- Les prisonniers nécessitent certaines fois des soins, expliqua un Eisei-nin calmement, sans donner davantage de précision sur les « raisons » de ces soins.

Entre les poux, les combats entre détenus ou la maltraitance des gardes comme la torture de la part des Shinobis de l’Alliance, un médecin avait un futur garanti en termes d’emploi dans ces bas-fonds qu’on pouvait nommer affectueusement les geôles. Ce n’était pas un lieu pour des enfants, direz-vous, cependant être Shinobi n’était pas une question d’âge. Dans un monde où l’on pouvait mourir à tout instant, il n’était que des plus naturels d’apprendre au plus vite. Ajoutons à cela que le bonhomme connaissait déjà d’excellentes bases, indiquant par-là clairement que le cantonner à sauver un petit poisson n’était pas l’exercice approprié.

- Quelques fois, nous avons à abréger leurs souffrances.

A nouveau, si cela paraissait inhumain, voilà une chose des plus naturelles dans ce monde caché aux yeux des Civils. Il n’y avait pas d’enfants de cœurs dans les Ombres, ni de scrupules parmi ces rangs meurtriers. Les rares qui brillaient pour leurs exploits étaient peut-être les rares à ne pas être totalement teintés de pêchés, et de crimes. Et aujourd’hui, en ce grand jour, le jeune Kiseki allait officiellement signer la fin de toute gloire brillante future en commettant son premier crime.

- As-tu les instruments nécessaires ?
- Oui, répondit-il d’une petite voix un tantinet tremblant.
- As-tu peur ?
- NON ! finit par dire le bonhomme avec force. Il n’était pas effrayé par la mort, ayant assisté tous les jours dans le laboratoire de ses parents, mais le faire soi-même était une toute autre chose !

Ils finirent par pénétrer une pièce où se trouvaient deux protagonistes. L’un était attaché au mur par des chaînes, la peau collée aux os et déchiquetée de tout part, et l’autre attendait sagement devant. Cependant, Kiseki ne se rendit pas compte immédiatement de ces deux figures humaines. Il plissait d’abord yeux et bouche et nez face à cette vague d’odeur nauséabonde qu’il sentait malgré le masque blanc mis sur cette moitié de visage.

- Pouah ! ne put-il s’empêcher d’ajouter. L’odeur en lui-même tue n’importe quel vivant !

Cet instant passé, il put enfin observer la seconde personne. C’était une fillette d’à peu près son âge, aussi blanche que du linge – avec les tâches de saletés qui va avec ! -, aussi crasseuse qu’un égout rouillé et aussi souillon qu’un sans-abri. Il se demandait si elle n’était pas l’une des prisonnières à achever.

- Très bien. En ce jour-ci …

Déjà le petit Kiseki n’écoutait pas. Il savait ce qui lui restait à faire : un simple produit à injecter dans les veines.

- Attend ! ordonna soudainement l’eisei-nin. Tout d’abord, le Mamoru doit répondre à la demande du prisonnier. Ce dernier semble vouloir une sorte de confession … ou revoir un proche.

Effectivement, avant même que Kiseki ne puisse demander ce qu’il se passait, le prisonnier suppliait d’une frêle voix de revoir l’âme de son défunt ami pour s’excuser d’une histoire de traîtrise. Déjà le petit bonhomme riait sous cape : il ne croyait pas en l’occulte !

L'endroit empeste la mort, la sueur ou les déjections. Le liquide encore tiède qui coule sous les pieds nus de Setsuko doit d'ailleurs sans doute être de l'urine. L'évidence se confirme quelques instants plus tard lorsqu'une odeur caractéristique vient titiller son nez. Est-ce le condamné à mort qui exprime ainsi sa crainte de perdre la vie? La gamine aimerait le rassurer, lui dire qu'il rejoindra bientôt un monde meilleur. Un monde exempt de souffrances dans lequel il trouvera enfin la paix. Mais elle lui mentirait... La mort n'est qu'un passage, certes. Mais qui mène aux ténèbres...

*Vous allez l'emmener n'est-ce pas?*

L'interrogations de la jeune Heishi se limite aux frontières de son esprit mais elle sait pourtant qu'il l'a entendue. C'est le silence qui persiste encore de longues secondes jusqu'à ce qu'un grondement sourd se manifeste. Elle sait que les autres personnes présentes ne l'entendent pas, qu'elles ne perçoivent pas sa présence ou le danger qu'il représente. Et c'est sans doute mieux ainsi... L'obscurité à laquelle Setsuko est coutumière semble encore s'amplifier, gagner en noirceur. Et lorsqu'elle sent un souffle à la fois chaud et glacial dans son cou suivit d'un ricanement guttural à son oreille, elle ne peut réprimer un frisson qui se propage violemment le long de son échine.

*Après toutes ces années je peux encore sentir la peur qui te ronge en ma présence...*

L'adolescente déglutit avec peine et se pince les lèvres sans réellement s'en rendre compte. Bien sûr qu'elle le craint! N'importe que le craindrait... Et cette terreur qu'il lui inspire ne doit rien au hasard. Elle ne sait que trop bien de quoi l'entité est capable. Et qu'il attend à une réponse à ce qui ne semblait pourtant pas être une question...

*Oui, je vous crains! Comme vous le désiriez...*
*Et comme il se doit!*

Setsuko retient sa respiration tandis que la noirceur autours d'elle semble encore s'accentuer. Elle a l'impression d'être en apnée quelques trop longues secondes avant de finalement sentir la pression se relâcher. La gamine pose alors le regard sur lui. On dit que la lumière illumine les ténèbres. Mais sa présence les assombrit encore davantage... Grâce à ses dons occultes la fillette distingue l'aura de l'entité sans percevoir sa véritable apparence. Peut-être parce qu'il ne le souhaite pas... Pourquoi? Ça fait longtemps qu'elle ne cherche plus à comprendre les désirs ou les buts qui régissent l'existence d'un démon...

Elle l'entend se déplacer d'un pas lourd autours des autres humains de la pièce. Il les jauge, les renifle. Est-ce son futur repas qu'il recherche ou une nouvelle source de distraction? Setsuko baisse son regard vitreux en direction du sol et joints ses mains jusqu'à ce qu'on la sollicite. Et ce n'est pas lui qui s'en charge mais bien ceux qui l'ont faite venir en ces lieux dans l'idée de permettre au condamné de parler avec un proche décédé. Malgré ses interrogations la fillette ne sait pas vraiment s'il s'agit d'une bonne chose ou non, d'une faveur ou plutôt d'une punition supplémentaire. Mais... soit!

Ainsi invitée à faire son office, Setsuko s'avance de quelque pas à tâtons avant de se mouvoir avec la grâce d'une personne voyant normalement. Sa main y veille et guide celle de la gamine jusqu'au prisonnier attaché. Elle sait qu'il apprécie cette situation. Il s'en régale et elle sent sa puissance grandir alors que le désespoir du captif augmente. L'enfant passe ses doigts sur le visage de l'homme pour en saisir les contours. Il est mal rasé mais a la peau ferme. Il doit être jeune. Mais y'a-t'il un âge pour être confronté à l'évidence de la mort?

