Le temps défilait et je n'étais plus la même. Tout semblait si différent. Il me semblait qu'un monde me séparait des événements de Yuki à aujourd'hui. La confusion me torturait l'esprit, mais étonnement, il n'y avait aucune question. Toutes les réponses m'avaient été apportées au pied de cette montagne couverte de neige. Quelque part cela faisait un poids de moins à porter. A présent il ne restait que la vérité sur cette tragédie familial. Aujourd'hui, je n'avais plus personne. Il n'était plus là. Je les avais tous perdu, et mon enfance me manquai.

Le Noir... Il y avait tant d'obscurité dans mon appartement. Je vivais depuis des semaines telle une bête recluse dans les ténèbres d'une grotte avec pour seule compagnie ma couleuvre et mes scorpions. J'avais parfois l'impression de perdre la raison. Les visites fréquentes de mes proches s'étaient présentés à moi comme une bouffée d'oxygène qui n'avait malheureusement réussi à atténuer mon mal être que l'espace d'un instant. Quand il repartait, ils me laissaient seule au milieu de cet immense espace et j'appuyai de nouveau sur l'interrupteur afin de rabattre les volets, laissant ainsi le Noir m'englober.

Mes nuits étaient interminable. Je ne dormais pratiquement plus, ou tout du moins n'en avais-je plus l'impression. J'avais sans doute lu une centaine de livre en un mois. Ces derniers s'orientaient dans tous les domaines. Dans le fond leur contenu m'importait peu, tout ce que je désirai étant de m'occuper l'esprit. Cependant, depuis peu, ce dernier était accaparé par une présence. Une étrange sensation de familiarité. Il y avait quelque chose quelque part. Parfois il m'arrivait de regarder toujours dans une même direction, sans comprendre pourquoi. Au bout de deux jours cela vira littéralement à l'obsession tant et si bien que je finis par sortir une fois la nuit tomber pour suivre mes instincts. Ceux-ci me guidèrent jusqu'aux quartiers commerçants qui, à cette heure-ci, étaient particulièrement animés. Le marché battait de bon train. Tous profitaient des quelques rares accalmies climatique de l’autonome pour se changer les idées. Moi je n'avais pas la tête à cela.

Hors, quel ne fut pas ma surprise lorsque j'arrivai devant l'appartement que j'avais offert à Shinji. Je savais qu'il l'avait légué à Yami en héritage et je savais aussi ce que cela signifiait, qui est-ce que j'allais retrouver dans un instant. Je pouvais dors et déjà ressentir sa présence. Perdu dans mon état, je n'avais que brièvement pensé à lui, préférant me concentrer sur mes propres tourments alors que tous les malheurs qu'il vivait étaient entièrement de ma faute.

Je serrai les points, quelque peu nerveuse, soudainement éprise de honte et de remord, mais malgré cela je me décidai à entrer dans le bâtiment. Montant à l'étage j'arrivai devant sa porte comme un fantôme. Je m'apprêtai à lever le poing pour frapper puis me résignai au dernier moment. Il savait que j'étais là. Il se tenait juste derrière la porte.

-Je... je voudrais vous parler.... Puis-je entrer ?

Le ton de ma voix était à peine audible, je me demandai même s'il m'avait entendu avant que la porte ne commence à s'ouvrir. Ce qu'il pu voir, c'était une Saibogu maigrichonne, à la mine dépité et maladive, son unique œil valide était cerclé une longue cerne. Le tout repliée sur elle-même craignant presque de monopoliser le peu d'espace que son corps frêle occupait. Non, je n'étais pas à mon avantage, voir plus faible que jamais. Ogami quand à lui semblait en meilleur forme, mais était-ce seulement en apparence?

-Je crois que nous avons beaucoup de chose à nous dire, navrée de ne pas être venue plus tôt...

Il restait toujours plus humain que moi, autant dans le corps que dans l'âme, mais pas ma faute il devrait renoncer à tout un pan de sa vie. Quels tourments ? Seraient-ils à l'image des miens ? Ou bien plus sombre car sa nouvelle existence lui avait été offerte par le démon Chura...

Musique:

Que pouvais-je dire de ces derniers jours ? Ils avaient été meilleurs, meilleurs que les précédents. Je me souvenais comme si c'était hier d'une soirée bien mouvementée. Lors d'une nuit, la douleur m'avait prise subitement pour me tordre de douleur. J'avais alors rejoint la salle-de-bain pour tenter de trouver un calmant, j'étais parvenu à me traîner au sol jusqu'à la pièce pour finalement poser le haut de mon corps sur le lavabo. C'était à ce moment-là que j'avais perdu connaissance, le dernier son que j'avais entendu était un bruit plutôt strident et donc agressif. À mon réveil, j'avais pu voir avec stupéfaction des traces de griffes sur mon lavabo. Je n'avais plus l'once du douleur mais il y avait ces traces profondément ancrées dans le mobilier. J'avais essayé de me leurrer, je pensais alors à mon inconscient. Je m'étais peut-être débrouillé dans la nuit pour simuler cela, j'avais quelques remords à cause de Yuki no Kuni. Je m'en étais pris à mes confrères, c'était impardonnable.. Je pensais donc cela mais finalement la vérité avait été bien plus dure. La nuit suivante, je m'étais retrouvé dans une ruelle torse-nu.

La ruelle était dévastée, les murs étaient marqués par des griffes acérées et les poubelles étaient renversées. J'avais eu l'impression qu'une bagarre avait eu lieu. Mon propre sang m'avait réveillé, je m'étais défoulé et à première vue je n'avais blessé personne mais encore rien n'était sûr. Je m'étais alors rappelé de la première fois, pendant un bref instant une image m'était revenue. Mes yeux s'étaient teintés d'une couleur dorée avant que je ne perde le contrôle. Je ne pouvais le nier maintenant, une partie du démon était encore en moi et elle essayait de prendre le contrôle. Quelque chose de néfaste pouvait me contrôler et faire du mal à mon entourage, je ne pouvais pas l'accepter.

J'avais beau ne pas pouvoir l'accepter, je n'y pouvais malheureusement rien. Je passais alors des nuits entières à m'empêcher de dormir pour ne pas sombrer, je ne voulais pas laisser une seule seconde à cette chose pour prendre possession de moi. Mais c'était bien trop dur, je me sentais fatigué et pourtant ce n'était presque pas visible sur mon corps et mon visage. Je n'y comprenais rien, c'était bien au-delà de ma compréhension. La cause de ceci ? Mon périple à Yuki no Kuni, j'avais été infecté à cause de ce voyage. Je ne regrettais pas d'avoir accompli mon devoir, de m'être dirigé en ces terres enneigées mais je regrettais d'avoir succombé à la tentation de Chura. En quelque sorte j'étais responsable et indirectement, Saibogu Oniri l'était aussi. C'était aussi pour elle que j'avais accepté l'invitation du comte Hélios. Je connaissais pertinemment la relation entre ma sœur et elle, c'était quelque chose que je ne pouvais pas ignorer.

Seulement, je n'osais pas. Je n'osais pas en parler, j'en avais parlé à personne, je le voulais pas. C'était bien trop dangereux, je pouvais perdre mes fonctions, être destitué et même examiné. Et à côté de ça je pouvais blesser des personnes, j'avais déjà détruit des meubles, des biens publics alors pourquoi pas m'attaquer à des personnes ? Je n'avais qu'une seule solution : Saibogu Oniri, elle seule avait des réponses à mes questions. Au fond de moi, je lui en voulais même si cela pouvait paraître puéril. Je vivais cela dit un vrai calvaire, je ne pensais pas pouvoir tenir un mois de plus dans ces conditions.

Un soir alors que j'étais recroquevillé sur moi même à lutter contre le sommeil, un de mes sens s'éveilla, me prévenant de la venue d'une personne. Je me dirigeai alors vers la porte et sans même savoir pourquoi, je savais qui était derrière. C'était Oniri, j'en étais sûr. J'y croyais à peine, je croisai les bras en posant mes yeux au sol. J'entendis alors quelques mots de sa part, elle souhaitait parler et entrer. Elle me vouvoyait même, je trouvais ça étrange. Nous avions déjà été amené à être côte à côte en mission, elle était bien plus formelle qu'autrefois. L'inventrice avait peut-être changé, comme nous tous après Yuki no Kuni.

Je décidai alors d'ouvrir la porte pour finalement apercevoir la damoiselle. Je la regardai de haut en bas d'un regard accusateur. Je mis quelques secondes à réaliser son état, mes yeux s'écarquillèrent légèrement malgré mon expression très sérieuse. Elle était bien plus maigre, son corps semblait pouvoir s'envoler avec un coup de vent. La conseillère n'avait pas l'air d'avoir des forces, elle était elle aussi touchée par « cette maladie » ?

Je m'écartai légèrement du passage pour la laisser pénétrer dans mon appartement. Je fermai la porte derrière elle pour m'adosser à celle-ci.

« Je crois aussi que nous avons beaucoup de choses à nous dire et je suis tout autant navré de ne pas t'avoir vu plus tôt. J'ai besoin de réponses, vraiment-.. »

Je jetai un regard sur mon poing droit avant de le serrer doucement.

« Je ne peux me contrôler, je me retrouve dehors dans la rue en ayant tout dévasté sur mon passage. J'ai détruit une partie de ma salle-de-bain.. Il faut que tu me soignes et vite. »

Je l'avais tutoyé comme je l'avais déjà fait, j'avais peut-être un peu trop parlé de moi même. Avec une once de compassion, je repris la parole rapidement.

« Apparemment, tu as aussi besoin de réponses vu ton état.. Que pouvons-nous faire ? Cela ne peut pas continuer. »

J'entrai dans son appartement comme il m'invitait à le faire. Ce dernier m'était assez familier. L'ironie avait voulut que j'ai jadis offert ce dernier à Shinji afin qu'il puisse commencer une nouvelle vie. Au lieu de cela elle s'était achevée prématurément et Yami en avait hérité. J'imaginai que la Ketsueki l'avait ensuite offert à son petit frère de cœur. Elle m'avait beaucoup parlé de lui, malheureusement en défaut de point commun, nous n'avions eu l'occasion de partager qu'une simple mission ensemble. Enfin tout ceci avant l’Éclipse. Désormais, nous avions quelque chose qui nous liait intimement.

