A Suna, la journée touchait à sa fin. Les derniers ninjas partis en mission s'en revenaient enfin et les premiers tours de garde commençaient. Dans le quartier Kawaguchi la vie régnait encore, des enfants couraient dans la longue rue bordée d'habitation en tout genre, profitant des quelques minutes leur restant avant d'être rappelés par leurs parents, ici et là des ninjas discutaient et parmi eux deux Sunajin : Kira et Tsukiko. Ces deux là cherchaient quelqu'un et demandaient à ceux qu'ils croisaient s'ils n'avaient pas vu un de leur semblable : Saijirô. Les réponses s'enchaînaient, toutes semblables : non.

Ce fut alors, à tout hasard, qu'un vieil homme barbu les interpella.

- "Saijirô, le borgne ? Il est parti dans le désert, vers les ruines du clan, en début d'après midi. Vous l'y trouverez peut-être. Les informa le patriarche en frottant sa barbe blanche. Il les observa s'éloigner et haussa les épaules. Vraiment mal polis les jeunes d'aujourd'hui... Se plaignait-il."

Maintenant, le village n'était plus qu'une faible lueur au milieu d'un désert plongé dans les affres de la nuit. Quitter Suna à cette heure éveillerait les soupçons, ainsi; les deux Kawaguchi décidèrent de remettre la probable rencontre au lendemain.

Le jour de retour et Saijirô toujours absent; les deux comparses se décidèrent enfin à le retrouver. Plusieurs plus tard, ils arrivèrent sur place et pénétrèrent dans les ruines du labyrinthe. Après quelques couloirs parcourus dans la pénombre, une lumière les attira. Et là, se tenait face à une vieille stèle entrain d'essayer de lire quelque chose, un homme d'un bon mètre quatre vingt dix, la chevelure blonde et un œil manquant. Il se retourna brusquement en observant les deux ninjas et soupira...

- "La batarde et son toutou... Qu'est ce que vous foutez là les gamins ? Vous n'avez des pâtés de sable à faire, ailleurs ? Leur lança-t-il de sa voix rauque et nonchalante."

Saijirô se demandait véritablement ce que ces deux là faisaient ici. Et surtout, pourquoi étaient ils là, enfin, devant lui ? Encore un coup du vieux, se disait-il.

Les jours s’écoulaient nonchalamment sous le regard de la demoiselle posée presque constamment sur sa terrasse personnelle, un thé à la menthe non loin de sa main. Le ciel ensoleillé de Suna était remplacé par le temps grisonnant et pluvieux de Ki, le sol sablé par un sol humide et boueux, le brouhaha des quartiers Kawaguchi par les appels de détresse des habitants d’un grand arbre-mère … Plus important, quelques fantômes apparaissaient sous ses yeux, notamment celle de la défunte Saibogu Lina.

- Et peut-être, vais-je mourir à mon tour ? conclut-elle, lançant un regard critique à sa jambe paralysée suite à une blessure importante lors de la catastrophe de Ki no Kuni, ainsi qu’au masque qui ne trônait jamais loin d’elle, qui la protégeait des grains de sable ou de la poussière lors des journées harassantes. Comme si la jambe n’était pas suffisante, un poumon avait été transpercé.

Elle aurait dû mourir il y a quelques semaines, mais elle était encore là, malgré une peau cireuse et des bouts de doigts bleuis. Tout ceci grâce aux soins puissants immédiats de Ketsueki Yami.

« Pourtant, me voilà inutile sur le terrain ». A bien réfléchir, ce n’était guère si « mauvais ». Au contraire, c’était un mal pour un bien car maintenant, elle pouvait se permettre de se poser au sein du village, et de s’investir davantage dans la « paperasse », et avoir accès à certaines informations. Entre autre, un petit récapitulatif de la situation familiale et du parcours militaire d’Umi Ji.

- Appelez Kawaguchi Kira, demanda-t-elle à la seule domestique de la maisonnée.

Ce garçon vint quand il le put. Elle attendit d’être seule avec pour lui tendre la missive d’Umi Ji pour Kawaguchi Kajiro.

- J’ai fait quelques recherches sur Ji. Elle existe bel et bien, son parcours est sans faute, son rapport psychologique n’indique aucune défaillance … En somme … Tout peut être vrai. Peut-être aimes-tu croire immédiatement, mais j’ai encore des doutes car, soyons clair, c’est tout bonnement « énorme ».

Elle ne savait quel autre mot choisir pour qualifier la situation.

- Ainsi, on va discuter avec Kawaguchi Kajiro. Si lui aussi confirme les dires de Ji … alors, eh bien. Je ferais mon choix.

Si tout ceci était vrai, Kira avait déjà fait son choix devant Umi Ji. Pour sa part, elle avait montré plus de réserve. Elle ne souhaitait nullement – encore – s’investir docilement et passionnément dans une cause « perdue ».

- Avant qu’on n’aille à sa rencontre, aurais-tu une idée de comment on va … l’interpeller ? Comment engager la discussion ? Plus important, doit-on lui donner la lettre tout de suite, ou le faire patienter ? Mieux, devrait-on parler de la lettre immédiatement, ou cacher jusqu’à la fin, comme une garantie, au cas où ?

Oui, la demoiselle allait reposer son jugement sur les paroles de Kira. Ce jeune homme disait vouloir être le représentant des Combattants, c’était maintenant ou jamais qu’il avait à faire ses preuves pour que Tsukiko ne le soutienne qu’avec plus de ferveur lorsqu’elle sera chef de clan – si elle l’était, évidemment.

