Musique ♫:

La nuit venait une fois de plus de s'échouer sur l'immense étendue de sable qu'était Kaze no Kuni. Pourtant elle n'était pas comme toutes les autres. C'était la nouvelle lune, qui, dans les préceptes Jashiniste définissait l'avènement du sacrement noir. L'obscurité était totale sur cette terre basse tandis que le firmament resplendissait dans les cieux éthérées. Là, au milieu des dunes avançait une silhouette féminine. De long cheveux noirs de jais, un corps serré dans un bustier qui lui servait également de protection. Un pantalon bouffant propre à l'archétype même du désert couvrait ses jambes. Baignant dans les ténèbres ambiants elle se détachait à peine de son environnement. Ketsueki Yami avançait telle une ombre parmi les ombres si ce n'étaient cette immense faux à double lame accrochée dans son dos. Elle était le symbole d'un illustre passé ne demanda qu'à renaître de ses cendres

« Continue... Diriges-toi toujours plus vers le nord, là où nos ancêtres ont bâti la citée Dolente, là où notre peuple dominait tous les autres . »

La voix résonnait dans son esprit, comme si elle provenait de partout et nulle part à la fois. L'habituelle plénitude du désert était continuellement rompue par des battements frénétiques et autre successions de grincement. La jeune femme était plutôt bien accompagnée. Les enfants de Nosferatu, ces chiroptères de toutes tailles et de tout âge servaient d'escortes, volant telle des étoiles noirs au-dessus de sa tête. Elles lui indiquaient la marche à suivre jusqu'à ce lieu que tous voulaient oublier. L'ancien château des Ketsueki qui avait servit de siège au buveur de sang durant l'ère des guerres claniques. Aujourd'hui il en restait plus que des ruines déchues de leur majestés. Pourtant son apparente décrépitude de suffisait pas à masquer le souvenir de sa gloire passée. Encastrée à même une falaise, une succession d'immenses remparts s'élevaient de plus en plus en hauteur jusqu'à enfermer la demeure principal au sommet. Ainsi les différentes étages servaient de démarcations entre les quartiers séparant la ville de basse de celle située en hauteur.

« Des milliers de serviteurs vivaient entre ses murs. Ceux qui refusaient d'en faire partie se retrouvaient à l'extérieur empalés le long des remparts »

Les chauves-souris guidèrent la Ketsueki jusqu'au pont levis ou plus exactement à ce qu'il en restait. Une fois parvenue dans la ville basse, elle put constater la déchéance dans laquelle les lieux étaient figées. L'air semblait soudainement devenu glacial et il faisait toujours aussi sombre. Dès lors, on n'en vint plus qu'à attendre le son qu'émettaient les pas de la faucheuse pourpre dans la ruelle pavés de galets. L'intégralité des bâtisses étaient en ruine. Il ne semblait plus y avoir âme qui vive. A en juger par l'avance de la dégradation des murs il ne faudrait pas plus de deux siècles au désert pour engloutir cette immense structure de pierre. A l'échelle même du temps cela était insignifiant. Quoi qu'il en fut la jeune femme continua son avancée, inébranlable, ne pensant certainement plus qu'à son avenir. Elle emprunta l'interminable escalier qui menait au sommet.

« C'est une belle leçon que je t'offre. Regarde ce qu'il en est à présent. De notre passé il ne reste que des souvenirs et des cendres. Si tu souhaites ne jamais cesser de monter, alors garde à l'esprit qu'il t'es possibles de perdre à tout instant, aussi puissante sois-tu. »

Par endroit le décor sembla se mouvoir, mais ce n'était pas du genjutsu. Les ombres se détachai entre elles et se déployaient. La forteresse était emplit de chauve-souris, des centaines, des milliers. Leurs innombrables yeux écarlates se tournèrent en direction de la Ketsueki. Escortée par se funèbre cortège elle continuait son ascension. A chaque marche, elle s'élevait un peu plus, surplombant peu à peu l'immensité du désert qui se trouvait désormais en contre-bas.

« Néanmoins sache que ce n'est pas finit. Cela ne sera jamais. Le sang nous unis tous. Tant que l'un nous demeure, nous sommes une infinité. Ne le sens-tu pas au fond de toi ? Les Ketsueki sont éternels Yami... »

Enfin elle parvint dans ce que l'on pourrait comparer à un jardin intérieur. Tout semblait si dérisoire vu d'en haut. Les restants d'une fontaine étaient présent sur le côté. La roche formant la cuve était noirci. On se demandait si ce n'était pas autre chose que de l'eau qu'elle laissait couler jadis. Mais l'heure n'était pas à s'attarder à l'ouvrage, mais bel et bien au sacrement. Ce faisant l'immortelle en devenir pénétra dans la bâtisse principale, perchée au sommet du désert. L'issue donnait sur la salle du trône. Immense, le plafond n'était guère visible en raison de l'obscurité et ce malgré les torches allumées disséminées le long des colonnes. Au fond de l'abysse, on aurait put s'attendre à apercevoir une silhouette siégeant sur ce majestueux trônes de pierre au-dessus duquel était gravé le symbole de leur famille, mais il n'en était rien. Yami se retrouva seule devant ce vide qui ne demandait qu'à être comblé. A cet instant, comme surgit du néant, l’Innommable apparut au côté de cette égide. Sa main se posa avec lenteur sur l'accoudoir. Enveloppé dans une tenue noir, le visage en partie cachée par sa chevelure sombre, seul son regard sanguin était visible, lui qui se reflétait tel deux rubis à la lueur des torches vacillantes.

« N'est-ce pas ce que nous désirons tous ? »

Il marqua le silence l'espace d'un instant afin d'accorder à sa protéger le temps de méditer sur la situation sans pour autant lui laisser le temps de répondre. Un filet écarlate presque aussi fin qu'un cheveux sortie de sous sa manche. Il traversa l'air et la trône fut brusquement fendu en deux. Le son de la pierre s'écrasant sur le sol se fit entendre.

« Quel intérêt y a-t-il à s'attacher à des ruines ? Un prestige passé ne doit jamais prévaloir vis-à-vis sur nos ambitions présentes. Il n'existe aucune fin, seulement une succession d'après. Et nous arrivons à l'aube d'un nouveau cycle...»

Silencieux, l'ancien comte avança de quelque pas en direction de sa fille. Son regard était toujours aussi sombres et pénétrants. Ses lèvres ne bougeaient pas, mais la Ketsueki pouvait clairement distinguer sa voix.

« Es-tu prête Yami à redresser notre emblème ? A devenir cet âme immortel transcendent les âges? »

Cette question était simplement rhétorique. Il n'y avait qu'une seule réponse envisageable.

Music ♫:

Il m'avait extirpé de mon sommeil. Cette voix, je la reconnaîtrais entre mille... Enfin était venu le jour tant attendu du sacrement. Plus encore que ce que me conférerais ce rituel, j'allais enfin être débarrassée du mal qui me rongeait les veines et affligeait mon âme.