Une fois à l'intérieur, ne sachant pas où me placer, je me contentai de rester debout au milieu du salon, quelque peu prostrée par la fatigue et les mauvais sentiments. Comme je l'eus cru Ogami n'était guère en meilleur état. Il me fit par de ses maux et ces derniers différaient en grande partie des miens. Malgré cela ses mauvaises actions concordaient avec un événement calendaire qui influait également sur ma personne.

-Bien avant Yuki j'ai commencé à étudier mon cas, cherchant par la science, livres et légendes des réponses à mes nombreuses questions. J'en ai trouvé quelques unes. Noa m'a également fournis des informations.

Cela ne faisait que quelques mois pourtant j'avais l'impression que cette histoire remontait à une autre vie. Le jeune homme s'inquiétait également de mon sort. Sa voix se voulait douce et réconfortante. Je comprenais un peu mieux pourquoi Yami était autant attachée à lui. Il y avait en lui quelque chose de rassurant que l'on pourrait retrouver chez un grand frère. Tout du moins de l'idée que j'avais de ce que pourrait être un grand frère. Seule face à lui je levais l'index vers le plafond, mais ce n'était pas lui que je désignai. Le point indiqué était beaucoup plus haut.

-La lune... Rien avoir avec les histoires de loup-garou, mais nous sommes liés à ses différents cycles. Notre corps se nourrit du Chakra naturel présent dans notre monde et en particulier l'énergie des rayons du soleil reflété par la lune. Ainsi, sans être apte à nous contrôler, il peut arriver que nous nous perdions lorsque celle-ci est pleine. Hors c'était le cas il y a quelque jour ce qui pourrait expliquer votre état.

L'information venait de Noa lui-même bien que j'avais pus récolter nombre de savoir au sujet des différentes races d'Akuma peuplant le monde.

-C'est pour cette raison que l’Éclipse était aussi importante. La lune, en se plaçant devant le soleil, s'est mise à dégager un chakra particulier propice au déclenchement des événements survenu à Yuki no Kuni.

Beaucoup de réponse qui entraînait tout autant de remise en question. Seulement au vu de sa description nous n'étions pas touchés par les mêmes maux. Était-ce du à nos origines ? Parce que j'étais censé être faite de lumière et lui de ténèbres ? Ou bien était-ce quelque chose d'autre, de plus complexe ?

-Je ne suis cependant pas touchée de la même façon que vous. Depuis mon retour je me suis mise à développer des capacités sensorielles innées. Ces dernières dépassent de loin le seuil commun. Le problème étant qu'il m'est impossible de les contrôler tant et si bien que mes pouvoirs s'activent sans prévenir. La lumière m'aveugle, le moindre son m'écrase les tympans et une simple piqûre se transforme en torture tant la douleur devient ridiculement atroce.

C'était mon quotidien, un quotidien totalement hors de contrôle. Je lançai un regard égaré autour de moi, quelque peu mal à l'aise de me tenir ici sans savoir que faire. Par politesse je n'osai pas demander ou m'asseoir, même si au fond je ne souhaitai que mettre un terme à cette discussion gênante. J'avais cependant besoin de me racheter auprès de lui. Tout ce qui lui arrivait était entièrement de ma faute, il me fallait donc trouver une solution pour l'aider et j'en avais peut-être une.

-Néanmoins, je pense qu'il est possible de faire quelque chose pour vous. Mon pouvoir me permet en quelques sortes d'influer sur le corps et l'esprit des gens. Je ne maîtrise pas encore assez le concept, mais je pourrais tenter d'alléger votre fardeau par ce biais. Cependant, si vous acceptez de vous plier à cette forme de traitement, je vous prierai d'aller avec moi dans le désert. Je ne tiens pas vraiment à ce que nos véritables natures soient mise en avant au sein du village.

« Notre véritable nature...» Pensais-je.

Cela sonnait si étrangement alors qu'il y a peu nous pensions être parfaitement normaux. Moi je n'étais plus humaine et il me fallait me faire à cette idée inconcevable, mais qu'en était-il d'Ogami ? Son contact avec Chura et l'influence que le démon avait ou gardait sur lui restait un mystère. J'espérai qu'il ne soit pas touché par le même mal que moi jadis et non programmé pour mourir après une certaine période donnée.

-Pourriez-vous commencer par me faire part de vos symptômes ? Êtes vous sujet à des maux particuliers ? Votre état d'esprit a-t-il changé ? Ressentez vous des émotions particulières et injustifiées ? Dites-moi tout. J'ai besoin du plus d'informations possibles.

Je m'adressai à lui avec tant de courtoisie comme si je cherchai à conserver une certaine distance avec lui. Je pensai que c'était la honte qui me faisait agir ainsi. Et vois-ci que je m'improvisai médecin pour soigner un mal que j'étais incapable de gérer...

Musique:

Ma noirceur ne s'était que développée avec ces événements, je n'arrivais pas à la contrôler, tout me dépassait. J'aimais penser avoir le contrôle sur ma vie mais ce n'était plus le cas, cette simple idée me torturait. La femme se tenant devant moi, était-elle ma sauveuse ? Celle qui allait pouvoir faire en sorte d'effacer cette idée ? D'un côté, je l’espérais et d'un autre, au vu de son état plutôt désastreux je ne me faisais pas d'illusion. Je me demandais même comment elle était arrivée jusqu'à mon domicile, sa tenue de corps faisait penser à une femme âgée et usée par le temps ; Dans tous les cas, elle était venue et c'était ce qui m'importait à ce moment-là. J'étais pour ma part toujours adossé à la porte, elle se trouvait être au milieu de la pièce. Nous étions éloignés, la distance de communication était bien grande mais justifiée. Je n'avais pu attendre plus, sans même attendre j'avais posé certaines questions à la Saibogu. Je voulais des réponses, des explications et comme je l'attendais elle avait des choses à me communiquer.

Des réponses, elle en avait obtenue à l'aide d'écrits, de livres et de.. Noa. Juste entendre ce nom provoqua à l'intérieur de moi un sentiment de colère. Ce n'était pas de mon fait, il m'avait traversé le corps mais j'avais en quelque sorte « pardonné » l'homme. En quelques secondes je sentais une chaleur en moi, semblable à celle de la colère. Je baissai la tête légèrement pour masquer celle-ci tout en écoutant la suite.

La lune expliquait notre état, nous étions donc liés à des cycles. La transformation puisait dans ce chakra naturel et pouvait donc nous faire perdre le contrôle. La damoiselle m'apprenait alors que c'était le cas il y avait quelques jours. En effet, comme elle le disait, j'avais une nouvelle fois pu empêcher le démon de prendre possession de moi. C'était étrange, elle me donnait des informations et à chaque fois j'avais de nouvelles questions. Des questions qui allaient amener sur d'autres réponses ? Et d'autres interrogations ? Le temps était pour moi un luxe dont je ne disposais plus depuis quelques semaines. Plus il passait, plus je me sentais partir. Tout ce que j'avais construit était peut-être voué à disparaître et cela me terrifiait au fond de moi. Le village, mon entourage, j'étais pour eux un danger. Si cela aurait été un autre habitant du village et que je l'avais appris, voyant à un danger je l'aurais sûrement éliminé pour qu'il ne s'attaque pas aux villageois. Ironie du sort, c'était moi qui était touché et non une autre personne.

Oniri m'apprenait alors ne pas être touchée de la même façon, elle avait développé des capacités sensorielles qui perturbaient sa vie de tous les jours. C'était donc sûrement la raison de son piteux état, elle ne pouvait rien supporter et de ce fait son corps en pâtissait. Ça me paraissait logique et en même temps affreux, je soupirai à l'entente de ces mots. Nous étions tous deux touchés, d'une façon différente mais il ne s’agissait pas là de dire qui avait le plus mal mais plutôt de trouver une solution à nos problèmes.

Lorsqu'elle me dit avoir une solution, j'écarquillais les yeux en me redressant. Je fis quelques pas en sa direction l'air surpris. Elle pouvait influer grâce au pouvoir, sur le corps et l'esprit d'autrui ; C'était une bonne chose mais elle me disait seulement pouvoir alléger mon fardeau, le réduire à néant était impossible. Je croisai les bras, face à elle en détournant le regard. Je ne me voilais pas la face, je savais pertinemment qu'il était impossible de trouver une solution radicale au fond de moi. Ce traitement devait être effectué en dehors, je comprenais tout à fait. « Notre véritable nature » disait-elle, je n'étais pas d'accord, je n'étais pas un monstre. Je réfutais cette idée-..

«  Tout d'abord, prenons place sur le canapé, j'ai envie de m’asseoir. »

Je me dirigeai vers le canapé à ses côtés pour lui indiquer de prendre place, je ne souhaitai pas la voir tomber de fatigue.

«  Pour répondre à tes questions, comme tu me l'as dit j'ai à nouveau perdu le contrôle il y a quelques jours. La première fois remonte à quelques semaines maintenant, je me suis levé en pleine nuit avec une douleur indescriptible. Je n'arrivais pas à la situer, c'était comme si tout mon corps en pâtissait. J'ai perdu connaissance dans ma salle-de-bain laissant des traces de griffe sur le lavabo. Je croyais à mon inconscient qui me jouait des tours mais le lendemain, je me suis retrouvé en pleine nuit dans une ruelle en ayant tout dévasté sur mon passage. Il m'arrive alors d'être en colère facilement, de vouloir éliminer pour un simple problème les parasites-.. Cela va crescendo, je préfère ne pas imaginer la suite. »

Je laissai tomber mon dos contre le dossier du canapé pour pencher ma tête en arrière pour regarder le plafond.

«  Si tu me dis avoir une solution, je veux bien l'expérimenter. Je sers Suna en tant que Shinobi, si on m'ôte mon travail, ma vie n'aura plus aucun sens. Je pense avoir été vu, je redoute chaque jour une missive, les autorités-.. Ce qui est ironique d'un côté, c'est que je représente cette même autorité et toi aussi. »

Et toi aussi, ce n'était que petit par rapport à sa position. Elle se trouvait être la conseillère de la défense de Suna, une des plus hautes gradés de notre patrie. Mais même en sachant cela, je savais pertinemment qu'elle se trouvait être mon seul espoir.