Cela fait déjà quelques temps que Tsukiko et moi sommes rentrés de Kaminari et malgré mon désir ardent de discuter avec Kaijiro de cette rencontre avec la Godaime j'ai du prendre mon mal en patience. Ma cousine a été détachée à Ki no Kuni pour venir en aide aux survivants de ce tremblement de terre qui a fauché tant de vies. Je suis bien content de ne pas avoir été sélectionné pour m'y rendre et y jouer les bons samaritains. Qu'est-ce que ça peut bien me foutre que nos voisins soient dans la merde? Chacun ses problèmes...

J'ai passé les derniers jours à m'entraîner sans adresser la parole à quiconque hormis les membres de mon propre clan. Et je n'ai évidemment parlé à personne de la teneur de notre mission à Kaminari. Je compte bien rester aussi discret que possible sur le sujet tout simplement parce que je ne veux pas prendre le moindre risque que d'autres apprennent que la Godaime est en vie. Comme tout bon joueur de poker qui se respecte, je ne veux pas dévoiler ma main avant d'être certain de remporter la mise... N'est-ce pas la plus élémentaire des prudences?

Mais ma patience n'est pas infinie et je suis de plus en plus pressé de passer à l'étape suivante de notre plan. À savoir rencontrer notre cousin et lui remettre enfin la missive confiée par Zanshi. Pour en apprendre plus sur la suite des événements, pour respecter la parole que j'ai donné à cette dernière et également pour rapprocher davantage Suna de sa perte. Aussi lorsqu'un messager du clan vient m'avertir que Tsukiko souhaite me voir je ne me fais pas prier pour aller à la rencontre de la blonde. Je passe même sur le fait qu'elle me convoque comme si j'étais un simple valet dont elle peut disposer à sa guise!

Je survole les demeures du quartier sur mon habituel nuage de silicium et parviens enfin à la hauteur de sa terrasse personnelle. Tsukiko est dans un sale état et une idée fugace me traverse l'esprit: et si je l'achevais? Vu ses blessures je doute qu'elle puisse m'opposer une résistance autre que symbolique. Je plisse les yeux en pesant le pour et le contre puis arrive à la conclusion que j'aurai sans doute encore besoin d'elle dans le futur. Se priver d'une alliée contre les autorités n'est certainement pas la meilleure des choses à faire en l'état actuel des choses. Dommage... Je saute de mon nuage et me réceptionne sur la terrasse, une main en appui sur le sol pour amortir ma chute.

- "Salut cousine!" je lui fait un petit salut en écartant deux doigts de ma tempe. "En pleine forme à ce que je vois..."

Oui, ça m'amuse! Avec un peu de chance ses blessures lui feront comprendre qu'elle n'a rien à gagner en servant le village. Même si elle n'a pas eu le choix... Encore une fois elle a la preuve que s'investir pour Suna n'est rien de plus qu'une idiotie qui conduit bien souvent à la mort. Les Kawaguchi n'ont pas à mourir pour défendre les autres et encore moins les étrangers. Peut-être que ça lui servira de leçon. Je l'espère en tout cas...

Elle me tend la missive que Zanshi nous a confiée et j'observe le rouleau un bref instant avant de plonger mon regard dans celui de la blonde. Cette dernière m'explique qu'elle a fait des recherches sur Ji et me résume en quelques mots le parcours de cette dernière. Je suppose qu'il s'agit de l'ancienne binoclarde, celle qui n'avait aucun avenir avant que la Godaime décide de prendre possession de son corps et peut-être même de son âme. Je hausse les épaules et prends place en face de la demoiselle avant de boire un peu de son thé à la menthe. Visiblement Tsukiko semble encore sceptique quant à la véracité de cette histoire. Et semble me reprocher la rapidité avec laquelle j'ai cru à l'histoire de l'ancienne Kage.

- "Pourquoi nous aurait-elle menti?" je lui décoche un léger sourire. "Qu'aurait-elle eu à y gagner? Écoute... Je suis comme toi, je ne peux pas être certain que Ji est bien celle que l'on croit! Mais ce qui semble évident c'est qu'elle n'est pas - ou plus - favorable aux autorités en place. Dans le meilleur des cas nous avons gagné une alliée de poids! Dans le pire... Et bien nous aurons juste perdu un peu de temps et l'espoir de faire progresser les choses rapidement..."

J'ai retourné le problème sous tous les angles je crois. Et je n'ai rien trouvé qui puisse prouver avec exactitude que c'est bien à Zanshi que nous avons parlé même si Ji savait des choses plutôt troublantes. Mais je ne peux pas non plus affirmer qu'elle n'est pas la Godaime réincarnée. Kaijiro pourra peut-être nous en apprendre plus sur le sujet. Du moins je l'espère... Et s'il nous confirme qu'il s'agit bien de la rousse alors je me fierai à son jugement. Tsukiko semble d'accord sur ce point par ailleurs. Enfin.. plus ou moins!

- "Faire ton choix?" je hausse un sourcil. "S'il s'agit bien d'elle alors il n'y a pas à hésiter! Mais si tu as encore des doutes alors pose-toi cette question: préfères-tu suivre une femme qui faisait trembler tout le Yuukan ou un homme qui t'a évincée du pouvoir sous prétexte que tu n'étais pas digne de confiance?"

Pourquoi hésite-t'elle encore? Je croyais pourtant qu'elle avait pris sa décision! Ou qu'à défaut elle avait compris ou résidait son intérêt et celui de notre clan... Je soupire et m'allume une clope sur laquelle je tire une longue bouffée avant de recracher la fumée en direction du ciel azur. Je n'aime pas tourner en rond et j'espère que l'irritante capacité de ma cousine à remettre les choses en question ne deviendra pas un obstacle à mes propres objectifs. Les Kawaguchi doivent se libérer de l'emprise de Suna. Et Zanshi - ou Ji - est notre meilleure chance d'y parvenir pour l'instant. Il n'y a pas à tergiverser plus longtemps...

