Des scorpions ! Il me fallait des scorpions. C'était mon objectif de la soirée. On pouvait en acheter sur la place des marchés, morts ou vifs, grillés en brochettes ou non. Mais cela ne m'intéressait pas, je préférais les attraper par moi-même. Aussi décidais-je de sortir directement du village afin d'aller les cueillir à même le sable frais du désert sous le ciel chantant de la nuit. Vêtue en civile, une tenue assez légère s'il en était mais tout de même pavée de mes deux holsters attachés autour de mes cuisses, je rejoignais l'extérieur du village au bout de quelques minutes sans problème. De là je défis mes spartiates de sorte à marcher pieds nues dans le sable. Les plus sages penseraient qu'il était complètement stupide de sortir dans le désert dans protection au pied, qui plus cela étant de nuit. Et ils auraient parfaitement raison. Il suffisait qu'un talon se pause au mauvais endroit pour s'assurer d'une piqûre mortel qui ne laisserait pas sans détour. Consciente du danger, mais totalement indifférente à ce dernier, je profitais du doux contact avec le sable sur plusieurs kilomètres. De-là le village était encore visible même s'il n’apparaissait que comme un point noir au milieu des ombres. La lune n'en était qu'au croissant de son cycle de révolution. Je ne pouvais donc profiter de son éclat argenté pour éclairer ma voie ce qui m'obligea à faire appel au mon œil d'Akuma.

Depuis mon épopée à Ki et mon retour de Yuki mes capacités sensorielles s'étaient considérablement accrut, voir même un peu trop. Elles étaient passés d'inexistantes à purement démentielles. Cela se situait bien au-delà de ce que les senseurs communs étaient en mesure de percevoir. Parfois il m'arrivait même de perdre le contrôle et le plus petit son, la plus petite odeur, la moindre lueur se transformaient en torture. C'était pour cette raison que j'affectionnais de plus en plus les sorties nocturne depuis mon retour à Suna. Ici tout était calme. Il n'y avait que de temps à autres les murmures de la brise venant siffler dans mes oreilles et rien d'autres. Au moins ici personne ne pouvait me voir perdre les pédales. A présent que je me retrouvais presque au milieu de nul part, je commençais à faire appel à ces fameux dons. Si en apparence seul mon œil droit changeait, c'était également le cas pour le restant de mon organismes. Le chakra circulait dans mon corps. Certaines cellules volaient en éclats avant d'être rapidement remplacées par d'autres. De nouvelles connexions nerveuses se formaient dans mon cerveau. La plante de mes pieds devenaient sensibles aux vibrations ce qui me permettait de ressentir les mouvements de mes petites proies au travers du sable.

Le monde autour de moi me semblait désormais tout autre. Quand les humains normaux se reposaient essentiellement sur leur yeux afin de percevoir ce qui les entoures pour moi tout n'était plus que sensation et ressenti. Un mouvement attira mon attention à une dizaine de mètre delà. Ses déplacements ondulatoires me permirent de déterminer qu'il s'agissait d'un serpent de petite taille, autrement dit il n'avait aucun intérêt. La chasse aux scorpions ne seraient certainement pas très laborieuse. Une fois l'astre diurne échoué sur l'horizon les dunes se sables se mettaient à grouiller bien plus qu'on ne le pensait. Insectes et prédateurs nocturnes sortaient de leur tanière pour partir en chasse et il en était de même pour moi. Je sortais un petit sac qui me servais à transporter ma récolte avant de me même à l’affût. Pliant les genoux afin de m'assurer de meilleurs appuies je commençais par suivre les vibrations qui me menèrent jusqu'à ma première proie. Là-devant-moi, sur une petite motte de sable, j’aperçus un léger mouvement.

Aussi vive que l'éclaire je plongeai ma main à l'intérieur pour en ressortir un petit scorpions blanc tenue par la queue. Je le plaçais sous mes yeux afin de l'examiner sous toutes les coutures. Il était vraiment trop petit, cela ne me plaisait guère. Ce faisant, je le remettais docilement à sa place avant de repartir en chasse. Durant l'heure qui suivit je parvins à ramasser trois spécimens qui me convinrent plutôt bien. Hors un quatrième, d'une taille plutôt importante semblait avancer droit sur-moi. En réalité il s'agissait plutôt d'un homme, d'un shinobi même. Il prenait la direction du village. J'osai présumer qu'il rentrait de mission. Il ne m'avait probablement pas encore vu, mais moi je le distinguais déjà très clairement et... Moi qui craignait de finir par perdre la tête, j'eus un instant de flottement en le voyant l'éviter sur un nuage. Mes idées revinrent à leurs place lorsque je compris qu'il s'agissait simplement d'un Kawaguchi. Après avoir désactivé ma vision nocturne j'entrepris de le rejoindre quelque peu curieuse. Jugeant par pur caprice que c'était une bonne occasion pour me familiarisé un peu plus avec les manieurs de Sunaton. Kioshi m'avait, sans le vouloir, inculqué ce désir d'en apprendre davantage sur les nombreux clans qui peuplaient notre village. Si nous devions les commander et les protéger nous devions commencer par les comprendre. Ainsi me laissais-je glisser le long d'une dune afin d'arriver en contre-bas non loin de lui. J'avais conscience que je devais paraître pour une folle ainsi vêtue, pied nue et seule au milieu du désert avec un sac remplit de scorpion dans la main. Mais au vu des circonstances il était peu probable que cet homme face le lien entre moi et la conseillère à la défense.

-Belle nuit n'est-ce pas ? Vous êtes aussi du village. Revenez-vous de mission ?

Je me rendais compte que mon comportement devenait beaucoup trop lunatique...

Je ne suis pas particulièrement pressé de retourner à Suna... S'il est évident que je me réjouis de revoir les miens et de m'assurer que ma pupille n'a pas fait de bêtises, je suis en revanche peu enthousiaste à l'idée de retrouver l'agitation de ce village qu'on est obligés de partager avec tous ces êtres inférieurs. Suna devrait être sous le contrôle total des Kawaguchi ou ne devait pas être... Tant que ce ne sera pas le cas je ne serai sans doute jamais ravi d'y remettre les pieds. Spécialement après des journées comme celle que je viens de passer!

J'ai été envoyé en mission en compagnie d'un autre genin pour patrouiller sur la route des oasis. Les autorités veulent s'assurer - et c'est normal - que les bandits qui arpentent de temps à autre le pays puisse s'y installer et extorquer les voyageurs obligés de s'y arrêter. Toujours est-il qu'on en a trouvé, des bandits. Une petite bande, une poignée d'hommes. Mais bien assez pour embrocher mon coéquipier et me blesser. Mais je suis toujours en vie. Pas eux. Et Suna a perdu un autre de ses défenseurs. La journée a été bonne, ouais!

Je baisse les yeux sur mon épaule et constate que le sable qui recouvre ma blessure contient plutôt bien le sang pour l'instant. Parfait! Une gorgée de bière plus tard je m'appuie plus confortablement contre le dossier que j'ai ajouté à mon nuage de sable. Une jambe à moitié repliée, mon bras libre ballant dans le vide, j'avance juste assez vite pour ne pas avoir l'impression de m'ennuyer. Et de temps à autre je matérialise à la surface des dunes mes pensées, sculptures éphémères qui retournent bien vite sur le sol en fines pluies dorées...

J'imagine que j'aurai pu poursuivre ma route ainsi, à profiter de cette belle soirée et à me laisser porter par la détente. Mais c'était sans compter sur des bruits de pas dans le sable un peu derrière-moi. Je fais pivoter mon nuage et me retrouve face à une jeune femme. La lune m'éclaire de face et son visage est plongé dans l'obscurité. Mais je ne crois pas que je la connais. Elle ne me dit rien. Et elle marche pieds nus. Une Yamada? J'aurais pu rencontrer bien pire...

- "Belle nuit, en effet! Ou du moins l'était-elle jusqu'à maintenant..." il me semble important de nuancer ses propos. "Et laisse tomber le vouvoiement! On a peut-être pas élevé les chameaux ensemble mais il n'y pas besoin d'être aussi formel pour autant..."

Je reprends une gorgée de bière sans la quitter du regard. On doit plus ou moins avoir le même âge mais je n'ai pas souvenir de l'avoir croisée quelque part. Il faut dire qu'en dehors de mon clan il n'y a pas grand chose qui m'intéresse à Suna. C'est tout juste si je vois à quoi ressemble le Kage. Pour moi les Yamada sont tous les mêmes... Sauf que celle-ci est, il est vrai, plutôt mignonne. Mais l'alcool et l'obscurité peuvent être trompeurs...

- "Je t'ai jamais vue au village! Qui me dit que tu n'es pas une sorte de tarée qui veut me buter pour prendre ma place et s'infiltrer dans le village pour faire péter quelque chose?" une autre gorgée de bière. "Si c'est le cas je te conseille de trouver quelqu'un d'autre! J'ai assez tué pour aujourd'hui..."

Je ne sais pas vraiment si je crois à ce que je dis. J'ai l'esprit un peu embrumé et je n'ai pas spécialement envie de m'embrouiller avec la personne que je vais sûrement avoir sur le dos jusqu'à Suna. Ceci est un moment de détente et je n'ai pas envie de le transformer en règlement de compte. J'ai déjà eu un bon lot d'emmerdes et je ne suis pas pressé de remettre le couvert! Je fais un mudras et un fennec de sable s'échappe du sable de mon nuage pour gambader en direction de la demoiselle, une bière à la gueule.

- "Je les ai achetées au dernier village. Elles ne sont plus très fraîches mais encore suffisamment pour donner l'impression qu'elles sont bonnes..." je mime le fait de trinquer. "Bon et bien puisque tu n'es pas douée pour les présentations je te laisse recommencer! Donc, tu t'appelles...?"

La bière attends encore à côté d'elle, coincée dans les mâchoires du petit animal qui agite gaiement sa queue. Quant à moi je termine lentement ma cigarette en attendant la suite des événements. Je ne sais pas encore si c'est une amie, une ennemie ou une casse-couilles. Mais elle n'est sûrement pas Saibogu, c'est déjà ça...

-Sachez-mon cher que le vouvoiement est une marque de respect. En somme cela signifie que je vous respecte. Et vous ? Voudriez-vous en faire autant ? Fis-je d'un ton qui se voulait amical.

Je n'appréciai guère son comportement familier. Tout comme je n'appréciai nullement qu'un inconnu me tutoie, mais ne cherchai pas à m'en offusquer pour autant. Il était clair qu'il ne savait pas à qui il avait affaire et ce pour mon plus grand soulagement. J'avouai ne pas vouloir m'encombrer avec ce genre de formalité, même si pour le coup ce Kawaguchi poussait le bouchon un peu loin. Je renvoyai mon sac dans mon dos comme si celui était rempli de patate alors qu'en vérité il contenait des scorpions. Dans mon autre main se trouvait mes spartiates. Avec une telle allure, cheveux dansant au vent, je pouvais presque passer pour une nomade, à l'image des Akuzu où des Yamada. A ce niveau là les holsters attachés à mes cuisses faisaient un peu tache, mais j'avais pour principe de ne jamais me rendre dans le désert dans être armée.

A dire vrai, j'avais plutôt pour principe de ne jamais aller quelque part dans être armée tout court. Mes pistolets allaient jusqu'à m'accompagner sous mon oreiller ou se suspendre au porte serviette de ma douche. Encore que cette fois-ci je m'étais contentée du strict minimum, désireuse de me forcer à mettre l'accent sur mes capacités sensorielles en cas de problème. Et je commençai à me demander si ce drôle de personnage ne risquait pas de m'en apporter. Il était en train de boire et à la vu de la forme de la bouteille, il ne s'agissait ni d'eau, ni de jus de cactus. Était-il en train de consommer de l'alcool alors qui retournait de mission ? Si j'avais eux la tête à mon rôle de Conseillère, je lui aurai certainement flanqué une branlée mémorable. Une chance pour lui je n'étais plus vraiment dans cette optique depuis plusieurs semaines. Je ne me sentais plus le courage à quoique ce soit d'ailleurs...

Et du haut de son perchoir il continuait de s'alcooliser. Et l'ironie voulait que ce soit moi qui ait l'air menaçante, tout du moins selon ses dires. Cette fois si je m'autorisai un pointe de sarcasme.

-Voyons si j'aurais voulu vous tuer je l'aurais fais en toute discrétion. On dit souvent que les plus belles morts sont celles que l'on ne voit pas venir...

Sourire noir pendu aux lèvres, je plaçai un pouce sous ma gorge et mimait le tracé d'une lame affûté venant ouvrir la trachée ; le genre d'allusion à laquelle nous étions tous réceptifs. Après coup je me demandai si je faisais bien de le provoquer. J'ignorai à quel point il avait bu, il pourrait tout aussi bien se montrer agressive, même si dans le fond ce garçon ne donnait pas l'air d'être bien méchant, seulement un peu idiot.

Je le vis matérialiser un petit fennec de sable qui transporta jusqu'à moi ce qui semblait être une bouteille de bière. Je haussai un sourcil, circonspecte devant ce spectacle assez incongru. Je m'agenouillai au moment de la venu de la petite bête et lui caressai le haut du crâne par instinct. Ce ne fut pas une très bonne idée je me retrouvai avec une main pleine de sable et la petite bête avec ses oreilles en moins. J'attrapai cependant la bière que j'avisai avec une certaine intensité sous ce faible clair de lune avant qu'une petite moue ne se dessine sur mon visage.

-Désolée. Je suis du genre à respecter le principe ninja qui est de ne pas de boire. Dis-je en lui lança son du de sorte à ce qu'il la rattrape sans difficultés. Et puis, je préfère ne pas me retrouver alcoolisée au beau milieu du désert en pleine nuit. Un parfait inconnu pourrait vouloir m'égorger et voler mon identité afin d'infiltrer le village.

Je mimai à nouveau le geste de la gorge trachée, d'humeur taquine. Sans faire usage de l'autorité inhérente à mon titre je n'avais à proprement dit aucun moyen pour le convaincre de changer d'habitude. A savoir attendre de rentrer au village et de finir son service avant d'aller se saouler.

-Je me nomme... Amael... Amael Aozora, mais vous pouvez m'appeler Ama. Et de votre côté. Puis-je avoir le plaisir de connaître... ?

Le prénom m'était venu d'instinct tandis qu'Aozora était mon véritable nom de famille...