« Comme tu vas m'aider, je veux aussi faire de même. Je suppose qu'on va être amené à se voir quelques temps et je souhaite que tu me tutoies dorénavant. Quand tu auras tes propres problèmes, n'hésite pas à quérir mon aide. Je peux être ta vue, au besoin, être tes oreilles, au besoin-.. »

Un service pour un service, pour moi c'était quelque chose de logique. Si elle pouvait m'aider, je devais en faire de même avec mes propres moyens. Je ne pouvais résoudre ses tracas mais peut-être les alléger à ma façon ?

«  Une dernière chose, je suis lucide tu sais. » Dis-je en ôtant une partie de mon tee-shirt pour montrer mon torse à celle-ci. « Tu es une Saibogu, je suppose que tu dois t'y connaître en Fuînjutsu. Je veux que tu m'apposes un sceau, un qui me tuera si je perds le contrôle et selon ton bon vouloir. Ne le prends pas mal mais tu dois prendre tes responsabilités suite à Yuki no Kuni. Je ne redoute pas la mort mais je redoute de blesser les miens et tu sais de qui je veux parler. »

Enfin il me demanda de m'installer sur un fauteuil. Je voyais cela comme une petite délivrance, au moins n'étais-je plus au milieu de cette pièce sombre en ne sachant que faire de ma place. Ogami m'expliqua ensuite ce qu'il en retournait. Le pauvre perdait peu à peu le contrôle de sa volonté. J'avais pus ressentir cette haine grandir brutalement en lui à l'annonce du prénom de Noa. Visiblement Chura continuait toujours d'exercer son influence sur lui. Il l'avait changé en jamais et cela était entièrement de ma faute.

J'avais honte, mais en même temps je ne parvenais à regretter ce qui était advenu à tous. Grâce à eux j'étais encore en vie, mais différente. Ma vie se transformait progressivement en lente agonie cauchemardesque pourtant les fondements du désespoir me demeuraient étranger. Je n'étais pas décidée à renoncer, car il y avait ce quelque chose. Cet appel lointain par delà l'univers, le temps et l'espace. Quelque chose qui me poussait à partir, à vouloir rejoindre un tout. Seulement ma vie se trouvait ici au côté de ceux que j'aimais et non vers au loin vers cette horizon aussi lointaine qu'inconnue. Tout du moins tel était ce que j'essayai de me dire.

-Vous n'avez rien à craindre de moi. Vous le savez.. J'ai une dette envers-vous et je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider.

C'était une question de principe. J'étais en quelque sorte l'origine de tous ces maux, c'était donc à moi qu'il incombait de trouver une solution. A nouveau il eut cette histoire de tutoiement. Tout le monde ne demandait que cela ici. Je me rendais à compte à quel point nous nous considérions tous comme une famille, pourtant je n'arrivais à y prendre part. Je n'aurais su dire si cela était du à mon éducation ou à la peur de me lié à autrui, sans doute un peu des deux. Pourtant le cas d'Ogami était différent. Dans un sens assez morbide nous pouvions quelque part considérer faire tous les deux parties de la même famille. Nous avions des origines communes lui et moi.

-J'ai beaucoup de mal avec le tutoiement, ne m'en veuillez pas à ce sujet. Cela finira certainement par me passer avec le temps...

Et du temps nous risquions d'en passer énormément ensemble. Quelque part nos destinés se voyaient à jamais liés entre elles.

-Néanmoins je ne vous demanderai jamais rien en retour. Ce qui vous arrive est entièrement de ma faute. Je ne fais que vous rendre ce qui vous est du. Vous n'avez donc rien à m'offrir en retour. Il en va seulement de mon devoir envers-vous.

Je ne m'attendais cependant pas à ce qu'il me demande une telle chose en levant son T-shirt. Il voulait que j'appose un sceau qui pourrait le tuer à tout instant et selon mon bon vouloir. Même si je comprenais les fondements de son raisonnement j'avais du mal à m'y résoudre.

-En êtes-vous sûr ? Je veux dire... Je n'estime pas mériter le droit de vie ou de mort sur vous. Peut-être en est-il de mon devoir. Peut-être en est-il de ma responsabilité, mais il s'agit de votre vie. Je n'ai pas le droit d'en disposer aussi facilement...

S'il insistait je m'y plierai sans la moindre hésitation car je n'avais pas le droit de lui refuser quoique ce soit. En attendant je me replaçai plus confortablement sur son fauteuil, me tournant face à lui en lui présentant mes paumes levées au plafond.

-Nous pouvons commencer la première étape ici. Posez-vous mains sur les miennes, je vais tenter d'apaiser cette fureur en vous.

Je m'en savais capable. J'étais jadis parvenu à refréner celle du Nara alors que je ne possédai pas la moitié de la puissance d'aujourd'hui. Prenant une légère inspiration, mon unique œil valide prit sa forme démoniaque signe que je mettais en éveil mes facultés. Ma vision était désormais apte à fendre la pénombre des lieux.

-N'imaginez pas cela comme un fardeau, essayez d'imaginer qu'il s'agit d'une entité faisant partie intégrante. Car si telle est le cas alors cela signifiait que vous pouvez la contrôler. Il ne sera jamais possible de l'arracher de votre corps vous devez donc apprendre à la faire votre. C'est vous qui la possédé et non le contraire...

C'était plus facile à dire qu'à faire, mais loin d'être impossible. J'en étais certaine.

Musique:

Il était vrai, Oniri avait une dette envers moi et pourtant je n'aimais pas trop cette situation. En principe, j'appréciais rendre service sans qu'on ne me rende quelque chose en retour. Paradoxalement quand on me donnait quelque chose j'insistais pour rendre la pareille à la personne. Pour l'heure et malheureusement, je ne pouvais me passer de l'aide de la Saibogu. C'était pour moi impossible, elle était ma seule chance d'aller mieux. Je le pensais bien avant qu'elle m'apporte une solution pour alléger mon fardeau, je ne pouvais en parler qu'à elle. Ce secret était bien trop lourd pour moi, si elle n'avait pas été là, si Yuki no Kuni aurait été un désastre-.. J'aurais sûrement décidé de quitter le village pour un moment ou même pour toujours. Seul mon attachement à celui-ci aurait motivé cette décision.

Mon interlocutrice me disait avoir du mal avec le tutoiement, c'était étrange cette sensation que j'avais face à elle. Je l'avais connu il y a plus d'un an après une mission, après une intervention lors d'une réunion. Elle n'était pas la même, son ton, son comportement me semblait différent d'autrefois. Je ne la connaissais pas plus que ça si ce n'est à travers les dires de Yami mais je pouvais affirmer que quelque chose avait changé en elle. J'en étais même curieux. J'esquissai un sourire à Oniri avant de prendre la parole.

«  Pas de problème, fais comme tu le sens. Cela dit, si tu es dérangée de mon tutoiement. Je peux arrêter ça immédiatement.  »

La conseillère ne me demandait rien en retour mais c'était de ma propre initiative que je lui proposais mon aide. C'était en effet dû à ma participation au périple et à mon problème de possession qu'elle était venue me voir. Ma participation était d'ailleurs quelque chose de choisi en y réfléchissant bien, c'était lâche de ma part de dire qu'indirectement mes problèmes étaient liés à la personne qu'est Oniri. C'était ma faiblesse qui avait amené Chura à me posséder, c'était ma faiblesse qui m'avait fait poser un genou à terre contre Noa-..

« Tu sais, je crois que tu vois la chose sous un mauvais angle tout comme moi au début. Je me suis voilé la face en pensant que tu étais indirectement la cause de mes problèmes. C'est entièrement ma faute et non la tienne. J'ai choisi de répondre à Hélios, j'ai choisi d'aider afin que tu puisses être de retour à Suna. J'ai cédé à Chura, chose qui a prouvé ma faiblesse. Ne pense pas à une dette mais plutôt à une aide et j'en ferai de même. »

Pour ce qui était du sceau, c'était quelque chose de réfléchi et de logique pour moi. Je pensais à quelque chose de temporaire bien sûr mais c'était obligatoire d'en arriver là. Si je perdais le contrôle pour de bon, j'imaginais facilement les dégâts que je pourrais causer autour de moi. Je préférai de loin mourir en tant que Toshiro Ogami et non en tant que disciple de Chura, mon honneur ainsi que toute ma vie était en jeu. Comme son rôle en tant que conseillère était de protéger les habitants de ce village, elle avait seulement une charge en plus, celle de m'éteindre au moment voulu si mes pouvoirs me dépassent. Je n'y voyais aucun problème, réciproquement je n'aurais pas hésiter à faire de même pour elle.

«  Oui.  »

Dis-je simplement, j'en étais sûr. La première étape pouvait commencer ici ? J'écarquillais les yeux en regardant autour de nous, si cela dégénérait je n'imaginais pas l'état de l'appartement après coup. Je devais faire confiance en son traitement, elle me présentait ses deux mains face à moi. Délicatement je posai les miennes sur les siennes avec un peu d’appréhension. Son œil se changea alors, prenant une couleur doré comme j'avais déjà pu voir auparavant. Mon cœur commençait à battre bien plus rapidement, juste le fait d'avoir vu cette couleur, cette pupille accélérait mon rythme cardiaque. Cette sensation, c'était la même que lorsque je perdais le contrôle. Je plantais mes yeux dans ceux d'Oniri même si un seul restait. Ils étaient sûrement dorés eux aussi, la couleur changeait seulement après que mon corps soit en ébullition.

Je me devais aussi d'écouter les paroles de Oniri, cette chose ne devait pas être un fardeau ? Je ne le concevais pas autrement. Je vivais bien avant que cette chose soit en mon corps, depuis je n'arrivais plus à vivre correctement. Ma main commençait à se teinter d'une couleur sombre, cela recouvrit peu à peu ma peau. C'était la première fois que je pouvais voir ça, je n'en avais jamais eu l'occasion auparavant. Ma perte de contrôle était bien plus subite, mon apparence avait changé et je pouvais le voir de mes propres yeux. Néanmoins, je ne me sentais pas capable d'aller plus loin. J'ôtai mes mains de celles d'Oniri en soupirant.

Cette matière me rappelait des souvenirs et pas les meilleurs.