Tsukiko me demande comment aborder le sujet avec Kaijiro et je me passe une main sur le menton tandis que je réfléchis à la question. En effet, ça risque d'être délicat. Nous croira-t'il sans preuve quand bien même il semble être au courant que la Godaime est en vie? Jouera-t'il la carte de l'incompréhension ou nous accordera-t'il du crédit? Nous sommes du même clan et il n'a aucune raison de se méfier de nous. À part s'il croit qu'on prêche le faux pour savoir le vrai... Et dans ce cas on risque d'avoir quelques problèmes!

- "Mmmhh..." je laisse mon regard vagabonder sur le toit des demeures alentours. "Bonne question... Je ne crois pas qu'il faille trop tourner autours du pot, ce serait stupide. Il sera sûrement méfiant tant que nous ne lui aurons pas donner de bonnes raisons de nous faire confiance à ce sujet. Même s'il est des nôtres il se montrera prudent et ne nous donnera pas la moindre information en l'absence de preuves convaincantes. C'est ce que je ferais à sa place en tout cas si nos rôles étaient échangés! Un secret comme celui-là n'est pas de ceux qu'on partage sans de solides garanties..."

Et la seule preuve que nous ayons de notre rencontre avec la Godaime, si tant est que ce soit bien elle, est cette lettre qu'elle nous a remise. Kaijiro est un Kawaguchi et à ce titre il mérite que nous lui accordions notre confiance pour obtenir la sienne en retour. Après tout c'est lui qui a les réponses qui nous manquent encore et à ce titre nous devons faire le premier pas. On a rien sans rien. C'est l'une des premières règles que ce monde hostile se charge de vous apprendre...

- "On a déjà perdu assez de temps!" je me redresse et écrase ma clope. "Finissons-en!"

Malgré son état Tsukiko semble capable de se mouvoir à l'aide d'une monture de sable. Tant mieux! Avant toute chose il s'agit de savoir où se trouve Kaijiro puis d'obéir aux ordres en lui donnant la lettre que Ji nous a confiée. Et nous serons alors en mesure d'y voir plus clair...

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Nous voila dans les ruines du clan. Il nous aura encore fallu patienter une journée de plus pour quitter Suna et retrouver notre cousin dans ce qui faisait jadis la fierté des Kawaguchi. Malgré notre impatience c'est la prudence qui doit primer et quitter le village en pleine nuit aurait éveillé trop de questions chez les gardes de la Voie Illusionnée. Après une nuit passée chez la blonde nous avons donc enfin pu arriver à destination - Kaijiro n'étant toujours pas de retour - et se rapprocher ainsi un peu plus des réponses tant attendues. Mais l'accueil n'est pas... comment dire... exactement celui auquel je m'attendais...

- "Toutou, moi?" je hausse un sourcil. "Ravi de voir que ton sens de l'humour a survécu à la perte de ton oeil..."

Je fais de mon mieux pour rester calme même si me faire traiter ainsi par l'un des miens a tendance à sérieusement m'irriter. Je me focalise sur la raison de notre présence et non sur l'envie que j'ai de lui faire bouffer du sable. Voilà typiquement le genre de comportement qui m'exaspère: être traité comme un moins que rien pas un membre de mon propre clan. Comment Tsukiko a-t'elle fait pour endurer ça pendant des années?

J'échange un regard avec elle et pousse un soupire. Allez Kira, reste calme! Ce n'est pas le moment que les choses dégénèrent. Pas maintenant que nous sommes si près de franchir une étape cruciale dans le plan qui a prit place dans la tête de la Godaime. Kaijiro et nous sommes des alliés, pas des ennemis. Il s'agit de ne pas l'oublier et de ravaler sa fierté jusqu'à ce que notre cousin le comprenne lui aussi...

- "Quant à la raison de notre présence..." voilà le moment crucial! "Et bien disons qu'une amie commune a demandé aux... gamins que nous sommes de te délivrer un message! Le genre d'amie qui se prend une balle en plein coeur mais qui parvient tout de même à survivre si tu vois ce que je veux dire..."

Ho oui, il voit très clairement de quoi je parle. Ou alors il n'est pas du tout au courant et on va simplement se payer l'air con! C'est peut-être habituel pour Tsukiko mais je ne suis pas coutumier de ce genre de situations. Il n'y a qu'à espérer que Ji ne s'est pas foutue de nous. Je tourne le regard vers Tsukiko et lui adresse un léger signe de la tête pour lui faire comprendre que j'aimerais qu'elle lui donne la lettre. Ce qu'elle fait! Voilà, il n'y a plus qu'à attendre qu'il la lise et voir ce qu'il arrivera...

Le Sunajin était resté là à écouter le plus jeune des deux palabrer assez inutilement sur la Godaime Kazekage, sa touche d'humour fit légèrement sourire le colosse. Si le jeunot savait d'où lui venait cette balafre, il rabattrait sûrement son caquet. Mais lui, Saijirô, n'avait pas de temps à perdre en discussion et détour sans valeur. Le Kawaguchi qui avait été recruté pour sa loyauté et sa franchise ne s'attarderait pas non plus davantage pour leur répondre...

- "Susceptible petit ? Raah.. Ne le prenez pas pour vous. C'est de cette façon qu'on reconnait ceux qui gardent leur sang froid. Bien, par contre il faudra éviter de parler pour ne rien dire! Si la Godaime vous a envoyé ici, c'est qu'elle estime que vous êtes assez loyaux pour garder un secret. Et assez... forts... pour remplir le devoir qui incombe à l'unité. Ajouta-t-il avec un certain scepticisme en observant ses deux... Parents ?"

