« Le pardon n’existe pas. »
Art. IX-II

Aurait-il pu le soupçonner ? Malheureusement non, il n’avait que trop peu côtoyé l’intéressé pour ça. Mais les faits étaient là et il était sans doute inutile de se tourmenter sur les raisons pour lesquelles c’était arrivé. Les choses avaient basculé, voilà tout.

D’une alliance promise à de grandes actions était né un empire dont le surplus de règles outrepassait totalement les fondations de son berceau. Tolérance et respect des individualités territoriales transformées en dictature et prise de pouvoir chez chaque pays qui peuplait autrefois l’Alliance des Pays Neutres. Le Shûkai s’était assombri, et semblait même promis à un futur encore plus sombre que ceux des villages shinobis.

On aurait pu croire que s’il y avait une personne hormis l’empereur lui-même qui aurait approuvé ou en tout cas qui n’aurait pas été gêné par ce changement de situation et de régime au sein de la nouvelle puissance shinobi, ça aurait bien été celui qui était connu pour être « la Loi ». Mais c’est justement parce qu’il l’était qu’il ne pouvait supporter tous ces changements moraux et indignes de ce qu’il avait fait et été.

Car avant toute chose, les lois reflétaient toujours la façon de penser, l’idéalisme, de Tsuhiro. Si bien qu’avant que certaines de ses règles ou articles aient été placardés au Shûkai lorsque ce dernier était encore l’Alliance des Pays Neutres, Hôritsu les avait notées dans un carnet qu’il avait toujours sur lui. Il les connaissait bien entendu par cœur.

Il aurait du partir en mission pour faciliter la transition entre l’Alliance et l’Empire, il avait su dès lors qu’il avait franchi l’entrée principale qu’il n’y reviendrait pas. Après une bonne minute de marche, il se retourna et regarda une dernière fois le Shozaichi. Sans dire un mot, il sortit un crayon ainsi que son carnet de lois.

Il n’avait pas pardonné à son père l’erreur qui avait coûté la vie de sa mère.
Il n’avait pas pardonné à l’un de ses maîtres de ne pas respecter les lois que ce dernier avait lui-même imposé à autrui.
Alors il ne pardonnerait pas le Shûkai d’avoir mué en un système tyrannique des plus indignes.

« Le pardon n’existe pas. »

Spoiler:

Hrp:

Les temps s’étaient calmés récemment, les tensions au sein de la Capitale étaient certes toujours présentes, mais désormais elles étaient tues. La rébellion commençait à prendre de l’ampleur et agissait toujours dans l’ombre. Aucune action notable n’avait été menée pour le moment, mais cela commençait à prendre forme et le moment de frapper n’allait pas tarder. Hiko était l’un des investigateurs de cette rébellion et il savait que le moment opportun n’était pas encore arrivé pour frapper un grand coup.

L’Empire comportait dans ses rangs des shinobis de haut niveau et aguerris, sans compter l’Empereur. Car c’était bien lui la tête qu’il fallait couper, mais pour le moment les jeunes rebelles n’en avaient pas encore les moyens et il était préférable pour eux de rester tapis dans l’ombre. Grossir les rangs, voilà la mission des rebelles pour le moment !

Et c’est dans cette optique que le jeune garçon aux cheveux blancs errait dans la Capitale afin de rechercher des personnes à recruter. Et un homme attira son attention. Il ne payait pas de mine, et le jeune garçon l’avait déjà croisé dans les bureaux des missions lorsque le Shûkai était toujours une démocratie… C’était le bon temps. Hiko le suivit un petit moment, jusqu’à ce que ce dernier ne passe les portes de l’Empire pour ce qui semblait être un voyage sans retour. Le jeune garçon marchait incognito derrière lui depuis un moment, ils étaient assez proches et c’est là qu’il entendit les quelques paroles prononcées par l’homme…

« En effet, seuls les actes peuvent réparer les erreurs d’autrui. »

Le jeune garçon avait dépassé l’homme sans le regarder directement, et en le dépassant, il lui avait glissé ces quelques mots. Etait-ce tout ? Non. Car en passant, Hiko avait glissé un papier dans une des poches de l’homme. Sur ce papier, quelques mots gribouillés à la va-vite par le jeune garçon pour indiquer un lieu de rendez-vous à celui qui s’autoproclamait « La loi ». Sur ce parchemin on pouvait lire ces quelques mots.

Si tu veux te dresser contre l’Empire, rejoins moi au coucher du soleil au niveau du rocher en forme de marteau au Nord du Shozaichi.

Le rendez-vous avait été planifié. Horitsu allait-il accepter de s’y rendre ? Le jeune garçon n’aurait pu le dire, mais qui ne tente rien n’a rien après tout. Et il se trouve que cet homme pourrait servir grandement la cause représentée par la rébellion s’il acceptait de venir gonfler les rangs de cette dernière…

« Aucun contact n’est innocent. »
Art. V-IV

Fin de journée...