"Tu es la... sorcière?"
"Je préfère Setsuko..." corrige-t'elle dans un léger murmure. "Mais oui, je suis celle que tu as demandée!"
*Tues-le!*
"Je..."
"Merci d'être venue!"
*Tues-le où personne ne quittera cette pièce vivant!*

Il n'est pas patient. Et il n'aime pas se répéter. Ce que Setsuko l'a forcé à faire... Elle est parfaitement consciente que la désobéissance à un prix. Mais elle ne peut que spéculer sur ce dernier. La gamine serre les dents quand une coupure apparaît le long de son avant-bras avec suffisamment de discrétion pour ne pas être perçue. Mais nul sang ne s'en écoule. La souffrance sans les désavantages biologiques qui en résultent. Juste de la douleur. Encore et encore. Jusqu'à ce qu'elle obtempère. Il n'y a pas d'autres échappatoires que la soumission absolue. La mort ne viendra jamais la délivrer tant qu'il ne le souhaitera pas. C'est un fait avec lequel l'adolescente a du très vite apprendre à composer...

"Est-ce que tu... Est-ce que tu peux me faire entrer en contact avec lui? Je t'en prie! Je dois apaiser ma conscience et purifier mon âme en lui demandant pardon pour mes péchés! S'il-te-plaît!"
"Tu..."
"'il-te-plaît, majo! Je dois lui parler! Je le dois!"
*Maintenant!*

La fillette sursaute à cause de la puissance de la voix du démon qui se tient juste derrière elle. Elle se reprend et caresse la joue de l'homme avec douceur. Puis elle approche maladroitement ses lèvres de son oreille. D'une doigt elle active alors un sceau qu'elle appose délicatement sur le torse du condamné. Non pour l'aider à communiquer avec celui qu'il a trahi mais pour le paralyser entièrement. Quelques secondes s'écoulent avant que Setsuko prenne enfin la parole dans un second murmure uniquement adressé au captif.

- "Ton âme ne peut être sauvée... Je suis désolée! Dès que tu seras mort un démon viendra te la voler pour la condamner aux abysses. Tu ne trouveras jamais le repos..." est-ce qu'il comprend ce que ça implique? "Ta fin marquera le début d'un cycle de douleur qui à son tour annoncera le suivant. Et tu ne pourras pas y échapper. Jamais. Tu es condamné à souffrir pour l'éternité..."

La gamine se contente d'exposer un fait. Sans une quelconque forme de cruauté ou d'empathie. Peut-être qu'il aurait été plus humain de lui cacher la vérité Mais aurait-ce été juste? Elle ne le croit pas! Et il ne le croit pas non plus. Dans le fond c'est tout ce qui importe...

- "Maintenant tu vas mourir. Mais je vais faire ça bien. N'aies pas peur... La mort fait partie intégrante de la vie, elle la sublime. Ce ne sera pas long." elle marque une pause. "Essaie de penser à quelque chose de réconfortant tant que tu le peux encore et... laisses-toi juste aller."

Elle dépose finalement un baiser sur la barbe mal taillée puis enfonce lentement la lame qui a pris place dans sa main dans le torse de l'homme. L'adolescente ne voit pas les yeux du mourant se fermer mais entend sa respiration ralentir, saccader puis disparaître dans une dernière expirations quelques instants plus tard. Elle reste alors immobile et prononce quelques mots dans une langue n'existant plus avant. Voilà, c'est fait!

*C'est terminé...*
*Ça le sera quand je l'aurai décidé. Pas avant!*

Il enveloppe le cadavre de son corps et en extirpe une lueur grisâtre qu'il dévore. Puis il disparaît comme il est venu et l'air semble à nouveau pur. Du moins autant qu'il peut l'être dans cet environnement. Setsuko soupire puis retire la lame du corps, la glisse dans son étui puis se retourne maladroitement pour faire face aux personnes présentes qu'elle repère grâce à leur respirations ou leurs odeurs respectives.

"À présent il communique avec les morts. Selon son souhait... et le vôtre."

La gamine reste un instant immobile en ne sachant pas vraiment si ce justificatif est acceptable ou non. Mais c'est le seul qu'elle soit en mesure de leur fournir sans trop s'écarter de la réalité. Il y a des choses que ses nouveaux collègues n'aimeraient pas savoir. Et encore moins voir de leurs propres yeux... Setsuko fait un pas en avant et se rapproche de l'odeur la plus puissante. Celle d'un jeune de son âge si tant est que la voix qu'elle ait entendu avant lui appartenait bel et bien.

"Tu devais tuer cet homme n'est-ce pas?" son empressement de tout à l'heure tend à le confirmer. "Je suis désolée mais c'était à moi de le faire. C'était mieux pour tout le monde. Toi y compris..."

Il ne comprendra certainement pas qu'elle l'a fait pour leur sauver la vie et non pour assouvir une quelconque pulsion ou désir. Comment le pourrait-il? Peut-être qu'il sera un brin frustré, qu'il verra l'intervention de la part de la demoiselle comme un désaveu de ses talents. Quoi qu'il en soit il devra se contenter de cette pseudo explication. En attendant il a éveillé sa curiosité.

"Laisses-moi te toucher!"

Cet avertissement à peine donné, Setsuko cherche à tâtons le visage de son interlocuteur avec ses mains encore pleines de sang - celui du cadavre mais également le sien, ce dernier s'étant mis à couler dès son départ - et de crasse. Le tout en tentant de faire abstraction du fumet de désinfectant que le jeune homme dégage. C'est... répugnant!

• Une Sorcière ? s’étonna Sana Kiseki. Et soudainement, un fou rire incontrôlable lui prit.

En sa qualité de Scientifique, il ne croyait nullement aux forces de l’Occulte, et encore moins lorsque le Chakra était un élément perturbateur qui expliquait plusieurs phénomènes spectaculaires ou illogiques d’un point de vue purement physique. Cette soi-disant « Âme » ou « Second Monde » n’était sûrement qu’une énième variante des affinités primaires ou secondaires ! En effet, cela pouvait être du vent ou du feu maîtrisé à un niveau tout autre. Ajoutons à cela que si la personne était dépourvue de stabilité mentale alors, effectivement, c’était la porte ouverte pour toute bêtise.

• Sérieusement, c’est de la pure bêtise. Une telle chose n’existe pas ! finit-il par dire avec force et conviction pendant que le prisonnier et la souillon échangeaient.

Soudainement, et impuissant, Kiseki assista à un « vol ». Cette fillette venait de voler sa première réelle victime et, plus important, elle venait de gâcher un cobaye pour son nouveau mélange mortel ! Il avait utilisé les ressources mises à disposition par l’Empire pour confectionner un poison qui paralysait un corps, tout en le tordant intérieurement de douleur. A priori, il avait espéré voir des muscles et os bougeaient anormalement pour en sortir violemment, dans une fontaine de sang ! Non, au lieu de ça, il mourrait d’une simple lame ! Abomination !

• ESPECE DE VOLEUSE ! hurla-t-il soudainement, fou de rage.

Autant dire, lorsqu’il vit les mains ensanglantés se diriger tout droit vers son visage, il y tapa avec force de sa main gantée de latex blanche. En plus de « voler » un corps, elle tentait de le rendre malade avec cette main gluante, sale, porteuse de plus d’un virus.