Ogami m'avait exposé une autre façon de voir les choses. Moi qui me voyait comme pécheresse de tout ceci, lui considérait que ce qui était arrivé n'était qu'une conséquence de ses choix. Quelque part tous étaient venu m'aider de leur plein gré, ils étaient tous prêt à encourir le risques et à encaisser les maux de l'adversité. Si j'avais été à leur place, je me serais dresser face à l'inconnue sans la moindre hésitation et ce sans rien espérer en retour. Je n'aurais jamais souhaitée que l'un de mes proches cherches à me dédommager suite à l'un de mes choix. Seulement ce n'était pas aussi simple de l'accepté lorsque l'on se trouvait de l'autre côté.

Kioshi avait perdu un bras, Yami écopée d'une lourde cicatrice, mais le pis de tout étant le jeune Toshiro qui avait perdu quasiment toute son humanité. Lui-même ne savait plus ce qu'il était. Il ne voulait pas que je vois cela comme une dette. Il voulait simplement que nous nous entraidions non pas par redevance, mais parce qu'il devait en être ainsi. Que cela devait être naturel pour nous, d'autant plus qu'à présent nous étions de la même race... Levant les yeux vers lui j'y vis ce regard qui me semblait monstrueusement familier. Il y avait tant de sentiments à l'intérieur. Je les comprenais et sans que je ne sache pourquoi sans présence m'était devenue rassurante. C'était bête à croire, mais j'avais l'impression de me retrouver en face d'un membre de ma famille, comme si nous partagions le même sang.

Quand nos mains se retrouvèrent en contact je sentis la même chose qu'avec Natsuki, mais cette fois-ci avec bien plus d'intensité. J'inspirai et expirai lentement, mesurant mon rythme cardiaque pour mieux appréhender ce déluge de sensation qui m'assaillait. Il s'agissait encore de beaucoup d'émotion. Aucune ne provenait de moi. Une rage grandissante commença alors à se profiler dans mon esprit. Je pouvais la sentir, la clameur ardente de Chura qui ne demandait qu'à s'éveiller. Mes mains tremblaient, celles d'Ogami également. Sa peau commençait à noircir alors que quelque taches apparaissaient également sur moi. Sa corruption étaient en train de m'atteindre. Le jeune homme s'écarta brusquement. Notre lien psychique subit une rupture nette.

Je me rendais compte que j'avais totalement cessée de respirer durant la manœuvre. Encore crispée, je relâchai l'oxygènes dans mes poumons en espérant parvenir à me décrisper. Je levais mon bras devant moi faisant pivoter ma paume de sorte à pouvoir examiner sous toutes les coutures ces tâches obscures qui étaient apparues. Elles commencèrent à s'estomper petit à petit et je parvins à reprendre possession de moi.

-Je pense que nous devrions poursuivre dans le désert. Néanmoins j'ai espoir qu'il nous soit possible d'arriver à quelque chose. Si votre pouvoir est capable d'influencer ma nature alors l'inverse peut-être possible. Je suis la pars de lumière de Yorn et vous celle de ténèbres. Peut-être pourrions-nous trouver notre salut dans une certaine complémentarité ?

La réalité étant que nous appartenions tous les deux à un tout. Cet antique démon ayant foulée le désert il y avait de cela plus d'un millénaire. Nous demeurions des êtres incomplets, Ogami plus que tout. Je compris qu'il nous faudrait apprendre à découvrir notre nature exacte avant d'espérer pouvoir avancer.

-La première étape va consister à apprendre à nous contrôler. Il n'existe pas d'autre solution. Ceci fait partie de nous, il nous est impossible de nous en débarrasser et chercher à le réprimer ne ferait que la retenir un temps avant que cela n'éclate de plus bel.

Je me relevais du fauteuil. Nous étions plongées dans cette semi obscurités et nos yeux démoniaques s'accordaient ensembles. Des pupilles d'ocres luisants au milieu des ténèbres..Alors qu'il était toujours assis je lui tendais une main bienveillante, l'invitant ainsi à me suivre.

-Sortons... La lune s'éloigne de plus en plus. Elle ne pourra rien pour nous ce soir. Nous aurons tout à loisir de profiter du désert pour nous entraider. Je vous promet que nous trouverons une solution...

Je n'étais pas certaine du quand ni du comment, mais il ne fallait pas perdre espoir. Il était étonnant pour moi de constater que la présence d'une personne partageant ma peine parvenait à me faire retrouver mon courage et ma détermination. Aussi sans plus attendre, en continuant de le tenir par la main comme s'il était la seule chose à laquelle je pouvais me raccrocher, nous sortîmes pour prendre la direction de la voie illusionnée. Après plus d'un quart d'heure nous arrivâmes finalement au beau milieu du désert. Mes pieds nus foulaient le sable frais tandis que je continuais d'entraîner Ogami au loin comme si je cherchais à fuir le village, ce qui était effectivement le cas. Nous nous installâmes alors dans un creux entre les dunes là où nul ne pouvait nous voir. J'étais calme, le monde autour de nous l'était également. Ici, il n'y avait plus les lumières des habitations ni des torches disséminées le long de la grande muraille, seul le firmament voluptueux s'offrait à nous. Nos regards se croisaient à nouveau, si peu humain, si sauvage. Je lui tenais toujours fermement la main au point de l'emprisonner.

-Allons-y...

L'énergie Senin afflua entre nos deux corps. J'étais parvenu à l'influencer, comme il en fit de même pour-moi. Là au milieu du désert, deux explosions retentirent. Deux démons venaient de renaître.

J'avais ôté mes mains de celle de ma partenaire, c'était quelque chose que je ne voulais pas revivre. La simple vue de cette matière noire me terrifiait. Comme si c'était l'essence de mon âme, cette chose obscure ne couvrait pas ma peau, elle la remplaçait. À terme je connaissais les dégâts que pouvaient causer la transformation. J'y pensais de temps en temps, des visions me revenaient. Si je laissais cette entité prendre possession de moi, ma demeure ne serait plus et je risquerai de causer des dommages à Suna. Je ne pouvais me permettre d'en faire plus, on m'avait sûrement remarqué, je n'étais pas passé inaperçu. Et puis je risquais de m'en prendre à Oniri, elle qui n'était pas au meilleur de sa forme, je ne pensais pas qu'elle puisse encaisser des dommages. Je me devais aussi de penser à elle.

Après avoir repris mes esprits, j'avais jeté un regard sur mon interlocutrice. Je n'entendais plus rien émanant d'elle, son corps était immobile voir crispé et sa respiration n'était plus. Avec de l'appréhension, j’approchai ma main délicatement d'elle avant de la voire subitement elle aussi reprendre ses esprits. Je fis un soupir de soulagement, je ne souhaitais pas expliquer à un hôpital nos séances expérimentales. Des séances que j'étais prêt à suivre des jours entiers pour pouvoir me soigner, des tests, des médicaments, elle pouvait tout essayer sur moi. Je souhaitais seulement que l'information sur nos particularités ne se propagent pas, je voulais le cacher. La Saibogu s'exprimait finalement pour me parler de poursuivre dans le désert, je ne pouvais qu'être en accord avec ses paroles. Je pensais la même chose, si nous avions à continuer, il fallait se protéger de nous même et par la même occasion, protéger les autres.

Oniri se trouvait être la part de Yorn représentant la lumière et moi l'obscurité. Dans un sens, une obscurité, les ténèbres pouvaient vaincre la lumière et dans un autre la lumière pouvait éclairer l'obscurité. Des opposés mais aussi quelque chose pouvant représenter une complémentarité.

Elle m'expliquait que la première étape consistait à apprendre à nous contrôler, je ne voulais pas le contrôler mais le supprimer. Je ne m'en sentais malheureusement pas capable, bien que ma fierté était touchée. Je fus un peu dépité en entendant que s'en débarrasser était impossible et que le réprimer ne ferait que nous causer du tort. Je posai mes coudes sur mes jambes avant de laisser tomber ma tête sur mes mains. Je fixai le sol, le regard vide. Cette situation me désespérait, j'étais effrayé de continuer. Je sentis alors quelque chose prêt de ma tête, du coin de l’œil j'observai de quoi il en revenait. Elle me tendait la main, elle qui se trouvait être la lumière représentait aussi ma lueur d'espoir. Je lui adressai un sourire avant de détourner le regard un peu gêné, je prenais au sérieux mes promesses et celles des autres.

«  Merci. »

Je lui pris la main pour me laisser entraîner à travers Suna. On mit un peu de temps à sortir du village pour finalement rejoindre notre si beau désert. J'appréciais la nuit même si depuis quelques temps elle m'était fatidique. Je remarquai d'ailleurs que maintenant que Oniri était pieds nus, n'avait-elle pas froid ? Je ne remarquai rien qui me le montrait mais pour être honnête, à sa place j'aurais du mal avec ça. Et puis ça m'étonnait un peu, il ne me semblait l'avoir jamais vu s'approcher du code des Nomades comme les Yamada par exemple.

Après quelques temps, nous avions enfin trouvé un endroit convenable. On ne pouvait pas nous voir et on ne risquait pas d'être dérangé. Je me mis face à elle pour ensuite entendre « Allons-y ».

De ces mots, je vis une aura obscure émaner de mon corps, obstruant ma vision. Celle-ci se projeta dans les airs en créant un bruit assourdissant. Du sable avait été projeté et était encore en suspension dans l'air autour de moi. Je pivotai de droite à gauche en ne comprenant pas trop ce qu'il venait d'arriver. Toute cette aura obscure qui s'était extirpée de mon corps revint finalement à moi pour ne plus laisser aucune trace. Comme je le redoutais, ma peau se recouvrit de la matière noire tant redoutée. Je plaçai mes mains devant moi pour les observer, elles devenaient plus grandes et des griffes acérées étaient maintenant apparues. Ma musculature avait elle aussi muté, j'étais plus grand et plus imposant. Je maîtrisais mes gestes pour le moment. Les yeux toujours rivés sur mes membres qui s'étaient changés, je pris la parole.

« Oniri... »

J'entendis alors cette voix grave et je mis aussitôt mes mains devant ma bouche. Elle me rappelait des mauvais souvenirs, en quelques secondes je revoyais les événements de Yuki no Kuni. Ce n'était pas moi, cette enveloppe aussi ne se trouvait pas être moi aussi.

« Faible, tu es toujours aussi faible.  »

Je me redressai alors, l’expression bien plus neutre. Je regardai maintenant la personne représentant la lumière de Yorn. Auparavant, je devais détruire Noa à l'aide de la puissance de mon maître, Chura. J'avais échoué. En tant que disciple, je me devais maintenant de continuer et donc de déchaîner ce pouvoir accordé afin de détruire tous les opposants.