Il l'avait compris dès qu'il les avait vu, ou plutôt entendu arriver. Il n'y avait pas cinquante raison pour que des Kawaguchi veuillent lui parler dans cet endroit, c'était même malin, au moins ici personne ne viendrait les écouter. Il s'approcha des deux comparses et tendit la main vers eux, ouverte. Cela voulait tout dire. Ils avaient parlé d'un message, il était maintenant temps pour eux de le lui remettre.

Il descella le pli, déplia le papier et lu d'abord pour lui même. Un nouveau sourire fendit ses lèvres et il releva les yeux vers les deux ninjas.

- "Elle m'étonnera toujours cette bonne femme... Vous savez, elle aurait pu vous tuer en voyant que ce n'était pas moi. Mais je crois qu'elle t'aime bien, Tsukiko. Enfin. Elle me demande de faire le tri entre les membres qui resteront dans l'unité, et ceux qui feront partis du... Shin.. Sekaï. Je vois. Vous, vous ne faites pas partie de l'unité si je comprends bien; mais du Shin Sekaï."

Le roula le papier en boule dans sa main et le fit disparaître dans une flamme de chakra. Les cendres tombèrent dans le sable, s'y mêlèrent. Ce fut comme si ce message n'avait jamais existé; mais son contenu, lui était bien encré dans la mémoire Kawaguchi.

- "J'espère franchement qu'elle n'a pas fait une erreur en vous accordant sa confiance. Bref. En attendant le retour de Zanshi, je suis votre supérieur au sein de cette nouvelle organisation. Donc, le Shin Sekaï supplante l'unité, vous avez donc accès à toutes les informations la concernant. Et, vous trouverez tout ce que vous cherchez ici même, sans doute le lieu le plus sûr de tout Kaze."

Il les observa un instant encore. Il se doutait que ces deux avaient quelques interrogations à élucider encore...

"Et, bien sûr, vous pouvez aussi me poser des questions. C'est ce que dit la Godaime dans sa lettre... Même si j'aurais préféré ne pas vous avoir sur le dos!"

Ses yeux s’agrandirent pour ne devenir que des billes bleues brillantes dans la pénombre de ces Ruines, et sa bouche forma un rond des plus larges qui pouvait accueillir quelques mouches ou araignées audacieuses. Elle reprit ses esprits – et contenance – quelques minutes plus tard, une fois que son cerveau avait assimilé chaque information, et chaque détail de la scène … Il ne faut guère lui en vouloir, car l’histoire frôlait définitivement le bizarre et l’impossible. Kajiro parlait calmement d’une femme qui était censée être morte, les intégrer sans formalité dans une mystérieuse organisation et était prêt à être l’homme le plus bavard du clan, exceptionnellement.

C’était un brin trop d’information.

- Commençons par le plus grand mystère, je suppose : comment se fait-elle qu’elle vive … sous les traits d’une certaine Umi Ji ? La Godaime est l’Ecarlate Habashi Zanshi, une femme à la chevelure rousse et à la figure emblématique, pas une chunin brune, avec lunette et archiviste que personne ne connaît …

Effectivement « Umi Ji » était une chunin au parcours exemplaire, mais qui n’avait pas marqué les esprits d’une nation entière par des hauts faits militaires. Elle avait toujours été la petite archiviste qui réussissait les quelques missions qu’on lui confiait. En somme, un « bon » militaire, mais sans faire partie d’une grande Elite.

- Elle a été tuée, une balle en pleine poitrine … Devant tout le monde.

La réponse était aisément devinable dans le monde Shinobi, mais Tsukiko n’arrivait pas à le croire, ou plutôt ne souhaitait pas le croire. Les réincarnations existaient mais c’était une technique interdite car cela nécessitait forcément un sacrifice : réincarnation dans le corps d’un cadavre, possession d’un vivant, sacrifice d’un vivant pour renaître dans son corps … les exemples et procédés étaient aussi nombreuses que les multiples talents des Shinobis qui parcourent cette terre.

« La Godaime aurait fait appel à une technique interdite ? » se demanda-t-elle, ayant dumal à conceptualiser cette femme qui l’avait soutenu sacrifier la vie d’un autre pour sa propre et égoïste survie. « Mais … elle est nécessaire » tenta-t-elle de raisonner, afin d’atténuer l’acte même de la Godaime. Y arrivait-elle ? Non. Elle était, à cet instant, surtout lasse, fatiguée et frustrée de toutes ces intrigues.

- Pourquoi supplanter l’Unité et le remplacer par le Shin Sekaï ? Les buts sont-ils différents ? Quels sont nos droits et devoirs, par exemple ?

Elle aurait voulu – peut-être – insulter cet homme, et tant d’autres choses, mais elle n’avait guère la foi à cet instant. Elle voulait tout simplement comprendre, dans un premier temps.

En somme, si Kira était déjà un homme décidé, Tsukiko la sceptique était encore à convaincre.

Parce qu'il croit que j'ai perdu mon sang froid? Ca m'arrive plutôt rarement à vrai dire. Et quand c'est le cas ce n'est jamais beau à voir. L'accueil de Kaijiro m'a irrité, c'est certain. Mais je ne suis pas assez stupide pour m'en prendre à lui alors que le clan dans son ensemble reconnaît volontiers ses capacités martiales. Je ne suis pas suicidaire! J'ai de grandes choses à accomplir dans ma vie et je ne compte pas mourir prématurément. Mais dans le fond, qui le souhaite? J'oublie néanmoins bien vite son comportement déplacé et me concentre sur ce qu'il a à raconter une fois qu'il a lu la missive de Zanshi.