• Allez allez, calmez-vous, finit par dire l’Eisei-nin.

Déjà le Shinobi poussait les deux jeunes enfants vers l’extérieur, disant qu’il avait à s’occuper de débarrasser la cellule de ce corps, de le nettoyer afin qu’elle puisse accueillir un nouveau prisonnier. Cependant, loin de la laisser faire et maniaque qu’il est, il finit par attraper par les poignets fragiles de la fillette et la diriger vers la première salle d’eau autorisée aux prisonniers.

Pourquoi cette salle d’eau surtout ? Car il y avait toujours ce fameux arrosoir pour les prisonniers récidivistes.

• Sincèrement, on devrait jeter ses guenilles au feu, te raser de la tête au pied et te frotter au savon jusqu’à ce que tu saignes ! disait-il. Même une défécation sent plus bon que toi, je te jure !

La jetant contre un mur, réglant la température de l’eau, il fit gicler soudainement ce liquide clair et limpide vers la demoiselle. Ce n’était ni froid, ni chaud, mais tiède.

L'impression de faire le bien, ce qui est juste. Ou plus précisément d'opter pour la moins pire des options... Et ne recevoir en retour que du mépris et de la haine. Le geste du jeune homme qui vient de frapper violemment ses mains tendues avec nul autre intention que de la curiosité arrache un petit cri de surprise à Setsuko. D'ordinaire les gens se montrent plutôt patients et tolérants lorsqu'ils se trouvent en présence d'une aveugle. Les handicapés ont le don de faire naître la compassion chez les gens qu'on s'accorde à qualifier de normaux. Du moins dans l'extrême majorité des cas...

*Tu vas le laisser te traiter de cette manière? Tues-le! Fais-le et ils te regarderont avec respect et crainte!*
*Non...*
*Il est juste en face de toi! Il te suffit de fendre l'air de ta lame et de lui trancher la gorge. Un petit geste. Un simple petite geste. Tu l'as déjà fait.*
*Les humains n'aiment pas tuer. Ils ne sont pas semblables aux kamis. Et je ne suis pas comme toi!*
*Non?* Son rire glacial tord les tripes de la gamine. *Détrompes-toi Shōjo, ils adorent ça! Ils n'ont rien à envier aux créatures du Yomi. Leur cruauté peut parfois même égaler la nôtre. Mais tu t'en rendras compte bien assez vite...*
*Je refuse de le croire!*
*La vérité ne peut être niée et encore moins ignorée. Tu es faible Setsuko. Et les faibles se font écraser par les forts dans le monde des humains. Il ne tient qu'à toi de choisir le camp dans lequel tu veux être.*

Elle ne veut pas mourir. C'est évident. Chaque fibre de son corps lui hurle de survivre. Mais sa tête lui commande de préserver son âme. Elle vit un enfer au quotidien depuis qu'il la faite sienne. Cependant même les plus longs cauchemars ont une fin. Et si la gamine ne peut pas jouir d'une existence terrestre paisible voir normale elle n'oublie pas pour autant qu'un autre monde se cache celui des humains. Et qu'un jour ou l'autre elle y trouvera le repos pour peu qu'elle parvienne à préserver son âme. A-t'elle vraiment le choix? Il lui vole une vie. Elle ne le laissera pas s'emparer d'une deuxième. C'est à cette pensée que s'accroche l'enfant pour garder une étincelle d'espoir. Un espoir qu'elle désire et dont elle a surtout besoin...

La troisième personne leur demande de s'en aller. Ou plutôt le leur commande comme Setsuko peut en juger à la pression douce mais ferme qu'elle exerce dans son dos pour qu'elle quitte la pièce. Et dès que la porte se referme derrière eux c'est main qui se referme autours de ses poignets et qui l'entraîne sans ménagement dans les couloirs. S'aidant de son bras libre pour éviter les obstacles, elle est finalement libérée puis aspergée d'eau sous pression qui la plaque sans ménagement contre le mur froid.

"Qu'est-ce que tu fais? Arrêtes! Arrêtes!"

Le jet fouette sa peau et lacère ses pauvres haillon puis sa peau. Des plaies à peines refermées s'ouvrent à nouveau et des volutes de sang se mêlent à l'eau qui s'écoule. Setsuko se recroqueville alors du mieux qu'elle le peut pour éviter la morsure aqueuse qui semble interminable.

"Arrêtes!!!"
*Tu ne veux toujours pas le tuer?*
*Non!*
*Je pourrais le faire pour toi tu sais?*
*Je... Non!*
*Il te suffit de me le demander et je prendrai possession de ton corps pour faire ce que tu es incapable de faire. Une chose que malgré tout tu désires. Tu n'as qu'un seul mot à dire Shōjo...*
"J'ai dit NON!!!"

Le stress et la douleur l'ont poussée à s'exprimer à voix haute. Une chose qu'il lui a formellement interdite lorsqu'elle s'adressait à lui afin de ne pas éveiller les soupçons. La désobéissance entraîne une punition. Elle le sait. Mais elle n'a pas le temps de regretter sa faute ou de craindre ses conséquences que déjà elle sent son corps s'engourdir et son esprit s'assoupir. Et lorsqu'elle ouvre une nouvelle fois les yeux ces derniers sont teintés d'une couleur violacée qui n'était pas présente auparavant.

"Spmetgonl port neib... Spmetgnol tiasiaf aç." la langue est incompréhensible et le ton guttural. Son regard se pose sur Kiseki. "Iom ceva reuoj xuev ut? Toûg ed evuerp tiaf niamuh nu dnauq iecérppa'j euq erid siod ej te srevrep xuej sel remia selbmes ut."

Cela fait quelques mois qu'il n'a plus possédé sa protégée. Si tant est que le mot sois adapté... La gamine se fend d'un rire mesuré, haché. Puis elle tourne la tête sur le côté et se redresse sans prêter attention au jet d'eau qui continue de fouetter son corps presque entièrement dénudé. Setsuko souffre. Pas lui.

"Snouoj! Srola..."

Prisonnière de sa propre chaire mais malgré tout consciente de ce qu'il se passe, la Mamoru lève la main et se griffe la joue. Du sang chaud s'écoule sur cette dernière puis le long de son cou. Elle hurle mais aucun son ne sort de sa bouche. Elle se voit ensuite effectuer quelques mudras puis apposer un sceau sur le sol humide. Des volutes de fumées verdâtres s'élèvent de ce dernier pour former le corps de deux humains.

Les parents décédés de Kiseki apparaissent finalement et posent le regard sur leur fils. La mère lui sourit et le père a une attitude transpirant la fierté pour la chaire de sa chaire. Ils s'approchent de lui gentiment avant de finalement l'entourer de leurs bras aimants. Le tout tandis qu'il observe la scène avec un sourire et un regard qui ne reflètent pas la moindre humanité. Il penche encore davantage la tête sur le côté avant de lever ses deux mains. Les esprits des deux disparus se retrouvent alors attirés inexorablement vers lui jusqu'à ce qu'il referme ses doigts sur leur gorge. Où ce qui en tient lieu.

"Xued sed leuqel riovas ed tse noitseuq al etuote? Erbil ares ertua'l, ardneitrappa nu'l. Erèp not te erèm at" le sourire s'accentue jusqu'à faire saigner les deux extrémités des lèvres de l'enfant. "Ut-sevuas iuq te? Ut-senmadnoc iuq?"