Je reste silencieux jusqu'à ce qu'elle daigne enfin me donner son prénom. Amael Aozora... C'est plutôt joli comme prénom mais je ne l'ai jamais entendu avant cette nuit. Peut-être est-il faux, peut-être pas... Dans tous les cas ce n'est pas vraiment ce qui m'importe pour l'instant. Je l'observe encore un instant avec les sourcils légèrement froncés avant de reprendre une gorgée de bière. Peut-être qu'il n'est pas judicieux de lui donner mon vrai nom en retour mais je suis la et je n'ai ni l'envie ni la force de commencer à jouer à ces petits jeux...

- "Kira..."

Inutile de lui préciser que je suis un Kawaguchi. Si elle est bien du village elle doit savoir qu'il n'y a que ceux de mon clan qui sont capables de modeler le sable. Et comme je suis assis sur un nuage de silicium en suspension... J'imagine que même le premier paysan sous-éduqué ferait le lien. Il y a un léger instant de flottement dans la discussion et je me force à briser ce silence pesant en rebondissant sur ce qu'elle m'a dit:

- "Personnellement je suis plutôt d'avis que la plus belle mort est celle qu'on peut affronter en face. J'aimerais voir venir le coup qui mettra fin à ma vie..." je lui décoche un léger sourire. "Mais que ça ne te donne pas des idées, hein?"

Oui, je continue de la tutoyer. Pour moi le vouvoiement est une forme de respect. Et le respect se mérite! Ça ne veut pourtant pas dire que je ne considère pas la demoiselle en face de moi. Maintenant si ça la dérange - et ça semble être le cas! - elle n'a qu'à poursuivre sa route de son côté tandis que je ferai pareil du mien. Aux dernières nouvelles ce n'est pas moi qui suis venu à sa rencontre. Je n'ai rien demandé et j'apprécierais qu'on ne me demande rien en retour...

- "C'est très bien ça de respecter les principes shinobis... Mais puisqu'on risques déjà nos vies pour défendre des gens qui ne le méritent souvent pas et des concepts stupides, je suppose que ce n'est que justice de prendre parfois quelques largesses avec le règlement!" je désigne le cadavre de mon coéquipier du jour. "Lui aussi il aimait bien suivre les règles. Regarde où ça l'a mené..."

Je lui décoche un regard entendu avant que mon champ de vision soit à nouveau coupé par la bière dont je prends une nouvelle gorgée. Oui, je suis indifférent et je le montre. Je ne vais pas me cacher parce que j'éprouve pas le moindre sentiment pour un type mort sous mes yeux. Nous nous étions croisés quelques fois à l'académie. Suis-je sensé verser des torrents de larmes pour ça? À mes yeux ce n'est plus qu'un tas de viande froide. Il n'y a rien de choquant, c'est ainsi que nous finirons tous...

- "Bon... Je reconnais que discuter avec toi n'est pas la chose la plus pénible que j'ai du faire aujourd'hui mais comme tu l'as remarqué j'étais en route pour Suna avant que tu décides de te faire des relations sociales en plein milieu du désert!" j'essaie de rester courtois mais je choisis sans doute mal mes mots. "Tu viens avec ou tu restes là?"

Je fais quelques mudras avec nonchalance et mon nuage s'agrandit pour offrir une place supplémentaire tandis que quelques tentacules viennent récupérer le cadavre de mon collègue et l'enfuir à l'intérieur de ce dernier. Puisqu'elle n'est pas de l'un des clans principaux de Suna - jamais entendu parler des Aozora! - elle n'est même pas digne de ma haine. Elle vaut tout juste mieux qu'une paysanne à mes yeux. Mais elle a au moins l'avantage d'être plutôt sympathique tout compte fait. Pour une fois qu'on ne m'envoie pas balader au bout de trois minutes j'aurais tort de ne pas pousser cette expérience sociale un peu plus loin...

Le dénommé Kira donna son point de vu sur la situation. Comme quoi il préférait avoir son adversaire en face et voir la mort venir si nécessaire. Moi je n'étais pas vraiment dans la même optique. Avec du recul, ma façon de faire se révélait bien plus malsaine, couplée à cette once de perversité exalté du à l'émotion de la traque. Je le simple fait de repenser à ce qui s'était passé à Ki suffisait à me donner des frissons. Le pis étant que je n'arrivais pas à éprouver de véritable honte quant à mes actes irréfléchis. Je n'avais que faire de ces Shukaijin, à ce que aurait pu leur arriver s'ils n'étaient pas parvenus à retourner la situation. Mais c'était de l'histoire ancienne. Cette nuit la lune était absente et le désert calme, je me sentais étrangement légère.

-J'imagine que chacun à son style. Ho, mais ne vous en faites pas. Des idées, j'en ai énormément...

Dis-je d'un ton rêveuse, ou plutôt comme si je m'adressai à un enfant de cinq ans. Sa vision des choses étaient assez primaires. En réalité, j'avais davantage l'impression de faire face à un adolescent en pleine crise de puberté. Et lorsqu'il me désigna le cadavre de son camarade mon expression semi souriante changea en quelque chose de plus inexpressif.

-Nous finissons tous par mourir un jour où l'autre, autant ceux qui respectent les règles que ceux qui ne les respectent pas. Même si l'espérance de vie des derniers est beaucoup plus courte.

J'avais presque l'impression de réciter une leçon. Une chose était sûre qui qu'il fut, lui et moi n'étions absolument pas fait pour nous entendre. J'étais plus... Et lui était beaucoup trop...

-Et bien, je n'ai pas vraiment l'habitude de traverser le village à dos de nuage magique, donc...

Je retombai sur l'amas de sable en lévitation avec douceur suite à un bond agil, sans faire le moindre bruit. L'impulsion de mon saut avait été instinctivement calculée de sorte à en arriver ce résultat. Je ne m'attardai pas pour m'asseoir en tailleur, légèrement en retrait par rapport à lui. Voici qui était bien curieux de sa part. Depuis le départ il n'avait eut de cesse de clairement laisser entendre que ma présence le dérageai pour finalement m'inviter à le suivre.

Je ne me gênai par ailleurs pas pour placer mon sac entre mes jambes, l'ouvrant un bref instant afin de m'assurer que mes petits protégés se portaient bien. Je me rappelai alors que ma vision nocturne n'était pas active. Malheureusement il serait assez mal venu pour mon chauffeur de voir mon œil démoniaque, même s'il aurait été amusant de mettre cela sur le compte de tout l'alcool qu'il avait bu. Cette idée saugrenue, mais sacrément amusante me trotta dans la tête durant de longues secondes tant et si bien qu'un sourire malicieux s'était figé sur mon visage.

-Mais si vous pensez que ces gens ne méritent pas d'être sauvé pourquoi le faite-vous ? Pourquoi être un shinobi si c'est pour faire ce qui vous déplaît ou va à l'encontre de vos idéaux ?

C'était ce que j'avais trouvé de mieux pour cesser de penser à ma bêtise. Et puis, quelque part le sujet m'intéressait. Même si je désapprouvai totalement sa façon de voir les choses je n'avais que trop connaissance de ce dilemme. Je me demandai comment est-ce qu'il pouvait y faire face au quotidien bien que je m'attendais presque à entendre une réponse complètement à côté de la plaque. Remarque, avec un peu de chance il finirait suffisamment saoul avant notre arrivé pour que je sache absolument tout de sa vie. Après tout, je cherchais bien à en apprendre davantage sur les Kawaguchi.

-Est-ce que c'est à cause des vôtres ? De votre famille ? Vous avez certainement vos principes vous les Kawaguchi. Je suis arrivée à Suna il y a peu vous savez, donc je ne me suis pas encore familiarisé avec les différents clans. Tous ont l'air d'avoir leur tradition, je trouve cela assez fascinant de constater que tous arrivent aussi bien à s’entendre.

Voici que je jouais à la menteuse frêle et insouciante. Je remarquai que plus le temps passai et plus je perdais l'habitude de réfléchir avant d'agir, me contentant de davantage fonctionner en me basant sur mes impressions que sur ma raison.

Parfois il suffit de quelques minutes pour savoir si vous allez bien vous entendre avec une personne. Et force est de constater que cette Amael et moi ne semblons pas être vraiment compatibles. Qu'importe au final, je ne souhaite de toute façon pas m'en faire une amie. Elle m'impose sa présence et je la tolère car je suis blessé, fatigué et que je n'ai guère la force de la chasser. J'ai poussé le vice jusqu'à lui offrir une place à mes côtés mais ce n'était pas seulement par pure courtoisie. On se déplace plus vite sur mon nuage qu'à pied, c'est une évidence. Et par extension nous arriverons plus vite au village et je n'aurai alors plus à subir les acquis de conscience de la jeune femme.

Je la laisse prendre place sans lui jeter un regard, le liquide doré au fond de ma bière étant clairement plus intéressant. Et là voilà qui recommence à me prendre la tête avec ses questions! Cette fois-ci elle désire savoir pourquoi j'ai embrassé la carrière de shinobi pour défendre des gens qui - selon mes propres termes - ne le méritent pas et faire des choses qui me déplaisent. Je hausse les épaules et termine ma bière avant de la faire disparaître dans le sable de mon nuage.

- "Parce que si la majorité des gens ne méritent pas d'être protégés il y a tout de même une minorité d'entre eux qui sont dignes d'être aidés..." principalement les plus faibles de mon clan mais je juge inutile de le préciser. "Et que je ne suis pas du genre à me conforter dans une vie monotone. Malgré toutes les règles imposées il y a tout de même un avantage à être shinobi: on ne s'ennuie jamais!"

J'observe le désert autours de nous tandis que nous prenons un peu plus d'altitude pour culminer à une demi-douzaine de mètres du sol. Je sors alors une gourde du sable et commence à boire de l'eau en abondance. Nous allons arriver d'ici une heure ou deux aux portes de Suna et j'aimerais éviter de sentir l'alcool plus que nécessaire. Et je devrai avoir l'esprit aussi clair que possible pour m'adresser au supérieur de la garde. Simple mesure de précaution! Lorsqu'on triche il faut savoir le faire avec un minimum de discrétion. On verra bien si Amael me balance ou non...

J'entreprends ensuite de chasser le sable de ma plaie d'une pensée avant de commencer à la nettoyer. Ce faisant ma voisine commence à me questionner sur mon clan. Sujet sensible... Je n'aime guère parler des miens aux inconnus. D'autant plus que je ne sais toujours pas si la jeune femme est bien une shinobi de Suna ou si elle joue une sort de double-jeu. Mais lorsqu'elle annonce qu'elle trouve fascinant que tant de clans arrivent à si bien s'entendre au sein du village, je ne peux retenir un ricanement.

- "Si bien s'entendre, hein?" je relève en me disant qu'elle doit effectivement être nouvelle à Suna. "Tu sais, les clans principaux peuvent être comparés à des fauves. Et tu sais ce qu'il arrive quand on enferme des mâles dominants dans une cage telle que Suna?"

Je grimace et pousse un gémissement étouffé en plongeant mes doigts dans ma plaie. J'en retire un bout de métal qui se révèle être l'une des lames d'un shuriken. Je l'observe un instant avant de le poser sur mon nuage. De minuscules tentacules viennent absorber l'objet tandis que je tourne à nouveau le regard vers Amael:

- "Tôt ou tard, inévitablement, ils en viennent à se battre et à se bouffer jusqu'à ce qu'il ne reste plus que le plus fort ou le plus malin d'entre eux. Ce n'est pas une question de si mais bien de quand..."

Et les vainqueurs seront les Kawaguchi! Je pose ma main libre sur mon bras pour arrêter trois petits rivières pourpres qui y glissent tandis que je me concentre pour former un nouveau bandage avec du sable. Le saignement s'arrête à nouveau et je pousse un soupire avant de repasser mon haut. Je m'adosse ensuite plus confortablement et me roule une nouvelle cigarette que je ne tarde pas à allumer.

- "Et non, ce n'est pas à cause des miens que je suis devenu un Shinobi. Je dirais plutôt que c'est pour eux! Les Kawaguchi sont l'un des plus anciens clans de Kaze et nous avons un héritage aussi conséquent que notre histoire. Un héritage dont il faut savoir se montrer digne! Je fais simplement de mon mieux pour suivre les traces de mes ancêtres et respecter les traditions qu'ils nous ont léguées..."

Je ne compte pas m'étendre plus que nécessaire sur le sujet du clan puisqu'elle n'est tout simplement pas digne d'en apprendre davantage... Je pose finalement le regard sur le sac qu'elle a entre les jambes et remarque de petits mouvements à sa surface. Je fronce davantage les sourcils quand je vois les deux holster qu'elle porte à la taille. On dirait ces étuis moches qui servent à ranger les armes encore plus moches des Saibogu. Est-elle l'un d'entre eux? L'obscurité, la fatigue et l'alcool ont sans doute atténué mes capacités d'observation si je ne fais attention à ce détail que maintenant. Je m'apprête à faire céder la partie du nuage sur laquelle la jeune femme est assise mais me ravise.

Je ne suis pas enclin du tout à laisser l'un de ces abrutis d'inventeurs voyager sur mon propre moyen de transport. Mais je n'arrive toujours pas à oublier la vision de la gamine que j'ai laissée brûler - d'abord volontairement puis contre mon gré - lors de cet incendie. Dois-je me racheter? Je ne peux pas m'empêcher de me sentir redevable envers cette enfant quand bien même elle est morte. Peut-être que laisser cette Amael voyager avec moi est un bon moyen de payer cette dette que je m'impose? Oui... Et après nous serons quittes elle et moi! Je baisse donc la main et soupire.

*Allez, tu as déjà du travailler avec Kanpeki et elle était bien moins agréable que celle-là...*

Je reprends quelques gorgées d'eau et m'en verse dans la nuque sans penser à en proposer à ma voisine. Je la tolère mais ça ne veut pas dire que je doive me montrer hospitalier ou agréable. Pourtant c'est la curiosité qui l'emporte quelque instants plus tard lorsque j'observe à nouveau le sac grouillant.

- "On a des passagers clandestins?" je lève les yeux vers elle. "À ce propos... Tu ne m'as pas dit ce que tu faisais dans le déset en pleine nuit? Tu es parti chasser des bestioles? Je ne savais pas que les Saibogu s'intéressaient à la faune de Kaze..."

Votre truc c'est plutôt les machines qui font du bruit et qui dénaturent la nation, non? Je sens une pointe de colère monter en moi comme à chaque fois que je repense à ces inventions horribles et à ceux qui les construisent... Je me force au calme et continue de l'observer en attendant au moins un début de réponse de sa part...

-Je pense qu'il est important pour une personne d'avoir quelque chose à protéger...

J'eus un petit sourire triste à ces paroles qui passa inaperçu dans l'obscurité. De nombreuses personnes avaient donnée leur vie pour me protéger. Aujourd'hui je me retrouvai seule à perpétrer leur volonté...

