La plupart des gens semblent affectés par le séisme qui a ravagé Ki no Kuni. De mon côté je suis tout simplement ravie de voir que la nature a décidé de me mâcher une partie du travail. Ho bien sûr je regrette de ne pas avoir pu tuer toutes ces personnes moi-même mais c'est toujours autant d'ennemis potentiels en moins. C'est ainsi, les gogyou sont naturellement en guerre contre l'humanité qui a d'ailleurs lancé les hostilités. Dès lors je ne vois aucune raison de ne pas me réjouir de ces récents événements.

J'ai de la peine à garder un visage impassible ou à me draper dans l'empathie que l'on est sensés ressentir pour les victimes du tremblement de terre. Mais je suis une Heishi du Shûkai et je me dois de donner le change. Des sourires satisfaits seraient sans doute un peu trop mal perçus par notre cheffe d'équipe, la Seigneur de guerre Samui Yuki. Sans parler des camarades que j'accompagne lors de cette mission. Mais si mon âme jubile de toute cette destruction mon corps, lui, doit se montrer affecté.

Je n'ai guère parlé pendant le voyage qui nous a menés sur cette montagne de Tori no Kuni. Pour quoi faire de toute façon, hein? Sympathiser? Ce n'est ni dans mes habitudes ni dans mes envies. Je me contente d'exécuter les ordres tout en espérant qu'une fois sur place je pourrai achever certains survivants. Il faudra que je me montre discrète, bien sûr. Mais cette perspective est plus que réjouissante. Ajouter encore au malheur des autres est tout simplement une possibilité qui me ravi!

- "Togata Sakura, au rapport!"

J'accompagne ces mots du salut réglementaire du Shûkai et je les adresse évidemment à notre supérieure hiérarchique. Je ne connais pas cette femme qui doit à peu près avoir le même âge que moi mais sa réputation la précède. Il vaut mieux ne pas jouer à la maline avec elle et rester aussi docile et obéissante que possible. Ne pas attirer l'attention, ne pas générer le doute... Voilà à quoi se résume ma vie depuis que je suis née tout compte fait...

Je jette un vague regard au matériel qui se trouve déjà sur place. On ne peut pas enlever au Shûkai sa capacité à s'organiser, ça c'est sûr. Je me demande un bref instant si je trouverai le moyen d'en faire disparaître ou d'en détruire une partie durant le trajet qui nous sépare encore de Ki. Après tout, des médicaments et des vivres en moins, c'est toujours quelques personnes de plus qui vont succomber...

Et maintenant?

Le voyage s’était passé sans réel problème. La tension presque palpable. Aucun des Shukajins présents ne devaient se douter de ce qui les attendait. Fuka l’ignorait en tout cas. Il savait pourquoi ils avaient pris cette direction mais difficile de se douter de ce qui allait suivre par la suite.

Leur convoi improvisé avait avancé sans relâche. Quelques pauses par instant pour permettre aux chevaux de se reposer. La carriole dans laquelle ils étaient se retrouvait pas mal crapahutée par les intempéries de la route. Mais il y avait fort à parier que ce soit encore pire une fois sur place. Si une force avait secoué la terre, les routes seraient accidentées et demanderaient aux shinobis de continuer à pied. Ce qui les ralentirait en plus de devoir transporter le matériel de secours.

Il n’y avait donc plus qu’à espérer que leur responsable de mission s’y connaisse dans le Fûinjutsu, tel le Hoheinheim. Fuka connaissait de nom celle qui était censé les diriger jusqu’au pays du Bois. Elle avait été nommée Seigneur de Guerre lors de la cérémonie d’intronisation de l’Empereur. Il n’y avait pas été présent lui-même mais ce genre d’évènement sont à la une des ragots pendant un moment dans la Capitale. Sans même y avoir assisté, c’était comme si. Il avait pu apprendre qui portait quoi comme tenue, qui avait mal regardé qui ou même ce qu’il y avait eu au buffet. Autant de détails inutiles que s’échangent les bonnes femmes en plein centre-ville. Malheureusement, leurs jacassements passent rarement inaperçus. Surtout lorsque la fenêtre de l’appartement du sabreur donne directement sur le lieu de rassemblement des ragots. Il n’y avait qu’à voir quelle cacophonie il régnait les jours de marché.