Premier point: nous sommes toujours en vie! Une bonne chose! Il semble désormais exclu que la lettre contienne l'ordre de nous tuer. Pour l'instant la Godaime - car d'après la réaction de notre cousin il s'agit bien d'elle - a joué franc jeu avec nous et ne nous a donné aucune raison de nous méfier d'elle plus qu'il n'est nécessaire. Me voilà soulagé et rassuré. Par contre je ne comprends pas trop pourquoi Zanshi apprécie Tsukiko et pas moi. Qu'a-t'elle dit à son sujet dans sa lettre? J'avoue que je suis plutôt curieux d'en savoir plus sur le sujet...

Deuxième point: nous ne faisons pas partie de l'unité mais de ce... Shin Sekaï. Le... Nouveau Monde? Ça ne me plaît guère... Je ne souhaite pas d'un nouveau monde! Je veux restaurer l'ancien, celui dans lequel nous vivions dans le désert. Libres d'aller où nous le souhaitions, quand nous le souhaitions. Et non pas prisonniers d'un village qui n'a aucune légitimité à mes yeux. Effectivement, Zanshi est pleine de surprise! Et si Kaijiro semble étonné alors qu'il la connait bien mieux que nous qui sait quelles surprises la rousse nous réserve encore?

- "Ce n'est pas ce qui était convenu..."

A-t'elle changé les termes de notre accord sans même nous consulter? Elle en aurait le droit et n'a pas le devoir de nous informer maintenant que nous lui avons prêté allégeance. Mais tout de même... Toujours est-il que j'ai exprimé ma pensée à voix haute sans réel désert d'entrer en débat sur ce point particulier. L'avantage - si on veut - c'est que notre cousin sera notre supérieur en attendant le retour de la Godaime. Travailler sous les ordres d'un membre de mon clan ne me pose pas le moindre problème même si je suppose qu'on aurait pu trouver plus sympathique que le borgne. Tant pis...

Et puis on va pouvoir obtenir des informations sur les membres de l'Unité. C'est précisément ce que je souhaitais. Me faire une idée des forces en présence, étudier les dossiers des shinobi qui ont rejoint ce groupe sensé être ultra-secret. Je parie que le Kazekage lui-même donnerait cher pour mettre la main sur ces informations. S'il se doutait de ce qui se trame sous ses yeux et dans son propre village... Tout ceci est délicieusement machiavélique!

*À la bonne heure...* on va pouvoir le questionner. *On va enfin obtenir toutes les informations qu'il nous manquait! C'est pas trop tôt!*

Tsukiko me devance au jeu des questions-réponses mais ce n'est pas grave. Ses interrogations sont les mêmes que les miennes même si elle semble toujours aussi sceptique quant à l'identité de Ji. On ne pourra pas lui reprocher d'être prudente au moins. Peut-être trop? Se poser des questions et peser le pour et le contre est une bonne chose en soi. Tant que ça ne nous empêche pas d'avancer... Je la laisse terminer avant de prendre la parole à mon tour:

- "De mon côté j'aimerais savoir précisément de quoi l'Écarlate parlait dans sa lettre. Elle nous a d'ailleurs précisé que tu partagerais son contenu avec nous. Mais maintenant qu'elle est détruite...." je soupire. "On devra se contenter d'un résumé aussi complet que possible je suppose..."

Je suppose que la missive contenait d'autres informations que celles qu'il a partagées avec nous. À lui de choisir s'il souhaite nous en parler. C'est avant tout un test pour s'avoir s'il partage la confiance que la Godaime semble nous témoigner. Il n'est pas très enthousiaste à l'idée de nous avoir sur le dos, c'est un fait. Et fort heureusement cette décision ne relève pas de son autorité. Un bon point puisque sans ça nous n'aurions sans doute jamais connu l'existence du Shin Sekaï ou de l'Unité. On aurait clairement perdu au change...

- "Ensuite et bien... Quels sont nos ordres? Je suppose qu'il s'agit de préparer le terrain pour permettre à Zanshi de revenir à Kaze dans les meilleures conditions?" je marque une pause. "Et tu as parlé de choisir quels membres de l'Unité vont rejoindre le Shin Sekaï... Est-ce que Saibogu Oniri est du nombre?"

J'aimerais avant tout savoir si la shinobi responsable de la pseudo-mort de la rousse a encore la confiance de cette dernière. Et par extension de savoir si nous pourrons utiliser cette information contre elle ou le Conseil si l'opportunité venait à se présenter. Une question simple dont la réponse risque de changer pas mal de chose. Voir de mettre en péril l'avenir tel que je le conçois...

Le Sunajin observa ses deux compatriotes un instant. A peine eut il fini d’énoncer le contenu de la missivie -la quelle il avait déjà détruite par ailleurs- qu'ils le questionnaient. Quelle boîte de Pandore ne venait pas d'ouvrir la Godaime. Autoriser deux curieux de nature à poser toutes sortes de questions en sachant qu'il avait les réponses, en plus... Enfin, qu'il soit écrit ou oral un ordre de l'Habashi restait un ordre et jamais il n'irait contester, quel que soit le but des décisions. Ce fut donc avec un long soupir en guise de prologue qu'il répondit à la première question.