Il n’était pas supposé être un spécialiste en Sensorialité, oh non, loin de là. Mais Hôritsu avait bel et bien remarqué la présence de celui qui, lors de son départ du Shozaichi, l’avait approché avec quelques mots. Des paroles bien sages pour un jeune homme qui semblait pourtant bien plus jeune et innocent que la plupart des shinobis qui peuplaient le nouvel empire.

Sans dire un mot, il regarda l’intéressé s’en aller, laissant ainsi la Loi se plonger dans une réflexion des plus intenses mais également des plus courtes. Devait-il se rendre à ce fameux point de rendez-vous ? Il voyait de quel lieu le gamin avait parlé, mais était-ce une bonne idée de se jeter dans ce qui pourrait simplement être un piège de la plus ridicule des bassesses ?

Il décida que oui, mais n’y vint pas sans précaution. Hôritsu était quelqu’un d’intelligent, mais dont les actes étaient d’abord dictés par un sens du devoir qui se faisait rare. Suivre son propre code d’honneur, ses propres lois, voilà ce que l’ancien membre du Shûkai avait fait toute sa vie. C’est pour ça que lorsqu’il vit l’adolescent venir le rejoindre comme prévu, il ne put s’empêcher de le fixer de ses prunelles azurées.

« Qu’importe ton âge, je ne te ferai pas l’impolitesse de ne pas te considérer comme le shinobi que tu es. Je te prierai donc de faire de même, car si je t’ai laissé glisser ton petit mot plus tôt dans la journée, sache qu'une autre indiscrétion de ta part et… »

Il s’était relevé de la pierre plate sur laquelle il avait attendu assis, les yeux toujours apaisés mais accompagnant pourtant des mots bien durs.

« Je t’exécuterai. »

Il n’y avait là aucun manque de respect, aucune sous-estimation, mais simplement une franchise pure et dure. S’il n’y avait aucune certitude qu’un affrontement s’achève sur une victoire de la part d’Hôritsu, ce dernier ferait bien tout pour l’exécuter si son interlocuteur se permettait encore la moindre indélicatesse.

« Rien n'est pire qu'un homme qui entraîne autrui dans l'accomplissement de ses méfaits. »
Art. IX-I

Même s’il faisait du mieux pour ne pas laisser paraître la moindre émotion, le gamin qu’Hôritsu avait en face de lui semblait avoir compris les paroles de son interlocuteur. Tant mieux, car il semblait en plus avoir été un minimum marqué. Dans tous les cas, des excuses aussi rapides furent-elles suffirent à remettre un brin de calme dans une entrevue qui commençait à peine. Le sujet ne faisait néanmoins aucun doute et le déserteur ne fut donc pas absolument pas surpris de la question qui venait de lui être posée.

Mais avant d’y répondre, il regarda avec plus d’insistance le gamin. Ce dernier jetait des coups d’œil par-ci par-là, mais c’était à intervalles assez longs. S’il n’était pas inquiet au point de regarder plus régulièrement les alentours, c’était soit qu’il n’était pas franc, soit qu’il était un spécialiste de la sensorialité. Tsuhiro opta pour la seconde option, qui pourrait également expliquer pourquoi l’adolescent avait pris ce « risque » que de l’approcher plus tôt dans la journée sans annoncer sa venue. Pour en être sûr, il lui offrit une phrase toujours aussi sérieuse et forte.

« Avoir une discussion avec quelqu’un qui, selon toi, a déserté le Shozaichi ne t’inquiètes pas plus que ça ? Soit tu essaies de m’arracher des informations alors que tu es toujours à la solde de l’Empire, soit tu as des capacités de détection… »

Hôritsu ferma un instant les yeux, mais lorsqu’il les rouvrit, sa pupille droite avait changé de teinte, passant d’un azur profond à un or étincelant. Une mise en scène qui pouvait paraître comme une provocation si on connaissait mal l’intéressé.

« … dans les deux cas je saurai à qui m’en prendre si notre discussion m’apporte des ennuis. »

Un autre clignement des yeux rendit à sa pupille son bleu accoutumé, tandis que l’homme restait droit, campant sa position. Le jeune shinobi était loin d’avoir obtenu sa confiance. Pour lui, c’était même presque un inconnu. Mais il avait pris ses précautions…

« Il n’y a rien en ce monde qui soit pardonnable, jeune homme. Les lois donnent à chaque crime une punition. Mais les punitions les plus lourdes ne sont pas données à ceux qui font des erreurs ou commentent des crimes seuls… mais à ceux qui plongent autrui dans leurs méfaits. »

Ses yeux firent face au ciel obscurci par la nuit tombante. Mais il ne soupira pas un seul instant.

« Samui Kakeshuou aurait pu tuer n’importe qui en ne respectant pas ses lois qu’il n’en serait devenu qu’un vulgaire criminel. Mais faire ce qu’il a fait : à savoir ne pas respecter ses propres lois et emmener avec lui la plupart des anciens effectifs du Shûkai de force dans un système tant tyrannique que déloyal a fait de lui… »

Son regard retomba sur celui de l’adolescent.

« Je n’ai pas de mot. »