Je l'écoutais, je le suivais, il me guidait... Ses chiroptères s'agitaient comme jamais, tournoyants, hurlantes dans le manoir en s'échappant par la toiture de la bâtisse ou m'accompagnant par la sortie principale. Je marchais d'un pas lent, éthéré, comme happé par ses indications sans que plus rien d'autre n'ait d'importance.

Je quittais l'enceinte du village, de nuit, informant mes hommes du Kakumeigun gardant la Voie de mon escapade et de mon retour prochain.
Ainsi donc je m'engouffrais dans le désert, ma faux a double lames dans mon dos et la nuée noire me guidant a travers la nuit vers ma destination.

Mon père m’emmenait vraisemblablement au lieu, que jadis, les nôtres arpentaient fièrement, surplombant bon nombre par leur puissance et leur pouvoir. J'avais hâte de découvrir le vestige de la gloire d'antan des miens...
Je foulais son parvis, fascinée par la structure en friche mais encore aujourd'hui si imposante. J'imaginais les Ketsueki érigeant cette cité et vivant entre ses murs... Nombreux, forts et fiers à la fois, perpétrant le massacre pour obtenir ce qu'ils convoitaient.

La pierre était ancienne, tout cela semblait venir d'un autre âge, une autre ère : et pourtant je parvenais presque à sentir les effluves émanant des mares écarlates qui avaient teinté la cité autrefois. Un fin sourire s'étira au bord de mes lèvres sous cette remarque, confortant mon esprit serein et emplit de fierté que de marcher sur ces terres.

Qui serais-je aujourd'hui si j'avais grandi dans cet environnement ? Sans doute n'aurais-je jamais éprouvé la compassion envers des personnes que je jugeais chères à mon cœur. L'amitié, l'amour, ne seraient que des chimères abstraites et abjectes enraillant mes idéaux et ne nuisant pas à mon jugement.

Mon regard écarlate se porta sur les remparts alors qu'Eien m'apprenait leur utilité et soulignait leurs décisions impitoyables. Ceux qui ne voulaient pas les suivre n'avaient d'autres choix que de mourir et d'assumer leur refus.

Mes pas résonnaient dans un silence de mort, sans âmes qui vivent entre ces ruines. Ou peut-être n'étaient-ce pas si désert... Les trépassés regagnaient souvent le lieu de leur funeste destin.
Mon regard se posait ici et là, observant les alentours, tandis que je gravissais l'imposant escalier qui menait au château déchu. C'était à la fois mirifique et affligeant d'explorer ce vestige relatant d'un passé bien plus reluisant que ce qu'il était advenu de nous aujourd'hui...
Voilà où nos méthodes nous avaient conduites. Voilà ce qu'il restait de l'admiration du peuple noir...

Mon père me rappela a la réalité, m'offrant un enseignement que je n'étais pas prête d'oublier : rien n'était acquis dans ce bas monde. Le plus difficile n'était pas d'atteindre le sommet mais d'y rester. Jamais je ne devais perdre de vue que je n'étais pas infaillible où la toute puissance qui galvaniserait mon ego obstruait aussi mon jugement, me conduisant sur le déclin subitement, sans que je ne puisse m'y attendre...

D'autres chiroptères m'observaient durant mon ascension, me confortant dans la bonne direction de mon ascension. Les paires d'yeux rougeoyants dans la nuit n'avaient de cesse de m'épier sans que je ne m'en sentes aucunement menacée, continuant ma route en leur passant devant, suivant celles qui jouaient les gardiennes depuis quelques mois désormais, au sein du manoir à Suna. La vue sur le désert était infinie et imprenable. Rien ne se trouvait aux alentours, laissant choir cette cité comme une illusion, un mirage semblant être posé là, au milieu de nul part.

Toutefois, ces ruines ne signifiaient rien. Car si elles témoignaient des erreurs des miens jadis, elles ne soulignaient pas pour autant l'impossibilité de rebâtir quelque chose de nouveau. Comme la voix tonitruante et à la fois apaisante, me le disait au creux de mon esprit : ce n'était pas fini et jamais cela ne le serait. Notre sang clanique résonne et même rattrapés par la mort, nous demeurions toujours à travers ceux restants...

Les trahisons avaient pourfendues les âges et les nôtres mais même les dissidents étaient toujours là quelque part... Il n'y avait qu'à constater a quel point, même dans la mort, Megami, ma mère, subsistait toujours malgré tout... Ses actes, ses souvenirs et une part d'elle même : tout était intact... Quand était-il du propre père du mien, scellé a tout jamais par ses fils qui le jugeait bien trop dangereux ? Ce qu'il avait construit : notre nom, notre sang... Tout cela nous le lui devions et même disparu nous ne pouvions renier son héritage.

Face à moi se dressait une salle du trône décrépi mais néanmoins imposante. J'imaginais alors les membres de ma famille qui avaient pu se succéder sur ce piédestal massif. La lignée des Comtes et Comtesses qui avaient autrefois régné en maîtres sur bon nombres de contrées : amassant pouvoir et richesse et ne ployant jamais sous le joug de l'ennemi, toujours prêts à faire couler le sang si l'opinion divergeait du leur. Jusqu'à ce jour où tout fut balayé et les nôtres dispersés avant de se trahir entre eux, laissant mon père comme mort tandis que ma mère, reprenant sa place, suivait Kyoshi Rei jusqu'au village caché du sable...

Le siège vide face à moi, arborant le sceau de notre famille, résonnait comme une symbolique en moi... Il était vide. Il n'y avait plus de successeur, plus personne pour conduire ce qu'il restait des nôtres.
Soudainement, il apparu face à moi, inchangé, faisant naître un respect réflexe en sa présence.
Il semblait presque nostalgique devant l'égide de ce lieu et pourtant il n'hésita pas à pourfendre la pierre, détruisant l'éminent symbole représentant le passé. Il appuyait d'ailleurs son geste par des propos allant en ce sens. J'étais d'accord avec lui. Aussi impressionnant et solliciteur d'envie, cet endroit appartenait au passé et nul ne prévalait sur le présent. La page était tournée depuis déjà plusieurs années : il nous fallait prendre un nouveau départ. Rebâtir en usant des leçons d'autrefois pour ne pas commettre les mêmes bavures.

Mon père s'avançait dans ma direction, nos regards baignant du même éclat plongés l'un dans l'autre. Nous demeurions silencieux et pourtant nous communiquions : lui par sa voix au sein de mon esprit, moi par mon ressentiment qu'il pouvait aisément percevoir à travers notre sang commun, sans nul besoin de mots. Je savais parfaitement qu'il n'attendait pas de réponse à sa question mais je ne pouvais que me sentir gratifiée d'honneur du privilège qu'il me concédait. Même si tout cela demeurait flou, je savais pertinemment que le rituel n'était pas accessible à tous : il n'était possible que dans la grande lignée des Comtes et Comtesses car Jashin ne semblait prêt à octroyer son pouvoir qu'au sang noble.