Ma main enserra le pendentif autour de mon cou, ainsi que sur cette plaquette de métal sur laquelle était apparut de nouveaux noms. J'y avais inscris ceux des vivants qui avaient changé ma vie, mais je ne pensais pas que des morts inconnus jusqu'à il y avait de cela quelque mois viendraient s'y ajouter.

-Actuellement tous les clans œuvrent de concert afin d'assurer la protection de Kaze. Et il semblerait que nous fassions tous correctement notre travail. La criminalité n'a de cesse de diminuer dans notre pays. Les Shinobi remplissent de nombreuses missions afin de facilité la vie des civils. Aucune guerre n'est visible à l'horizon. Nos frontières sont sécurisés. Le peuple de Kaze peut vivre en paix. C'est tout ce qui compte. Nous n'aurons à nous inquiéter que le jour où se fragile équilibre sera brisé.

Suna existait parce que nous avions tous quelques choses ou quelqu'un à protéger et nous étions prêt à tout pour y parvenir. La vérité était là, nous étions des sacrifiés, prêt à mourir pour les autres, mais nous l'avions tous décidés en nous engageant sur cette voie. Il s'agissait de notre choix, pas celui des autres.

-Si un jour le village venait à s'effondrer en raison d'un conflit interne ou externe, alors cela voudrait dire que quelque part que nous aurons correctement fait notre travail en attisant toute la haine du monde sur nous afin de laisser en paix notre cher désert et tous ceux qui y vivent.

Tel était mon idéal, ma conception d'aborder mon existence en tant que Kunoichi. Il m'avait fait part de son point de vu, il était donc naturel pour moi d'en faire de même en retour. Ma Sensei m'avait inculquée ces notions il y avait de cela quelques années alors que je m'apprêtai à partir pour un long voyage qui me coûterait mon œil gauche.

-Vous semblez très attaché à votre clan. Pour moi la famille est une valeur importante. Même si... Enfin, laissez-tomber...

Je n'allais certainement pas faire part de ce genre d'états d'âmes à un inconnu. Je le vis alors s'allumer sa cigarette, et comme mes neurones miroirs fonctionnaient à plein régime, l'envie me vint également et je fis de même en sortant un paquet d'une des poches de mon short. Je tirais quelque latte avec désinvolture tout en le regardant triturer son épaule blessée.

-La dedans... Seulement quelques compagnons de voyage...

J'ouvris mon sac pour en sortir un scorpions noir par le dard. Celui-ci était aussi grand que mon poing.

-Mais ils n'iront pas plus loin pour cette-fois.

Je le lâchai simplement dans le vide, avant de secouer mon sac par-dessus le nuage, rendant ainsi la liberté aux autres qui s'échouèrent dans le sable. Il m'avait fallut faire un choix. Tant pis, je pourrais toujours venir les chercher un autre soir. Suite à cela je coinçai mon sac entre mes dents de sorte à pouvoir déchirer le tissu et en faire plusieurs lanières. Sans même lui demander son avis ni l'avertir de quoique ce soit, je me relevai pour faire le tour de son nuage, me retrouvant dès lors à auteur de son épaule blessée. Je soulevai sa manche et commençai à retirer le sable qui lui servait de bandage.

-Vous ne vous êtes pas loupé. Dis-le la clope au bec.

Je saisissais sa gourde sans ménagement alors qu'il s'apprêtait à prendre une autre lampée, humidifiai le tissu puis m'atteler à convenablement nettoyer sa plaie. Une fois fait j'aspergeai un dernier bandage d'eau.

-Serrez les dents.

Le tout fut fermement nouée en une compresse qui serait déjà de meilleur qualité que ses premiers soins improvisés. Mon travail achevé je retournai à ma place.

-Je vais souvent dans le désert. Cela fait du bien de se retrouver seule quelque fois, même si le fait d'être accompagné ne me dérange pas outre mesure. Je me demandais s'il avait remarqué le clin d’œil qui lui était adressé.

Nous étions toujours à une dizaine de mettre au-dessus du sol. Au loin commençaient à apparaître les quelques rares lumières entourant la muraille de Suna.

-Les Kawaguchi ont-ils des traditions particulières. J'ai pus lire quelques bouquins à votre sujet. Vous semblez en effet posséder un héritage millénaire...

Mille an. C'était ce qui séparait le jour de la naissance de ma mère à aujourd'hui. La déstructurations du démon Yorn et la servitude d'Intername le fantôme de l’Éclipse au nom de la déesse Ewa. Je savais que certains Kawaguchi avait jadis été lié à ces histoires. J'espérai y trouver un quelconque lien.

J'écoute son avis mais je ne le partage pas. Suna a effectivement été bénéfique au pays pour certaines choses et la rancoeur que j'ai envers le village ne m'empêche pas de le reconnaître. Néanmoins je ne le perçois pas comme une fin en soi mais bien comme une étape nécessaire pour atteindre un avenir glorieux pour les Kawaguchi et eux-seuls. Il est trop tard pour changer le passé mais le futur, lui, ne demande qu'a être construit. Mon clan a fait des erreurs mais fort heureusement il n'est pas trop tard pour les corriger. Ça prendra du temps, ça coûtera du sang, mais au final nous sortirons grandis de cette épreuve qu'aura été Suna...

*Faire correctement notre travail? Si Suna venait à s'effondrer c'est tout simplement parce que réunir autant de clan sous un concept d'égalité est une entreprise vouée à l'échec, contre nature... Le village n'est pas un rempart pour Kaze, loin de là. C'est précisément l'appât qui attire l'attention sur notre nation et qui risque de l'entraîner dans sa chute!*

Mais je garde le silence. Je suis trop faible pour tenir un débat qui risque d'être passionnant mais néanmoins compliqué. Je n'ai même pas la force de nuancer ses propos lorsqu'elle parle de... notre cher désert! Sache qu'il appartient uniquement aux Kawaguchi et que la présence des autres clans sur son sol sacré n'est qu'une concession parmi tant d'autres faite par notre clan. Un jour tout le monde se rappellera qui sont les véritables maîtres de cet océan de silicum et, par extension, de notre nation. De tels propos dans la bouche d'une Saibogu me révoltent mais je reste néanmoins stoïque et continue de tirer tranquillement sur ma cigarette.

Je tourne vaguement le regard vers elle lorsqu'elle semble sur le point de me révéler quelque chose relevant de son intimité. Elle affirme être attachée à son clan mais on dirait qu'il y a une ombre au tableau. Se pourrait-il que les Saibogu ne soient pas aussi unis que les miens? En fait ce serait plutôt logique. Ce... clan n'est qu'un regroupement de personnes ayant une passion commune et difficilement compréhensible. Au contraire des Kawaguchi qui sont liés par le sang, par le concept de famille. Une famille se soutient. On peut se reposer sur elle à chaque instant. Peut-être en dire autant des siens? Je ne compte cependant pas la questionner davantage à ce sujet. Je la regarde vider son sac rempli de scorpions en me demandant quel intérêt elle a pu trouver à les capturer pour ensuite les relâcher. Est-ce une sorte de... passion?

- "Hey qu'est-ce que tu fous? Arrête ça!"

Elle s'est relevée et tente de relever ma manche. Je tente de dégager mon bras tandis que je lui décoche un regard noir. Mais elle semble bien décidée à jouer à l'infirmière et les efforts pour me libérer de son emprise échouent. Je soupire mais consent finalement à me laisser faire. C'est la meilleure celle-là! Je suis capable de me débrouiller seul contrairement à ce qu'elle semble penser. Je n'ai besoin de l'aide de personne et encore moins de l'une de ces ingénieures qui dénaturent notre nation. Et la voilà qui y va de son petit commentaire sur l'état de ma blessure...

- "Tu devrais voir la tronche de l'autre..." ma fierté est touchée. "Lui non plus, je ne l'ai pas loupé!"

Je la regarde verser de l'eau sur ma plaie et savoure un instant ce contact frais. Juste avant de serrer les dents car elle n'y va pas main morte. La pression soudaine des bandes sur la blessure n'est guère agréable voir carrément douloureuse. Pendant qu'elle travaille je tourne discrètement le regard vers elle pour l'observer à la dérobée. Je suis gêné par cette promiscuité mais elle n'est pas désagréable pour autant. Je peux sentir la douce chaleur qui émane de son corps et le parfum féminin qu'elle dégage.

Je détourne le regard, résistant à la tentation de l'observer à nouveau. Puis je scrute mon nouveau bandage et lève les yeux au ciel. Il faut reconnaître que c'est tout de même plus pratique que le sable mais j'espère simplement que les scorpions n'ont pas déversé leur venin sur cette compresse improvisée. Si c'est le cas je saurai la retrouver et lui montrer ce que je pense de ses soins...

- "Tu aurais dû garder tes scorpions..."

C'est une forme de remerciement et la seule dont je la gratifierai. Je ne lui ai rien demandé et ne me sens pas redevable. Je rabaisse ma manche et l'ajuste quelques instants avant de m'adosser à nouveau contre le sable. Je savais que c'était une mauvaise idée de la laisser se joindre à moi. Il arrive que même les pires ennemis arrivent à éprouver une forme de sympathie entre eux lorsqu'ils se côtoient plus que de raison. Je suis un humain comme les autres et je n'échappe donc pas à cette règle. Vivement qu'on arrive à Suna et que nos chemins se séparent...

Je l'écoute me dire qu'elle aime bien se retrouver seule dans le désert, que ça fait du bien. Je ne la contrarierai pas sur ce point puisque je partage cette opinion. L'océan de sable est source de mort mais également de quiétude. J'ai toujours trouvé cette ambivalence étonnante quand bien même je suis un Kawaguchi. e tourne les yeux pour la dévisager puis m'autorise finalement un petit ricanement qui n'a rien de vraiment moqueur lorsqu'elle ajoute qu'elle n'est pas dérangée par la présence des autres. Tiens donc!

- "Ouep, j'avais remarqué..." pourquoi ce clin d'oeil? "T'es sociable dans ton genre je ne peux pas te l'enlever. Peut-être un peu trop d'ailleurs..."

Un regard à ma blessure montre clairement à quoi je fais référence. Elle s'intéresse à nouveau au Kawaguchi et je n'arrive pas à m'enlever de l'idée de la tête que ça cache forcément quelque chose. Veut-elle mieux nous connaître pour mieux nous détruire? Comme bien souvent je ne peux pas concevoir qu'une Saibogu ait des intentions honnêtes envers les miens. Ils sont centrés sur eux-mêmes - bon d'accord, je peux parler! - et en général ils ne se gênent pas pour clamer haut et fort qu'ils sont le futurs. Pourquoi ce soudain intérêt alors?

- "Je n'ai pas vraiment la force de te retracer un millénaire et plus d'histoire là... J'ai perdu pas mal de sang et je préfère économiser mes forces jusqu'à ce qu'on soit au village. On est pas encore à l'abris d'une mauvaise rencontre..." la bonne excuse qui tombe à point! "Parles-moi plutôt de toi, tiens! Tu ne portes pas le nom de Saibogu pourtant c'est bien leur équipement que tu portes à la taille si je ne me trompe pas? En tout cas ça y ressemble..."

Il y a un célèbre adage qui dit qu'il faut connaître ses ennemis encore mieux que ses amis. J'ai là une occasion rêvée d'en apprendre plus sur le clan que je déteste le plus à Suna. Peut-être que j'arriverai à obtenir des informations dignes d'intérêts, exploitables pour les détruire de l'extérieur voir de l'intérieur.

- "Tu es une sorte de... candidate? Quelque chose dans ce genre?" si j'étais elle je réfléchirais avant d'embrasser un futur qui risque d'être plus court que prévu aux côtés des Saibogu. "Je me suis toujours demandé comment ils choisissaient ceux qui sont dignes de les rejoindre..."

Pas vraiment, en fait... C'est même la première fois que j'en viens à me poser la question. Mais comme ma voisine semble d'humeur à papoter elle sera certainement loquace sur le sujet. Et pendant ce temps je serai épargné par ses questions sur mon propre clan...

Selon ses dires j'étais du genre sociable. Ses paroles donnèrent un sens profond au sourire innocent que dessinaient mes lèvres.

-Nous pouvons dire cela. Je n'ai pas eu la chance de connaître ma mère ni ma sœur. J'ai seulement grandi avec mon père. Il a toujours été là pour-moi et ma inculqué de nombreuses valeurs comme celle d'aider ceux qui sont dans le besoin.

Les doux souvenirs de mon enfance me revenait. Le manoir, les montagnes, la neige tout ceci était bien loin maintenant. Ici, il n'y avait que la nuit et le désert, ce qui n'était pas si mal. Peu importe où je me trouvais sur cette terre, le ciel étoilé était toujours le même, même si les aurores boréales me manquaient.

-C'est aux forts qu'incombent la responsabilité de protéger les faibles. Disait-il. C'est pour cela qu'il s'est toujours appliqué à créer des inventions pour le bien d'autrui.

J'ignorai pourquoi je disais cela à un inconnu. Peut-être était-ce justement parce que je le connaissais à peine, qu'il ne savait rien de moi d'autant plus en ce qui concernait mon identité. Cela faisait du bien de parler quelque fois, même si un coup d’œil à son visage me laissait clairement comprendre qu'il n'avait que faire de mes dires.

-Je veux bien vous parler des Saibogu si vous acceptez de me parler des Kawaguchi c'est donnant-donnant. Et même si cela vous dérange, vous savez que je finirais tôt ou tard par le découvrir moi-même. Les livres sont fait pour cela. Alors plutôt que de l'apprendre par des écris, j'aimerais autant que cela vienne de votre bouche.

Son visage dépité laissait penser qu'il s'apprêtait à faire lâcher son nuage sous mes fesses. Heureusement ce ne fut pas le cas, sinon j'aurais directement rejoints les scorpions en bas et les attraper sans sac aurait été un vrai calvaire. Ce faisant je m'allongeai à mon tour sur le sable flottant, croisant mes bras derrières ma tête en guise d’oreiller. Mon regard se leva vers les étoiles.

-Mais puisque vous le demandez, en effet j’appartiens à la communauté Saibogu.

Parce qu'on ne pouvait pas vraiment parler de clan à ce niveau là. Nous étions un regroupement de passionnés, de chercheurs, d'égoïste, de visionnaires, de tyrans et d'humanistes.

-Je ne suis cependant pas très douée pour inventer des choses. Je me contente généralement de reprendre les inventions des autres afin de les adapter à ma façon.