Les deux détonations retombaient. Mon corps tout entier baignait dans une aura de flammes bleutés tandis que la transformation s'effectuait. La teinte de ma peau vira sur une couleur acier qui reflétait les quelques éclats de lunaire venu d'au-dessus de notre tête. Des griffes se façonnaient sur mes mains alors que de petites cornes venaient d'apparaître en partant depuis mes tempes pour épouser le prolongement de mon crâne. Mes yeux ne furent plus que deux orbites lumineux traduisant toutes l'énergie mystique de la nature qui coulait en moi. Ma langue claqua contre ma mâchoire remplie de crocs. J'inspirai et expirai lentement. Il s'agissait de la première fois que je revêtais cette forme depuis mon retour à Suna, n'ayant pas oser m'y prêter, honteuse de ce que j'étais devenue et espérant feinter la réalité pour la traduire en un simple rêve. Mais mes origines venaient inlassablement à me rattraper comme elles l'avaient toujours fait.

Une fois de plus je devais faire face à mon antithèse. L'Apôtre de Chura qu'était devenu Ogami. Je pouvais aisément lire l'avidité meurtrière dans son regard. Ses grandes ailes se déployaient et se rétractaient nerveusement son dos. Chacun des muscles de son corps saillant semblaient tendu à l'extrême. S'il possédait encore un tant soit peu de contrôle cela n'allait pas tarder à flancher. Moi je me tenais prête à réagir. Laissant mon chakra se véhiculer dans mon environnement, j'usais de mon pouvoir afin d’accroître considérablement mes sens au point d'en développer en sixième. Je devenais alors consciente du monde qui m'entourait. Je pouvais sentir tout ce qui était, que ce soit vivant ou non. Il m'aurait été possible de compter chaque grain de sable dans un périmètre à dix lieues de là, tout comme je pouvais sentir le sang pulser avidement dans les veines du farouche démon. Les yeux grands ouverts la grande majorité de mon attention était concentrée sur lui. Je me tenais prête à agir à tout instant. Je savais qu'il me serait possible de l'éviter, peu importaient sa vitesse ou sa force.

Ce trop plein d'arrogance me coûta car je ne pus présumer que mes propres facultés se retourne contre-moi. L'espace d'un instant j'avais oublié qu'Ogami n'était pas le seul a avoir besoin qu'on le soigne. Cela se traduisit par une légère brise, une simple oscillation dans l'air qui se transforma en sifflement assourdissant dans mon crâne. Mes facultés sensorielles se déchaînaient. Mon Némésis profita de cet instant pour charger. Je le sentis partir, mais ne parvins à réagir a temps. Le coup me frappa de plein fouet si bien que je fus projetée en arrière. Je retombai sur mes genoux, mais dans la fraction de seconde qui suivit son poing s'abattait sur moi. Une immense colonne de sable s'éleva dans la désert sous la violence du choc. J'étais parvenue à éviter ce coup au dernier moment. Le son provoqué fut si violent qu'il m'endommagea les tympans. Ces assauts s'enchaînèrent sans que je n'ai le temps de me remettre de mes émotions. J'esquivai dès lors totalement à l'aveugle, me contentant de m'appuyer de mes dons de perceptions eux-même entravés par la suractivités de mes sens les plus basiques. Je fus frappée à plusieurs reprises aux ventres et aux visages. D'épais filets de sang se mirent à couler du bord de mes lèvres. Je crachai le tout dans le sable frais.

Un sourire carnassier ce dessina sur mon visage malgré les maux qui me tiraillaient. C'était absurde. Je n'osai même pas songer à échouer un seul instant. Ce n'était pas envisageable, je n'avais pas le droit. Je faisais cela pour lui, pour nous, pour notre village. Il me fallait réussir même si cette mesure semblait totalement insensée. A dire vrai je n'étais pas certaine de ce qui allait réellement se passer. Je me contentai simple d'agir à l'instinct. Et celui-ci me disait que pour dresser cette bête il fallait commencer par la faire sortir de sa cage. Je fis un pas en avant me rappelant alors qu'il m'était possible de bloquer les terminaisons nerveuses de sorte à me débarrasser de mes sens transformés en véritable fardeau.

Ainsi perdis-je la vue, l’ouïe, l'odorat et la nociception. Je ne pouvais à présent me reposer que sur mon sixième sens celui-là même qui me rattachait au monde plus que jamais. Ses énergies fluctuaient tout autour de nous comme autant de signaux m'indiquant la marche à suivre. Ne ressentant désormais plus la douleur je retrouvai la pleine possession de mes moyens. Une simple expiration. La bête fondit sur moi et je m'élançai vers elle. Sa frappe balaya le vide et fit trembler la terre sans jamais parvenir à m'atteindre, ayant pivoté latéralement au dernier moments. Dans le même élan l'une de mes griffes de posa sur son épaule. Cela ne dura qu'une seconde, mais ce fut suffisant pour commencer à perturber le flux de chakra Senin présent dans son corps. Si je continuai ainsi en répétant plusieurs fois cette opération le démon perdrait peu à peu en force ce qui permettrait à la conscience d'Ogami de ressurgir dans ce corps possédé.

Musique:

Alors que je me sentais au summum de ma puissance, mon maître m'emmena à l'aide de ses pouvoirs dans mon passé. Je me voyais alors comme spectateur et je m'observais, plus petit devant la tombe de mon père. J'étais encore jeune et seul, ce regard traduisait une faiblesse déjà au plus jeune âge. Chura voulait que je regarde cette scène pour que j'en fasse des conclusions, pour me pousser à devenir plus fort. En tant qu'Apôtre ne devais-je pas seulement exécuter ses volontés ? Il était si bon, qu'en plus de me conférer des pouvoirs, il m'aidait à oublier mes faiblesses passées. La scène que je percevais en noir et blanc se brouilla pour laisser place à une autre. Cette fois-ci, c'était toujours moi, assis sur un lit dans une petite chambre. Je me souvenais de cette chambre, j'y avais logé après m'être fait évincé de mon clan. Ces humains ne m'avaient pas respecté, aujourd'hui j'étais bien au-dessus d'eux. Je pouvais enfin faire régner l'ordre et accomplir les volontés de mon maître. La scène changea à nouveau pour laisser place à mon combat contre le Furyou, puis contre l'homme masqué, puis contre Noa-..

C'était rapide et pourtant intense quand tout à coup, je me retrouvais dans une pièce noire. Quelque chose m'éclaira subitement, c'était une pupille dorée géante, Chura. Je posai un genou à terre pour exprimer mon respect.

«  Voilà ton passé, tu étais faible Ogami. Tu en es conscient n'est-ce pas ? »
«  Oui maître.  »
«  Je t'ai montré ton passé, je ne peux le changer mais ton futur, je le peux. Veux-tu devenir plus fort ? »
« Oui maître. »
«  Ne sois plus humain, tu es au-dessus de ces créatures, utilise ma puissance pour tuer encore et encore. Je te le répète une dernière fois, veux-tu devenir plus fort ?! »
«  Oui maître ! »

L'espace se tordit et mon poing fonça en direction de mon ennemie. À une telle vitesse, que je fus le premier à la toucher et à la faire reculer. Elle était maintenant sur les genoux. Je ressentais à nouveau cette puissance en moi, la présence de Chura me permettait de surpasser les hommes. J'esquissai un sourire tant j'étais submergé de cette aura obscure qui me donnait la possibilité de tout réussir. La première réussite se trouvait devant moi, en remerciement à mon maître, j'allais ôter la tête du corps de la démone. Cette tête sera une offrande à mon maître pour le remercier de son obscurité. Je me devais d'éteindre cette lumière qui ne faisait que déranger. Je ne comptais pas m'arrêter à un coup, je voulais mesurer l'étendue de mes pouvoirs et de ce fait, je voulais amener l'enfer sur terre et le présenter à cette femelle.

Elle avait réussi à éviter mon prochain coup qui avait été propulsé par l'aura obscure. « Tsk. » dis-je en regardant le paysage se déformer suite à cette attaque. Je voulais l'atteindre elle et non pas mouvoir le sable. La lumière allait payer cet affront, je me commençai alors un enchaînement sans précèdent. Je souhaitais la toucher grièvement et j'étais parvenu à atteindre son visage et son torse. Je pouvais voir avec satisfaction, le sang coulant le long de visage. Je laissais un sourire des plus démoniaques se dessiner sur mon visage. Ce n'était que le début, le début d'un combat amusant et destructeur. Une seule personne allait en sortir vainqueur et c'était moi, « l'Apôtre de Chura ». Je m'écartai alors, tournant même le dos à mon adversaire. Je ne pouvais perdre, mon futur était déjà tracé. Cet élan, je l'avais pris pour asséner le coup de grâce. Je laissai alors une quantité faramineuse de chakra de type Raïton se concentrer dans ma paume. Volontairement et grâce à ce nouveau corps, je pouvais faire plus. Je mis la moitié de ma puissance dans cette attaque, voulant même m'évaluer grâce à celle-ci.

La fin, c'était la fin pour elle. Je fondis sur elle, laissant ma main traîner en arrière et créant une traînée dans le sable. Au denier moment, je levai ma main droite au niveau de son corps pour la toucher. À ce même moment et malgré moi, elle pivota pour éviter mon attaque. Mon bras était figé parallèlement au sol. Je tournai alors la tête avec difficulté pour voir que sa main était sur mon épaule. Comment osait-elle ? Mon corps se crispait et des veines ressortaient sur mon visage. Elle venait de déchaîner ma colère.

Soudainement, comme un voile obscur disparut de mes yeux. Mon corps se détendit et je repris possession de lui. J'avais tout vu, j'avais vu ce qu'il s'était passé. J'étais cette personne sans l'être. Je l'avais blessé et je le savais. Je n'osais même pas assumer ces actes et daigner poser à nouveau mes yeux sur sa forme démoniaque. C'était une honte pour moi de ne pas pouvoir me contrôler et pourtant, grâce à son action j'y parvenais. Du moins j'en avais l'impression. Je me sentais d'autant plus lié avec Oniri, peut-être était-ce grâce à son action ?

«  Oniri, arrêtons-nous là. S'il te plaît, rends-moi ma forme humaine. »

Ma voix grave m'impressionnait encore et toujours.