« Fais ce qui doit être fait. »

Me contentais-je de lui répondre. J'imaginais que mon sang devait être versé... Alors soit...

Je songeais alors à la fin du mal qui rongeait mes veines et tiraillait mon corps... Enfin j'allais en être débarrassée. Après tout, la mort me tendait déjà les bras...

« Je guiderais les nôtres. »

Ils étaient peu nombreux au sein du village caché du sable mais je savais que d'autres se trouvaient quelque part. Bientôt, ils se rallieraient à moi et ensemble nous embrasserions notre nouvelle destinée : à l'aube d'un cycle nouveau pour redorer notre blason...

Contrairement à ce que l'on pourrait croire l’événement qui s’apprêtait à avoir lieu était unique en son genre. Aucun des immortels constituant la lignée des comtes n'avaient effectué le Sacrement Noir en de telles circonstances, à savoir sous la tutelle de son prédécesseur direct. Yami s'apprêtaitbientôt recevoir le Don Noir. Ce pouvoir pour lequel des générations entières de Ketsueki s'était déchiré dans le but de s'en emparer, mais a ce jour il ne restait que peu d'individus capable de prétendre à un tel héritage. Et la dernière phrase de la jeune femme confirmèrent le choix d'Eien.

« C'est exact. J'ai cru attendre que tu détenais une place de choix au sein de ce village caché du Sable. Tout ce qui s'y trouves, toute sa force, sa richesse ainsi que les nombreuses âmes qui vivent, de tout ce sang qui coulent dans leur veines.... Sert-en comme base pour parvenir à tes fins. Suna servira de fondation pour créer notre nouvel empire. »

Malgré le cauchemar qu'avait inspiré Eien dans le cœur d'innombrable innocent on ne pouvait nier que l'influence des Ketsueki s'amoindrissait au fil des décennies. Peu d'individus les considéraient encore comme la menace qu'ils fussent jadis. L’anonymat était une arme redoutable si utilisée à bon escient. Plutôt que d'ériger un nouveau partie, il est plus aisé de s'emparer de celui déjà présent. Dès lors Suna ignorait qu'une épée de Damoclès siégeait au-dessus de sa tête.

« Mais nous parlerons de cela plus tard. Une fois que tu te seras éveillée à l'immortalité. A présent suis-moi. Tu vas découvrir par toi-même les secrets de notre clan, ainsi que le lieu ou j'ai jadis accédé au titre de comte... »

Il n'avait pas prononcé la moindre parole. Ses lèvres demeuraient toujours close. Une personne extérieur à la situation aurait simplement vu Eien aviser son hôte d'un regard brûlant d'une intensité glaciale. Sans montrer le moindre signe d'invitation il tourna le dos à sa protégée pour s'engouffrer dans les ténèbres. Yami n'avait plus qu'à le suivre. Derrière la salle du trône se trouvait un escalier en colimaçon qui semblait descendre dans les profondeurs de la falaise. L'air y était particulièrement humide et glacé. La température semblait drastiquement chuter au fur au fil de la longue série de marche qu'ils laissaient derrière eux.

D'autres torches étaient disposées le long des parois qui finalement menèrent dans une nouvelle salle. Celle-ci faisait étrangement penser à celle du trône avec ses longues colonnes disséminées de par et d'autres. Les murs étaient fait de pierres empilées tandis que le sol était couvert de pavés. Le tout donnait l'impression que les lieux n'avaient pas été creusé à même la roche et ce malgré la profondeur à laquelle ils se trouvaient. D'innombrables gravures recouvraient les parois. Dans le font se présentait une balustrade sur laquelle siégeait une large coupe en pierre. Un foyer brûlait en son centre et mettait d'autant plus en évidence l'immense statue de pierre à l'effigie d'une chauve-souris aux ailes repliées. Sa tête se perdait presque dans l'ombre du plafond. Au pied de l'estrade se trouvait un renfoncement dans le sol relié par divers petits canaux taillés à même la roche tous rejoignant la monstrueuse statue.

« Avant de prétendre à l'Immortalité il te faudra effectuer le rituel de l’Ascension, celui par lequel tout Ketsueki parvenu à maturité se doit de passer. Gardes tout ceci en mémoire car dans l'avenir tu seras menée à l'effectuer pour tes semblables »

Plus que le sentiment d'enfermement au milieu des profondeurs les ténèbres ambiant étaient ceux qui paraissaient le plus oppressants. Les maigres lueurs aux flammes vacillantes ne servaient qu'à faire danser les ombres contribuant à renforcer ce sentiment d'oubli. Eien s'était avancé jusqu'à la coupe ardente. Il avait ôté sa cape avec une certaine solennité pour révéler une tenue ample à l'allure noble.

-Avant que nous ne commencions, laisse-moi donc te poser cette questions...

Sa voix grave s'était mise à raisonner dans toute la salle. Le comte parlait si rarement de façon traditionnel que lorsqu'il en faisait œuvre cela soulignait l'importance de ses futurs paroles. Dans le même temps sa main attrapa une chevalière sertie d'une pierre noir posée à côté de la coupe. Il y fit glisser son majeur droit.

-Si d'avenir je venais à entraver ta route serais-tu en mesure de t'opposer à moi et de m'éliminer ?

La question était pointilleuse. Tout autant que l'aiguille encastrée dans l'anneau de la chevalière.

Music ♫:

La conversation silencieuse se poursuivait. Le Comte relevait ma place au sein du village de Suna, me conseillant d'user de ses ressources pour bâtir les fondations de l'ère nouvelle de Ketsueki. Nombreux étaient ceux qui se méfiaient du clan entre ces murs mais la crainte s'étaient bien amoindrie depuis quelques temps, notamment par le fait de ma prise de poste parmi les plus gradés pour conforter les autres de la confiance que m'accordait les hauts dirigeants malgré mon nom. D'abord élève de la Godaime puis membre du Kakumeigun et enfin à la tête de ce dernier depuis l'ascension de son ancien chef au rang de Rokudaime Kazekage : mon élévation avait été sans doute aussi fulgurante qu'inattendue...

J'avais simplement su me démarquer du lot et de m'entourer des bonnes personnes sans pour autant songer me servir de leur position. J'appréciais réellement certains d'entre eux et si cette confiance que je leur portais et qu'il m'attribuait pouvait m'aider dans ma quête alors j'en étais satisfaite.

Je suivais mon père dans ce dédale sans fin qui s'enfonçait toujours plus dans une pénombre de plus en plus oppressante. Il n'y avait pas âme qui vive dans les vestiges de ces lieux : le silence régnait en maître, seulement fourbu par le bruit de nos pas sur la pierre glacée.

