais ils ne pouvaient décemment pas commencer sur les chapeaux de roue. Le manque d’informations flagrant avec lequel on leur faisait débuter la mission ne rendait pas les choses évidentes. Cette mission avait de fortes chances de durer un sacré bout de temps. Le duo allait pouvoir se retrouver et discuter ! Génial. Samehada grognait déjà dans son coin à cette idée.

Alors que le jeune Sairyo créait des clones qui lui serviraient d’informateurs, il encouragea le Taisa à en faire de même, à condition qu’il en connaisse le jutsu. Ce qui était le premier problème. Au moins sur cette étape il n’allait pas se fatiguer c’est sûr. Baissant légèrement la tête, il ne tarda pas à vite relever le regard. Il n’avait pas honte de lui mais il lui était assez désagréable de se sentir inutile. Sa volonté de perfectionnement l’encourageait à toujours essayer de se surpasser. Mais il est vrai que là pour le coup, il ignorait comment faire. Il allait donc devoir laisser la main à son « senseï » pour cette tâche.

Alors que les répliques infantiles allaient sillonner le pays à droite à gauche, le duo s’engageait vers le Sud. Ils feraient halte à la ville la plus proche. Alors que l’astre céleste atteignait le paroxysme de sa course quotidienne, Hiko se décida à parler pour prendre un peu des nouvelles de celui qu’on lui avait attitré comme élève. Ses interrogations premières allèrent à Peau-de-Requin, et surtout au lien unissant les deux êtres. Il avait remarqué un certain self-control chez Fuka qu’il n’avait pas les premières fois qu’ils s’étaient rencontrés. Il faut dire que dans ces moments, il y avait toujours tout qui allait de travers. Tout cela pour énerver le bretteur délibérément ! Mais comme il fallait s’y attendre, la remarque arracha une remarque silencieuse à l’arme :

- Si ça lui manque tant je peux aussi être moins calme. Juste une minute et je boufferais jusqu’à la dernière goutte de son chakra.

- N’oublie pas qu’il est plus fort que nous.

- Plus fort que toi, tu veux dire. J’ai un potentiel incommensurable, c’est juste que tu n’es pas capable de l’utiliser.

- C’est ça, soupira mentalement le Taisa.

Ce petit discours intérieur ne dura pas plus qu’une demi-seconde dans la vie « réelle ». À part dans leur bulle, l’épée et le sabreur pouvait tenir leurs conciliabules pendant plusieurs heures sans que cela ne se remarque extérieurement. A la fois un avantage et un inconvénient. C’est pas toujours chouette d’avoir une voix qui palabre dans votre tête. Il s’y était fait avec le temps mais ça pouvait rester gênant par moment. Assez-t-il tout étant qu’il apporta une réponse à la question précédente de son acolyte :

- Nous avons eu l’occasion de travailler ensemble et avec l’aide de certaines personnes oui. Même si je pense n’en être qu’au quart du potentiel de Samehada.

Alors qu’il franchissait un pont scindant brièvement la route, il interrogea à son tour son supérieur hiérarchique :

- Et je pourrais te retourner la question. Cela fait longtemps qu’on ne s’est pas vus. Tu devais être sacrément occupé. L’Empire avait des projets pour toi ?

Le ton se voulait taquin. Fuka ignorait parfaitement ce que pouvait faire son nabot de senseï dans l’armée mais il recevait tout de même des missions. Ce qu’il avait parfois du mal à comprendre. Peut-être comprendrait-il mieux à l’occasion de cette mission.

Le jeune garçon tâcha de revaloriser l’avis que le Taisa semblait dégager de sa propre personne. Il ne manquait pas de confiance en lui mais il est vrai que lorsqu’on l’entendait parler de Samehada, il avait tendance à la mettre sur un piédestal. Et chacun voyait ça comme un manque d’assurance lié à son niveau encore modeste en tant que shinobi. Mais Fuka savait ce qu’il valait. Il savait sa marge de progression encore vaste mais il était le seul à pouvoir réaliser quelle puissance abritait l’arme. Aussi étonnant que cela puisse paraître, cette force semblait passer inaperçue parfois. Même auprès d’un ninja senseur comme Hiko. Encore un mystère qu’abritait l’arme.