C'est tout lui, ça. Il aime proposer des choix particulièrement pervers. Setsuko essaie de crier pour avertir le jeune homme qu'il est forcé de choisir. Qu'un refus ou qu'une négation de ce qui est en train de se passer entraînera la perte de l'âme de ses deux parent au lieu d'une seul. Mais son cri se perd dans les méandres de son esprit désormais devenu une prison.

"Iot ruop essaf el ej ueq tnava! Sisioch!""

Est-ce qu'il comprend seulement ce qu'il lui demande? Et les portées du choix qui lui est offert? Impuissante, Setsuko tente de lutter contre la possession mais son emprise est écrasante. Il resserre davantage les doigts de la demoiselle autours des cous des deux esprits et il les soulève du sol sans la moindre difficulté. L'heure du choix est venue...

- Hummm, elle se relève, marmonna-t-il en arquant les sourcils.

Scientifique dans l’âme, il ne tarda pas à calculer la force de ce jet ainsi que la force de la maigre corpulence de la petite fille. Le verdict contredisait la situation : elle ne devrait pas pouvoir se relever ou faire face à un jet d’eau avec autant d’aisance. Cela devait être encore un talent Shinobi … Il soupira longuement. Son soupir ne se fit que plus puissant lorsqu’elle se mit à parler d’un langage non « humain » et « référencé ». Cependant, il ne prit pas cela à la « légère » : il ne manquerait plus qu’elle soumette sa personne à une étrange illusion !

- Franchement, j’ai connu mieux en charlatan.

Soudainement, il pâlit. Il voyait le « spectre » de ses deux parents. Il finit cependant par éclater de rire, ignorant royalement les recommandations et menaces étranges de Setsuko possédée – chose qu’il ne prenait pas au sérieux, évidemment. Fou de rire, il finit par enlever ses lunettes pour les essuyer, ainsi que les larmes qui commençaient à perler aux recoins de ses yeux d’amande.

- Ils sont vivants ma pauvre fille. Tu viens tout juste de prouver que tout ce que tu fais n’est qu’une arnaque !

Inconsciemment, dans sa grande ignorance et stupidité – et irrespect – il venait inconsciemment de condamner l’un de ses parents. Qui donc ? Il ne saurait dire, car il aimait les deux profondément, les seuls êtres qui l’importaient réellement.

- Je te remercie cependant, je me dis qu’il serait temps de leur rendre visite pour montrer le grand homme que je suis devenu ! proclama-t-il fièrement.

Vous vous interrogerez : n’avait-il pas peur ? Ne ressentait-il pas ce froid spectrale qui touchait son âme directement ? Oui, mais il était un « médecin » et un « rationnel » : il ne croyait nullement à ces histoires d’esprit. Tout avait une logique, et une explication ! La vie n’était qu’une algèbre complexe qu’il fallait maîtriser pour y régner en maître, et il comptait bien y réussir par des faits concrets et non par des hallucinations dues par quelques poudres et champignons !

- Sincèrement, ça suffit.

Il releva le doigt, et un petit éclair en sortit. Il ne tarda pas à lancer ces filons bleutés vers le sol mouillé qui était directement en contact avec la « Souillon » - jamais il ne lui donnerait la joie de l’appeler la « Sorcière –, ce qui produisit sans surprise un « beau » spectacle de son et de lumière. Mais n’ayez crainte jeunes âmes sensibles, il n’avait concentré que très peu de raiton sur le bout de son doigt et ainsi, hormis sombrer à l’inconscience, elle ne risquait rien.

Aucun arrêt cardiaque, aucune paralysie durable inutile … Juste une paralysie temporaire suivie sûrement d’un petit sommeil au vu du nombre de bêtises qu’elle venait de débiter en l’espace de quelques minutes.

- Avec ton teint blanc, tu ne dois pas connaître le concept du sommeil. Je te fais une fleur à nouveau, disait-il sincèrement, se pensant âme charitable.

A nouveau, et surprise, Setsuko se releva … mais en bougeant étrangement. Il faut avouer, il commençait à être « agacé » : comment tenait-elle encore debout. Las, il doubla à nouveau cette dose de Raiton … elle lâchera un moment ou non ?

Toujours prisonnière mais consciente de ce qu'il se passe, Setsuko fait ce qu'elle peut pour tenter d'avertir le jeune homme. Elle lutte, s'acharne et s'obstine. Mais la pression sur son esprit est si forte qu'elle n'arrive à rien. Elle se bat dans le vide, contre quelque chose sur laquelle elle n'a aucune chance de prendre l'ascendant. Mais elle ne cherche pas à remporter une victoire qu'il est vain d'espérer. Non... Elle souhaite plutôt qu'il l'écrase, qu'il la fasse tomber dans l'inconscience pour qu'elle n'ait pas à ressentir ce qui va inévitablement arriver depuis que leur interlocuteur a opté pour la défiance. Il l'a déjà fait et il peut le refaire. Setsuko ne veut pas être la spectatrice d'un spectacle qui la révulse.

Et il semblerait que finalement sa demande soit exaucée. Elle ressent un choc violent qui les paralyse alors que l'électricité se propage dans son corps possédé. Et l'enfant sombre dans l'inconscience en même temps que son enveloppe charnelle. Elle n'a dès lors pas conscience de se relever alors que cette dernière s'anime sous sa volonté. Simple marionnette sous l'influence d'un pouvoir qui la surpasse. Il se redresse, les esprits toujours en mains. Et la persévérance de l'enfant qui continue son assaut raïton brûle la plante de ses pieds, dégageant une odeur de chair grillée et noircissant cette dernière peu à peu.

"Niem el eriaf ressial em ed tse ic-iulec te! Xiohc not tiaf sa ut cnod isnia." son sourire s'accentue davantage et continue de déchirer la commissure des lèvres. "Riov sel ed énnod tiaté't li'uq siof erèinred al trse'c rac ueida reul-sid!"

Il ne prend pas la peine de tenter de convaincre son vis-à-vis de la véracité de cette scène qui défie la logique et la raison. Les humains sont marqués par un scepticisme qu'ils ont acquis au cours des âges lorsque la science a peu à peu commencé à se substituer à la religion. Il est vain de vouloir les changer. Mais pas inutile de leur faire payer leur arrogance. Se mouvant comme un cadavre doué d'un semblant de vie, il approche les esprits des parents de Kiseki vers sa bouche. Les dents s'apprêtent à se refermer sur ces derniers.

"Je t'aime mon petit génie! Ne l'oublie jamais!" glisse la femme avec résignation.
"Nous..." renchérit son époux.

Ce seront leurs derniers mots. L'étau se resserre et leur lacère le visage. Puis la fumée qui les compose s'estompe pour l'éternité. Ils sont désormais ses esclaves. De simples jouets entre ses griffes. Et la souffrance deviendra le lot quotidien de leur non-vie. Le médecin vient de faire une erreur qu'il aura tout le temps de regretter lorsqu'il s'en rendra compte. Mais il sera trop tard. Bien trop tard. Et ce qui a été fait ne pourra alors plus être défait. Certaines choses ne permettent pas un retour un arrière. Et il s'agit souvent de celles qu'on aimerait le plus pouvoir changer. Cruelle ironie...