Le démon déchaînait toujours plus ses pouvoirs. Pourtant je pouvais sentir le jeune homme enfermé à l'intérieur ressurgir petit à petit. Je me permis de recouvrer mon ouïe en sachant qu'il s'apprêtait très certainement à me parler. J'attendis très nettement le son de sa voix alors que mes autres sens étaient entièrement obstrués, mais je restai totalement impassible devant cet appel à l'aide. Si j'avais pris tous ces risques pour en arriver là ce n'était pas pour renoncer au moment le plus fatidique. Mes yeux aveugles étaient tournées dans sa direction. Le pauvre était en proie à la peur et au tournant. Il devait cependant apprendre à ne plus craindre cette chose présente en lui sans quoi il ne serait jamais à mesure de l'affronter. Il avait le contrôle mais était tellement troublé par ce sentiment d'incertitude qu'il ne parvenait à le réaliser. Je me tenais toujours droite et fiers à seulement quelques mètres de lui.

-N'abandonnez pas Ogami. Vous avez le contrôle sur lui. A vous d'en profiter pour retrouver la place qui vous reviens de droit dans ce corps. N'ayez crainte. Je suis là et je serais votre gardienne qui tiendra enchaîner cette créature. Faite-moi confiance. N'ayez aucune retenue. Je suis là...

A ces paroles je pris appuie sur le sable pour me donner une rapide impulsion qui me permit d'arriver à sa hauteur. J'en profitai pour plaquer ma main griffue sur son torse et altérer la condition de son chakra Senin. Avec se contact prolongé je pus également en absorber une grande partie ce qui me permit de le soulager de son fardeau, mais ce ne fut pas sans conséquence. En effet la noirceur qui nourrissait sa rage était désormais présente en moi et commençai à imprégner ma chair. Ma peau couleur acier virait progressivement à l'obscure part endroit comme si ma gangrène s'était emparée de moi.

Je fus prise d'un soubresaut en ressentant tout la rage désespérée de Chura. Ce sentiment était le même qu'à Yuki lorsque nous l'avions affronté. Malgré qu'il fut à nouveau scellé dans les profondeurs de la terre à l'autre bout du continent l'influence qu'il avait sur Ogami continuait de perdurer. J'en faisais à mon tour les frais. Et même si aucune voix ne se faisait entendre dans mon esprit je pouvais parfaitement sentir sa présence couler en moi. J'avais horreur à penser que tout compte fait, cette histoire n'était peut-être pas terminée.

Il me fallut prendre sur-moi même et canaliser la plus grande partie de mon chakra Senin dans les parties de mon corps affectée afin de réprimer ce mal. Je l'avais déjà affronté et battu une fois. Je connaissais cette sensation et était la plus à même de la combattre. Je parvins à retrouver le contrôle petit à petit. La nature profonde de mon chakra étant à l'exact antithèse de celle de Chura. Son influence finit par disparaître et je retrouvai le contrôle. C'était particulièrement étrange, j'avais l'impression que je possédai désormais davantage d'emprise sur mes sens qu'avant ce contact. La vue, l'odorat et le touché me revinrent également. J'avisais mon environnement avec une certaine sérénité. Mon regard se posa sur mes griffes que je pliais nerveusement comme pour me confirmer qu'elles m'appartenaient biens.

Je me sentais si tranquille mais en même temps si fatiguée. Le poids du manque de sommeil cumulé depuis les dernières semaines semblait me retomber dessus. Hors ce n'était pas le moment de faiblir. Tremblotante je m'efforçai de rester debout et de garder mon attention rivée sur Ogami. Mon sixième sens n'était plus actif tant et si bien qu'il me fallait désormais me reposer sur les cinq autres.

-N'ayez pas peur Ogami. C'est vous qui le dominé à présent. Tâchez de retrouver forme humaine de votre propre gré. Si vous y parvenez ce sera une première grande victoire.

Et surtout que s'il ne s'y appliquait pas je ne serais plus en mesure de le contenir. L'une de mes cornes tomba en poussière. Je n'étais plus en mesure de tenir ainsi...

Musique:

Elle me le disait, de ne pas abandonner. Sa voix, elle pénétrait mon esprit et arrivait même à de temps en temps, se faire entendre bien plus que celle du démon. Je me devais de l'écouter pour mettre fin à ce calvaire, je ne pouvais accepter de subir à long terme ces choses-là. Oniri me disait alors de lui faire confiance. Suite à ces mots et pendant un court moment, je retournais dans le passé et plus spécialement je me revoyais lors de notre mission. Je lui avais demandé de me faire confiance et elle m'avait répondu mot pour mot « D'accord, je te fais confiance ». Ce n'était pas dans le même contexte, ni même le sujet. Cette fois-ci, c'était elle qui me demandait de lui faire confiance. Ça sonnait comme une piqûre de rappel, montrant clairement que dans le passé j'étais moi même et que je pouvais continuer à être moi même. Ma vie allait être différente mais avec des efforts, de la persévérance, je pouvais changer le destin que me réservait Chura. Ses mots m'avaient permis de me calmer intérieur, c'était déjà ça.

La lumière vint m'éclairer à nouveau. La sensation était étrange, plus qu'étrange même, je me sentais progressivement plus léger et je voyais plus clair. Je n'arrivais pas à trouver une explication rationnelle. Alors que je profitais de cet instant se rapprochant d'un instant de paix, je jetai rapidement un coup d’œil à ma droite. Oniri était à mes côtés mais l'aura obscure qui me quittait rejoignait son corps. Elle aspirait une partie de mon pouvoir ? Ironiquement, depuis son intervention j'appelais ça « mon pouvoir » à la place de « son pouvoir ».

Dans tous les cas, j'étais effrayé à l'idée de partager mon mal avec elle. Je ne voulais pas qu'elle subisse les effets de l'obscurité et en même temps, je n'y pouvais rien. Elle était la seule jusqu'à maintenant à avoir un contrôle plus ou moins certain sur elle, ou bien sur moi. Quelques minutes, secondes peut-être, j'avais du mal à quantifier, elle réussit à ôter l'énergie maligne de son corps. Je soupirai. J'étais concentré sur elle, faisant abstraction du reste et finalement avec son aide je n'avais pas écouté le démon enfoui en moi.

La conseillère avait beau avoir réussi à extirper le tout, son état ne s'était pas pour autant amélioré. Je pouvais même transcrire une fatigue sur son visage, son corps quant à lui tremblait comme jamais. Elle n'allait pas tenir le choc plus longtemps, elle n'allait sûrement pas non plus pouvoir supporter une autre attaque à nouveau. Un énième encouragement vint de la jeune femme, je ne devais pas céder, pas maintenant. En me concentrant, pouvais-je peut-être reprendre la forme humaine. C'était la clef selon moi. Je devais donc faire abstraction de certaines choses et la première se trouvait être la voix de Chura. Suite aux paroles de la démone, il m'ordonnait de reprendre mes forces et de l'éliminer. Cette voix m'impressionnait toujours et pourtant, j'arrivai peu à peu à m'en éloigner. Sa voix grave ne se faisait presque plus entendre quelques minutes plus tard. J'ouvris tout à coup les yeux.

Je regardai mes mains, mes bras, ils laissaient échapper cette aura sombre. Mon corps était redevenu ce qu'il était, j'avais réussi à prendre le dessus et reprendre ma forme. La première lueur d'espoir ? Ça ne représentait bien sûr qu'un petit obstacle franchi et pourtant je trouvais ça encourageant. La joie me prit tout à coup, j'étais content, heureux, plus que ça même. Une et seule larme coula le long de mon visage qui lui, transcrivait ma joie. Ne devant pas oublier que je me trouvais face à une autre personne, je repris mon air sérieux en essuyant d'un coup de main la larme. Je plantai alors mes yeux dans les siens.

«  Je n'ai pas pour habitude d'être si reconnaissant envers une personne et pourtant, je ne peux que te remercier. Grâce à toi, j'ai pu franchir une première étape. Je ne sais que ce n'est qu'un début et pourtant ça m'encourage.  »

J'en étais presque égoïste, à quel prix je venais d'être heureux ? Au prix de l'état de santé d'Oniri-.. Était-ce un si bon marché ? Finalement je n'en étais pas sûr.

«  Tu n'es plus en état de continuer quoi que ce soit, je me trompe ? Si on doit arrêter là, on arrête et je te ramène à Suna. »

Lentement, sous mon regard épuisé je le voyais reprendre sa forme humaine. Je fus prise d'un intense sentiment de soulagement. Il y était finalement parvenu. C'était une première grande victoire. Le souffle court, un genou à terre, je l'observai tandis qu'il arborait se sourire béa. Cette fois-ci je le voyais avec mes propres yeux, l'entendait parler avec mes oreilles. Comme si je suivais ses traces dans l'ombre, je recouvrai progressivement mon humanité. Ma dernière corne se désagrégea tandis que ma peau s'effritait pour laisser place à celle que j'arborai en temps normal. Il en devenait de même pour mes griffes qui se retrouvaient réduites à néants ; transformées en d'infimes particules, comme si elles s'étaient soudainement desséchées. Ces restes ne pouvaient se distinguer avec le sable du désert. Tout redevenait poussière. Bientôt le vent emporterait les immenses traces d'impacts dans le sol qu'avait causé Ogami.

Il ne resterait plus rien pour témoigner de cet échange si ce ne fut la mémoire que nous aurions de cet instant. Il s'agissait d'une première grande victoire. J'avais bon espoir que nous parvenions à corriger ce problème rapidement. Le fait de constater qu'il m'était possible d'aider autrui en dépit de pouvoir m'aider moi-même me conforta. Cela me prouvait que je pouvais apporter quelques choses aux autres, que j'existai.

Voir cette unique larme couler le long de sa joue m’emplis d'émoi. J'étirai un sourire maladroit en sentant l'émotion me submerger. Depuis quand étais-je devenue aussi réceptive aux sentiments d’autrui ? Avant que je n'ai le temps de m'en rendre compte, une perle saline était déjà en train de glisser le long de mon visage. L'émotion et la fatigue pesaient de plus en plus sur-moi et commençaient à réclamer leur du. Mon teint devenait livide. Mes yeux me tiraient et me donnaient l'impression d'être enfoncés dans leurs orbites. Ma prise de risque avait été inconsidérée et tout aurait pu très mal se terminer. La malédiction de Chura aurait tout aussi bien put m'affecter et j'aurai finit exactement dans le même état qu'Ogami. Heureusement il n'en était rien. Au contraire, nous venions de faire un premier pas vers l'avenir.