De son côté, le Sairyo ne manqua pas de souligner son rang au sein de l’Empire. « L’élite » semblait avoir les chevilles trop grosses pour elle ! Mais sa réaction n’arracha qu’un sourire en coin du côté de Fuka tandis que Peau-de-Requin se lamentait du comportement de cet enfant qu’elle n’avait jamais porté dans son cœur.

- Il a beau pas être grand, il semble avoir assez de chakra pour me satisfaire le temps d’un goûter.

Parole à laquelle Fuka était habituée et ne réagissait même plus. Sa progression s’était aussi remarquée personnellement chez lui. Les interventions de Samehada dans sa tête étaient moins nombreuses et plus contrôlées. Lui-même de son côté parvenait de temps en temps à obtenir une petite pensée silencieuse dans son coin juste pour lui. Une sensation qu’il n’avait pas connu depuis longtemps et qui le poussait encore plus à progresser. Ses entraînements avec l’épée étaient de plus en plus intenses, de sorte qu’il privilégiait ses séances à l’extérieur de l’enceinte du Shozaichi pour ne pas trop s’afficher en public. Et également parce que parfois ça pouvait causer un sacré grabuge.

Vint ensuite sa réponse quant à ses dernières missions au sein de l’Empire. Entre la conquête et certains voyages, Hiko ne semblait pas avoir chômé. Comme Fuka à vrai dire qui répondit tour à tour aux interrogations de son « senseï » :

- Oui j’étais à Mizu effectivement. Un combat que nous avons gagné de ça ! Même s’il restait un Kumojin debout, nous avons dû le laisser s’enfuir avec son collègue. Mais j’estime que c’était déjà une réussite personnelle. Le fait de pouvoir m’en sortir face à quelqu’un de mon niveau reste un bon moyen de se situer, au moins sur le plan international. Même si je ne doute pas que d’autres sont sûrement plus doués que moi.

Raison pour laquelle ses entraînements quotidiens étaient aussi ardus et violents. L’idée même d’être en retard par rapport à un tiers le poussait à se dépasser à chaque occasion. Un comportement qui lui avait valu deux séjours rapides à l’hôpital pour quelques plaies pas très mortelles. Et alors que l’enfant s’était soucié de son apprentissage, il s’interrogea sur les personnes à l’origine de ses changements :

- Disons que Hoheinheim-sama et un certain Shinda Michiki m’ont aidés à appréhender certaines capacités de mon arme que moi-même j’ignorais possibles. C’est là-dessus que nous nous entraînons essentiellement ces derniers temps. Ainsi que de vaines tentatives d’améliorer mes capacités en Ninjutsu même si je n’en suis qu’à mes tous débuts.

Alors qu’il lui avait répondu, les remparts de la ville de Doa s’étaient profilés à l’horizon. Ils pénétrèrent dans la ville animée par sa rue principale commerçante. Les étales chargés des marchands attiraient foule de monde et provoquaient une belle cohue. Le genre de climat idéal pour pouvoir enquêter sans se faire remarquer. En se fondant dans la masse et en allant taper la discute à diverses têtes. Le duo Shukajin échangea un regard. A croire qu’ils en étaient venus à la même conclusion. Ils se saluèrent d’un acquiescement de tête mutuel avant de se séparer sur le marché. Le peuple réuni ici pouvait leur apporter quelques éléments de réponses.