Ce faisant je dégainai l'un de mes pistolets que je levai au-dessus de mon visage. Sans les rayons de la lune pour l'éclairer, il n'était qu'une ombre mortelle et figée dans la nuit. Une simple pression sur la détente suffisait à ôter une vie. La notion même de progrès demeurait encore un concept assez abstrait aux yeux du reste du monde. Nul ne réalisait encore le potentiel de nos inventions. Ce Kira par exemple était loin d'imaginer qu'une des balles présentes dans cette arme était assez puissantes pour traverser son sable, briser sa cage thoraciques, arracher ses poumons et ressortir par son dos en important quelques vertèbres avec elle avant de se perdre dans le désert. Le tout en moins d'une fraction de seconde. J'avais essayé une seule fois sur une personne et le résultat avait été franchement dégoûtant. Beaucoup de morceau partout. Ce n'était pas très beau à voir.

-J'ai cependant l'avantage de savoir m'en servir mieux que personne. Dis-je en cherchant en motter cette image peu ragoutante qui trottait encore dans mon esprit. C'est surtout grâce à mes prouesses techniques j'ai pus être acceptéeparmi les Saibogu. J'ai cependant préféré garder mon véritable nom. En réalité je m'appelle Aozora S. Amaelle, mais là encore le « S » n'est pas obligatoire.

Je penchai la tête de côté, le visage du Kawaguchi était à la hauteur du bien. Je lui adressai à nouveau ce même sourire serein.

-Pourquoi vous intéressez-vous aux Saibogu ? Souhaitez-vous en devenir un ? Dis-je tout en rangeant mon arme.

Il aurait été stupide d'y croire. L'ouverture d'esprit ne semblait pas être le fort de cette petite tête de nœud. Hors ce point était essentiel pour garder un œil rivé vers l'avenir.

-Dans tous les cas c'est à vous de parler mon cher. J'aimerai savoir quelle vision du monde partagent les Kawaguchi. Vous devez être particulièrement lié au désert et au sable. Possédez-vous une certaine philosophie de vie ? J'imagine que celle-ci doit être plus positives que celle des Ketsueki

Je tentai de plaisanter en mimant avec mes doigts deux crocs sur-développés sortant de ma bouche.

C'Elle est tenace et du genre dure en affaire. Je ne lui impose pas de parler des Saibogu alors pourquoi semble-t'elle si décidée à en apprendre plus sur les Kawaguchi? J'ai l'impression d'être harcelé, forcé d'en parler. Et c'est précisément dans ce genre de cas que j'ai tendance à me braquer et refuser la conversation. Spécialement avec quelqu'un issu du clan que je déteste largement plus que les autres à Suna. Je suis déjà tenté depuis un moment de relâcher mon emprise sur la sable qui la soutien pour la forcer à continuer à pied. Et cette envie se fait de plus en plus présente. Et pourtant je ne le fais pas... Pourquoi? Si je le savais je n'aurais pas besoin de me poser la question...

- "Commence déjà par me répondre et on verra ce que je peux faire pour épancher ta soif d'informations, d'accord?"

Je lui décoche un regard entendu tandis qu'elle s'allonge à mes côtés et je fais de mon mieux pour ne pas tourner mon regard dans sa direction. Cette promiscuité, même si elle reste étrangement agréable, n'en est pas moins une chose à laquelle je ne suis guère habitué hormis avec les prostituées qui pullulent au Heaven's Night. Et ça relève alors plus d'un besoin naturel que d'une véritable envie... Et puisqu'elle vient de me confirmer qu'elle est bien une Saibogu je m'emploie donc à garder une muraille invisible entre nous deux. Il faut savoir vivre en accord avec ses principes même si le destin s'emploie bien souvent à les remettre en cause!

- "Ouais tu plagies les inventions des autres, quoi!" n'ayons pas peur des mots "Je suppose que tu ne dois pas forcément être la personne la mieux vue au sein de ton clan..."

Personne n'apprécie se faire "voler" ses découvertes je crois. Même si peut-être qu'il y a une sorte de solidarité au sein des... - comment s'appellent-ils déjà? Ha oui! - Créateurs. Peut-être pas semblable à celle qui règne au sein de mon propre clan mais tout de même assez conséquente pour qu'ils tolèrent ce genre de choses. Et là voila qui commence à se vanter de son maniement des armes. Ha ben pour le coup c'est sûr: c'est bien une Saibogu! Me voilà presque rassuré!

Je ne m'attarde pas plus que nécessaire sur son nom complet. De toute façon je doute que je vais retenir son identité quand bien même elle a l'avantage de la beauté. Elle ne sera qu'un interlude dans ma vie et je serai sans doute la même chose dans la sienne. On pourrait dire que c'est un instant de paix que nous partageons, une sorte de cessez-le-feu que je veux bien respecter quelques minutes ou heures. Mais les chose reprendront leur cours habituel sitôt les murailles de Suna franchies.

Je tourne le regard vers elle et lâche un ricanement alors qu'elle me demande pourquoi je m'intéresse aux siens et si je compte devenir l'un d'entre eux. Shukaku m'en préserve! Jamais de la vie j'apporterai mes compétences à un groupe d'inventeurs fous qui dénaturent Kaze avec leurs machines aussi étranges que bruyantes. Bien au contraire! L'un de mes objectifs et purement et simplement de les rayer de l'histoire de notre nation. Parce que j'estime que c'est nécessaire et aussi parce qu'ils n'ont rien à y faire.

- "Moi? Un Saibogu?" je renifle de dédain. "Je crois que je préférerais encore crever! Et puis ce n'est pas vraiment de l'intérêt que je porte à ton clan mais plutôt de la curiosité. Du genre de celle que les Hommes peuvent avoir envers un insecte avant de... laisse tomber va, je divague!"

Avant de l'écraser! Voilà ce que je m'apprêtais à dire! L'alcool encore présent dans mes veines et la fatigue ne favorisent guère la retenue et il va falloir que je me montre plus prudent. Je n'ai pas spécialement envie de me faire des ennemis si je peux l'éviter. Manifester ouvertement de l'hostilité - même si elle reste palpable pour un observateur averti - n'est pas la chose la plus intelligente à faire pour l'instant. Je ne suis pas comme cette Ketsueki La qui n'est pas capable de maîtriser ses émotions. Du moins ne le suis-je pas en temps normal...

Toujours est-il que si elle n'a pas répondu à ma question de la manière dont je le souhaitais, elle a au moins fait preuve d'ouverture d'esprit en me donnant certaines informations. Personnelles, soit, et non générale comme je le désirais. La moindre des politesses est donc de lui rendre la pareille même si cette idée ne m'enchante guère. Et puisqu'elle joue la carte de la conciliation je peux au moins faire l'effort de répondre à ses interrogations en retour. Je vais même jusqu'à lâcher un rire sincère lorsqu'elle fait une remarque sur les Ketsueki et qu'elle mime des canines avec ses doigts.

- "Ha ça c'est sûr! Mais en même temps ce n'est pas vraiment compliqué d'être plus positif que ces buveurs de sang! Et ce quel que soit le domaine..." je plonge mon regard dans le sien et reste silencieux quelques secondes, pesant une dernière fois le pour et le contre avant de me lancer. "Et bien... Il y a autant de visions du monde que de Kawaguchi je dirais... Pareil pour la philosophie de vie, elle est propre à chaque individus. Certains veulent retrouver le désert et notre vie d'antan, avant que Suna voit le jour. D'autres sont certains que le village est la meilleure opportunité d'avenir pour le clan... Il y a de tout!"

Il y a des gens que je ne comprends pas au sein de mon propre clan et je suis loin d'être d'accord avec la vision des choses de certains d'entre eux. À vrai dire ceux qui veulent continuer à vivre selon les traditions ancestrales sont les moins nombreux. Et je m'emploie en compagnie de Tsukiko à leur rappeler que nous n'avions besoin de personne par le passé, que nous nous suffisions à eux-même. Je n'ai guère d'estime pour ceux qui voudraient rendre les nôtres dépendant au village même si ce n'est sûrement pas leur intention...

- "Mais nous avons en effet tous un point commun: notre amour pour le désert. Il n'est pas seulement l'endroit où nous vivions mais revêt également un aspect sacré pour la plupart des miens. Il y en a même qui vont jusqu'à penser qu'il est animé d'une volonté propre. Je suis de ceux-là..." je lui décoche un léger sourire sans même m'en rendre compte. "J'imagine que pour une ingénieuse ça doit sembler farfelu. Et je pourrais comprendre ton scepticisme si je n'avais pas vu de mes yeux des choses parfois étonnantes. Pourquoi certains survivent au désert alors qu'ils devraient y mourir? Et pourquoi d'autres y succombent alors qu'ils sont équipés pour l'affronter? Il y a quelque chose de... magique en ces lieux même si je n'arrive pas précisément à savoir ce que c'est, quand bien même je suis un Kawaguchi..."

C'est la première fois que j'ai presque honte d'exposer ainsi l'une de mes convictions alors que je n'ai aucune raison de ressentir ce genre de sensation. Je suis fier d'être un Kawaguchi et donc un fils du désert! Mais quelque part - et je le remarque que maintenant! - j'ai aussi l'envie d'obtenir son approbation. C'est stupide... Et je me déteste d'apporter du crédit à ce que peut penser une Saibogu! Il va falloir que je me ressaisisse! Et vite! Et que j'arrête de boire quand il y a une possibilité que mon chemin croise la route d'une autre personne!

- "Outre le désert c'est également le sang qui nous uni puisque nous sommes une vraie famille au contraire des Saibogu par exemple. Et puis il y a la solidarité entre les membres de mon clan qui n'est pas seulement conseillée mais carrément érigée en règle. Voir même en loi! Nous nous rangeons derrière les nôtres chaque fois que le besoin s'en fait sentir. Que ce soit justifié ou non!" je l'observe à nouveau quelques instants en silence. "Voilà, satisfaite? Je ne vois pas vraiment ce que je pourrais te raconter de plus pour contenter ta curiosité! Et puis comme tu l'as dit... il reste toujours les livres si jamais tu veux en apprendre plus! Des bouquins qui traitent des Kawaguchi, ce n'est pas ça qui manque!"

Le silence reprend à nouveau ses droits et je détourne mon regard d'elle pour observer la voûte étoilée de Kaze. Cette vision merveilleuse à le don d'apaiser mais aussi de vous faire prendre conscience que vous n'êtes que bien peu de chose sur l'échelle du temps ou de la nature. Ça fait peur mais ça fascine en même temps. Ça vous rappelle également que la vie est éphémère malgré la tendance de chaque individu à se penser différent des autres, insensible à l'emprise des années qui s'écoulent...

- "Dis-moi la Saibogu..." je reporte mon attention sur elle. "Qu'est-ce que tu penses de Suna et de notre nouveau Kage? Honnêtement je veux dire... Ne me sors pas les inepties habituellement réservées aux étrangers! Il n'y a aucune oreilles indiscrètes ici! Même si tu sembles apprécier le village tu dois bien avoir quelque chose à lui reprocher non? Ne me dis pas qu'il est parfait à tes yeux?"

Je reste ainsi à l'observer, mon bras valide replié en guise d'oreiller au niveau de ma tempe. C'est plutôt rare que je discute ouvertement de ce sujet avec une personne que je viens à peine de rencontrer voir même une personne tout court. Mais je suis plutôt curieux de connaître l'avis d'une Saibogu à ce sujet...

Visiblement il n'était pas du genre à apprécier les Saibogu. Ho cela non ! J'arquai un sourcil interrogateur à son encontre. Je comprenais que l'on puisse être réfractaire à une philosophie, une façon de vivre, c'était dans l'ordre continuel des choses. Cela contribuait à l'enrichissement de notre monde. Cependant j'avais du mal à accepter que l'on puisse faire preuve d'une telle aversion, d'autant plus si elle était justifié. Mon père s'était toujours montré tolérant envers son peuple et j'avais pris exemple sur lui. Pour moi l’intolérance était une notion inenvisageable, même si j’admettais avoir jadis aveuglément méprisé les su...

Je papillonnai des yeux, venant subitement de perdre le file de mes pensées. Quelque chose clochait chez-moi. De nombreux souvenirs contradictoires dansaient dans mon esprit au point où il m'était impossible de différencier le vrai du faux. Cependant l'heure n'était pas aux états d'âmes. Mon compagnon semblait soudainement devenu plus affable, allant jusqu'à finalement me parler de son clan. J'eus un nouveau sourire lorsqu'il m'expliqua qu'il croyait en une volonté propre pour le désert. Il s'attendait certainement une brimade de ma part. Peu de Saibogu se seraient permis de lui rire au nez en se contentant simplement de le faire intérieurement. Divinité et légende n'étaient que des comptes pour enfant à leur yeux, et je pouvais parfaitement les comprendre. Cependant je ne partageai en aucun cas leur point de vu.

-Ho vous savez... Je suis bien placée pour savoir qu'il en ce monde de nombreuses choses qui nous dépassent...

J'étais l'un de ces exemples, mais le petit Kira n'en aurait pas la démonstration. Je ne tenais pas à ce que cette petite sortie nocturne se termine en chasse au démon ou à l'humain...

-Toutes les légendes contiennent une part de vérité. Je ne sais pas si je pourrais y croire également. Sans doute oui, mais pas de la même façon. Je pense malgré tout que nous serons d'accord pour admettre que ce désert est spécial.

Je me redressai m'asseyant en tailleur les mains cramponnée aux chevilles. Mon regard se porta sur l'horizon infini, symbole de la jonction entre le firmament étoilé et la masse sombre sableuse qui s'étendait à perte de vue. L'air frais était des plus agréable. Cette saison était particulièrement propice aux sorties nocturnes. Mon chakra s'éveilla dans mon corps, étendant la portée de mes sens autant que possible. Je fis néanmoins en sorte de rester à la limite de ce qui m'était possible de percevoir tout en conservant ma forme humaine.

-Il renferme bien des choses, de nombreux secrets. Et puis, on ne peut pas nier que le spectacle en vaut le détour.

Immobile, mon regard se perdait dans le vide. Mon corps était ici, mais mon esprit ailleurs suivant la trace du déluge d'informations que me fournissaient mes sens. A quatre-cent mètre de là un peu plus à l'est, un serpent venait d'agripper un rongeur. Celui-ci se dégagea et commença à s'enfuir. Il était malheureusement trop tard. Le poison venait d'être véhiculé dans son organisme qui ne prendrait pas plus d'une minute pour arrêter son cœur. A partir de là le reptile n'aurait plus qu'à commencer son festin...

-En voilà un qui n'aura plus besoin de se nourrir durant les prochaines semaines. Plutôt pratique...

Ma tête s'était tournée dans la direction du prédateur au loin. Ce ne fut qu'à cet instant que je me rendis compte de mes mots.