J'allais accéder à l'immortalité, ne plus souffrir des affres de la maladie : le temps n'aurait plus d'emprise sur moi... Nous défions les lois même de l'humanité et du cycle de la vie régit par les étapes de la naissance jusqu'à la mort tandis que le corps dépérit peu à peu sous le poids des âges. Jamais plus je ne serais touchée par cela : conservant tout au long de ma vie ma vigueur jusqu'à mon trépas. Je ne pouvais pas défier la mort mais pouvait la repousser en ayant la possibilité d'exister bien plus longuement que le commun des mortels.
Là était mon véritable dilemme, mon véritable fardeau : choisir de maintenir mon existence au prix d'une nouvelle malédiction peut-être bien pire que ma maladie initiale. Eien n'était pas touché par ce malheur mais moi j'allais devoir faire face à la mort de mes semblables et finir indéniablement par me retrouver seule : cette solitude dont j'avais tant horreur...

Toutefois, j'avais réfléchi à ma décision depuis déjà quelques temps : j'étais prête à ce sacrifice pour conserver ma place parmi les vivants afin d'accomplir mes objectifs et guider les miens vers la rédemption.

La salle où nous nous trouvions désormais était similaire à la précédente, à l'exception près que nul trône ne se dressait fièrement en son centre : ici il s'agissait d'une statue colossale d'une chiroptère. Plusieurs canaux se dirigeaient vers elle et je n'avais pas besoin de m'y attarder davantage pour savoir de quoi il fallait qu'ils soient irrigués... Ce détail ne me faisait pas sourciller le moins du monde pour autant : aucune crainte n'émanait de moi et mon regard était aussi glacial que celui que me renvoyait mon père.

Écoutant son conseil, j'observais tous ses faits et gestes pour les conserver dans ma mémoire si d'aventure j'étais moi même amenée à exécuter le rituel de l'Ascension, tandis qu'il se dirigeait vers la coupe incandescente en ôtant sa cape. Nous allions pouvoir procéder à sa réalisation : cela était certains non seulement de part son attitude solennel que par des vraies paroles qui furent prononcées avec sa voix grave résonnant dans la pièce vide.

J'écoutais ses paroles, attentive à la question qu'il était sur le point de me poser tandis que je le vis s'orner d'une bague imposante à la pointe aiguisée comme celle que je portais moi même au pouce. Mon anneau d'argent était bien moins impressionnant que cette chevalière mais leur office devait être semblable... La mienne me servait à extirper mon sang de mes veines...

Toujours aussi peu expressive, j'accueillais avec attention son interrogation et lui répondais sans perdre de temps, certaines de ma réponse.

« Quiconque s'opposera à moi ou interférera dans mes objectifs sera châtié puis éliminé. »

Il y avait encore quelques temps j'aurais probablement hésité. Mon père était tout ce qu'il me restait et sa puissance était bien supérieure à la mienne : tout comme son expérience de vie bien plus longue. Pour autant je ne pouvais laisser impunément mes intentions ruinées et cela, je l'avais compris récemment lors de la sanction que j'avais infligé à ma cadette. Je ne permettais à personne de ruiner mes efforts pour redorer notre blason clanique et il en allait de même pour mes intérêts...

Mon regard brûlait d'une intensité nouvelle mêlant à la fois suspicion et un tout autre sentiment bien contraire : une certaine affection.

« Même s'il s'agit de vous, père. »

J'avais prononcé cela sans le moindre flegme.

« La confiance n'est pas quelque chose que nous pouvons accorder et surtout pas aux nôtres, vous le savez tout aussi bien que moi père. Pour autant, je ne suis pas idiote : votre puissance est bien supérieure à la mienne : je ne peux vous sous estimer. Je n'ai guère l'intention de commettre les erreurs faites par mes aïeux. »

Leur ère avait pris fin par leur trop grande confiance et le peu de crédibilité qu'ils avaient apporté à leur ennemis. Leur surestimation d'eux même les avaient conduit à la déchéance. Cependant, je possédais, et risiblement grâce à mon abandon par les miens, des sentiments qui me conférait cette vision d'ensemble qu'eux avaient eut étriquée...

Music ♫♪:

Cette question était en effet à double tranchant, mais la vérité étant qu'il n'y avait aucune finalité. Chacune pouvait contenir sont lots de suffisances, de déceptions, d'aspirations et d'éclats. En réalité la seule mauvaise réponse aurait été de n'en fournir aucune, car le silence à lui seul en disait également long. De son côté Eien tenait simplement à se faire une opinion définitive sur le sujet. En réalité le choix des réponses lui permettait en quelques sortes de faire une estimation de l’espérance de vie que gagnerait Yami une fois devenue comtesse. Et il savait désormais à quoi s'en tenir maintenant qu'il connaissait le partie qu'avait choisi sa fille.

-Dans ce cas la première étape consistera à effectuer ton rituel de l’Ascension. Par ce biais tu voueras ton existence à Jashin en lui confiant une part de ton humanité. A partir de là vous serez à jamais liés. Chaque vie que tu condamneras selon nos rites se verra offerte à notre dieu. En échange il conférera à toi et aux tiens plus de pouvoir que vous ne pourrez l'imaginer. Ta maîtrise du sang pourra atteindre son apogée et les maladies liés à ces derniers disparaîtrons progressivement garantissant un avenir aux nouveaux nés et par conséquent à l'ensemble de notre famille. Par ce biais les Ketsueki seront en mesure de renaître et d'accomplir ce pourquoi ils sont destinés. A savoir régner.

Le clan avait progressivement dépéri suite à la chute du culte de Jashin. Sans la présence d'Eien cette tradition avait finit par se perdre entraînant le déclin du pouvoir des buveurs de sang. S'ils en étaient aujourd'hui rendu à un tel état de décrépitude c'était parce qu'ils avaient renié leurs dogmes. La première étape consisterait donc à réinstaurer leur culte à travers le désert ce que ne serait pas sans conséquence pour les nombreux humains y vivant.

-Comprends-tu ce que cela signifie ? Si nous voulons continuer de nous élever pour atteindre notre objectif alors il nous faudra prendre appuie sur des montagnes de cadavres. Le sang en appel le sang. En embrassant cette voie tu devras t'adonner à un éternel massacre sans quoi l'histoire viendrait inévitablement à se répéter.

Cette idéologie d'un carnage sans fin était propre à leur nom. Il avait transformé au fil des générations les lignés des premiers humains s'étant adonnés au culte pour en faire les Ketsueki d'aujourd'hui. Leur histoire était écrite dans le sang et elle ne faisait commencer.

-Si tu es prête à l'accepter alors avance toi face au calice et offre une part de ton sang aux flammes.

Le regard d'Eien était toujours aussi pénétrant. Cela était d'autant plus souligné par les ombres dansantes sur son visage blême suite aux oscillation des flammes du calice juste à côté de lui. Selon la légende Ketsueki, Jashin se serait jadis servit de ce récipient pour boire le sang de la chimère qui lui aurait conféré ses pouvoirs. Le Dieu sombre et cet objet seraient donc intimement lié. Depuis des siècles le Peuple Noir s'en servait comme catalyseur afin d'effectuer leur rituel. Il s’agissait d'une des nombreuses reliques que possédait le clan. Yami n'allait pas tarder à en découvrir une seconde. En effet lorsqu'elle déversa un peu dans son sang dans la coupelle les flammes réagiren aussitôt en s'abrasant de plus belle. La jeune femme venait d'être reconnue comme une digne héritière du clan Ketsueki.