"Eétucéxe ecnetnes al te écnonorp étéa tcidrev el!" annonce-t'il de sa voix d'outre-tombe. "Eudner cnod tse ecitsuj am!"

Il garde le regard violacée de Setsuko sur l'enfant encore quelques instants puis tourne de l'oeil et tombe comme une pierre sur le sol quand il quitte l'enveloppe charnelle. Mais il a laissé un petit cadeau à sa... protégée en lui insufflant assez d'énergie pour qu'elle reprenne connaissance. La gamine lâche tout d'abord une expiration qui s'approche du râle et se redressant à moitié. Puis repose l'arrière de son crâne sur le sol recouvert d'un mélange d'eau, de sang et de crasse. Elle observe alors le plafond sans, évidemment, le distinguer. Elle en a marre de tout ceci. Plus que marre!

"Tues-moi!" glisse-t'elle simplement. "S'il-te-plaît..."

La demande ressemble à une supplique. Elle ne peut plus en endurer davantage. Sa chair est meurtrie au moins autant que son âme. Survivre... Voilà ce qu'elle fait depuis qu'elle est née. Mais son existence n'a rien d'une vie. C'est simplement un avant goût du Yomi. Un prélude à l'enfer. Et il est temps que cela cesse.

*Te tuer?* l'idée semble l'amuser. *Vraiment?*
*Je veux que ça s'arrête!*
*Peut-être... Mais ton existence ne t'appartient pas! Tu es ma propriété, ma chose. Et je ne me suis pas encore lassé de toi! Sois certaine que je te tuerai moi-même lorsque tu ne me seras plus utile. Mais d'ici là n'espère pas t'évader de la vie sans mon consentement. Ce serait... stupide de penser que ce choix te revient. Stupide et dangereux!*
*Pourquoi?* il ne répond pas. *Pourquoi est-ce que tu t'acharnes sur moi?*
*Je ne suis nullement tenu de te donner une réponse. Mais si tu cherches une raison à tout ceci dis-toi que c'est le... comment disent les humains déjà? Ha oui, le destin!*

Son rire emplit à nouveau la petite pièce et lui vrille les tympans. Du sang commence à s'écouler de ses oreilles et se mêle une nouvelle fois à l'eau qui tapisse la pièce. Setsuko soupire puis se redresse avec peine pour se mettre à quatre pattes puis debout. Elle écarte une mèche de cheveux trempés de son visage marqué par la lassitude. Se fiant à la respiration du jeune homme pour se tourner dans sa direction, elle reprend la parole:

"Le jour où tu prendras conscience de ce qu'il s'est réellement passé dans cette pièce, ne t'en veux pas trop! Ça n'aurait pas pu se terminer autrement. Même si tu avais choisi par toi-même!" elle marque une pause. "Et ne m'en veux pas non plus s'il-te-plaît..."

Il y a assez de haine pour noircir son existence sans y ajouter encore celle de ses congénère. Ses épaules s'affaissent et son visage se déforme sous l'effet de la tristesse. Les lèvres tremblantes, les sourcils à moitié froncés, elle tombe une nouvelle fois à genoux et éclate en sanglots. Ses larmes se mêlent au fluide vital qui s'écoule des extrémités de ses lèvres déchirées. Et par pudeur ou instinct elle se détourne du garçon pour qu'il ne la voit pas ainsi. Recroquevillée dans un coin, elle trouve un semblant de réconfort.

"Maintenant va-t'en!"

Seule elle est et seule elle restera. Il y veillera. Et c'est ainsi qu'elle a le plus de chances de protéger les gens qui l'entourent de ce démon qui s'acharne sur elle depuis bien des années. Le destin...

« Pourquoi elle saigne autant ?! » s’étonna-t-il. Certes, il envoyait des décharges mais rien de mortel ou de sanglant. Certes « tuer » n’était pas si dérangeant mais il craignait un tantinet les répercussions sur ses futures recherches – il ne voulait pas perdre une quelconque subvention ou aide de l’Empire pour ses recherches ! -. Cependant, malgré la crasse et le sang et l’eau, elle finit par dire quelques mots. Elle parlait de choses incompréhensibles pour Kiseki – de choses qu’il ne voulait pas comprendre, à vrai dire – et se cachait tantôt.

- Tu risques de tomber grièvement malade comme ça. Faut t’habiller.

En fait, c’était gênant. C’était la première fois qu’il voyait une « demoiselle » avec des courbes tout simplement. Au fil des jours, son regard changeait petit à petit vis-à-vis de la gente féminine, s’attardant sur les courbes prononcées des adultes ou sur les courbes naissantes et disproportionnées des filles de son âge.

Il sortit finalement sa main, et actionna un sceau. Aussitôt une tenue de médecins tout neuf, tout beaux, tout propres et tous repassé finit sur son bras. Sans plus tarder, il tendit à la demoiselle mais, face à son inactivité, il toussota et finit par lancer sur sa tête.

- Franchement, prends une bonne douche et habilles-toi ! Tu fais pitié !

Dans le fond, il fallait avouer, il avait été un tantinet impressionné. Il fallait qu’il trouve la « ruse » et qu’il la démonte aussi aisément.

- Je suis un génie, et je peux prouver par tous les moyens que tout est faux. Hop, relèves-toi, que je détruise ton argumentation comme il se doit et scientifiquement, et galamment.

Non, il ne pouvait pas apprécier une victoire s’il ne démontait pas l’argumentaire de la demoiselle sur les esprits si elle était si « faible » et si mal en point. Il voulait admirer le désarroi et la colère d’avoir lu la supercherie dans son regard ! Par contre, ses plans démoniaques prirent vites fins lorsque son regard s’attarda sur les oreilles d’où s’écoulaient du sang. Il arqua les sourcils.

- Non mais qu’est-ce que tu es faible ! Tu n’es pas censé saigner ! s’insurgea-t-il. Je ne veux pas m’attirer d’ennui avec l’administration, moi !

Oubliant tout virilité ou pensées déviantes, il mit par la force le manteau, et la traîna discrètement dans les couloirs pour la sortir de la prison. Mais trop tard, car déjà un garde tomba sur eux.

- Vous faites quoi ici les gamins ?
- Tu crois … des prisonniers ?
- Des gamins, malgré tout.

L’un soupira.

- Dispute entre vous ? Toi, tu vas à l’infirmerie, et toi, tu vas me suivre aussi à l’infirmerie. Et une fois soignée, je veux un rapport de la situation.

Il en avait marre. Il aurait dû la tuer quand il avait eu sa chance …

« Je déteste les filles ! Trop compliquées ! » soupira-t-il en suivant contre gré le garde.

Quel pénible... Pourquoi est-ce qu'il s'obstine à me côtoyer alors que je lui inspire du dégoût? Je reste silencieuse et agrippe les vêtements que le jeune homme m'a maladroitement jetés. Ce garçon semble vouloir se prouver que ce qu'il vient de se passer n'est qu'un tour de magie habilement orchestré. Je suis aveugle et pourtant je perçois les manifestations occultes. Comment peut-il encore douter de quoi que ce soit alors que ses yeux fonctionnent parfaitement? Il m'a souvent répété que mes congénères cherchent toujours une explication rationnelle à ce qu'ils ne peuvent comprendre. Gommer la crainte par la connaissance. Une chose qui me semble sensée. Mais il existe des choses qui ne peuvent être - et ne seront jamais - expliquées...