-Hum... je veux dire... enfin... Laissez-tomber !!

Au moins cette fois-ci ce devait être clair. Il devait me prendre pour une folle. Cependant sa nouvelle suite de questions fut comme une petite aiguille plantée dans un nerf qui me fit brutalement redescendre sur terre. Le tout dans un léger sursaut.

-Kioshi... Disons que...

J'hésite à me montrer honnête avec lui, mais je me rends compte que je suis pas spécialement d'humeur à me compliquer la vie. Pour ainsi dire je n'en ai plus la capacité.

-Il n'est pas vraiment fait pour être Kage. Seulement le peuple de Suna a décidé de l'élire en tant que tel, nous nous devons donc de respecter ce choix et faire avec. J'imagine qu'il sera capable de s'améliorer avec le temps. Après tout il reste un puissant Shinobi, un des plus renommé de notre nation...

Cette note positive méritait d'être relevée car tout n'était pas à jeter. Je tenais énormément à Kioshi et ne souhaitai que son bonheur, à lui comme à tous ceux qui m'était proche, mais je devais cependant avouer que rien ne me ferait plus plaisir que de le voir céder son poste pour quelqu'un de plus compétent. Il n'avait jamais demandé à être là, mais y restait parce qu'il s'y sentait obligé, parce que lui aussi avait de nombreuses personnes à protéger.

-Quant-à Suna...

Je relevai les yeux en direction de cette gigantesque masse sombre qui se dessinait dans la nuit. La grande muraille de Suna... Nous y étions presque. Il ne restait plus que quelques centaines de mètres à parcourir avant d'atteindre notre but. A cette vision, je me recroquevillai quelque peu sur moi-même.

-Ce... Ce n'est pas le genre d'endroit que j'affectionne. Ces murs... On s'y sent enfermé. On dirait une prison...

A ces mots je baissai la tête honteuse de mes propres paroles, mais il ne servait à rien de se voiler la face.

-Je préfère rester dans le désert. Finis-je par avouer.

Une prison, c'était un peu cela, mais il n'était pas uniquement question de mur ou de surveillance. En réalité je me sentais surtout prisonnière de mon devoir envers les autres. Je me rendais compte que ce n'était pas vraiment la vie dont j'avais rêvé. Et comme un rêve d'enfant venu enlacer l'adulte froid qu'il était devenu, je m'émerveillai en m'imaginant ce qui se trouvait non pas devant, mais derrière-moi.

Le monde.

Cette jeune femme m'étonne de plus en plus. Déjà parce qu'elle n'a pas l'arrogance qui caractérise tant de Saibogu mais également parce qu'elle et moi semblons sur la même longueur d'onde sur bien des points. Au côté de la curiosité se met alors à poindre une touche de méfiance: pense-t'elle sincèrement ce qu'elle dit ou tente-t'elle d'exprimer ce qu'elle croit que je souhaite entendre? Le fait que je la questionne sur la Kazekage et le village induit le fait que j'ai quelques griefs à leur encontre. Elle n'imagine cependant pas que mon but est de tuer le premier et de détruire le second. Du moins, je l'espère...

- "Le peuple a voté, c'est vrai..." je tourne à nouveau le regard vers elle. "Mais la démocratie est un exercice nouveau pour lui. Et puis combien de votants ont réellement pu côtoyer Kioshi ou Kibo? Regarde, je prends mon exemple: je suis shinobi et ai donc plus de chance qu'un civil de parler ou travailler avec l'un ou l'autre. Pourtant je n'ai pu le faire avec eux qu'une fois ou deux au grand maximum. Bien trop peu pour me faire un avis constructif sur l'un ou l'autre. Que dire alors des civils qui ne leur ont jamais adressé la parole? Autrement dit la grande majorité! Ça a été un vote à l'aveugle ou peu s'en faut... Et c'est pareil pour les conseillers quand on y songe!"

Je suis naturellement hostile à la démocratie puisque je pars du principe que tous les clans et habitants devraient être les sujets des Kawaguchi. Dès lors une votation n'a aucun sens à mes yeux. Mais puisqu'elle a bien eu lieu il me semble normal de remettre en question sa pertinence. Accorder sa voix à quelqu'un sans le connaître relève plus de la plaisanterie qu'autre chose. Pourtant il faut bien reconnaître que le peuple a choisi et qu'il faut respecter sa décision selon les désirs de Zanshi. Seul l'avenir lui donnera raison ou tort même si j'ai déjà une idée bien précise du verdict que le temps délivrera...

*Il faudra que j'en touche deux mots à Zanshi pour peu qu'elle soit disposée à opter pour un retour en arrière! Suna n'est pas prêt pour la démocratie et ne le sera sans doute jamais. Je l'espère en tout cas...*

Ma voisine porte également un regard critique sur le village qu'elle qualifie même de prison. Un terme que j'utilise régulièrement pour Suna car pas si éloigné de la réalité dans le fond. Savoir qu'on est pas le seul à penser ainsi a le don de vous conforter dans votre vision des choses. Ketsueki La, Aozora Amaelle... Et sans doute bien d'autres partagent le même avis. Il m'arrive parfois de me remettre en question, de me demander si j'ai un vision décalée de la réalité et un ressenti bridé par ma haine envers les autres clans... Mais ce genre de discussion ne fait que renforcer mes convictions. Non, je ne suis pas fou...

- "Une prison..." je répète ce mot le regard vague avant de me ressaisir. "Oui, je suppose que c'est le mot qui se rapproche le plus de la réalité. Le temps où les clans parcouraient le désert sous un vent de liberté est bien loin, pas vrai?"

Et pourtant pas si éloigné que ça... Je ne perds pas espoir de voir à nouveau mes souvenir prendre place dans le présent et d'arpenter à nouveau l'océan de sable avec pour seuls maîtres le ciel et le soleil. Mais il ne faut pas se contenter d'attendre que les choses se produisent mais bien savoir provoquer la chance et le destin. Ce que j'ai déjà commencé à faire par ailleurs. Ha, si le peuple savait que Zanshi foulera à nouveau le sol de Kaze d'ici quelques semaines... Les secrets sont parfois bien durs à garder...

Je me demande si les civils et les shinobis se rangeraient derrière elle ou soutiendraient Kioshi. Peut-être que nous allons au devant d'une guerre civile si tant est que la Godaime désirait partager avec tous son petit secret. Ce dont je doute... Elle préférera sans doute manœuvrer dans l'ombre et tirer les ficelles d'un pouvoir qu'elle ne tient plus officiellement. Mais à nouveau, seul l'avenir nous le dira. Je reporte mon attention sur ma voisine un brin étrange - n'a-t'elle pas lâché une phrase sans queue ni tête tout à l'heure? - alors qu'elle m'annonce qu'elle préférerait rester dans le désert. Comme je la comprends...

- "Alors restons dans le désert!" je ralentis l'allure de notre moyen de transport. "Je n'ai pas envie de devoir faire un rapport sur la mort de notre camarade et encore moins d'aller dormir! Continuons à discuter et profitons du spectacle offert par les premiers rayons du soleil. Comme avant, quand il n'y avait pas de murailles pour masquer l'aube et briser la caresse du vent sur nos visages..."

L'alcool me rend sans doute un peu trop nostalgique - et un brin poétique - mais force est de constater que la présence d'Amaelle ne m'est plus désagréable. Du moins pas autant que le village en lui-même et son agitation qui ne s'atténue jamais vraiment au point de devenir tolérable. Et puis c'est la première fois que j'ai une discussion aussi poussée avec une Saibogu et je compte bien la mettre à profit pour en apprendre plus sur son clan ou même elle. Et puis...

- "J'ai envie de boire de toute façon! Ma blessure peut attendre et au moins je suis sûr qu'ici il n'y aura personne pour me donner des leçons de morale et me rappeler les devoirs d'un shinobi!" sans vraiment attendre sa réponse je fais apparaître une nouvelle bière puis une deuxième que je lui tends à nouveau. "Mais il est hors de question que je boive seul! C'est bon, relax! Je ne veux pas abuser de toi ou je n'sais quoi! T'es pas mon genre de toute façon! Trop bizarre, trop Saibogu..."

Je lui décoche un léger sourire ce qui en soit représente déjà un exploit. Puis je reprends quelques gorgées tandis que je fais virer mon nuage pour nous éloigner de Suna. Si elle souhaite descendre, elle n'a qu'à sauter. Mais ma décision est prise. Je ne suis pas un grand buveur et encore moins un alcoolique. Mais je crois qu'il est nécessaire de prendre du temps pour soi voir se mettre minable de temps à autre. Outre mon ressenti sur Suna, notre profession nous impose tant de contraintes qu'il est obligatoire de s'imposer des moments comme celui-ci.

- "Et quand tu auras trop bu je te poserai des questions sur Oniri Saibogu! Puisque elle est de ton clan tu dois sûrement avoir une ou deux anecdotes à me raconter à son sujet, non?" je reprends une gorgée ou deux. "Il est peut-être temps que j'en apprenne plus sur la femme à qui le... bon peuple a décidé de confier sa sécurité!"

Je ne m'attends pas à des révélations fracassantes ni même à changer d'avis sur elle. Quand bien même je ne la connais pas, je sais déjà que je ne vais pas l'apprécier. Certains la décrivent comme arrogante voir antipathique. Je suppose qu'il y a du vrai! Cependant la grande majorité semble convaincu qu'elle est compétente. Du moins suffisamment pour éveiller ma curiosité...

Kira ne semblait pas promouvoir la démocratie. En réalité tout ce qui provenait de Suna semblait le débecter. Je le devinai comme Kioshi, ne parvenant à se complaire dans le village, mais se contraignant y rester pour des raisons précises. Quelque part l'idée qu'une personne ne se sente pas à sa place à l'intérieur me dérangeai. Je m'efforçai, de part mon travail, à faire de Suna un lieu sûr pour tous. Malheureusement bon nombre de choses m'échappaient et je savais qu'il était impossible de plaire à tous. Il y aurait toujours des réfractaires à un système. Le jeune Kawaguchi à mes côtés en était un parfait exemple. Pour autant je n'avais rien à lui reprocher et tant qu'il ne causait pas de problème je ne voyais aucun inconvénient à ce qu'il mène sa petite vie à part, quitte à boire de temps en temps de l'alcool en plein servir même si cela était interdit.

-Aucun système n'est parfait. Répondis-je d'une voix paisible. Et aucun ne le sera jamais. Ils comporteront toujours leurs défauts. Seulement plutôt que de confier le pouvoir suprême à un seul individu, celui-ci est conféré par le peuple. Ainsi ce même peuple est en droit de reprendre ce qu'il a donné. Tout du moins c'est ma façon de voir les choses. L'important et que nous évitions de nouvelles tragédies comme Kyoshi Rei.

Il en était ainsi. Nous n’œuvrions pas pour un monde meilleur, mais pour un monde moins pire. Nous vivions tous ensembles sous l’emblème du sacrifice, près à donner de nous encore et encore dans le but de préserver cet idéal que nous partagions. Il n'y avait aucune promesse d'avenir, aucune bonne intention où humanisme. Nous agissions seulement en étant mu par ce désir égoïste de préserver ce qui nous est cher et nous nous appliquions à le faire autant que possible. Le jeune et naïf Kawaguchi se revoyait vivre dans le désert à écumer l'étendue de sable s'étirant vers l'infini. Il ne réalisait pas la porté de ses paroles, ni tout ce que cela pourrait impliquer s'il en devenait ainsi.

-Je vous comprends. Il n'y a pas pire que de sentir enfermé et privé de sa liberté. Parfois moi aussi j'aimerai simplement pouvoir partir. Malheureusement séparer les clans nous feraient tous revenir en arrières du temps des guerres claniques. En plus des autres nations, nous nous battrions contre ceux issus de la même terre. Devenir Shinobi ne serait plus une option, mais la seule solution pour survivre. Les enfants seraient de nouveau obligés de se battre et de mourir... Le système des villages cachés n'est certainement pas exempt de défauts, mais reste la meilleur solution que nous ayons à ce jour pour garantir un avenir aux plus jeunes.

Le soucis étant que je n'envisageai rien de mieux à offrir au monde que ce que nous avions. Tout ce que je pouvais faire à mon niveau étant de tirer le meilleur parti de ce qui était déjà là. Je savais que je ne serais pas capable de faire changer l'opinion de Kira au sujet du village. Quelque part il me ressemblait, tout aussi borné et ancré dans ses idéaux. On n'ébranlait pas l’édification mentale d'une vie du jour au lendemain. Je le trouvais malgré-tout assez ouvert d'esprit. Il posai de nombreuses questions preuve que dans un sens qu'il s'intéressait aux autres. Et puis je ne pouvais aussi nier que cette conversation me plaisait. Parfois cela faisait du bien de recentrer ses idées ainsi que ses objectifs. D'autant plus pour moi qui avait l'impression de m'égarer de plus en plus du droit chemin au fil des jours passés. J'avais plus que jamais besoin de me rappeler qui j'étais et les raisons qui me poussaient à combattre.

-Il faut voir les choses ainsi. Suna, étant le cœur militaire du pays, à pour but t'attirer l'attention sur lui. Ainsi, toute la haine du monde se retrouve entièrement redirigé dessus. Il n'est plus question de Kaze, mais uniquement de Suna. Lorsqu'une armée voisine tente une invasion elle attaque Suna. Lorsque des terroristes cherchent à fomenter un attentat ils le font en Suna et pendant ce temps le restant de Kaze est épargné. Nous l'avons très bien vu au cours de ces dernières années. Le village à énormément souffert, subit et lutté pour sa survie. Mais qu'en est-il de la nation?

Liant le geste à la parole, je levai ma paume vers le ciel pour balayer le décor tout autour de nous. Cette étendue paisible et silencieuse caressée par la fraîcheur de la nuit...

-Il suffit de regarder. Notre nation continue de prospérer malgré les conflits mondiaux. Les civils vivent en sécurité. La criminalité diminue grâce au mission effectuée. Tout cela parce que Suna existe. Parce Suna attise la souffrance afin de préserver les innocents.

Ce n'était nullement de l'idéalisme, seulement un constat. Nul ne pouvait nier que Kaze se portait mieux depuis l'apparition de Suna et ce qu'importait les différentes tournures qu'avaient put prendre les événements. Avec un peu de recul on pouvait trouver cela affreux. Condamner une minorité dans un cercle vicieux où se mêlait continuellement déchéance et renouveau pour que la majorité puisse continuer de prospérer au loin. Il ne fallait pourtant pas oublier ce point essentiel...