Alors sans prévenir l'immense statue de chiroptère commença à s'animer. La pierre qui recouvrait son corps vola en éclat pour finir par tomber en poussière. Ses yeux ardents étaient à l'image de ceux des enfants de Jashin. La bête se courba, poussa un petit cri aigu, avant de rapprocher son monstrueux visage de Yami. Ils n'étaient plus qu'à quelque centimètres l'un de l'autre.

-Je te présente Nosferatu. Le maître des chiroptères. Il fut également mon mentor et le plus ancien représentant encore vivant de notre clan. Au prês de lui tu acquerras un grand savoir notamment en ce qui concerne nos techniques les plus secrètes.

La bête secoua la tête chassa les derniers gravas sur sa peau.

« Cette voix... Je ne pensais pas l'entendre un jour de nouveau... Eien... Cette enfant... Elle possède le même sang que toi... Je présume qu'elle est ici pour accomplir l’Ascension... »

Le démon parlait également le langage de l'âme. Sa voix raisonnaient dans l'esprit de chacun. Elle sonnait de façon totalement déstructurée et caverneuse tel un murmure en plein cauchemar.

-C'est exact Nosferatu-sama. Notre clan à subit de nombreux troubles durant ces dernières décennies. Il n'est plus que l'ombre de lui-même. Je vous présente mon héritière, Ketsueki Yami. Elle va également hériter du Don Noir.

La gargouille resta immobile, laissant apparaître le reflet de la jeune femme dans son regard vitreux. Elle tourna ensuite la tête en direction du conte.

« Que t'arrive-t-il Eien, cela ne te ressemble pas d'agir ainsi... Tu es le plus à même d’insuffler une nouvelle vie à notre clan. Pourquoi faire cela...? »

La tête tourna à nouveau en direction de Yami. Cette fois-ci Nosferatu la dévisagea de bas en haut, comme s'il cherchait quelque chose de particulier. C'est ainsi que son attention fut retenue par le regard de la Ketsueki.

« Il y a beaucoup trop d'humanité en elle, beaucoup trop de faiblesse... »

Le faciès du démon disparu dans l'ombre lorsqu'il se redressa de toute sa hauteur. Seul restait visible deux pupilles ardentes encadrées par une silhouette cauchemardesque.

« Elle en est indigne... »

Music ♫:

Il m'écoutait sans relever toutefois mes propos comme je m'y attendais. Chacun était libre d'interprétation : y avait-il seulement une bonne réponse ? Tout dépendait de la conception que l'on se faisait de la chose. Sa non expression me rassura presque : au moins il ne semblait pas déçu par mes paroles.

Eien m'expliqua alors le déroulement des opérations et du premier rituel que j'allais devoir effectuer avant de recevoir le Don noir. Je savais que seul le Comte était immortel et au fond de moi, je commençais à me demander ce qu'il allait advenir de mon père une fois cela accompli... Allait-il retrouver sa mortalité ou bien tout simplement mourir ? L'idée même qu'il puisse effectuer un tel sacrifice seulement pour moi me laissait perplexe car ce n'était pas simplement comme ça que je l'imaginais. Avais-je raison pour autant ? Après tout je ne pouvais guère affirmer le connaître : il n'était entré dans ma vie qu'il n'y avait peu de temps. Pourtant, cette pensée me chagrinait bien que je n'en laissais rien paraître. Il était mon mentor, mon guide dans mon ignorance et aussi ma seule famille...

Je laissais tout cela de côté en me concentrant sur ce qu'il me disait. Il était bien évidemment question de Jashin et le fait de lui céder une part de mon humanité, comme je m'y attendais déjà. Je serais lié en un Dieu auquel je n'avais jamais porté le moindre intérêt avant de rencontrer mon père. Beaucoup de choses allaient changer, j'en étais convaincue et pour l'heure je ne souhaitais pas en dresser la liste par crainte de vouloir reculer in extrémiste. Je n'avais plus le choix et définitivement choisir entre les personnes qui m'étaient chères et ma vie.

Je devais guider les miens, leur permettre de régner en récoltant le sang d'une infinité de personnes que j'offrirais au Dieu déchu pour qu'il nous concède sa puissance afin que mon clan retrouve sa gloire d'antan, éradiquant peu à peu cette maladie qui touchait de plus en plus les nôtres...
C'était là la voie à suivre pour parvenir à cette finalité et je l'avais déjà compris il y avait quelque temps.

La montée de Megami au pouvoir de la famille avait entraîné nos croyances sur le déclin et c'était ainsi que le clan avait suivi sa chute infernale. Tout était bien plus stable lorsque Eien régnait. Pourtant, j'étais née peu de temps avant la rébellion de cette femme que je devais appeler « mère » et malgré la place de mon père et de ses principes et préceptes, j'avais tout de même été atteinte par le mal signant notre déclin... Etait-ce un présage de la destinée miséricordieuse des nôtres ? Nul ne possédait la réponse...

Le massacre serait mon lot quotidien pour restituer la Gloire des miens... Comment allais-je m'y prendre ? L'autre moi le saurait sûrement...
Comme il me l'indiquait, je m'approchais du Calice incandescent et m'entaillais le poignet avec ma bague à pointe, laissant couler mon sang dans le feu crépitant et oscillant. Dans le même temps, la statue s'anima, se débarrassant de son manteau de pierre pour se mouvoir à son gré. La Chiroptère était impressionnante, tant par sa taille que par l'aura qui se dégageait d'elle alors qu'elle se courba pour me dévisager a quelques centimètres, de ses yeux rubis semblables aux nôtres. Je ne bronchais pas, la laissant faire sans la moindre crainte malgré le curieux spectacle qui se jouait devant moi.

Nosferatu avait été le mentor de mon père, rien que cela... Ce dernier lui vouait d'ailleurs un profond respect qui m'étonna... La chauve-souris pourrait m'apprendre bien des choses concernant mon clan ou des techniques puissantes et je me demandais ce qu'il faisait d'autre que d'attendre telle une gargouille, qu'un enfant de Jashin s'amène ici pour s'adonner au rituel...

Personne ne parlait et pourtant la conversation allait bon train. La Chiroptère reconnaissait mon père et se montrait sceptique quant à la décision de ce dernier qui lui faisait comprendre que c'était moi qui allait reprendre le flambeau alors même que Nosferatu voyait en mon père un être bien plus à même de le faire par lui même. La bête soulignait mon humanité en la débectant comme une faiblesse tandis qu'elle finissait totalement par jouer les indifférente en reprenant sa place initiale tout en décrétant que j'étais indigne de recevoir ce pourquoi j'étais là.