Mais même après deux heures passées à entendre les derniers ragots sur untel ou untel, Fuka s’en fatigua et préféra se rendre dans un bar en bordure des murs extérieurs, près de la porte principale. Il savait que le jeune Hiko saurait le retrouver facilement dans cette ville, peu importe où il se trouvait. Il prit donc place avec un verre qu’il se mit à déguster, plongé dans ses pensées mais l’oreille toujours attentive. Une précaution qui lui valut justement un renseignement anodin mais semblant lié à sa présence ici :

- Les paris ont été clos il y a peu donc normalement on devrait avoir confirmation du lieu dans pas longtemps.

La tête du bretteur pivota en direction de cette voix. Celle d’un homme lambda accoudé au bar avec un compère. Le crâne légèrement penchée en avant comme s’il inspectait ses chaussures, le bonhomme en avait profité pour chuchoter ça. Heureusement que le Taisa se trouvait non loin. Il garda la même attitude rêveuse pourtant. Le duo lui jeta un rapide coup d’œil avant de terminer leurs verres, payer et quitter le bar. Quelques minutes plus tard, Fuka se retrouvait déjà dehors pour retrouver leur trace.

Il dû profiter d’une ruelle sombre pour grimper sur les toits en toute impunité afin de remarquer la silhouette des deux hommes dans la foule. Il redescendit de son perchoir tout aussi discrètement pour les prendre en filature. Un manège qui le mena devant un grand bâtiment d’habitations modestes. Les deux types entrèrent là-dedans. Au vu des circonstances de sa présence ici, Fuka se disait qu’attendre un peu ici pourrait peut-être lui en apprendre davantage. Quand bien même cette piste s’avérait infructueuse, elle pouvait le mener tout aussi bien sur les traces du cartel à l’origine de ces combats illégaux.

- Hum l’intuition du guerrier je présume ?

Une simple réponse quant au questionnement du Sairyo. Il est vrai que les dons inexistants de Fuka en matière de sensorialité ne lui permettaient pas de statuer sur le niveau de son adversaire. Mais c’était le feeling qui avait prévalu lors de cette rencontre. Le fait qu’ils se retrouvent tous deux presque à court de leurs réserves en même temps. Mais le duo improvisé Shukajin avait eu nettement plus de résultats que du côté Kumojin. Même si Hiko déplorait le fait qu’ils avaient laissés filer une potentielle source d’information. Une remarque que le bretteur ne prit même pas en compte. Il ne s’en offusqua pas en tout cas. Il avait agi au mieux. Son credo était plus dans le lattage de fessiers que dans la récolte d’informations, contrairement à son senseï. Puis le jeune garçon réagit aux dires de Fuka sur ses fameuses rencontres l’ayant aidés à s’améliorer, s’interrogeant sur le fameux Michiki.

- Une connaissance de Van-sama semble-t-il.

Le Taisa n’en connaissait pas non plus énormément sur ce spécimen qui l’avait malmené lors de leur entraînement particulier. Mais il avait au moins eu le mérite de l’aider et de l’aiguiller. Un « coup de pouce » qui lui apportait une certaine force de frappe aujourd’hui qui n’en était qu’à ses balbutiements. Tout comme son niveau de Ninjutsu pour lequel Hiko déplorait qu’il ne lui ait pas demandé de l’aide. A cela, Fuka répondit d’un ton ironique :

- Pourquoi tu crois que je suis là ? La paye de fin de mission et des techniques à gratter !

Samehada s’exaspéra de tant de boniments. Ça manquait de sang et de violence à son goût. Ce genre de moments où elle regrettait de n’être qu’un simple outil dans les mains d’un ignorant. Même s’il valait mieux pour lui qu’elle ne se dévoile pas totalement.