- "L'unité, ce n'est qu'un nom, comme Shin Sekaï. Ce que vous avez accepté, c'est de servir la Godaime. Elle dit qu'elle sera à la capitale de Kaze no Kuni dans quelques mois, on devra s'arranger pour tous nous y retrouver. Ne t'inquiètes pas, elle a sûrement tout prévu déjà. Il marqua une courte pause. Hum, elle ne vous a pas expliqué l'utilité réelle de l'unité si je comprends bien. Ce groupe n'est que le fondement de quelque chose de plus grand, comme ce qui a été orchestré par la Godaime. A la base, nous étions cinq Sunajin, sans compter la Kazekage. Un Kawaguchi -moi-, une Akuzu, Un Ketsueki, une Saibogu et Umi Ji. Nous avons tous accepté de suivre les ordres de la Godaime, quels qu'ils soient, nous nous faisions réellement confiance. Et nous avons accepté de recevoir les sceaux et de lui servir d'hôtes. Elle a envoyé Umi Ji en dehors du village, pour une mission de longue durée, ce n'est pas quelque chose d'exceptionnel, au contraire. L'une des Kunoichi les plus discrètes du village est la couverture idéale pour la suite de son plan. Zanshi-sama est... passionante. Dit-il en rigolant. Peu de ninja maîtrise des techniques interdites, et lorsque celles-ci touchent à la vie ils deviennent des parias. Mais la Godaime... Nous a demandé notre autorisation pour employer ce Kinjutsu sur nous. Alors, effacez de votre esprit l'image du monstre qu'elle pourrait être. Faire avancer les choses nécessite souvent des sacrifices, vous savez. Et je ne doute pas un instant que le plan soit à la grandeur des exigences."

Saijiro se retourna vers la stèle à sa gauche, lisant les inscriptions et pensant à la question Saibogu. La réponse était pour lui évidente, si bien qu'il ne prit pas plus longtemps pour répondre à Kira sur ce sujet.

- "Cette jeune femme est une exception, cependant, moi comme la Godaime; ne faisions pas confiance au Saibogu. Étant donné que je dois faire un tri je peux d'ores et déjà vous dire qu'aucun Saibogu ne sera au courant de l'existence de cette... organisation. Saibogu Oniri y comprit. Ces gens ont tendance à... trop parler, si vous voyez ce que je veux dire."

Il se tut un moment sans déporter son attention de la pierre devant lui. Puis il se redressa.

- "Ah oui, il n'y a rien d'autre à savoir sur cette lettre, aucune autre information inintéressante... Mais je peux toujours vous la réciter, j'ai une très bonne mémoire photographique! Rigola-t-il."

Est-ce que le bien commun justifiait le sacrifice de l’individu ? Voilà une question que la demoiselle s’était posée lorsque Kajiro prétendait qu’il ne fallait pas blâmer la Godaime, ou la voir comme un monstre, indiquant que cela avait été le choix et qu’à nul moment elle n’avait forcé la main. Peut-être disait-il la vérité, mais elle n’avait rien pour vérifier. Enfin, plus important, elle ne partageait pas forcément sa façon de penser. Il y a quelques mois, elle se serait sacrifiée pour elle, comme ces autres membres de l’Unité, mais aujourd’hui, les décisions étaient moins spontanées et moins intuitives. Tout n’était plus que calcul, projet, anticipation et survie … Elle ne désirait plus assister à d’autres morts, prochainement. Elle avait atteint son quota, et un cadavre en plus signerait la fin de toute raison …

- Vous n’avez toujours pas répondu à l’une de mes questions ? Quel est le but de cette nouvelle organisation ? insista-t-elle un tantinet.

Certes, peut-être que la Godaime avait été « humaine » en demandant l’autorisation de « posséder » un corps, mais elle avait un sacré doute sur les « motivations ». Aucune entreprise « saine d’esprit » et « non vicié » n’avait ce besoin de « transférer » de corps ou de « posséder » ou de « réincarner » - au choix de chacun d’opter pour la vision la moins horrible, ou la plus horrible, de l’acte de l’Ecarlate.

- Précisément, quels sont ces prétendus ordres ? demanda-t-elle.

Elle ne supportait plus du tout cette attente durant laquelle la curiosité ne cessait de la ronger ! Elle désirait obtenir plus d’informations, mais Kajiro semblait encore un tantinet avare de certaines réponses. Plus important, comment était-elle censée savoir si elle faisait le bon choix à cet instant ?

« Plus important, ai-je un choix ? Vivre ou mourir ? » pensa-t-elle. Effectivement, elle doutait sincèrement qu’elle avait le droit de refuser, et de partir en sautillant d’un pas joyeux.

- Avant que vous ne parliez, j’espère qu’elles ne sont pas contraires aux intérêts de Kaze no Kuni et Suna. N’oublions pas que les fouilles se poursuivent à l’entrée, malheureusement.

Certes, à force, Tsukiko commençait à maîtriser son souffle et donc son rythme cardiaque, mais mentir sera toujours une tâche ardue sans sensorialité, face à un senseur habitué. Il serait temps qu’elle corrompe quelques gardes, par divers moyens. Si ses souvenirs sont bons, certains apprécient le Heaven Night, son bar, et peut-être pourrait-elle dénicher quelques petits secrets gênants et compromettants ? Au final, tout le monde avait quelque chose dont il n’était pas fier …

- Considérez cela comme de la lâcheté, mais j’ai déjà beaucoup perdus tant en terme de dignité, de confiance et d’amis … Je ne souhaite pas continuer ce massacre.

Si elle perdait « encore », c’en était fini d’elle. Au sens littéral, comme figuré.

- Je peux vous suivre, car la Godaime a toujours été une femme de vision, et une femme prudente. Cependant, elle n’est pas là. Et je vous connais à peine.

Elle sous-entendait donc que Kajiro était leur seul « contact » et ce dernier n’avait pas encore brillé aux yeux de la Kawaguchi pour les qualités de la Godaime. Il fallait quil montre qu’elle pouvait lui confier son « avenir ».

C’était une question de vie ou de mort.

Kaijiro est du genre chaleureux malgré son sale caractère. Il se montre plaisantin et bavard. J'avoue que j'apprécie. C'est ainsi que les Kawaguchi devraient se comporter entre eux, entre égaux. Mais si j'apprécie le fait que la discussion semble se détendre je n'oublie pas non plus que la situation impose une certaine prudence. Tant que je ne saurai pas précisément s'il préfère son clan à Zanshi alors je resterai sur la réserve. Simple mesure de précaution...