Je n'étais pas capable de poursuivre un discours muet mais je me faisais tout de même entendre en observant l'ancienne statue dans les yeux, mon regard irradiant d'intensité.

« Tout le monde dispose de faiblesses. Ces dernières peuvent devenir des forces tout comme l'inverse est vrai. Enma était bien trop puissant et se sentait invulnérable pourtant il a été défait par ses propres fils. Megami aussi à été aveuglée par le pouvoir et n'a pas fait preuve de suffisamment de prudence : ce qui lui a coûté la vie. Eien, à l'inverse, à accorder sa confiance et s'est fait poignardé dans le dos : personne n'a été infaillible. »

Je marquais une pause avant de reprendre :

« Mon humanité est ce qui fait également ma force car je sais décrypter les sentiments d'autrui et jouer avec si l'envie m'en prend. Je n'ai pas grandi parmi les miens et j'ai dû me débrouiller sans cet enseignement, choisissant ma propre voie sans jamais pour autant oublier le sang qui régit mes veines. »

Puis concluais finalement.

« Le rituel et le Don Noir auront raison d'une part de mon humanité alors qu'importe mes faiblesses non, Nosferatu-sama ? »

Je ne confortais pas le même respect qu'avait pu avoir mon père à l'égard de la chiroptère. Ma dernière phrase était au contraire teintée d'arrogance : j'avais horreur que l'on mette ma puissance en doute. Cela me coûtait de l'admettre mais j'y reconnaissais bien là Megami... Quoi que je puisse en penser elle était ma mère et j'avais indéniablement pris certains de ses traits de caractère tout comme je possédais également le flegme d'Eien.

Puisque cela ne semblait guère conforter Nosferatu, je décidais d'user d'une manière plus solennelle. Je dégainais ma faux a double lame et la maintenait dans ma main, posant l'une de ses extrémités sur le sol : cette arme d'un autre âge en corrélation avec les miens.
Mon regard demeurait glacial bien que brûlant d'intensité.

« Moi, Ketsueki Yami, héritière de Ketsueki Eien et Ketsueki Megami de la lignée principale des Comtes. Je revendique mon nom et guiderais les nôtres à leur rédemption tout en m'asservissant au dogme de Jashin que je nourrirais du sang des pécheurs comme des innocents pour permettre au clan de retrouver sa gloire d'antan. »

Je n'avais rien à prouver et mes paroles emplie de convictions tout comme mon impassibilité soulignait la véracité de mon engagement.

La jeune femme semblait plus que déterminée, mais cela serait-il suffisant ? De bien belle parole qui n'étaient pas dénuées d'intérêts.

« Une nouvelle façon de voir les choses... Voici qui est intéressant. Malheureusement tu as plusieurs siècle de retard sur tes aïeuls.... Tu n'es pas la première à faire preuve d'humanité parmi les notre... Et tu ne serais pas le première à en payer le prix... »

La bête demeurait totalement immobile tandis sa voix de son âme portait dans l'esprit de chacun. Ainsi figé elle donnait presque l'impression d'avoir recouvré son état de statue. Seul le son rauque de sa respiration répercuté avec écho sur les parois indiquait le contraire.

« Et tâche de faire preuve de davantage de respect en parlant de tes prédécesseurs, d'autant plus que tu ne sais absolument pas de quoi tu parles... Tu ignores tous d'eux de ce qui a été accomplit ainsi que des nombreux sacrifices qui ont du être fait pour préserver notre nom... »

De toute les entités légendaires appartenant aux Ketsueki qu'elles soient d'origine humaine ou monstrueuse, Nosferatu était celle la plus attaché à ce qui avait été. Sa condition le plaçait au point culminant de frontière entre le passé et le présent. Yami venait d'effectuer son serment la gargouille demeura silencieuse semblant réfléchir.

« Si tu n'as pas grandi parmi les tiens alors serait tu prêtes à sacrifier ceux qui t'ont élevé pour tes origines ? Serais-tu prête à brandir cette faux que nous présente avec tant de fierté afin de leur ôter la vie ? »

Il n'y avait que deux issus possible. Soit Yami parvenait à faire taire ses émotions pour mener son clan dans une nouvelle ère, soit elle signerait son déclin définitif. La réponse tardait à venir et contre toute attente Eien s'avança puis se retourna pour faire face à l'ancien Roi maintenant déchu.

-Nous n'avons guère le choix.

Lentement il défit le haut de sa tenue. La tunique de soi tomba révélant un corps mutilés par d'atroces cicatrices qui creusaient de nombreux sillons dans sa chair. Un médecin confirmé remarquerai que ces anciennes blessures n'avait jamais reçu de soins adaptés. Le temps était parvenu à lui seul à faire cicatriser les plaies béantes. Seulement elles s'étaient résorbée sde la façon la plus immonde qui soit, ne laissant plus que l'image d'un corps ravagé prêt à céder. Malgré cet état affligeant le conte faisait toujours étalage de sa grandeur d'âme, restant droit et digne devant son maître.

-La dernière trahisons que j'ai subi ma effectivement coûté. Je ne serais plus jamais en mesure de diriger notre clan. Quand bien-même je fus immortel cela ne change désormais plus rien au fait que mes jours soient comptés. A présent il vous faut faire un choix Nosferatu-sama. L'avenir... ou l'oubli...

Dit-il froidement tout en désignant de la main son enfant. De toutes les horribles blessures qui pavaient le corps du Ketsueki la plus repoussante était certainement celle qui se trouvait au niveau de son cœur. Un stigmate boursouflé long d'une quinzaine de centimètre. C'était précisément ce qu'était en train de regarde la divinité sombre au faciès de chauve-souris. Après un long instant d'hésitation. son poitrail gonfla pour mieux laisser s'échapper un sombre grondement. Une aura noir s'échappa de son immense corps velu pour venir se propager dans toute la salle soufflant au passage les quelques maigres éclairages qui tamisaient l'atmosphère. Les lieux baignaient dans une aura nébuleuse aussi rougeoyante qu'obscure. Contre toute logique les yeux écarlates des protagonistes se détachaient dans cette noirceur.

« Soit... Si tel est son destin, il en sera ainsi. Que commencent les rituels de l’Ascension et du Sacrement Noir... »

Et sans prévenir une griffe acérée s'enfonça dans le buste de la faucheuse pourpre qui senti son cœur lui être brutalement arraché.

« Ketsueki Yami... Toi qui à prêté serment devant moi. Rencontre à présent ton dieu...»

Le sang se répandis à flot depuis l'ouverture de sa cage thoracique, remplissant progressivement le petite cuve que formait le renfoncement sur le sol. Le corps de la jeune femme semblait chuter au ralenti tandis que la gargouille portait le cœur empalé par la pointe de sa griffe jusqu'à sa gueule, prête à l'engloutir.