Le Taisa attendit trop longtemps devant cet hôtel miteux. Il commença à se faire une raison. Il descendit donc de son perchoir pour rejoindre la rue. Mais au détour de l’une d’elles, il perçut une clameur un peu plus loin. Il ne lui fallut que quelques foulées pour réaliser que le jeune Hiko était au centre de tout cela. Une échauffourée semblait commencer à cause d’une victoire où d’il ne savait trop quoi. Le Sabreur soupira, contraint d’intervenir. Il se fraya un chemin parmi les gros musclés gonflés à la testostérone et bien énervés. Il s’approcha de son acolyte et lui déposa une main sur l’épaule. Geste interrompu par une énergumène voulant lui attraper le bras. Fuka fit volte-face et réagit par une clé de bras qu’il conclut par un coup de pied dans le dos pour l’envoyer valsé dans ses petits camarades. Avant qu’ils ne réalisent et réagissent, les deux Shukajins avaient disparus.

Déjà loin du tumulte, ils purent alors partagés leurs découvertes. Hiko avait bien plus avancé que son élève sur la question. Comme dit plus tôt, la spécialité de Fuka n’était pas vraiment la récolte d’infos. Un peu déçu de ne pas avoir apporté sa pierre à l’édifice, il ne se découragea pas pour autant. Maintenant qu’ils en savaient un peu plus, venait la question du quoi faire :

- On fait quoi alors chef ? Tu joues le coach et je fais le gros bras imbécile ?

Son regard tomba sur sa fine silhouette qui ne laissait pas envisager son utilisation du combat au corps-à-corps. Il releva la tête, fixant le Sairyo avec un sourire :

- Ouais pas très convaincant je sais. Mais c’est pas pire que si c’était toi qui devait aller les taper !

Après avoir approuvé l’idée du plan de Fuka, et en balançant une passage une petite vanne à ce dernier, Hiko avait validé cette tournure des choses. Le Taisa serait le plus à même d’infiltrer ce réseau, voire même de participer aux combats pour se mêler plus facilement dans le cartel et les débusquer de l’intérieur. Sous Henge, le Sairyo se ferait passer pour un coach ou un agent et le tour serait joué.

Le duo Shukajin avait du temps néanmoins avant le prochain combat. Deux jours au moins. Leur route les mena dans une auberge où ils avaient décidés de poser bagage le temps de leur mission. Ils devraient faire un peu de marche pour y parvenir mais ils avaient du temps devant eux. Sûrement pour cela que le petit garçon prit la liberté de faire une halte supplémentaire. Il intima à son élève de déposer ses affaires pour le rejoindre. L’endroit était dégagé et le duo se faisait face d’à peine un mètre de distance entre eux. Un défi de Ninjutsu apparemment. L’idée semblait bonne. Fuka avait bien besoin d’entraînement et de conseils en la matière.

Néanmoins Hiko trouva tout de même le moyen de préciser qu’il ne fallait pas utiliser Samehada ou une quelconque technique de Taïjutsu. Les remarques arrachèrent un sourire à l’épéiste qui répondit sur le ton de l’humour à son tour :

- Ce n’est pas Samehada qu’il faut craindre tu sais…

Et avant qu’il ne prenne le temps de s’expliquer, il se mit à cracher une mare d’eau collante. Handicapant les mouvements, elle empêcherait le gamin de prendre la fuite. Par la suite, il fut attaqué de plein fouet par une boule d’eau contrôlée par l’esprit du jeune homme. Ce projectile aqueux pouvait s’avérer très utile pour être certain de choper sa cible. Fuka n’espérait pas toucher à un cheveu du garçon lui faisant face. La différence de niveaux était flagrante. Il n’aurait aucun mal à se dépêtrer de ce mauvais pas.

Mais le porteur de Peau-de-Requin gardait tout de même un atout dans sa manche. Son senseï enfantin avait demandé l’utilisation du Ninjutsu pour voir où il en était. Il aurait une dernière réplique suite à cela. Mais ses connaissances en la matière s’arrêtaient là ensuite. Vu la maîtrise d’Hiko dans cet élément, il pourrait sûrement lui apprendre quelques trucs qui lui seraient bien utiles pour plus tard.