Tsukiko, elle, exprime clairement sa propre méfiance et questionne notre aîné sans retenue. J'apprécie également son comportement. Après tout elle l'interroge sur des sujets qui m'intéressent également sans que j'aie à obtenir les réponses moi-même. Elle passera sans doute comme la plus réfractaire et la plus maline d'entre nous. Et les deux me vont. La comédie a déjà commencé!

- "Ravi d'apprendre que la Godaime et toi ne faites pas confiance aux Saibogu!" ce qui est on ne peut plus vrai! "Ces insectes n'ont rien à faire parmi nous de toute façon!"

Je ne pouvais pas mieux tomber il faut croire! Tant mieux! Un point commun en plus avec Zanshi et mon cousin. Je suis soulagé de ne pas avoir à me soucier de la présence des Créateurs dans le Shin Sekaï. On pourra les prendre pour cible plus aisément et n'auront pas voix au chapitre. Une excellente nouvelle que je savoure comme il se doit!

En attendant que notre supérieur au sein de la nouvelle organisation de la Godaime décide de nous en dire plus sur nos ordres et ce qu'il attend de nous, je décide de le questionner à mon tour. Zanshi sera de retour dans quelques mois. Et moi je veux agir maintenant. Et avec la plus puissante arme que nous ayons: le secret!

- "Zanshi en a sûrement fait mention dans sa lettre et donc tu dois savoir que nous connaissons les détails de sa mort. Ainsi que son assassin! Je compte bien utiliser cette information pour faire tomber la responsable puisque la Godaime nous laisse libre d'en user comme bon nous semble! Y vois-tu une objection? Si ce n'est pas le cas alors peut-être que tu pourrais me donner le dossier de l'Unité concernant Oniri? Ainsi que chacun de ses autres membres par ailleurs?" tant qu'à faire... "Et éventuellement nous accorder ton appui?"

Il faut connaître son ennemi avant de s'en prendre à lui. Une règle de chasse qui facilite la victoire. Et une fois que je me serai débarrassé de la Conseillère alors je m'arrangerai pour que la prochaine cible soit l'Unité elle-même. Il faut restreindre le nombre de personnes qui connaissent l'existence de Zanshi. Ceci fait il sera temps d'employer le Shin Sekaï pour détruire Suna et son Kage... Comment? Manipuler la rousse ne sera pas facile, c'est vrai. Mais nous avons plusieurs intérêts en commun et je trouverai bien un moyen de la rallier à ma cause d'une manière ou d'une autre.

À force de temps et de patience, j'arriverai à en faire un outil que j'emploierai alors pour vassaliser les autres clans et mettre Kaze à mes pieds. Les Kawaguchi ne seront jamais aussi puissants et respectés que sous mon règne . Puis il sera temps de mettre définitivement fin aux jours de la Godaime pour rester le seul maître aux commandes. Un plan ambitieux, certes... Mais pas irréalisable.

Saijiro les observa un instant. Toujours autant de questions sortaient de leur bouche. S'il avait su qu'il devrait se coltiner ces deux là, peut-être y aurait il réfléchi à deux fois avant d'accepter la proposition de la Godaime. Ceci-dit, maintenant que la mal était fait...

-"De la lâcheté ? Non. De la faiblesse, oui. C'est tout à fait normal de craindre les pertes, de craindre pour sa vie ou sa... dignité. Mais certaines choses demandent des sacrifices, plus ou moins important. J'en suis la preuve."

Il avait en quelques sortes accepté de sacrifier sa vie pour que le plan de l'Habashi soit un jour mené à son terme. Mettre en gage son existence n'était pas chose facile, mais à un certain stade de la vie, Saijiro estimait que l'évolution requérait... des sacrifices. Enfin, tout le monde ne pouvait pas être aussi solide que lui, que la Godaime...

Mais lui, il pouvait parfaitement vivre avec cette idée, car finalement c'était pour le bien commun; et pas seulement celui d'une personne, ou d'un seul clan.

-"Et bien, lorsque je serai à Suna, je tâcherai de vous faire parvenir des dossiers. Par contre, 'le dossier de l'unité...', haha... Il n'y a rien de tel. L'unité n'existe pas. Il faut que vous vous le mettiez dans la tête, que vous vous en persuadiez! Il marqua une pause et reprit. Oui, donc... Le Shin Sekai. Il n'y a aucune information autre que ce que je vous ai déjà dit. Tout sera plus clair lorsqu'elle sera là. Pour le reste... Je ne suis que le messager. Ne me tirez pas dessus. Rigola-t-il."

Avant de reprendre ses travaux sur la stèle Kawaguchi qui n'avait toujours pas bougé, il fit part de son impression..

-"Je pense que la Godaime vous a recruté pour ne pas avoir à vous exécuter... Alors, même si elle vous laisse le champ libre, évitez de commettre des erreurs. Même si la Godaime est une personne prudente, elle n'hésitera pas à se débarrasser de vous; si vous mettez en péril son plan. Enfin, elle le ferait à quiconque... en fait... Soupira-t-il."

- L’Unité porte bien mal son nom, finit-elle par dire. Ton cousin montre son désir de piéger Oniri, et tu ne l’en empêches pas.

Elle se tut, et réfléchissait à nouveau sur les dernières paroles de cet homme.

- Votre fidélité ne va qu’à la Godaime, et en son absence de l’Unité, ce groupe n’a plus raison d’être, en fait, comprit-elle.

Dès lors, que devenez ces électrons libres ? Profitaient-ils chacun de la disparition de la Godaime pour occuper d’importantes et stratégiques places au sein de Suna ? Ou au contraire, se terraient-ils patiemment le temps du grand retour de la Ressuscitée miraculeuse ?