« Pour Jashin... »

Music ♫:

J'écoutais Nosferatu contredire mes propos et me dire de faire preuve d'un plus grands respects à l'égard de mes prédécesseurs. Devais-je lui souligner que j'en connaissais suffisamment pour me faire une idée de ce qu'ils avaient accomplis et que hormis les hauts faits de mon père je ne parvenais pas à éprouver le moindre respect pour les autres ?! Ce n'était même pas la peine d'exprimer ce qui me venait à l'esprit en songeant à Megami.

Je restais impassible en toute circonstances. Pourtant, lorsque la semi gargouille me questionna que ma fidélité à Suna, celle qui m'avait élevé pour servir les intérêts des miens je ne parvenais pas à lui répondre. Je n'hésiterais pas à tuer et cela même des Kazejins s'il le fallait mais Suna demeurait ma première famille et je ne pouvais me résoudre à faire du mal à tout ceux auxquels je tenais et qui vivaient en son sein tout en m'accordant leur confiance. Je pouvais bien mener les miens, jamais je ne nuirais au village caché du sable.

Devais-je vraiment lui dire cela ? Ne pouvait-il pas déjà lire à travers mon sang ? Je cherchais mes mots, certaine d'être châtié une fois ces derniers prononcés mais, contre toute attente, mon père s'avança, me débarrassant de cette réponse à apporter : lui aussi devait savoir. Après tout, lorsque je l'avais retrouvé, j'aurais pu partir sillonner le désert en sa compagnie mais j'avais fait le choix de rester là où était ma place et où j'avais grandi : là où je me sentais chez moi.

Eien se débarrassa de sa tunique, laissant entrevoir le martellement sans nom qu'avait subi son torse mutilé. Il avait dû en acquérir au cours de nombreuses batailles mais je me doutais également que la plupart avait été commise par ma mère. Cette vision raviva la colère dans mon regard. Comment avait-elle osé le mettre dans cet état ?!
De part mon regard médical, je savais dire qu'il n'avait reçu aucun soin pour que ces plaies sûrement autrefois béante, se referment. Les marques étaient boursouflées et rougeoyantes alors que j'aurais pu moi même en restaurer les tissus.

Toutefois je ne bougeais pas de ma place, me contentant d'observer ce qui se jouait devant moi. Le Comte semblait lui aussi déterminé et ses paroles étaient emplies de sens. Le fait qu'il souligne que ses jours puissent être comptés me fit un pincement au cœur. A vrai dire je m'en doutais et cela semblait se confirmer... C'était là le prix de l'immortalité ? Succéder littéralement à son Prédécesseur ? Allait-il donner sa vie pour épargner la mienne en me confiant délibérément les rênes de notre clan ? L'heure n'était ni aux jérémiades ni à l'émotion : si tel était le cas je me jurais de ne pas gâcher ce don bien plus précieux que n'importe lequel d'autre...

L'ambiance se fit pesante un peu plus encore alors que Nosferatu semblait presque ouvrir la porte des limbes par un grognement sourd tandis qu'une nébuleuse ténébreuse nous entourait de son halo pernicieux. Les rituels allaient commencer. Je me tenais fin prête, attendant les instructions que je n'eus pas le loisir d'entendre...

Nosferatu planta l'une de ses griffes dans ma poitrine pour embrocher mon cœur et me l'extirper hors de ma cage thoracique. J'écarquillais les yeux de stupeur tandis que mon hémoglobine s'échappait a grand flot de mon corps. Par réflexe en tant que Ketsueki mais aussi que Shinobi médecin je parvenais à user de mon chakra pour guider mon sang tant bien que mal comme une pompe remplaçant celle que l'on venait de m'arracher. Pourtant je commençais à m'effondrer, la douleur était incommensurable, j'aurais pu crier mais je n'en eu guère le temps : tout fut fulgurant. J'entendais à peine la voix de la chiroptère pendant que mes jambes se dérobaient sous moi, me faisant tomber au pied de l'imposante semi gargouille.

Je baignais littéralement dans mon sang, et malgré la souffrance et mes forces qui m'abandonnaient : je souriais. Le fléau de la maladie m'avait quitté et je ne serais sans doute plus jamais la même...

Music:

Lentement... Avec une infinie lenteur... Comme si le temps s'étirait progressivement au fil des secondes... Le cœur de Ketsueki Yami s'engouffrait dans la gueule béante de l'antique démon alors que les ténèbres servaient de linceul à son corps pâles dont le visage affichait un sourire profondément belliqueux. L'instant fatidique était finalement arrivé. Par de-là l'histoire, seule une poignée d'individu avait put accéder au Sacrement Noir. La protégée de Suna était l'une d'entre-elle. L'air et l'espace commencèrent à se tordre. Plus rien ne laissait présumer qu'ils étaient encore dans le temple, voir même qu'ils se trouvaient encore dans ce monde. Au milieu de cette cohorte obscure planaient les complaintes d'innombrables âmes déchues offertes aux Dieu Sombre depuis les confins des âges. Il n'y avait ni haut ni bas, ni commencement ni fin seulement ce tourbillon dantesque dans lequel semblait converger toute la souffrance du monde. Ils étaient innombrables, des faciès désaxés brutalement arraché à la vie. Flux affreux de la désolation, leur corps putréfiés et entrelacés formaient une masse pernicieuse continuellement attirée par le fond.

Ils étaient légion de bras décharnés tendus comme des appels à la délériction qui, dans un ultime élan de haine, tentait de saisir leurs bourreaux pour les attirer avec eu dans les profondeurs. Hors, il n'y avait en bas aucune limbe, aucun enfer, aucun espoir d'absolution ; mais uniquement Jashin. Il était le point final, là où s'achevait toute existence. Passé ce cap il n'y avait plus d'après. Et les Ketsueki se trouvaient au milieu de tout ce chaos insondable. Immortels, ils transcendaient les âges mu par une même passion. Car tous ensemble ils ne formaient qu'un et la nouvelle élue ne dérogerait par à la règle. Tout autour les morts continuaient de danser, arrachant parfois des cris déchirants tandis que la Noirceur même chantonnait en définissant le tempo de la marche à suivre.

« Jashin... Ô grand seigneur noir accepte cette vie qui t'es offertes. Qu'elle soit tienne à jamais et pour toujours. Que son sang serve à verser celui des autres. Elle est ta volonté et tu es la sienne...  »

Malgré ce typhon de ténèbres dans lesquelles ils étaient happés un élément venait se détacher de tout le reste, si l'on faisait abstraction des yeux ardents des différents protagonistes : Le sang... Quand il était l'origine. Jashin lui était la finalité. Et celui de la jeune femme, déversée par sa plaie béante ne tarda pas à être aspiré pour se mêler au déluge d'âmes errantes. Ainsi l'espace d'une fraction de seconde les deux mondes se retrouvèrent lié. Il n'en avait pas fallut davantage. Le rituel de l’Ascension venait d'être effectué. Le cauchemar pouvait donc continuer.

