Comment un homme aussi calme et intelligent que Jisetsu Uji pouvait s’être accaparé un objectif aussi fou que celui de mettre fin à l’humanité ? C’était forcément une question qui taraudait l’esprit de celui qui, sous l’aspect d’un clone, l’accompagnait. Ce dernier avait accepté de le suivre, sans le moindre doute pour retrouver son épée. Et Alpha réfléchissait déjà à la manière de remplir sa part du contrat.

Trouver un endroit où parler n’était pas difficile. Mais compte tenu du fait qu’il allait parcourir Sai’ham avec trois autres personnes, il fallait éviter les endroits de même type ou trop fréquentés. C’est ainsi qu’après quelques minutes de marche, Alpha se décida à s’asseoir sur un banc qui donnait sur une petite place. Sa capuche toujours sur la tête, il attendit que le Jisetsu fasse de même.

» Un beau début d’après-midi, n’est-ce pas ?

Il se décida finalement à retirer sa capuche pour laisser un peu son visage baigner dans la lumière. La brise était si légère qu’il en ferma les yeux un court instant.

» Saviez-vous que Kyoshi Rei avait presque le même objectif que vous ? Et même si c’était un aliéné psychopathe, j’arrivais à comprendre quelle logique il y avait derrière sa philosophie tordue.

Il remit sa capuche, puis croisa les jambes tout en allongeant son bras sur le haut du banc, adressant au passage un regard perplexe à son interlocuteur.

» Mais je dois avouer ne rien comprendre à la vôtre. Au-delà de savoir comment vous pourriez anéantir l’humanité, la véritable chose qui me tracasse est que je n’arrive pas à comprendre quelle logique, quel intérêt vous pourriez en dégager.

Perplexe, c’était bien le mot qui pouvait définir l’état d’esprit de l’Autocrate. Loin d’être l’homme le plus droit de ce monde, il avait toujours agi dans un but, souvent son intérêt. Mais qu’est-ce qu’un homme pouvait tirer de sa propre mort en plus de celle de tous ses congénères ? Alpha espérait un petit éclaircissement de la part de l’intéressé, et espérait sincèrement qu’il n’était pas totalement fou.

Car avant tout, l’ancien leader de la Corporation attendait de ses collaborateurs un minimum de sérieux.

Les réponses multiples de cet homme qui ne ressentait apparemment plus la douleur avaient quelque peu rassuré son interlocuteur. Il était plus « humain » que prévu. Mais la logique qui le motivait dans son entreprise impossible ne paraissait toujours pas bonne aux yeux de celui qui, en tant que fondateur de la Corporation, avait côtoyé illuminés et grands acteurs du monde shinobi.

Son bras continua de caresser le dossier du banc de toute sa longueur. Le visage d’Alpha, sous sa capuche, avait fini de regarder Jisetsu Uji. Pourquoi se nommer Al Sa-Her d’ailleurs ? Il aurait tout le loisir de le savoir en temps voulu.

» Je vois. Je ne vous cache pas que, si la Terre devait mourir de par le fait de notre espèce, je serai de ceux qui se diraient qu’après tout je ne serai plus là à ce moment-là.

La suite fut moins réjouissante que prévue. Le Jisetsu, dans tout son intérêt et son éloquence, ramena la discussion à ce qui semblait le préoccuper plus que tout : la recherche de son épée, Atiesh. Et la description qu’il fit de son ravisseur fut assez longue et complète pour donner des idées à Alpha.

Ce dernier retira son bras du banc. Sa tête fut un peu relâchée vers l’arrière tandis qu’il fermait légèrement les yeux. Après un soupir, il les rouvrit.

» Oui. Le Peintre.

La seule bonne nouvelle, c’était que l’Autocrate avait pu mettre un nom sur une nouvelle personne parmi les Huit qui l’avaient trahis. Mais malheureusement, c’était quelque-chose qui ne le surprenait pas. Après tout, comment pourrait-on avoir les pouvoirs innés des shinobis en horreur et apprécier Alpha ?

Non, que le Peintre fasse parti des Huit n’était pas une surprise. Mais la confirmation était toujours bonne à prendre. Son ancien chef replongea ses iris dans celles de son interlocuteur privilégié.

» Un vieil homme puriste, réactionnaire et donc un pur conservateur. Ayant toujours haï les ninjas pour leurs pouvoirs qui leur ont donné les rennes de ce monde, il a rejoint la Corporation en espérant que nos actions réduiraient le champ de grandes institutions comme les villages cachés.

Pour la première fois depuis qu’il avait fait face au quatuor de shinobis capturés par les Huit, Alpha avait pris une profonde inspiration. Il ne doutait pas qu’il saurait être meilleur que ce vieillard, mais redoutait une inconnue.

» Chaque membre de l’organisation possède un surnom, un nom de code. Si vous travaillez avec moi, nous devrons d’ailleurs nous mettre d’accord sur le vôtre… Bref ! Ces derniers ne sont pas choisis au hasard. Alors, le Peintre, à quoi cela vous fait-il penser, Al Sa-Her ?

C’était une inconnue de taille…

La discussion perdurait mais allait-elle se conclure sur une information intéressante ou bien cela tomberait-il dans l'échange basique sans contenu réel ? Nous verrons bien. Pour commencer il se contenta de répondre qu'il était de ceux qui vivaient le moment présent sans penser aux générations futures. En somme un égoïste. Comme la grande majorité de la population en somme. Soit, je n'étais pas surpris, étais-je seulement capable de l'être ? Ça c'est une vraie question. Je lui répondis brièvement sans m'attarder réellement là dessus.


« C'est bien pour cela que notre espèce doit s'éteindre. »


Après quelques instants il répondit au sujet le plus préoccupant à mes yeux, récupérer mon bien. Il me transmit un nom ou tout du moins le pseudonyme de celui qu'il nommait comme étant le peintre. Il le décrivait comme un vieil homme attaché à ses propres valeurs et comme un conservateur. De plus il semblait détester les shinobis en général et donc pas uniquement les personnes comme moi possédant des particularités. Enfin il me parla d'une histoire de nom de code et me demanda à quoi « le peintre » me faisait pensé. Je réfléchis un instant avant de répondre.


« Il y a un clan ayant déserté Konoha, les Hyô, qui possèdent le pouvoir de manipuler l'encre. Serait-ce un membre de cette famille ? »


Pure spéculation mais à vrai dire je n'avais pas réellement d'autres idées en tête pour le moment, c'est pour cela que je me contentais de rajouter ceci :


« Mais plutôt que de me demander ce que j'en pense, j'aimerai vous demander si vous n'avez pas une idée de l'endroit où il peut se terrer. Après tout l'organisation m'a eu par surprise, leurs chances dans un face à face contre moi sont bien moindre. »


Enfin puisqu'il parlait de nom de code, il me suffisait de conclure là dessus pour le moment.


« Pour le pseudonyme que vous me demandez, je vous laisse choisir, puisque dans votre organisation ils prennent des surnoms en fonction de leurs pouvoirs vous n'avez qu'à en faire de-même. De toute manière peu importe, que l'on m'appelle l'horloger, le magicien ou Jisetsu Uji, en définitive je ne suis qu'une seule chose, L'apocalypse à venir. »