"T'es vraiment borné..."

Je soupire et déglutis avec peine. La gorge en feu et les oreilles en sang, je n'ai qu'une seule envie: être seule. Et de toute évidence c'est trop demander... Ça ne fait pas longtemps que j'ai rejoins ce que les bien-pensants se targuent d'appeler la civilisation. Mon expérience de mes semblables est largement surpassée par celle que j'ai du contact avec les entités du Yomi. Mais je suis pratiquement certaine que je suis tombée sur un cas. Enfin... Ce n'est pas comme si j'étais chanceuse d'ordinaire.

"Dégage!"

Ma requête se perd dans le flot de paroles du garçon. Elles sont comme un tsunami que je n'ai pas la force d'arrêter et que je suis obligée d'affronter. Je n'ai pas davantage la force de lui résister lorsqu'il m'habille et me traîne à sa suite dans les méandres de la prison. Résignée, j'attends simplement qu'il se lasse du jeune homme et qu'il m'en débarrasse. Mais il tarde à revenir. La situation doit sûrement l'amuser. Sois maudit!

Les choses évoluent lorsque nous tombons - littéralement dans mon cas - sur une patrouille et qu'elle nous dirige vers l'infirmerie. Je soupire à nouveau. Ils pourront me soigner tant qu'ils le voudront. Ce n'est pas moi qui vais m'y opposer. Mais il rouvrira mes plaies aussitôt que les médecins auront le dos tourné. D'après lui les blessures forgent le corps et l'esprit, les renforcent. Quelque part je suppose qu'il a raison...

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Les bandages recouvrent mon corps et gênent mes mouvements. Et il est revenu. Assis au pied de mon lit il m'observe. Moi et quelqu'un d'autre. En me concentrant je reconnais la respiration de celui qui est responsable de tout ceci. S'il avait pu ravaler sa fierté quelques instants nous n'en serions pas là. Je hais déà cet endroit. L'odeur de désinfectant me donne à elle seule à la nausée. Et bloque mon sens olfactif. Je veux quitter cet endroit. Tout de suite!

*Si tu te voyais...*
*Ça serait le cas si un démon ne m'avait pas rendue aveugle!* je ne suis pas d'humeur. *Mais merci, j'apprécie l'ironie de la remarque!*

La réaction est immédiate: ce qui lui serre de main saisit ma gorge en un instant avant de la serrer peu à peu. Pourtant ce n'est pas une punition pour ma désinvolture. Lorsque sa langue se balade sur mon visage avec un mélange de délicatesse et de perversité, se mêlant à son souffle glacial puis à un rire grave, j'en conclus qu'il s'agit d'une forme d'encouragement. Une appréciation positive.

*Il y a longtemps que tu n'as pas été si... vivante.* un long silence ponctue sa remarque. *Cet humain a réveillé quelque chose en toi. Ta fierté peut-être? Mmmh...*
*On dirait que vous l'appréciez...*
*Et il semble évident que ce n'est pas ton cas. Ce qui en fait tout naturellement une personne apte à t'apporter certaines choses que je n'arriverai jamais à t'enseigner. Des leçons que seul un humain peut donner à un autre humain.*
*...*
*Tu passeras du temps avec lui!*

Je renifle de dédain et provoque à nouveau son rire. Côtoyer ce garçon? L'idée m'insupporte. Rien de bon ne sortira de tout ceci. Mais je ne contesterai pas ses ordres. Je ne souhaite pas souffrir inutilement. Les deux options qui s'offrent à moi? Obéir ou être forcée d'obéir. J'ai rapidement appris que la première option était préférable à la seconde. Les souvenirs m'assaillent un instant puis des bruits de pas me ramènent à la réalité. Les personnes qui nous ont arrêtées veulent visiblement obtenir des réponses à leurs interrogations. Très bien!

"Ce garçon..." je désigne maladroitement l'endroit où j'estime que Kiseki se trouve. "... m'a entraînée dans les douches en profitant de ma cécité. Il m'y a fait subir des sévices. J'ai été électrocutée et dénudée. Vous nous avez trouvés peu après, quand il m'entraînait je-ne-sais-où. Qui sait ce qui aurait pu arriver si vous n'aviez pas été là pour l'en empêcher.."

Ce n'est pas vraiment un mensonge. Plutôt une omission d'une partie de la vérité. Il se rapproche de moi et je le sens me humer le cou. Pourquoi fait-il ça? Avec le temps j'en ai conclu que c'est ainsi qu'il flaire les intentions des humains. Avec une justesse impressionnante par ailleurs. Il doit sans doute se demander ce que je suis en train de faire. Mais il ne m'interroge pas. Il préfère faire sauter les points de sutures de mes diverses plaies. Les bandages qui les recouvrent se teintent presque immédiatement de sang. Le tout tandis que je grimace en retenant une plainte de douleur.

*Je... Je l'appâte!*
*Vraiment? J'ai plutôt l'impression que tu essaies de me désobéir en l'éloignant. Peut-être en le faisant emprisonner?*
*Non! Il veut comprendre ce qu'il s'est passé dans les douches tout à l'heure. Tant qu'il n'aura pas de réponse il continuera de me harceler. Encore et encore. Plus je le repousserai et plus il reviendra.*
*Je l'espère pour toi...*

Le danger semble écarté pour l'instant mais la menace reste présente. Confiante, j'attends la réponse du garçon à mon accusation. Il arrivera sans doute à se disculper. Je suis curieuse de voir de quelle manière il s'y prendra. Et j'espère qu'il se montrera convainquant. C'est dans notre intérêt...

regards hostiles se tournèrent immédiatement vers lui suite aux accusations un tantinet déformé et exagéré de la brunette. Il fallait avouer, il ne s’était pas attendu à celle-là. Peut-être que les hommes avaient raison au sujet des femmes : il fallait toujours s’en méfier, et ne jamais leur laisser le loisir d’ouvrir leur clapet, si ce n’est durant une nuit nuptiale – que disait les pirates de Nami no Kuni !

- Non mais non ! Elle s’est dénudée d’elle-même ! Elle puait de trop, alors je me suis dit qu’un bain ne serait pas de refus ! Ses vêtements sont tombés d’eux-mêmes en morceau sous l’eau, pour dire à quel point c’était bouffé par la crasse, les termites et tout ça ! Et je ne l’ai pas électrocuté par pur plaisir ! Elle commençait à délirer, en prétendant je ne sais quoi, ou en montrant soi-disant les âmes de mes parents, alors qu’ils sont vivants ! J’ai voulu la sortir de son délire !