-Oui, je suis d'accord pour que l'on s'arrête. Nous reprendrons une autre fois. Tu vois ? Qu'est-ce que je te disais ? Ça a marché. Tu as réussi...

Mes dernières forces étaient rassemblés dans ces mots. Après quoi je me sentis chavirer. Ma dernière sensation fut le contact du sable frais sur ma peau avant de perdre connaissance. C'était étrange. Je me sentais si fatiguée et reposée en même temps. C'était la première fois depuis des mois que je parvenais à ressentir une telle quiétude dans la profondeur du sommeil. Pour une fois, j'avais l'impression de réellement dormir, de reprendre des forces. Je n'étais plus habituée à cela. Et mon réveil se fit d'autant plus en douceur. Ma vue était encore brouillée, mais mes facultés sensorielles demeuraient toujours actives. Aussi pus-je ressentir la présence de mon confrère à mes côtés. Il s'agissait cependant de la seule chose que j'étais en mesure de deviner.

-Ou sommes-nous ? Parvins-je à balbutier. L'esprit encore engourdi.

La réponse n'avait pas vraiment d'importance. La question servait simplement à faire savoir que j'avais repris connaissance. Malgré la confusion je me sentais si sereine. Je continuai de me demander si cela n'était pas du à mon contact avec la force sombre de Chura car tout semblait avoir commencé à partir de cet instant.

-Rassures-toi. Je crois que je me ne suis jamais sentie aussi bien. Il semblerait que cet entraînement ai eu du bon pour nous deux.

Je tentai un nouveau sourire, mais j'aurai été incapable de dire s'il était en mesure de l’apercevoir ou non.

Cette seule larme avait peut-être aidée Oniri à s'exprimer aussi de la sorte. Aussi inattendu que ça pouvait l'être, je vis en quelques instants son visage se transformer et arborer une expression plus qu'émotive. Une larme avait aussi coulé le long de son visage, je ne l'observai pas avec étonnement, je la comprenais. Habituellement, cette situation m'aurait été insupportable. Je ne pouvais pas concevoir le fait de laisser glisser une seule larme le long de mon visage, c'était comme perdre de ma fierté et montrer une faiblesse à mon entourage. C'était comme si je m'égarais et pourtant, au final c'était peut-être ma vraie nature. Au fond, je me trouvais être sensible. À y réfléchir et depuis des années, elle se trouvait être la deuxième personne à me voir dans cet état. La première était Yami, je m'étais ouvert à elle si facilement que j'avais même encore du mal à en comprendre la raison. Peu importe la fierté, rien ne comptait plus à cet instant que le chemin d'espoir que nous venions d'emprunter côte à côte. Son aide était bien plus qu'efficace, en plus de ses capacités elle avait su me guider avec les mots justes. Des remerciements étaient de mise et encore, je ne pouvais donner l'équivalence de son mérite.

Mon interlocutrice était d'accord sur le fait de s'arrêter, même si ça sonnait comme une question, ça ne l'était pas vraiment. Son état m'indiquait clairement qu'elle était inapte à continuer, j'étais décidé à la ramener à Suna. Du moins à l'épauler jusqu'à chez elle, je ne savais d'ailleurs pas où elle habitait. Je laissais mes pensées de côté pour observer un court moment les étoiles, la vue du désert était imprenable et le ciel s'offrait à nous si aisément qu'on pouvait s'en sentir maître. Je sentis alors Oniri s'en aller, je détournai le regard des cieux pour la voir allongée sur le sol. Ses yeux étaient déjà fermés, elle était bien loin ?

Je l'avais vu toute à l'heure, son corps montrait une fatigue évidente. Son poids était quant à lui changé depuis notre dernière rencontre. Je m'accroupis doucement pour la prendre dans mes bras et la maintenir contre moi. Je n'apparentais pas cela à un malaise, elle était simplement fatiguée et avait besoin de repos. Je n'eus pas de mal à la ramener premièrement jusqu'à la Voie Illusionnée. Je vis alors les gardes, voyant la conseillère dans cet état ils s'inquiétèrent. Je pus seulement les convaincre en disant que ma partenaire était exténuée et avait besoin de repos. Je réussis à les convaincre et je me dirigeais donc à ma demeure. Je ne savais pas où se trouvait son habitation et peut-être que c'était pas la meilleure chose à faire que de la laisser seule pour ce soir. En y repensant, elle m'avait tutoyé. Sous l'émotion je n'y avais pas fait attention et puis ça me semblait si normal. Elle m'avait averti en me disant qu'il était difficile pour être de faire cet effort et pourtant, ça ne l'avait pas été à mon humble avis. C'était venu naturellement.

Je pénétrai dans mon appartement, j'eus du mal à ouvrir la porte avec elle dans mes bras mais avec un peu d'ingéniosité je réussis à rentrer à bon port et à déposer la Saibogu sur le canapé. Je la recouvris d'une couverture avant de m’asseoir sur ma table basse, dos à elle et face à la baie vitrée. Je pouvais contempler Suna de cette position, c'était fort agréable. Comme un enfant à la veille de son anniversaire, je n'arrivais pas à m'endormir. C'était une si bonne nouvelle, c'était une si grande avancée pour moi... Je ne pouvais fermer l’œil et en même temps, je pouvais garder de temps à autre un œil sur la femme ayant pu rendre mes rêves encore possible.

Les heures passèrent et le soleil se montrait peu à peu. Je décidai de prendre une douche, je l'avais bien mérité après hier soir. Une fois finie, je m'habillai d'un Kimono pour rejoindre mon invitée de ce jour. Elle dormait encore mais le soleil n'allait pas tarder à l'extirper de son sommeil. Je la vis finalement prendre la parole, elle semblait déjà en meilleure forme.

«  C'était chez toi, c'était chez lui, c'était chez elle et c'est finalement chez moi. Tu es à l'appartement Oniri. »

Aussi étrange que ça pouvait être, l'appartement avait été tout d'abord un don de la jeune femme à Akuzu Shinji. Lui l'avait légué à ma sœur qui me l'avait ensuite confié, à ce jour je devais être le propriétaire en ayant le plus profité. Je voulais connaître son état mais je n'eus pas le temps de me prononcer qu'elle me rassura. J'esquissai un sourire, elle avait raison, cet entraînement nous avait été bénéfique.

«  J'en ai bien l'impression, tu peux aller prendre une douche si tu veux, je vais faire nous préparer le petit-déjeuner.  »

Je m'éveillai peu à peu et le monde m'apparaissait de plus en plus clairement. Papillonnant des yeux, j'attendis patiemment que ma vue se stabilise. Mon regard s'attarda dans celui azuré du jeune homme avec qui j'avais l'impression d'avoir créé un nouveau lien. Ce n'était pas de l'amitié, ce n'était pas de l'amour, sans doute une sorte de mixte des deux. Je ne comprenais pas. La seule chose dont j'étais certaine, n'était autre que ce sentiment de familiarité en sa présence. Un peu comme si nous venions subitement d'appartenir à la même famille. Sans conteste cela était du à nos natures d'Akuma intimement liés. Pourtant devais-je là rejeter ? Les mots « instincts » et « conservation » me vinrent aussitôt à l'esprit. Oui. C'était cela. Ce lien n'entrait pas dans le registre émotionnel, il était davantage d'ordre naturel. Comme deux animaux de la même espèce ayant toujours vécu seul et dont les routes se croisaient par hasard après de nombreuses années d'errances. Alors je lui rendis son sourire de la façon la plus naturel qui soit. Suite à quoi je tournais la tête sur le côté, laissant mes yeux glisser dans la salle, reconnaissant dès lors les lieux. Je compris que nous étions de nouveau dans son appartenant ce qui donna sens ses paroles énigmatiques.

-D'accord... Je... Je reviens d'ici dix minutes...

J'acceptai cette proposition d'aller prendre une douche sans trop réfléchir. J'avais surtout besoin de m'isoler un instant, de me retrouver seule avec moi-même afin de faire le point sur ce qui s'était passé plutôt dans la soirée. Je me levai lentement avant d'emboîter le pas d'une démarche fébrile. Mon hôte n'eut pas besoin de m'indiquer la salle de bain, je m'y rendais déjà. Même après avoir refermée la porte derrière moi j'éprouvai toujours cette étrange sensations de flottements. Je m'adossai contre le mur et poussait un long soupir de lassitude avant de passer ma main sur mon visage. De nombreuses et fines mèches de cheveux retombaient devant mes yeux. Au travers je pouvais discerner la paume de ma main.

Je pliai maladroitement les doigts davantage pour m'assurer qu'ils m'appartenaient que pour réapprendre à les utiliser. Mon esprit se perdit dans les événements de la veille tandis que, mécaniquement, j'ôtai un à un mes vêtements puis me glissait dans la douche. La température monta rapidement à mesure que le bruits sourd de l'eau résonnait dans la pièce. La vapeur ne tarda pas à étouffer les parois translucide de la cabine qui devinrent opaque. Je ne me lavais pas vraiment, profitant simplement du contact de l'eau sur ma peau. La chaleur acheva de me ramollir les muscles à la suite de quoi je me sentis plus diminuée qu'à mon entrée. Néanmoins cela eut le mérite de pleinement me réveiller. Je me rhabillai en vitesse après m'être sommairement séchée, préférant ne pas faire davantage attendre Ogami qui avait certainement déjà finit de préparer le petit déjeuné.

Mes soupçons furent confirmés lorsque je vis tout le nécessaire déjà installé sur la table. Et ce ne fut qu'à partir de cet instant que je me réalisai que j'étais devenue aussi rouge qu'une écrevisse, ayant visiblement et inconsciemment trop forcée sur la température de l'eau durant ma douche. Lui de son côté venait de revêtir un Kimono des humbles. Je ne connaissais que très peu le clan Toshiro mais celui-ci semblait grandement attaché aux traditions. Une fois installé en face de lui, je commençai mon petit déjeuné tout en profitant de l'occasion pour ouvrir le dialogue.