Ici, au milieu de ce chant infernal Nosferatu n'était plus qu'un amas sombres sans forme définie. Pourtant une lueur apparut à ses pieds et juste au-dessus du cadavre de la Ketsueki. Ce dernier se redressa de lui-même faisant fit de son état. L'univers commença de nouveau à se tordre. Le flux se perdit et les morts cessèrent de descendre. Tous étaient là, observant avec étonnement le Sacrement. Un son grave se mit alors à résonner secouant les fondements même de l’existence qui se contractait et se rétractait à interval régulier

« Un cœur unique battant pour tous... »

Telle était le secret de ce don d'immortalité propre au Peuple Noir. Le Cœur des Ténèbres qui n'était autre que celui de Jashin devait être accueillit par le conte en devenir en remplacement du sien. Celui-ci ne cesserait alors jamais de fonctionner.

« Le sang est l'argent de l'âme... Il est le prix de l'existence passé et avenir... »

A cette image les vies de ses précédents porteurs continuaient d'imprégner le cœur. Ils étaient là, tous les trois. Ces silhouettes écarlates entourant la sainte relique. Eien en faisait parti. Dans un geste commun elles enfoncèrent le cœur dans la poitrine de la Ketsueki. La lueur s'éclipsa. Les morts cessèrent de s'agiter et de se plaindre. L’éther se stabilisa. Puis soudainement, tout fut brutalement aspiré en elle. Yami devint le réceptacle de ces millions d'âmes en souffrances, de ces trois prédécesseurs élus, mais aussi est surtout du dieu Jashin.

« Nous sommes ses apôtres. Les exécutants du châtiment divin sur terre... »

La promesse d'un éternel carnage était maintenue...

Music ♫:

« Un cœur unique battant pour tous... » 

A ces mots, j'ouvrais mon regard impérial sur le monde tout en esquissant un sourire belliqueux. J'observais la plaie béante de ma poitrine, immonde et incandescente... A peine refermée, je parvenais presque à voir le cœur du Seigneur Noir à travers. Il avait traversé les âges et avait été confié à tous ceux de la haute lignée des Comtes. Hormis Megami, cette imposteur qui s'était auto-proclamé ce titre.

Mes doigts se posaient sur l'hémoglobine qui en suintait pour la porter à ma langue. Son arôme était autrement plus imposant qu'autrefois et dénué de toute trace de la corruption relatif à notre maladie clanique. Un sourire de béatitude se dessina sur mon visage suite à ce constat. J'usais de mon chakra médical pour finir ensuite la cicatrisation de cette blessure porteuse en signification. Une nouvelle cicatrice trônait sur mon corps, symbole de mon ascension.

Je ressentais la colère, la tourmente et la souffrance de toutes les milliers de vie qu'avait prise les porteurs de la sainte relique depuis la nuit des temps. Je percevais la présence de mes aïeux ayant eux même arborés ce trophée ainsi que celle même de notre père à tous, nous les Ketsueki.

La vision d'enfer qui nous entourait s'estompait peu à peu bien que je n'y prêtais guère la moindre attention. Ils étaient morts pour nous servir, leur sang avait contribué à repaître Jashin et lui octroyer la puissance dont il avait besoin afin de nous en faire bénéficier. Ainsi, plus les cadavres s'amoncelaient, plus notre puissance était grandissante...
Le sang appelait le sang et son écoulement était indicible, jamais son flot ne devrait s'arrêter. Nous vivions pour le servir et pérenniser notre nom.

Nous nous retrouvions de nouveau dans cette salle peu lumineuse et encerclée par la nébuleuse ténébreuse, et je vis Eien s'adosser à l'une des colonnes alors qu'il se trouvait à la place que je détenais il y avait encore quelques minutes : la poitrine vidée de l'essence même qui permettait la vie. Allait-il mourir pour autant ? Je ne le savais pas et n'en avais cure.
Il avait été destitué de sa mission et je reprenais le flambeau. Il avait bien servi Jashin durant ses années de servitude et devait désormais tirer sa révérence, lui qui venait de perdre sa glorification que j'avais à mon tour subtilisé.

Mon attention se déposa donc sur Nosferatu, la forme la plus respectable présente en cette pièce.

« Le Seigneur Noir à soif. Il sera comblé. »

Mon regard noir mauvais et mon sourire pernicieux aurait presque pu laisser sous entendre que la chiroptère allait retourner voir son créateur et pourtant, je détournais les talons, ma faux en main, pour accomplir ce pourquoi j'étais née...

Je quittais cet endroit, vestige d'un prestige passé pour m'en aller dresser le mien. Les regrets d'hier ne seraient plus ceux de demain. Un cœur unique battant pour tous... J'endossais cette responsabilité avec honneur et noblesse.

Mes veines n'avaient jamais été aussi galvanisées par la puissance qui se dégageait de cette hémoglobine pulsant à travers ce cœur éternel. La faiblesse et la maladie n'existait plus. Yami n'était plus. La Comtesse Écarlate prenait sa place, se jurant de contenter son maître et de guider les siens...

Yami s'en alla, un sourire pernicieux suspendu aux lèvres. Le bruit de ses pas devint un lointain écho, puis un profond murmure avant de disparaître complètement. Elle était venue en nourrissant de nombreux espoirs, elle repartait à présent dans demander son reste, laissant son géniteur au plus mal. Son teint était livide. Un trou béant se trouvait dans sa poitrine. Le sang coulait à flot le long de son torse. Le comte déchu semblait prêt à rejoindre son dieu. Nosferatu pencha son immense corps velu pour se retrouver à la hauteur de son ancien élève.

« Non... Cela ne te ressemble pas d'agir ainsi. Tu avais prévu tout cela n'est-ce pas ? Quels sont tes obscures desseins Eien ? »

Le concerné respirait avec difficulté. Il était déjà miraculeux de constater qu'il vivait encore en étant dépossédé de son coeur. Cependant cet organe censé filtré la vie n'était pas essentiel pour le maître Ketsueki qu'il était. Son sang continuait de couler à travers son corps sans qu'il n'y ait d’hémorragie. Même pour un enfant du peuple noir une telle capacité relevait du prodige.

Lentement, en prenant appuie sur l'une des nombreuses colonnes qui ornaient la salle du rituel, Eien parvint à se redresser. Sa main se posa au niveau de la chair de sa plaie qu'il tira afin de la refermer. Cette fois-ci il ne put réprimer un gémissement de douleur alors que des flammes naissaient dans la paume de sa main. La blessure fut instantanément cautérisée.

Eien se laissa ensuite choir contre la colonne, haletant. Son visage livide et les perles de sueurs coulant le long de son visage laissait penser qu'il allait perdre conscience à tout instant.

Mais il n'en fut rien...

Au lieu de cela le Ketsueki étira un sourire noir qu'il présenta à son ancien maître en guise de réponse.

Malgré son état déplorable ses yeux écarlates luisaient d'une intensité nouvelle.