Les regards passèrent de l’énervement, à l’étonnement pour finir par de la pitié. Si Kiseki ne croyait nullement aux talents des Mamoru, ceux du Shukai y croyaient. Et ils comprirent bien vite que le petit homme ne savait pas pour la mort de ses parents. Autant dire, la situation était tendue : ils ne pouvaient pas l’engueuler en lui disant que tout était vrai, et donc que c’était de sa faute … mais également lui dire que ses parents étaient morts. Ils ne pouvaient pas non plus le laisser ignorant tant des talents Mamoru que de la réalité …

- Ecoutes-moi petit … Tes parents …
- VIVENT ! Et ils vivent à Nami no Kuni, à rafistoler quelques pirates ! Personne n’ose les toucher, car ils sont nécessaires ! Et ils sont trop jeunes pour mourir ! C’est une folle, je vous dis ! Aucune hygiène de vie, une double personnalité … Elle a des troubles psychologiques, elle devrait être accompagnée au lieu de vagabonder dans des lieux encore plus crasseux !

On tentait de lui expliquer, il refusait d’écouter. Finalement, quelqu’un le claqua violemment, suffisamment pour qu’il en voie quelques étoiles. IL se tut obligatoirement, et écouta les paroles de ces hommes et femmes. Mais plus ils insistaient, plus ils se résignaient, et plus son regard se fit noir vis-à-vis de la brunette.

« Tu vas me le payer » se promit-il.

- On va appeler tes parents Setsuko … Où vivent-ils ? s’hasarda les gardes.

Sans parents les deux, les Shinobis firent plutôt appels à un responsable « social » qui se chargeait de les raccompagner au domicile respectif de chacun.

- Je veux qu’on dépose Setsuko en premier ! annonça l’enfant. J’ai pas envie de rentrer tout de suite, mentit-il.

En fait, il voulait savoir où vivait cette fille, connaître l’environnement et trouver ainsi la raison de sa folie ! Il allait prouver à cette « méchante fille » qu’elle faisait tout ceci que pour attirer l’attention sur elle !

Je l'écoute me décrire comme une femme qui n'a que peu de respect pour son corps ou sa réputation. Bon... Je suppose qu'il n'a pas tout à fait tort. Mais à ses yeux on dirait que je suis l'une de ces personnes qui monnaient leurs chairs contre quelques ryos. Comme celles qui se trouvent en haut de la rue des rochers. Ma tête se tourne de gauche à droite pour marquer ma désapprobation. Il s'est attaqué à moi sans aucune raison digne de ce nom. Et si je n'ai pas été irréprochable dans ma façon de présenter les choses, il l'est encore moins que moi.

Mais je n'ai pas envie de me plonger dans un débat stérile. Ce jeune homme est borné et il me l'a déjà fait comprendre. Et puis maintenant que mes plaies ont été soignées - jusqu'à ce qu'Il les ouvre à nouveau - j'ai envie de quitter cette prison et son infirmerie. Retourner dans la rue, là où l'air est bien moins vicié qu'ici. J'en suis à me questionner sur les chances d'être libérée dans les prochaines minutes quand les propos des gardes me tirent de ma rêverie. Ces derniers deviennent des alliés lorsqu'ils tentent de faire comprendre à Kiseki que ses parents sont effectivement morts. Ravie de constater que les arts Mamoru sont considérés comme crédibles par certains membres du Shûkai. À juste raison par ailleurs...

Mais leurs protestations sont étouffées dans l'oeuf par le garçon qui tente d'expliquer la situation par mes soit-disant troubles psychologiques. Mes doigts se resserrent sur mes draps. Comment ose-t'il dire ça? Comment peut-il me juger alors qu'il n'a pas la moindre conscience de ce qu'est mon existence? Ma main se porte sur le sceau qui renferme mon poignard mais Il m'empêche de l'activer. Ses griffes se referment sur mon avant-bras et bloque instantanément mon mouvement. Je me résigne et me contente d'un soupire agacé pour signifier ce que je pense de tout ceci.

"Mes parents ne sont plus." pas la moindre trace d'émotion. Je me contente d'énoncer un fait. "Les contacter est une option largement hors de votre portée."

Moi-même je n'y arrive pas. À mon avis Il leur a fait subir le même sort que les géniteurs de Kiseki. Une deuxième mort. Définitive cette fois-ci. Les gardes semblent se contenter de notre réponse et de la situation et s'éclipsent quelques temps. Je reste silencieuse, allongée sur le lit, jusqu'à ce qu'une nouvelle personne fasse son apparition et nous propose de nous ramener chez nous. Bien. Cet improbable chapitre de mon existence semble sur le point de trouver son épilogue. C'était sans compter sur le jeune médecin qui souhaite qu'on me ramène en premier. J'imagine sans aucun problème les remarques dont il me gratifiera une fois que l'on sera arrivés à destination. Mais je tirerai sans doute de la satisfaction à le sentir patauger dans un environnement qui doit sans doute le révulser. J'y trouve une certaine consolation.

"Ramenez-moi en premier, oui. J'habite près du quartier sud."

Je sens des bras se glisser autours de mes épaules et sous mes genoux. Le nouveau-venu m'arrache à la gravité terrestre et scelle également son sort. Il tue tout ce qui me touche sans son autorisation. Il prend parfois du plaisir à laisser mes congénères avoir un quelconque contact physique avec moi. Kiseki ou encore Van-senseï par exemple. Mais les autres voient inévitablement leurs existences se terminer dans les jours qui suivent l'acte. J'aimerais pouvoir l'avertir, lui recommander des mettre ses affaires en ordre avant de passer de l'autre côté. Mais ça ne ferait que précipiter l'échéance.

Nous retrouvons enfin l'air libre et je prends une profonde inspiration. La capitale regroupe un mélange de senteurs qui ne sont pas toutes agréables. Mais qui restent tout de même préférables à l'odeur de mort et de stérilité qui régnait dans la prison puis l'infirmerie. Grâce à mes indications nous nous retrouvons rapidement dans l'une des zones les plus malfamées du Shozaichi. Le genre d'endroits ou la loi impériale est à peine respectée. Et seulement quand c'est dans l'intérêt des résidents...

"Encore dix-neuf pas tout droit. Ensuite il faut tourner à gauche et en faire quinze de plus. Et nous serons arrivés!"

Une fois sur place je reconnais l'odeur d'urine, d'excréments et de neige viciée. Nous sommes arrivés. Je m'extirpe des bras de l'homme qui me porte et cherche à tâtons un tonneau à moitié défoncé. Un léger sourire s'installe sur mes lèvres quand je reconnais ma demeure.

"Merci pour votre aide!" j'essaie de faire bonne mesure. "Je vous inviterais bien à prendre le thé mais je manque un peu de place."

Je me glisse dans le tonneau et fouille l'intérieur jusqu'à retrouver un morceau de pain déjà entamé. Il est rassis mais peu m'importe. Mes dents se referment sur la nourriture à moitié congelée que je mâche néanmoins avec plaisir. Les clochards ne m'ont pas volé mes maigres ressources pendant mon absence. C'est souvent ceux qui en ont le moins qui se montrent les plus généreux et sympathiques. Ce n'est pas par hasard que je vis comme eux dans cette ruelle. Aussi étrange que cela puisse paraître, je me sens bien avec les marginaux. Peut-être parce que je fais partie de leur famille...

"Tes parents sont morts Kiseki! Tu peux renier l'évidence et continuer à chercher une explication scientifique à ce que tu as vu. Mais tu ne la trouveras jamais. Je suis la seule à posséder les réponses. Et plus tu attendras pour les obtenir et moins je serai disposée à te les donner."