-Il semblerait qu'il se soit passé quelque chose lors de notre affrontement, au moment où j'ai tenté d'influer sur le chakra de Chura présent en vous.

Autant revenir dans le vif du sujet, plutôt que d'enfermer ce début de matinée dans un mutisme gênant.

-Ce dernier à cherché à pénétrer dans mon corps pour en prendre possession. Je n'ose imaginer ce qu'il se serait passé s'il y était parvenu. Hors, après être parvenue à prendre le dessus, son chakra ses assimilés au mien si bien qu'il me fut possible, durant l'espace d'un instant, de parvenir à maîtriser mes pouvoirs. Ce phénomène s'est également produit avec vous au même moment. Est-ce qui vous à permis de reprendre le contrôle ?

Nous tenions peut-être là une piste. Si tel était le cas alors cela signifiait que nos malédictions respectives seraient le salut d'autrui. C'était malheureux à dire, mais le fait qu'Ogami ait subit l'influence de Chura allait certainement me permettre de trouver une issue à tout ceci.

-Si on repars sur le principe que Heyle incarne la lien et Chura les ténèbres nous pouvons peut-être partir sur cette notion relative que l'un doit être complémentaire à l'autre. A la base Yorn était une entité unique ayant finit scinder en plusieurs fragments. Ces derniers pourraient être instable. Cela justifierai l'aspect monstrueux de Chura. Si cette théorie se confirme alors nous pourrions tenter de trouver une solution afin d'exploiter nos chakra à chacun pour tenter de guérir l'autre.

Tout était encore très vague. J’avais mandaté Kibo sur ce fait, ainsi qu'un savant fou nommé Van. La découverte des origines de Natsuki pourrait également présenter des pistes intéressantes. Nous étions encore loin d'être à cours de moyen et d'idée ce qui avait quelque chose de réconfortant. Je trouvais par ailleurs avisé du cas du Nara avec mon homologue. Tous deux méritaient très certainement de se rencontrer pour partager le même genre de condition. Akuma certainement, mais pas de la même race ce qui ne devait pas nous empêcher de nous montrer solidaire.

-Je n'ai pas eu l'occasion de vous en parler jusqu'à présent, mais je connais un autre personne possédant un Akuma. Ses propres origines lui sont inconnus, cependant il partage les mêmes difficultés à contrôler la bête en lui. J'aimerais pouvoir vous le présenter. Je pense qu'il pourrait nous être d'une grande aide et que nous aurions également beaucoup à lui apporter.

J'avais appris pendant des années à me débrouiller seul, suite à mon évincement du clan Toshiro. Ce n'était donc pas difficile de préparer un petit-déjeuner correct pour Oniri et moi même, j'étais même devenu un plutôt bon cuisinier. Je crois que peu étaient à avoir eu la chance de goûter à mes plats, en même temps peu étaient venu ici. J'avais beau être entouré depuis quelques mois maintenant, je gardais une certaine distance entre moi et les autres. Si on ajoutait à cela le facteur Akuma et l'entité Chura, on pouvait facilement comprendre le fait que je me sois récemment retiré. Oniri accepta ma proposition, j'entendis alors le son de la douche tandis que je m’attelai à cuisiner des plats typiques. Du riz, des omelettes différentes, il y avait de quoi se nourrir correctement après la soirée qu'on avait passé.

Il nous fallait reprendre des forces, je levai les yeux pour voir la conseillère à la défense me rejoindre. Je finis ma tâche pour ensuite déposer les assiettes sur la table. J'observai quelques instants mon invité de ce jour, sa peau était devenue rosée, elle était peut-être resté un peu trop longtemps sous l'eau chaude. J'esquissai un sourire tandis que je pris place face à elle pour finalement débuter.

Le sujet de Chura revint, logiquement, je pris mon air sérieux tout en écoutant mon interlocutrice. Elle avait remarqué quelque chose d'étrange lors de notre affrontement, tout était si étrange que je ne voyais pas où elle voulait en venir. Je remarquai cela dit qu'elle continuait à me vouvoyer, encore. Cela me fit troquer à nouveau mon air sérieux pour un sourire. Elle était peut-être gênée d'être face à moi ? Avait-elle oublié qu'elle m'avait tutoyé ? Je n'en savais rien pour être honnête, je ne m’attardai cela dit pas sur ce point. Il était loin d'être important comparé au sujet abordé, ce n'était que futilité.

Plus précisément, elle voulait parler du moment où elle avait influé sur mon organisme en insufflant du chakra dans mon corps. Chura avait cherché à prendre possession d'elle, décidément, c'était un vrai fléau. Je ne voulais pas partager cette chose, c'était mon fardeau que je ne souhaitais à personne d'avoir. La bonne nouvelle étant qu'elle avait réussi à contrôler ses pouvoirs un instant et comme elle le soulignait, c'était pareillement pour moi. L'air perplexe, je réfléchis un petit moment à ses paroles. Le prix à payer pour garder le contrôle grâce à Oniri était de risquer que Chura prenne possession d'elle ? C'était un prix trop fort à payer selon moi.

Je fis un simple signe de tête pour acquieser.

Chura était l'obscurité, elle était la lumière ; On y voyait forcément une complémentarité, en effet. La solution résidait donc en nos pouvoirs, comme dit auparavant, nous pouvions nous aider mutuellement. En m'insufflant du chakra, elle pouvait me permettre de garder le contrôle et en y transférant le mieux, ça pouvait être de même. Logiquement, si dans le futur j'arrivai à dominer Chura, je pourrai alors lui transmettre mon énergie sans problème et sans risque qu'elle soit possédée. C'était à ce moment là que je compris que je devais redoubler d'effort pour espérer un jour y parvenir.

«  Je vois ce que tu veux dire, je suis d'accord avec toi. Cela dit, c'est très risqué et on l'a vu hier soir. C'est un risque qu'on ne peut pas prendre sans avoir pris nos précautions, dans le futur on fera plus attention, il faudra prévoir.. »

Je ne savais comment mais dans le cas où elle perdait le contrôle, il fallait trouver une solution adéquate. C'était de même pour moi, en tant que Saibogu peut-être pouvait-elle créer quelque chose pour nous contenir ? Je n'en doutais pas une seule seconde. La conversation suivait son fil et elle me parla d'une autre personne atteinte par un Akuma et elle voulait me le présenter. Je détournai le regard réfléchissant à cette option. Je voulais limiter le nombre de personnes connaissant ce secret, c'était à mon sens très sensible, même pour une personne atteinte des mêmes maux. Je passai une main dans mes cheveux, laissant ma tête tomber en arrière.

«  C'est d'accord. » je me redressai. « Peux-tu assurer que cela restera entre nous ? Est-il quelqu'un de confiance ? »

-En soit le désert est déjà une bonne solution, mais je pourrais tenter de nous fabriquer une salle extérieure au village dont les parois seraient assez résistantes pour supporter d'éventuels débordement. Seulement les matériaux ainsi que les financements nous fonds défauts. Et nous ne pourrons compter sur le soutien du village pour cela.

Plus les choses avançaient et plus cela sonnait comme une évidence. Nous avions besoins d'un lieu où nous entraîner pour maîtriser nos démons respectifs. Le Nara pourrait également en bénéficier. Il s'agirait en quelque sorte d'un lieu caché où les êtres de nôtres espèces pourraient se regrouper afin de s’entraider ; car il fallait se rendre à l'évidence. Les entités que nous incarnions n'avaient pas vraiment leur place en ce bas monde. Ou tout du moins pas encore, ce qui nous obligeait à cacher notre véritable nature. Nul doute que le peuple de Suna n'apprécierait guère d'apprendre que la responsable de la Sécurité, autrement dit la femme chargée de leur protection était en réalité une monstre se complaisant à pourchasser les âmes innocentes au clair de lune.

-Néanmoins... Nous pourrions compter sur Satoshi pour nous accorder les fonds nécessaire. Il... est au courant de ma situation, là comprends... Je pense qu'il accepterai de nous aider...

Le ton de ma voix se faisait plus fébrile à la mention de mon père adoptif. Beaucoup de choses avaient changé depuis les événement de Yuki, dont la relation que j'entretenais avec lui. Sans pour autant aller jusqu'à envisager le mot « famille », nous pouvions dire que nous étions en de bon terme. J'avais peine à le réaliser, mais il semblait se soucier de mon bien être, me posait de nombreuses questions et prenait régulièrement des nouvelles. Nous savions qu'il était trop tard pour rattraper toutes ces années perdues, mais je ne pouvais nier que ce changement avait suscité de nombreux bouleversement en ma personne. Je n'aurais su clairement définir mes sentiments à cet égard, mais je pensais qu'il s'agissait d'une forme de bonheur.

-Concernant cette fameuse personne. C'est un Konohajin et je puis vous assurer qu'il s'agit effectivement de quelqu'un de confiance, mais aussi dans le besoin. Face à cette difficulté commune j'estime que nous devrions nous entraide.

En soit rien ne m'obligeait vraiment à joindre nos efforts avec lui, mais fort était de constater que je commençai à apprécier cet homme et à me soucier de son bien être comme s'il était un « ami ». Cette pensée me fit étirer un imperceptible sourire tandis que je me servais un ultime jus d'orange que je bus modérément. Ce petit déjeuné copieux parvenait à me revigorer. La teinte de ma peau avait reprit une couleur naturelle et mine de rien, cette nuit de sommeil s'était révélée plus que salvatrice étant donné que le nombre d'heures où il m'avait été permit de réellement me reposer ces derniers mois se comptaient sur les doigts de la main.

[color=#A49400]-Je pense qu'il va être temps pour moi de partir. Je vous remercie sincèrement pour votre hospitalité et préfère ne pas en abuser davantage. Nous nous reverrons prochainement. Je vais effectuer quelques recherches de mon côté et m'entretenir avec Satoshi afin de voir ce qu'il lui serait possible de faire pour nous. Néanmoins n'hésitez pas à me rendre visite si l'envie se fait sentir, notamment lorsque la pleine lune approche. Je suis en permanence chez-moi ces derniers temps.

Après m'être brièvement inclinée je le laissai me guider jusqu'à la sortie.

-Bonne journée à vous Ogami-san !

Je ne tardais pas à rejoindre l'extérieur, mais de-là il m'était encore possible de sentir sa présence et je savais que cela était également réciproque. Même éloigné l'un de l'autre nous restions intimement liés et ce malgré nous.