« Quant à lui, qu’a-t-il en tête avec cette information de la plus haute importance ? » se demanda-t-elle. A l’époque, elle serait allée voir Kioshi immédiatement pour lui parler de ce grand sujet, mais malheureusement, elle doutait plus que jamais de ses capacités à juger. D’une, était-il lié d’une manière ou d’une autre à ces histoires ? De deux, accepterait-il d’agir drastiquement alors qu’il n’avait montré nul empressement à la résolution de l’enquête sur la prétendue mort de la Godaime ?

« Je commence à savoir trop de choses … ».

Sa fin se rapprochait, ou au contraire, son immortalité. Elle avait l’impression qu’au fil des jours, à chaque pas, tout son destin se jouait. C’était maintenant ou jamais de briller au sein de l’Histoire, ou de sombrer définitivement dans les méandres de l’oubli de l’Homme. Elle était une SHinobi formée aux arts ninjas, et non à la diplomatie à priori, mais le temps avait su forger en elle une âme hybride. Elle avait donc le calcul froid et le manque de scrupule de toute Kunoichi, mais également la ruse et l’hypocorticisme de tout bon diplomate qui se respectait.

- Ainsi, j’attendrais avec vous, et avec grande impatience le retour de la Godaime. Je ne dirais rien à quiconque au sein de Suna, je promets.

Elle ne parlerait pas à un Sunajin, c’était certain. Cependant, et pour « garantir » un tantinet sa mémoire, elle avait un besoin urgent de mettre à l’écrit ou se confier à une personne « neutre ». Aussitôt, elle sut exactement auprès de qui susurrer quelques mots doux empoisonnés, retraçant l’histoire, les manigances et autres joyeusetés de Suna.

- Je pense qu’il serait temps que chacun entre chez soi …

L’avantage que trois Kawaguchi composent une même organisation était qu’il serait plus aisé de les réunir sans attirer grands soupçons. Cependant, un désavantage s’imposa tout autant : le manque de souplesse de la formation. Certes le sunaton était un art tant offensif, que défensif que de soutien, mais elle avait ses forces … et ses faiblesses.

- N’oubliez pas de diversifier vos rangs pour le retour de la Godaime.

Trouver plus fidèle qu’un Kawaugchi serait compliqué mais pas impossible. Elle glissa un regard vers Kira, et vers sa personne.

« Peut-être qu’inconsciemment, Suna a distillé les graines de la discorde dans le cœur des plus fidèles et vaillants combattants de Suna … Mais comment leur en vouloir ? Hormis une suite incontestable de guerres, ou de complots, ils n’ont rien obtenu ».

J'aurai les documents que je réclame. Du moins ceux qu'il est possible d'obtenir! Je crois que je ne peux décemment pas espérer mieux... Je remercie donc notre cousin d'un signe respectueux de la tête, satisfait qu'il soit prêt à nous... à m'épauler! Comme Tsukiko le fait presque immédiatement remarquer, elle s'attendait plutôt à ce que Seijiro m'empêche de causer du tort à Oniri. La frontière entre la prudence et la lâcheté est bien mince. Et il n'est pas rare que la première serve d'excuse à la seconde. Plus le temps passe et plus je me dis que je ne peux pas compter sur ma cousine pour faire bouger les choses. Elle est prisonnière de ses peurs. Et je suis le captif de Suna! Une différence de taille qui définit sans doute la base de nos nombreux désaccords...

"Pourquoi m'empêcherait-il de causer du tort à Oniri?" le ton employé est marqué par l'étonnement. "La Godaime a été claire et Seijiro vient de le confirmer: nous pouvons disposer des informations qu'elle nous a données à notre aise tant que nous sommes prêts à payer le prix d'une éventuelle erreur..."

Et comme je ne commets jamais d'erreurs... Ha, l'arrogance! Si elle gouvernait un peu moins mon être je serais sans doute enclin à envisager d'autres hypothèses. Mais ma seule et unique préoccupation est la chute du régime actuel! Et je compte bien employer toutes les armes dont je dispose. Et spécialement la plus puissante d'entre elles: le savoir!

"Mais..." je tourne le regard vers notre aîné. "Tu te trompes, cher cousin: la Godaime ne nous a pas laissé la vie sauve parce qu'elle ne souhaitait pas nous exécuter! Elle l'a fait parce qu'elle pense que nous pouvons lui être utiles! Et je ne tarderai pas à lui donner raison... et à te faire prendre conscience de cette évidence!"

Je connaissais Zanshi surtout grâce aux rumeurs qui circulaient sur elles. Si on doit évidemment prendre les récits de tavernes avec des pincettes, on peut raisonnablement penser qu'ils sont teintés de vérité. Et je vois mal la Godaime faire dans le sentiment... Notre disparition aurait pu être expliquée de bien des manières. Et je vois mal les gens oser ne serait-ce qu'imaginer que la rousse soit impliquée dans celle-ci... Pour l'extrême majorité des Sunajins Zanshi repose en paix, non?

"Bien! C'était fort instructif mais nous avons un village à conquérir..."

Ou à détruire... J'écarte deux doigts de ma tempe pour saluer notre cousin et je rebrousse chemin en compagnie de Tsukiko. Le tout avec un léger sourire au coin des lèvres: jamais je n'ai eu l'impression d'avoir autant de pouvoir entre les mains. Et je compte bien remercier la Godaime pour cette délicate attention en lui servant sur un plateau la tête d'Oniri lorsqu'elle sera de retour. N'est-ce pas le meilleur moyen de gagner sa confiance? Et de pouvoir ensuite l'utiliser à ma guise?