J'espère lui donner une raison supplémentaire de revenir me voir. Car c'est ce qu'Il désire. Je me recouvre d'un reste de couverture crasseuse et disparaît dans l'ombre du tonneau. Home, sweet home...

La demoiselle était orpheline. Aussitôt un sourire triomphant naquit sur ses lèvres : cette arnaqueuse solitaire projetait sa solitude sur autrui, et tentait de communiquer son apathie et sa tristesse à son monde. En somme, aux yeux de l’enfant, elle jalousait son bonheur soit une famille, de l’intelligence et un style merveilleux. Fier de cette déduction, il releva ses lunettes sur son nez par habitude, et lança un sourire victorieux à la demoiselle. Ce croissant de lune s’élargissait encore plus lorsque la noiraude accepta d’être la première que l’on déposait à son « logis ».

La surprise n’en fut que plus grande lorsque les différents protagonistes, soit Kiseki et l’accompagnateur, découvrirent que le domicile n’était qu’un tonneau dont la seule richesse était un pain rassis. Si le petit homme voulut ouvrir la bouche pour indiquer que l’hygiène déplorable de la fille était plus que compréhensible mais l’accompagnateur ne lui laissa guère le temps. Il commençait déjà à parler, et à s’exclamer dans tout cela.

« Quelle misérable ! »

- Il te faut un logement plus décent, en tant que Shinobi de l’Empire ! commença l’accompagnateur. Tu ne peux continuer à vivre dans un tel lieu … Tu peux tomber malade à tout moment, tu seras fatiguée …

Sous-alimentation, fatigue, maladie … La Déchéance Humaine dans toute sa splendeur ! Pendant que l’adulte parlait à l’enfant, le Médecin sortit ses gants ainsi qu’un masque pour se protéger contre d’éventuelles vermines bactériologiques. Il toucha par-ci et par-là du tonneau, regarda à l’intérieur sans impunité et grimaça tout le long.

- Vous allez nous accompagner, afin que l’on vous attribue un logement décent, décida l’accompagnateur.

Il leva les yeux au ciel, lassé par tant d’amour niais à l’égard de cette pauvre folle. Pour sa mécréance, elle ne méritait que misère et pauvreté et humiliation. Silencieux, encore et toujours, ils marchèrent jusqu’au prochain logis du Médecin. Ce dernier ne vivait ni dans un appartement de luxe, ni dans un tonneau, mais tout « simplement » dans un laboratoire aménagé. Si la première pièce menue était réservée pour une longue liste de produits, d’ouvrages et d’expériences. A part, dans une petite pièce fermée et blindée se situait sa chambre.

- Au cas où mes expériences explosent, se justifia le petit face à un accompagnateur crédule et étonné.
- Dans quel monde vit-on ? se demanda-t-il.

Il voulut également emmener l’enfant devant les Autorités Shukajins mais, contrairement à la noiraude, il avait bien plus de ressources.

- Je ne reçois d’ordre que de l’Empereur lui-même. Voyez-vous, je suis son Médecin personnel, et je fais partie de son impériale équipe. Il m’autorise à continuer mes recherches en privé, sans avoir la constante nécessité de me déplacer à un laboratoire !

L’argument de l’Empereur … Voilà l’argument imparable qui dérangeait plus d’un !

Spoiler:

Ils n'ont pas l'air très convaincus par mon logement. Pourtant il me suffit amplement. Un toit pour me protéger de la pluie, un peu de paille comme couchette et un drap en guise de porte pour me couper du froid. Qu'ont-ils à y redire? Je ne suis peut-être pas aussi confortablement installée que la majorité des habitants du Shozaichi mais c'est amplement suffisant. Tout ce luxe éloigne les gens de la nature et leur fait perdre de vue l'essentiel. C'est peut-être ironique pour une aveugle de penser ainsi. Mais je tiens à rester proche des plaisirs simples de la vie. Et le meilleur moyen pour ça, j'imagine, c'est d'adopter un mode d'existence tout aussi modeste...

"Je suis très bien installée ici, merci!" je m'installe à l'entrée de mon tonneau. "Saviez-vous qu'un philosophe célèbre vivait ainsi? Un jour un grand seigneur est venu lui rendre visite, intrigué par sa façon de vivre. Il lui a demandé s'il pouvait faire quelque chose pour lui. Et le philosophe lui a simplement répondu de changer de place car il lui masquait le soleil. On devrait tous prendre exemple sur cet homme vous ne croyez pas?"

Les rares fois où j'ai osé exprimer ce genre d'avis on m'a considéré comme une cinglée. Et le silence qui répond à ma question semble également aller dans ce sens. Je soupire et me repère en posant l'une de mes mains sales contre le mur. Chaque petite aspérité, chaque défaut de ce dernier m'est familier. J'en conclus rapidement que ma demeure se trouve à ma gauche. Je la trouve et tente de m'y installer avant de me raviser.

"Ceci dit... Je pourrais tout de même voir ce que vous avez à me proposer? Par curiosité? On ne sait jamais..."

Je n'ai pas changé d'avis. Mais inévitablement nous allons faire un détour pour ramener Kiseki chez lui. Et comme nous allons faire le chemin depuis mon tonneau je vais pouvoir mémoriser le nombre de pas que je dois faire et les directions que je dois prendre pour rejoindre sa maison. Je le retrouverai rapidement. Pratique.

Je donne ma main à notre accompagnateur et trace donc une carte mentale du chemin que nous empruntons. Ce qui m'impose le silence et une grande concentration. De temps à autre je pose discrètement un sceau invisible sur la façade d'une maison ou à l'angle d'une rue. De quoi me repérer plus aisément, ma cécité ne m'empêchant pas de discerner ces derniers. Ils émettent une jolie couleur blanche et m'indiquent des directions à suivre. Lorsque j'en aurai recouvert la cité je pourrai alors me déplacer sans l'aide d'un guide ou d'un esprit. Je gagnerai pas ma de temps.

Nous arrivons finalement chez Kiseki et l'odeur de son laboratoire est la même que celle qu'il porte. En plus accentuée. J'imagine un endroit tout blanc, aseptisé. Vide de tout meubles superflus. Mes narines sont agressés par le désinfectant et les fumets de diverses potions ou autre. Mais je fais tout de même l'effort de découvrir l'endroit en posant volontairement les mains un peu partout. Kiseki n'aimera pas ça. Je ne sais pas vraiment si je le taquine ou si je cherche à l'énerver. Mais en tout cas ça m'amuse!

"Tes expériences risquent d'exploser? Je croyais que tu étais plutôt doué, moi." j'attrape la balle au bond, m'incrustant dans la conversation. "Ben tu feras attention alors. Je n'ai pas envie que tu viennes toquer un jour sur mon tonneau parce que tu es à la rue. On serait trop serrés! J'anticipe hein?"

Un vague sourire pour ponctuer ma remarque et nous voici repartis sans la médecin. J'abandonne en route l'accompagnateur en prétextant avoir changé d'avis et me voici sur le chemin du retour, suivant les signes lumineux que mes sceaux dégagent. Mes pieds brûlés me font toujours mal malgré les pansements. Et la journée a été éreintante. À en juger par la chaleur que le soleil dégage et la fraîcheur ambiante, c'est la fin de l'après-midi. Mais je vais déjà aller me coucher je crois...