-Il ne s'agit peut-être pas de la meilleur solution. Nous endossons le rôle le moins enviable, mais c'est notre choix. Nous avons tous demandés à devenir Shinobi. Nul ne nous y a obligé à l'être. Il s'agit de notre décision entière issue de notre libre arbitre. Nous sommes ici parce que nous sommes prêt à souffrir pour protéger ce qui nous importe. Vous par exemple. Je présume que vous vous battez pour votre famille. C'est l'unique raison qui vous retient ici n'est-ce pas ?

Toujours rabattu sur moi-même je tournais la tête dans sa direction lui adressant un énième sourire dans l'obscurité. Je tirai les dernières lattes de ma cigarette. Les braises s'allumèrent créant une infime lueur l'espace d'une seconde.

-Moi c'est pareil. Sauf que je considère que la mienne est encore plus grande...

J'ignorai pourquoi, mais je me sentais émotives au point où le simple fait d'imaginer les visages de ceux que j'aimais au milieu de ce désert paisible suffisait à me donner les larmes aux yeux. Pour me redonner contenance et ne rien laissait paraître je donnais une petite pichenette sur les cendres de ma cigarette avant de ranger le mégot éteint dans ma poche. Suite à cela je pus constater que le comportement de mon chauffeur avait changer. Il se montrait plus sympathique, plus bienveillant. Cela s'entendait dans le ton de sa voix. J'imaginai qu'il avait sa manière à lui d'exprimer sa sympathie envers autrui. Là en l’occurrence cela se caractérisait par cette bière qu'il glissa entre mes doigts. Je restai de longues secondes stoïque à fixer le conteneur en verre comme s'il m'aurait été possible de voir l'alcool présent dans le liquide.

Je me sentis prise entre deux feux. Premièrement parce que je tenais pas à repousser une nouvelle fois son invitation et deuxièmement parce qu'une ancienne tentative de suicide aux médicaments et aux whisky m'avait transmit une aversion totale envers toutes formes d'alcools. Après un instant d'hésitation je décapsulai la bouteille à main nue puis trinquait avant de porter le goulot à mes lèvres. Pas la moindre goutte ne glissa dans ma bouche. Je fis seulement semblant de boire en même temps que lui. Par chance l'obscurité ne lui permettait pas de discerner le contenu de la bouteille.

-Tiens on dirait qu'il y a quelque chose devant-nous...

Je profitai du fait qu'il se penchait en avant pour mieux regarder afin de renverser une partie de la bière par-dessus mon épaule. Le liquide doré s'échoua dans le sable une dizaine de mètre plus bas. Lorsque le Kawaguchi reporta son attention sur moi. Il put de nouveau me voir en train de faire semblant de boire.

-Visiblement ce n'était qu'un fennec. Je trouve qu'il y en a de plus en plus par les temps qui courent...

Je manquai alors de m'étrangler non pas avec ma bière, mais avec l'air que j'étais en train d'inspirer lorsqu'il voulut me poser des questions sur Saibogu Oniri. Mauvaise idée. Je n'étais pas sûre de savoir quoique ce soit sur elle. Il voulait des anecdotes ce qui était assez ironique par le fait que j'avais à la fois mille et aucune chose à raconter.

-Heu...

Il était difficile de se faire une opinion objective de soit-même. J'avais encore peine à croire que le jeune homme n'était toujours pas parvenu à me reconnaître.

-Tout le monde s'accorde à dire qu'elle a vraiment mauvais caractère...

Sérieusement c'était l'image que je me faisais de moi ? Bravo !

-Je crois-même qu'elle fait peur à beaucoup de gens...

Il était rassurant de constater que je me considérais aussi comme un monstre. Le plus triste dans cette histoire étant que je n'arrivais pas vraiment à me trouver de qualité, tout du moins en tant que conseillère.

-Mais si vous voulez tout savoir je pense qu'elle en fait trop. Elle tient tellement à vouloir protéger tout le monde qu'elle se surmène plus que de raison. C'est ce qui la rend si peu amicale. Le genre de fille à ne jamais prendre de vacance et à ne penser qu'à son devoir au détriment de sa propre vie. Vous voyez le genre ?

Là ce n'était que les paroles de Kioshi que je répétai bêtement. Pourtant elles semblaient prendre un tout autre sens en sortant de ma bouche. Je me sentis ridicule. Mon unique œil valide se posa sur la bouteille dans ma main. L'idée de me saouler pour oublier ma honte devint soudainement très tentante, mais option de facilité fut rapidement balayée.

Je m'étais jurée de ne plus jamais déborder, quel qu’en furent la façon où les raisons...

Percevoir les villages cachés comme une chose bénéfique? Comment est-elle arrivée à cette conclusion? Ils attisent la méfiance et la rancoeur entre les peuples des différentes nations. Ils incarnent le besoin de violence de chacun d'entre nous et attirent la guerre sur le pays qu'ils sont sensés protégés. Reconnaître Suna comme une nécessité temporaire est une chose, la considérer commme une bienfaitrice en est une autre. Une idée que je peux ni soutenir, ni approuver. Je la laisse pourtant poursuivre tandis que je prends une autre gorgée de bière.

D'après elle nous avons le choix de devenir un shinobi. Pas vraiment si l'on considère que c'est l'un des rares moyens de devenir un acteur du futur voir tout bêtement de sa propre vie. Et d'avoir en prime les moyens de se protéger sois-même sans avoir à compter sur l'aide des autres. J'ai décidé de devenir quelqu'un... Et le chemin passait presque obligatoirement par les cases académie et carrière militaire. Mais on ne m'y a pas forcé au sens où elle l'entend, c'est vrai. Lorsqu'elle m'annonce qu'elle considère que sa famille s'étend à tous ceux qu'elle apprécie, je ne peux retenir un rire amusé.

- "Plus une famille est grande, plus elle est difficile à protéger!" simple remarque. "Le moment venu il vaut mieux ne pas avoir à choisir qui sauver et qui sacrifier..."

Je me limite aux Kawaguchi de mon côté. Et elle? À combien de personnes a-t'elle ouverte son coeur? Suffisamment pour qu'elle se mette en danger le jour où elle devra les défendre d'une attaque? Qu'elle en perde la vie? L'amitié est un concept qui me dépasse et m'effraie à la fois. Combien de gens ont péri en se sacrifiant pour cette idée et les sentiments qu'elle a fait naître en eux? Bien assez pour me dissuader de m'entourer de trop de personnes. Une simple règle de survie qu'Amaelle serait bien avisée de suivre.

- "Je ne partage pas ton avis pour Suna! Elle n'est pas seulement un bouclier mais également une épée. Et donc une menace pour les autres nations qui s'en protègent en retour. Et inversement. Le serpent qui se mord la queue, ça te parle? D'après toi ça va mener à quoi?" la militarisation n'est jamais bon signe. "Kaze se porterait bien mieux sans la cible qu'est Suna..."

Mais c'est discutable. On peut voir le problème sous les deux angles et je peux concevoir son point de vue bien que je le trouve niais. Notre nation a toujours su faire face aux événements du passé. Bien avant que le village caché du sable voit le jour. Et elle continuera longtemps après sa disparition! L'histoire se chargera de me donner raison. Amaelle peut bien penser ce qu'elle désire...

Je regarde dans la direction qu'elle m'indique lorsqu'elle croit avoir perçu quelque chose. Finalement il s'agirait d'un fennec. Je hausse les épaules. Et alors? C'est la première fois qu'elle en voit un ou quoi? Peut-être qu'il s'agit d'un simple animal ou de l'un des gardiens des ruines Kawaguchi. Il faut dire que ces temps elles sont plutôt actives sous l'impulsion - un peu trop - novatrice de Tsukiko. Toujours est-il que la discussion vire sur Saibogu Oniri. Un sujet qui a le mérite de m'intéresser même si les informations que me livre ma voisine sont de bien peu d'intérêt. On peut entendre les mêmes choses dans un bar...

- "Peur?" je hausse un sourcil. "Je ne l'ai jamais vue ou je ne lui ai pas prêté suffisamment d'attention pour m'en souvenir. Mais je serais curieux de voir comment elle peut inspirer un tel sentiment dans le coeur des gens... Qu'est-ce qu'elle a de si effrayant?"

C'est sûrement son côté Saibogu qui fait peur aux gens. Pour leur défense il faut bien reconnaître qu'ils sont sacrément louches dans ce pseudo-clan. Je me ferai une idée moi-même de la conseillère lorsque je l'affronterai. Pour peu que Zanshi m'en laisse l'occasion. En attendant je vais devoir me fier à ce qu'on raconte sur elle. Après tout les rumeurs ne sont pas toujours dénuées de vérité.

- "Si ce que tu dis est vrai, on est mal barrés. Vouloir protéger tout le monde est un merveilleux concept. Mais qui n'est pas réalisable. Il faut quelqu'un qu'elle soit consciente que la mort de quelques-uns est non seulement inévitable mais également souhaitable pour protéger le plus grand nombre. Une personne qui persiste à se murer dans l'illusion et l'idée qu'elle pourra sauver tout le monde nous mène droit dans le mur..."

Je suis peut-être un peu trop pragmatique. Mais au moins j'affronte les choses telles qu'elles sont. On dit souvent que toute les vérités ne sont pas bonnes à dire. Celle-ci en fait sûrement parti. Mais peu importe. Je ne cherche pas l'approbation d'Amaelle et je me contente d'exposer mon avis. Il serait peut-être temps que les gens voient les choses en face et arrêtent de se leurrer avec leurs idées séduisantes mais dépassées...

- "On ne peut pas vivre dans un village militaire et espérer protéger sa population efficacement. Plus tôt elle s'en rendra compte et mieux ce sera..."

Je hausse les épaules et reprends une autre gorgée de bière avant de m'allumer une clope. J'oriente ensuite le nuage vers la route des oasis. Les survoler est toujours un spectacle distrayant et qui change du sable habituel.

- "Et si tu me donnais ton vrai avis sur Oniri Saibogu maintenant? Tu m'as ressorti ce que tout le monde sait ou presque. Tu es une Saibogu non? Même si pour une raison que je ne comprends pas tu ne portes pas leur nom!" et en plus ils se camouflent maintenant! "Tu dois bien savoir des choses en plus que les autres?!"

J'insiste un peu, c'est vrai. Mais l'alcool est sensé favoriser la discussion et j'espère que ma passagère se décoincera rapidement. Après tout je ne la tolère pas à mes côtés par simple charité et j'attends qu'elle se montre au moins un peu utile. De quelque façon que ce soit...

Les propos qui suivirent ne renfermèrent que peu de réels arguments. Je sentais déjà venir un dialogue de sourd que je préférai éviter. On ne changeait pas une personne en un claquement de doigt, mais ce n'était pas faute d'avoir essayé. Dans tous les cas je venais d'en apprendre plus que jamais sur ce fameux Kira. Le pauvre semblait être un bien triste personnage. Bien trop seul et peu entouré. Je me demandai même si les autres membres de son clan lui portaient autant de considération au vu de son mauvais caractère. Quelque part j'avais pitié de lui, même s'il ne s'en rendait pas compte, il n'existait pas pire existence qu'une vie en solitaire mené à l'écart des autres.

Il avait besoin d'ami, cela se sentait vraiment, mais je n'avais guère la patience d'en devenir une. Le jeune homme devrait attendre le déclic pour s'ouvrir aux autres. Ce dernier pourrait très bien ne jamais survenir. Toujours fut-il qu'il revint à la charge avec cette série de questions au sujet de la fameuse Saibogu Oniri au point où cela en devenait assez louche. Que voulait-il vraiment ? Pourquoi elle est pas quelqu'un d'autre ? Je restai un instant silencieuse avant de finalement éclater d'un rire de bon vivant qui sonnait presque forcé. Il n'aurait manqué plus qu'une petite tape dans le dos de Kira afin de compléter le tableau.

-Et bien pourquoi est-ce que vous la conseillère vous intéresse autant ? Auriez-vous le béguin pour elle ? Plutôt qu'une petite tape, il eut droit à un petit coup de coude. Si vous voulez je peux toujours vous arranger une rencontre avec.

Je devinais déjà la réponse, mais il s'agissait avant tout d'un stratagème pour clore le sujet. Son comportement devenait étrangement suspect. On ne questionnai pas aveuglément autrui sur ce genre de sujet sans de quelconques raisons derrière. Et puis, il n'avait aucunement l'air de porter le village dans son cœur. Peut-être devais-je le garder à l’œil. Il était important de garder ses alliés près de soit, mais également de potentielle nuisance en devenir afin de les étouffer directement dans l’œuf. A un moment ou à un autre il fallait bien que je justifie mon poste.

-Et mis à part vous intéresser aux jeunes demoiselles effarouchées avez-vous un réel but ? Je veux dire par là que je vous vois mal vous cantonner à votre petit rôle de Shinobi entrant gentiment dans les rangs. Cela ne semble pas être votre genre, ni votre style, pas plus que ce n'est le mien. Il faut se faire à l'évidence pour nous le village n'est qu'un marche pied, mais pour aller où ?

Je me redressai légèrement sur ce nuage. Pour peux il ne manquait plus que nous nous laissions pousser des queues de singe en plus de porter des bâtons de combat dans le dos et nous aurions formés une fine équipe le tout en bénéficiant d'une sacrée mise en scène. Je ne pouvais cependant nier que changer d'air me faisait le plus grand bien même si j'aurais préféré aborder n'importe quel autre sujet que celui du village.

-Je cherche à avoir les connaissances et la force nécessaire pour pouvoir un jour partir loin et explorer le monde. Il s'agit en quelque sorte du grand rêve que je porte. Et vous quel est-il ?

Le pire étant qu'il ne s'agissait que d'un demi mensonge. Il était étrange de voir à quel point je me comportais différemment en sa compagnie. Lui qui ne me connaissait pas, ou plutôt ne me reconnaissait pas, ne pouvait porter aucun jugement quant à ma personne et n'irait jamais répéter cela quelque part. Et quand bien même il venait à découvrir ma véritable identité, il penserait certainement que tout ce que j'ai pus lui raconter jusqu'à présent n'était qu'un flot d'inepties sans nom.

-Ho un oasis... Vous souhaitez vous la jouer romantique à présent ?

Le taquinais-je gentiment en voyant l'ombre du bassin apparaître au milieu du désert par cette belle nuit silencieuse. De nombreuses plantes desséchées avait germée tout autour, pour le restant il ne s’agissait que roche froide et humide qui donnait naissance à une cette cuve naturelle remplit d'eau.

-A Kaze !

Je tendais ma bière tout en le gratifiant d'un clin d’œil pour l'inviter à trinquer, mais je fis évidemment semblant de boire à mon tour. J'étais déjà parvenu à vider la moitié du contenue de la bouteille en toute discrétion...

M'organiser un rendez-vous avec la conseillère? Et pourquoi pas? Je sais bien que cette offre relève plus de la plaisanterie que d'une véritable proposition. Et pourtant elle ne manque pas de mérite. Après tout ce serait le moyen le plus aisé de l'approcher et de voir quel genre de personne c'est. Mais ce faisant je sortirais de l'ombre et cette Oniri pourrait mettre un nom sur un visage. Chose que je ne souhaite pas pour l'instant. Au final c'est plus prudent de me rabattre sur son dossier de l'Unité plutôt que de la rencontrer en personne.

- "Peut-être une autre fois..."

Mais je garde à l'esprit qu'Amaelle aurait sûrement les moyens de me faire rencontrer la Conseillère. Elle devient un peu plus précieuse. Comme quoi ça peut payer de ménager un peu ses ennemis de temps en temps. Qui sait ce qu'elle pourrait encore mettre sur le tapis au fil des heures? La discussion vire sur nos buts respectifs dans la vie. Vaste sujet! Les miens ne sont pas de nature à être révélés à la première venue. Fusse-t'elle sympathique! Il va donc falloir trouver une réponse bateau à lui offrir pour la contenter. Ce que je m'emploie à faire tout en rigolant vaguement à sa blague.

Mais elle me devance et m'explique que son rêve est d’acquérir les connaissances et la force nécessaire pour quitter Kaze. Mon sourire s'accentue. Son rêve risque bien de se réaliser plus vite qu'elle ne le pense. Les Saibogu seront les premiers à payer lorsque je prendrai le contrôle de Suna ou, à défaut, la détruirai. Et si elle survit à la purge elle devra de toute façon s'exiler. Elle voulait voir le monde? En noble Kawaguchi que je suis, je réaliserai son voeux!

- "Tu comptes démissionner?" étrange... "Ou attendre la retraite? Ce n'est pas toi qui me faisait de merveilleux discours sur le devoir d'un shinobi et sur la nécessité de protéger les plus faibles? Et tu comptes mettre les voiles dès que tu te sentiras prête pour parcourir le monde et en abandonnant ton pays?"

Ce qui prouve bien que les Saibogu ne sont pas réellement des enfants du désert. Pas dans le sens ou je le conçois en tout cas. Je compte bien finir mes jours à Kaze de mon côté. L'amour de cette nation coule dans mes veines et anime chacune de mes pensées. J'ai quitté une seule fois le désert pour Kaminari. Ce voyage m'a permis de rencontrer Zanshi et de me rendre compte à quel point j'aimais Kaze. Je ne partirai plus jamais...

- "Quant à mon but..." que dire? "Je n'aime pas me projeter trop loin dans le futur. Je me contente de prendre chaque jour comme il vient et d'y survivre jusqu'au prochain. Et ainsi de suite... Pour l'instant je me concentre sur l'examen Chûnin et on verra bien après!"

On dirait un Yamada! À la vas-y comme j'te pousse! Mais ce n'est peut-être pas une si mauvaise chose si Amaelle me considère ainsi. Il s'agit de ne pas paraître trop froid et calculateur! Nous arrivons en vue d'une oasis et je me lève pour l'observer. Oui, c'est bien celle de Ker-Bala. Cette dernière possède une particularité que j'exploite à chaque fois que je passe par-là: elle est profonde!

Je me tourne vers la demoiselle et trinque avec elle, répétant à Kaze après elle. Je termine donc ma propre bière et la laisse tomber sur le sol granuleux et pourtant doux de notre moyen de transport. Je positionne ensuite ce dernier à un endroit bien précis au-dessus de l'étendue d'eau. Parfait!

- "Converser avec toi est passionnant. Si si, vraiment!" mais heu... comment dire? "Par contre j'ai un truc à faire alors si tu peux juste m'excuser deux petites minutes..."

Et je me laisse choir dans le vide en tombant en arrière. Un plongeon d'une quinzaine de mètres qui me conduit droit dans les profondeurs de l'oasis. Mon épaule proteste avant d'être apaisée par l'eau fraîche. Il est maintenant temps que ma passagère vienne me rejoindre. Je ne vais pas la laisser squatter mon nuage quand je n'y suis pas. Est-ce qu'elle verra le coup venir? Mon nuage se désagrège presque immédiatement. Il n'en subsiste plus que de petits supports qui retiennent encore en l'air le cadavre du genin qui m'accompagnait ainsi que les bouteilles de bière...

Le petit resta toujours aussi buté dans ses idées et hermétique aux autres. Qu'à cela se tienne, malheureusement cela n'aidait en rien à le rendre plus sociable. Je n'étais par ailleurs nullement certaine qu'il cherche à aller dans cette direction. Cette fois il alla jusqu'à retourner mes paroles contre-moi. Cela n'avait pas vraiment de sens, mais je pris tout de même la peine de lui répondre.

-Il y a une différence entre ce que l'on veut et ce que l'on peut faire. C'est pour cette raison que l'on appel ce genre de chose un rêve. Ils ont pour objectif d'être atteint mais pas nécessairement d'être réalisé...

Je disais cela avec une point d'amertume. Le devoir, toujours le devoir. En réalité je n'étais pas prisonnière de Suna, mais de mes propres choix ainsi que de mes convictions. Elles m'enchaînaient à ces murs tandis que je ne pouvais que rester là à regarder l'aube se lever pour mieux attendre la chute du crépuscule. Ces sentiments contradictoires me menaient la vie dure. Le quotidien de Kioshi était-il ainsi fait ? Si tel était le cas j'éprouvai de la peine pour lui. Vivre toute sa courte vie ; emprunter toujours la même voie pour finalement se rendre compte que celle-ci menait à une impasse...

-Cela reste une bonne chose de centrer ses idées. Quelque part je ne que vous rejoindre. Nous vivons dans le présent. Le passé comme le futur n'ont que peu de place ici.

Je devais certainement être la première à blâmer pour cela. Même si je parvenais à garder la tête sur les épaules durant mon travail, cela était beaucoup plus difficile le reste du temps, cause étant d'un passé chargé couplé à un futur des plus incertains.

Le nuage commença à se stabiliser juste au-dessus de l'oasis. La nuit était toujours pleine et aussi lumineuse. Les étoiles resplendissant encore dans le ciel et les quelques rayons de lune se reflétaient dans les eaux sombres de ce petit refuge naturel. Kira se redressa lentement avant de marmonner quelques phrases dans sa barbe. J'écarquillai les yeux de stupeur. Il n'allait tout de même pas... ? Puis je fus rassurée en le voyant se laisser tomber dans le vide. Moi qui m'attendait à une action bien moins glorieuse et poétique cette idée me plu beaucoup. Mes sens en éveils me permirent de sentir les variations de chakra dans le nuage et ainsi deviner qu'il s'apprêtait à se disloquer. Je profitai de ces quelques secondes d’avances pour défaire une partie du bandage qui entourait mon poignet et ainsi le plonger au contact du défunt Genin. Son corps fut instantanément scellé au niveau de la marque située dans la paume dans ma main. Le pauvre enfant ne méritait pas de se faire ainsi malmener...

La fraction de seconde qui suivit fut à peine suffisante pour me repositionner si bien que je chutai à mon tour dans le vide, fendant à vive allure la bonne dizaine de mètre qui me séparait des eaux de l'oasis. On appelait cela le saut de l'ange. La tête vers le bas, mes bras écartés entrèrent dans le prolongement de mon corps.

-Wow houuuuuuuuuuuuu !

Je n'avais rien de mieux à offrir que ce petit cri énergique avant d'intégralement disparaître sous la surface dans un « plouf » sonore assez peu discret. L'eau fraîche me revigora. J'ouvrais l’œil un instant et senti une membrane se former au niveau de la cornet ce qui me permit de voir aussi distinctement que si j'étais en surface. Sur l'instant je me demandai s'il n'allait pas aussi me pousser des branchies. Après plusieurs secondes passées en apnée je me rendis compte qu'aucun autre changement n'avait opéré en moi. Kira venait de remonter, mais moi je me trouvais plutôt bien ici, dans cette bulle géante entièrement coupée du monde. Les informations exacerbées de mes sens se voyaient grandement atténuées ici. Je pensais qu'il pourrait s'agir d'une solution pour rendre mes nuits plus abordable, mais l'instant n'était pas à la réflexion.

Comme il m'était permit de voir avec aisance, je restai tapis dans les profondeurs empoignant la jambe du Kawaguchi afin de brutalement le tirer vers le fond jusqu'à moi. Je le repoussai alors par les épaules afin de le propulser en arrière avant de reprendre appuie pour remonter la surface. Ma premier goulet d'être frais fut succédé par un rire aux éclats. Trempés jusqu'au os, je me laissai aller en nageant sur le dos jusqu'au bord. De-là je m'adossai contre la pierre, attendant que Kira remonte le bout de son museau. Naturellement je pris soin de relâcher mes sens de sorte à faire disparaître cette aspect animal dans mon regard. Il n'avait pas besoin de voir cela.

-Ho ! Un petit Kawaguchi tout trempé. Dis-je le voyant finalement ressortir la tête. Vous ne m'avez pas l'air bien glorieux ainsi loin de votre sable. Il faut tout de même reconnaître que c'est plutôt rafraîchissant...

J'avais le sourire jusqu'au lèvre encore sous le coup de l'amusement. Et je n'étais pas décidé à en démordre.

-Attention tout de même à ce qu'un prédateur aquatique ne vienne pas vous dévorer.

A ces mots ma chevelure jusqu'alors plaquée contre mon visage s'éparpilla dans l'eau tel un amas de filament immaculés à l'instant où je plongeai avec la ferme intention de m'en prendre à nouveau à lui.

Mmmmh... Je ne sais pas trop si j'aime cet espèce de petit jeu qui consiste à noyer les gens... Je plisse les yeux tout en l'observant. Elle est détendue, allongée contre son rocher. Ce n'est pas vraiment le comportement de quelqu'un qui a quelque chose à se reprocher. Une ruse? J'en doute... Elle n'a pas l'air sournoise. Mais je ne montre pas non plus que je suis du genre à vouloir tuer le Kage... Partant de là, impossible d'être sûr qu'elle n'en a pas effectivement après moi...

Et la voilà qui me nargue de sa voix douce. Elle me fait remarquer que je suis loin du sable. Une menace? Avec un large sourire? Soit elle se fout ouvertement de ma gueule, soit elle est décidément coupable d'avoir simplement voulu s'amuser. Et dans ce cas nous n'avons définitivement pas la même définition de ce qui est amusant... La faire tomber dans l'eau, oui! Qu'elle tente de me noyer, non!

- "Ouais, je suis éloigné du sable! Mais pas toi ma chère..." ce n'est pas l'essentiel? Je lève les yeux en direction des maigres restes de mon nuages. "Hey, va falloir que tu me rendes le macchabée! Je vais avoir des emmerdes sinon!"

Mais qu'est-ce qu'elle en a fait? On vole pas des cadavres aux gens comme ça! Elle qui me sortait de grands discours sur la courtoisie et le vouvoiement... Voilà qu'elle se met à me piquer mes affaires! Nan sérieux faut qu'elle me le rende sinon on va m'accuser d'avoir laissé un camarade derrière. Ce n'est pas par acquis de conscience cependant que je tiens à ramener son corps. C'est plutôt que la plupart des gens estiment que c'est moral. Donc forcément...

- "Et le premier monstre marin qui tente de me bouffer..." Ben il me bouffera j'ai envie de dire! "Bah, y'en a pas de toute façon!"

Si? Est-ce qu'elle a plongé pour m'attaquer? Voilà qu'elle remet ça? Ok ça va chier! J'effectue quelques mudras et soulève des volutes de sable au-dessus de l'eau avant de plonger à mon tour. Je les lâche ensuite sur mon agresseuse après les avoir solidifiés grâce à ma maîtrise du dôton. Bam, bombardement sous-marin! Finalement je commence à bien apprécier ce jeu moi aussi! Car oui, il semble bien s'agir d'un jeu en fin de compte. Mais même pour jouer ça reste agréable d'embêter une Saibogu. Si elle compte me traîner au fond de l'eau, il faudra qu'elle le mérite. Hé ho!

Parallèlement cette demoiselle m'étonne! J'ai toujours perçu ces ingénieurs prétentieux comme des personnages austères, sérieux. Kanpeki n'a pas le moindre sens de l'humour tout comme cette Oniri si j'interprète un peu ce qu'Amaelle m'a dit. Mais elle-même reste modeste et... fraîche? C'est rare de rencontrer ce genre de personnes à Suna. Des gens qui parviennent à maintenir cet équilibre entre la maturité et l'enfance. Je suppose qu'elle vient de rejoindre ces abrutis de Créateurs. Et si elle pouvait encore être sauvée? Être préservée de leur folie...

Peut-être qu'il y a des élus parmi les Saibogu. Qu'il y en a dans leurs rangs qui peuvent être épargnés, autorisés à rester à Suna lorsque j'en aurai pris le contrôle. Ho bien sûr ils seront considérés comme la lie de ma nouvelle société mais ils pourront tout de même remplir des fonctions d'utilité publique. La gestion des ordures, le nettoyage du village ou encore de la simple conciergerie. Oui, peut-être qu'Amaelle mérite d'être épargnée tout compte fait... Ne serait-ce pas une grande preuve de miséricorde?

Pas le temps de divaguer plus longtemps. Je ne crois pas que j'ai touché ma partenaire de jeu et elle doit être sur le point d'attaquer. Reste juste à savoir de quel côté...

Il semblait enfin décidé à jouer. Parfait, cela promettait d'être intéressant. La tête sous l'eau, je m'apprêtai à me saisir de lui quand de minis bombes vinrent éclater à la surface. Mes réflexes aidant je parvins à en éviter une partie cependant l'une me tomba littéralement sur la tête ce qui eu le don de me sonner l'espace d'une seconde. La surface comme les profondeurs se tassèrent le temps que je reprenne mes esprits. Passablement gênée je remontai à la surface avec une boule de bout posée sur le haut du crâne et dégoulinant le long de mes cheveux. Je tirais une mine de déterrée et laissait échapper quelque bulle alors que la partir inférieur de mon visage était encore immergée. Le Kawaguchi eut droit à mon regard le plus assassin. Je me redressai complètement pour lui faire face.

-Tu vas me le payer....

J'attrapais la boue sur ma tête, adoptai la posture d'une joueuse de baseball et lui adressai un sourire un grand sourire blanc avant de lui envoyer le tout en pleine face à une vitesse fulgurante. La seconde d'après je disparaissais sous l'eau avec autant d'agilité que si j'étais un boisson. Je profitai de ma petite diversion pour le contourner et donner de petit coup de pied dans ses jambes de sorte à ce qu'il perdre l'équilibre et à l'obliger à me rejoindre dans les profondeurs. De mon côté je m'engouffrai plus que jamais dans le fond, me plaçant dans un coin entre deux rochers et attendais patiemment mon heure. Il ne me poussai pas des branchies, mais j'étais en mesure de ralentir mon rythme cardiaque de façon à économiser mon oxygène. Ainsi une minute s'écoula sans qu'il ne se passe rien. Je m'arrangeai ensuite à rester dans dos d'eau avant de remonter brusquement.

-Attrape-moi si tu peux !

Je disparaissais à nouveau, telle une taupe s'enfonçant sous terre sans laisser au marteau le temps de s'abattre sur ma tête. En tournant autour de lui je laissai parfois quelques bulles remonter de sorte à lui donner l'emplacement de ma dernière position. Puis lorsque je fus lassée de jouer ainsi je pris appuie sur le fond afin de lui bondir littéralement dessus. Les paumes de mes mains se plaquèrent sans ménagement sur sa joue pour le faire basculer sur le côté sous mon poids plume. Cette fois-ci je ne restai pas sous l'eau, remontant rapidement afin de lever deux poings victorieux au ciel.

-Wouhouuuuuuuu !

Fiers certes, mais certainement pas très belle avoir avec mes cheveux et mes vêtements me collant à la peau de façon débraillé. On ajoutai à cela de belles taches de boues éparses un peu partout sur mon visage et dans ma chevelure d'ivoire pour compléter le tableau d'une gamine venant de s'amuser.

Touchée! Un air victorieux sur le visage, j'observe la Saibogu et la boue qu'elle porte en couronne. Ça lui donne un petit côté sauvage et il faut reconnaître que ça lui va plutôt bien. Et puis ça exprime à la perfection ma supériorité. Même dans l'eau un Kawaguchi est capable de faire face à la plupart des menaces. Amaelle vient de s'en rendre compte à ses dépends. Et sa promesse de me faire payer mon acte ne fait qu'accentuer mon sourire goguenard.

- "Je vais finir par croire que tu aimes ça..."

Et la voilà qui plonge, non sans avoir auparavant eu la délicatesse de me jeter à une vitesse plutôt impressionnante un peu de boue. Je le bloque en partie avec la paume de ma main mais les éclats viennent se loger sur mon visage. On dirait bien qu'elle vient d'égaliser. Fort heureusement elle n'a sans doute pas vu qu'elle m'avait touché. Si? En tout cas elle compte bien ne pas rester sur la défensive...

Quelques secondes plus tard ma nage est perturbée par la demoiselle et je n'arrive plus à me maintenir à la surface. Je prends une grande bouffée d'oxygène juste avant de disparaître sous le miroir de l'eau. Je vois la demoiselle qui disparaît à nouveau dans les profondeurs. Elle retient sa respiration plus longtemps que moi et c'est clairement un désavantage. Et puis tapie dans les profondeurs, elle est en mesure de m'attaquer d'à peu près n'importe où.

*Tu me prépares un sale coup toi...* il y a de quoi se méfier. *Qu'est-ce que tu as en tête, hein?*

De temps à autres des bulles remontent à la surface et je les suis du regard. Leur emplacement change à chaque fois et je suis forcé de supposer qu'elle cherche à m'embrouiller en m'indiquant volontairement sa position. Ou plutôt l'endroit où elle est sensée se trouver. Petite maline, va... J'ai beau savoir que c'est une ruse, je me fais tout de même surprendre par la remontée rapide de la Saibogu. Celle-ci plaque ses mains sur mes joues et m'emporte dans son élan. La physique se charge du reste et malgré son poids plume, je bascule à nouveau sous la surface de l'eau. La bouche entrouverte sous l'effet de la surprise, je manque de peu de boire la tasse.

Quelques secondes plus tard ma tête émerge à nouveau à l'air libre. Accompagnée d'une quinte de toux qui m'irrite la gorge. C'est à mon tour de poser un regard noir sur la demoiselle alors qu'elle exprime sa joie sans retenue. Ok! Je fais quelques mudras au ralenti - dans l'eau c'est moins facile hein? èé - et un pilonne de roche sort du sol, m'emportant dans sa course. Désormais fermement campé à une demi-douzaine de mètres sur mon nouveau perchoir, j'observe la jeune femme.

- "Ne cries pas victoire trop vite, toi!" c'est bien un sourire qui se dessine sur mes lèvres. "Manges ça!"

Une nouvelle série de signes plus tard, le sable qui lèche l'oasis s'anime et se regroupe pour former un cobra de taille respectable. Une technique mise au point avec le Kazekage et qui est normalement dévolue à ma défense. Mais cette fois je compte bien l'utiliser autrement. L'animal de silicium serpente dans les airs avant de s'écraser à l'endroit où se trouve ma partenaire de jeu. Je relâche néanmoins volontairement mon emprise sur ma création qui éclate en pluie de sable peu avant l'impact. De quoi la recouvrir d'une bonne dose de boue sans la blesser. Je vais devoir expliquer la mort d'un genin en rentrant au petit matin. Pas la peine de m'infliger d'autres procédures administratives...

Il faisait son petit malin du haut de son perchoir. Visiblement ce petit homme ne semblait pas capable de s'amuser sans faire usage de ses dons. Soit, c'était dommage. Parfois il ne fallait pas grand chose pour passer un bon moment, mais s'il tenait tant que cela à relever le niveau il pouvait compter sur moi. Je le vis alors composer une nouvelle série de mudra. Il me fallut faire instinctivement attention à ne pas activer mes pouvoirs d'Akuma par mégarde sans quoi le jeu risquait certainement de se transformer en affrontement. Un serpent de sable se matérialisa au-dessus de sa tête, prêt à fondre sur moi à tout instant. Un sourire provocateur de dessina sur mes lèvres, accompagnés d'un regard tout aussi éloquent.

Je pris appuie sur le bord et me hissait avec toute ma force de Kunoichi. Mon agilité naturelle suffit pour me redresser en faisant le poirier. Mes pieds nus humides entrèrent en contact avec le sable et je me redressai avec une grâce digne des plus grands gymnastes. Je m'inclinais alors en croisant les jambes faisant preuve de toujours autant de savoir faire devant sa majesté Kira, alias la terreur de es baque à sable. Mon sourire ne me quittai pas alors que ma tête était penchée vers le sol. Des perles d'eaux glissaient le long de mes cheveux pour retomber en une série de clapotis étouffés par les granulés. Les bras écartés, j'attendais ainsi dans cette posture voluptueuse que monsieur ce décide à passer à l'action.

Ce qui ne tarda pas à arriver. Son imposant serpent se décrocha de son trône des airs pour fondre sur moi à vive allure. J'attendis, sereine. Encore deux mètres. Encore un mètres. Encore cinquante centimètres. Je m'en rendais compte que sa créature était beaucoup trop lente. Alors en un éclaire je dégainai l'un de mes pistolets pour le pointer en direction de cette chose qui n'était plus qu'à quelque centimètres de l'armes. Un coup de tonnerre retenti à l'instant où je pressai sur la détente. Il me parut étrange de constater que le serpent semblant de disloquer avant que la balle ne l'atteigne. Celle-ci poursuivit néanmoins sa course pour traverser la colonne qui soutenait Kira. Elle vola littéralement en éclat sous la violence de l'impact, délaissant le jeune qui s'adonna à une belle chute.

En éclatant le serpent projeta ses gerbes de sable sur moi sans que je n'en prenne compte. Je restai une seconde de plus figée dans ma posture, le bras tendu en avant, l'arme au poing a savourer cette petite victoire. Je soufflais ensuite sur le canon du pistolet avant de le ranger dans son holster.

-On va dire que c'est match nul pour cette fois cela vous va ?

Et dans mon dos je pouvais sentir la chaleur des premiers rayons de l'aube se dresser fièrement. La nuit touchait à sa fin en même temps que cette interlude.

Elle est futée. Mais bien trop confiante... Je me réceptionne sur une mince plateforme de sable à partir des restes encore en lévitation de mon précédent nuage. Derrière-moi le pilier de roche se divise en plusieurs blocs qui viennent perforer la surface de l'oasis. Je déteste les armes Saibogu... Elles sont bruyantes et sans once de subtilité. À l'image de leur créateurs. Arrivé à une altitude plus modeste je me laisse glisser au sol en face d'Amaelle. Cette dernière me propose le match nul.

- "J'ai déjà gagné... Pourquoi j'accepterais?" je hausse les épaules. "Tu as le sens du spectacle, je le reconnais. Ton... ballet était parfaitement exécuté et la puissance de ton tir m'a surpris. Malheureusement tu as oublié un petit détail..."

J'effectue un mudras et le sable dont est recouverte la Saibogu s'anime pour venir former un collet autours de son cou. L'idée de l'étouffer sur place et de me délecter de son regard tandis qu'elle s'éteint est une perspective des plus tentantes. Mais j'ai déjà un cadavre à ramener à Suna et la procédure veut que je réponde à quelques questions sous la surveillance d'un senseur. Ce dernier verrait rapidement que je cache le crime d'Amaelle. Cet acte, bien que séduisant, causera ma perte. Le jeu n'en vaut donc pas la chandelle...

- "Le match nul me va!" le sable retombe sur le sol. "Après tout il n'y avait aucun enjeu pas vrai?"

Je lui décoche un sourire faux-jeton avant de m'allumer une clope. L'aube pointe et un ciel orangé commence à sublimer le paysage qui nous entoure. Il est temps de rentrer. Je dois m'entraîner cet après-midi avec l'un des maîtres en taïjutsu de mon clan. Et je dois encore faire soigner mon épaule douloureuse et trop sollicitée ces dernières heures. Et ça c'est sans prendre en compte la charge de travail supplémentaire aussi stupide qu'inutile que Tsukiko risque de m'infliger par simple plaisir.

Je tire une bouffée et en crache la fumée vers le ciel avant de poser mon regard sur la demoiselle. Je l'observe avec les yeux d'un homme tout en regrettant une nouvelle fois qu'elle ait choisi de rejoindre les Saibogu. Mais si je gagne son amitié il se peut qu'elle m'en apprenne beaucoup plus sur les Créateurs à l'avenir. Une sorte d'agent infiltré qui n'aurait pas conscience de l'être. Cette Amaelle pourrait me révéler bien des secrets pour peu qu'elle me fasse confiance. Et ainsi même me donner les clefs pour détruire son propre clan. L'idée est perverse. Et donc tout à fait savoureuse...

Mais elle demandera du temps. Je sais que les sont naturellement méfiants. Et ce d'autant plus depuis le fausse mort de Zanshi. Il faudra que je la revoie. Et pour qu'elle en ait envie je vais devoir me montrer agréable. Peut-être même me glisser dans sa couche? Vu ce que j'imagine sous ses vêtements trempés je dois bien reconnaître que c'est un prix que je paierai sans trop de difficultés. Toujours est-il que nous n'en sommes pas là...

- "Maintenant si tu voulais bien me rendre le corps de l'autre genin je t'en serais très reconnaissant!" il ne faut pas que je l'oublie celui-là, c'est vrai! "J'dois encore aller expliquer sa mort avant d'aller dormir et j'sais pas toi mais je commence à sérieusement fatiguer de mon côté. Entre le chakra et la nuit blanche..."

Je crée un nouveau nuage de sable sous mes pieds et le laisse me soulever dans les airs. Il est temps de retourner à Suna. Et de subir un jour de plus ses affres...

Non content de faire preuve d'une grande mauvaise foi le jeune Kira se laissa prendre à un jeu dangereux. Se rendait-il réellement compte de ce qu'il était en train de faire ? Je n'avais pas de réponse à cette question, me contentant de simplement conserver mon calme tandis que cet anneau de sable se resserrait autour de mon cou. Une chance que je ne sois pas comme lui sans quoi il serait certainement déjà mort à cet instant. Au lieu de cela je préférai lui faire comprendre par la subtilité qu'il était fortement dans son intérêt de se calmer. Un sourire belliqueux se dessina sur mes lèvres tandis que l'hésitation le retenait de passer à l'acte.

-Allons allons mon cher... Ne soyez pas trop gourmand... Proclamais-je sur le ton de la confidence.

Mon index vint se poser sur mes lèvres en guise de fermeture, lui intimant de garder le silence, mais également d'en rester là auquel cas les représailles lui seraient reversées au centuple. La seconde qui suivit fut déterminante. Le sable composa l'anneau se désagrégea en même temps que la tentation qui s'était soudainement densifiée dans l'atmosphère.

-Sage décision...

Je m'exprimai à nouveau avec la même candeur que durant le restant de la soirée. Seulement celle-ci touchait à sa fin. L'aube était proche et ses quelques premières lueurs naissantes sur l'horizon étaient autant de fléaux sources de mes migraines. Il était temps de rentrer et de m'enfermer chez-moi en attendant la prochaine nuit. Malgré son comportement plus que suspect ce Kawaguchi était parvenu à me faire passer de bons moments en sa compagnie. Pour être franche, je ne savais que trop penser de lui. Était-il un bon élément ? Un imbécile ou bien un futur fléau ? Devais-je le garder à l’œil ? Bien sûr que non. S'il me fallait épier constamment les futurs ni à problèmes présent dans le village je ne m'en sortirais jamais.

Comme il me l'avait si bien fait comprendre ce Kira désapprouvait totalement le système qu’était Suna. Il semblait même l'avoir en horreur. Pourtant il continuait d'y faire son œuvre en bon petit soldat. En somme je ne pouvais lui en vouloir pour cela. Il était si jeune dans sa manière de penser. J'avais un peu l'impression d'avoir eu un adolescent en pleine crise de puberté. Indécis, borné et persuadé d'avoir raison sur toute la ligne. Seulement sa dernière action avait témoigné d'une perversion des plus mal avisées qui portait à croire qu'il finirait par poser des soucis dans l'avenir.

-Oui match nul, cela ira très bien.

Autant jouer sur les apparences et attendre de voir comment les choses évoluent. A en juger par la façon dont il me reluquai, je ne doutai pas qu'il chercherait certainement à reprendre contact avec moi. En tapant dans mes mains je fis apparaître un parchemin dans lequel je transposai le sceau présent sur ma main. Le corps du malheureux genin se trouvait désormais scellé à l'intérieur. Je tendais le tout au Kawaguchi afin qu'il puisse effectuer son rapport en bonne est du forme.

-Oui rentrons à présent. Je commence également à fatiguer.

Ce n'était qu'un demi mensonge. Passé un certain stade d'insomnie on ne ressentait plus la fatigue.