Tout autant de gérémiades et de médisances qui avaient au moins permis au Taisa de se renseigner un minimum sur la cérémonie. Très peu de précisions sur les grands évènements en soit. Quelques titres balancés à droite à gauche et le reste était venu par la suite en traînant parmi les soldats. Pas vraiment le genre de conversations qu’il avait pu retrouver dans les campements des champs de bataille à Mizu. Allait-il retrouver la même chose ici ? Peu probable étant donné la nature de leur mission.

Mais tout compte fait, le malheur des uns allait attirer la convoitise d’autres. Il ne devait pas y avoir que le Shûkai sur place. Et la réunion de plusieurs troupes risquait de provoquer quelques conflits. Aussi mineurs soient-ils, ils risquaient de ne rien arranger. Surtout s’ils tombaient sur des Kumojins. Mais en toute honnêteté, Fuka se ferait un plaisir d’en combattre à nouveau. Il n’avait pas pleinement rempli son objectif la dernière fois. L’un d’eux s’en était sorti. La prochaine fois, il ne devrait en rester aucun.

Mais il n’était pas question de ça pour l’instant. Ils étaient arrivés au point de rendez-vous avec leur supérieur qu’ils ne tardèrent pas à apercevoir. Descendant du convoi, les shinobis à sa charge descendirent pour la rejoindre et se présenter :

- Taisa Fuka Madame.

Son œil tomba sur le matériel qui serait emporté. Il y avait de tout, y compris d’importants colis qu’il désigna par la suite :

- Auriez-vous besoin que nous portions ça une fois à Ki ?

Je ne savais combien d’heure ça allait nous prendre, mais c’était vraiment long comme trajet bordel. En plus de ça, aucun de mes coéquipiers n’avait daigné prendre la parole. Cool le trajet hein. J’avais galéré de mon départ jusqu'à mon arriver. Enfin bref, c’était une mission importante. En plus j’avais eu ouïe dire que j’allais faire partie de l’équipe qu’une certaine Yuki allait diriger. Ouais, donc c’était pas le gars à l’épée qui allait diriger l’équipe. Il avait l’air plutôt cool de base, mais franchement depuis que je savais qu’il n’allait plus être le chef d’équipe, il avait perdu de la valeur. Il avait chuté dans un abysse sans fond remplie de merde … Alala. Le pauvre homme, Sali jusqu'à sa mort maintenant. Enfin bref, on était arrivé sur place. Le campement était sur la plus haute montagne, celle qui surplombait les bois.

C’était plutôt stratégique comme endroit, il fallait l’avouer. Puis franchement, la vue était magnifique … Habituellement. Là, la vue n’était franchement pas belle. J’avais eu vent d’un tremblement de terre qui avait ravagé le pays du bois, mais il fallait dire que mes pupilles n’étaient pas du tout prêtes à titiller cette vue apocalyptique. Putain de merde … C’était vraiment atroce. Debout, mon poing s’était lui resserrer. J’étais quelqu’un de froid, mais je n’étais pas franchement fan de ce genre de chose. Le chaos régnait sûrement dans le pays … Plusieurs centaine de millier d’habitant étaient sûrement mort enterré vivant sous les décombres. Ils avaient toutes et tous besoin de nous. Il fallait faire vite.

Mon regard se tourna directement dans la direction de la supposé chef de mission. Samui Yuki, seigneur de guerre du Shukai. C’était bizarre comme désignation, surtout pour une femme. Mais bon, elle avait sans doute accomplie plusieurs faits majeurs pour en arriver là et donc, elle devait être respectée. Ou alors c’était la cousine de l’empereur qui l’avait nommé directement seigneur de guerre. C’était quelque chose de possible, ils avaient tous le même nom de famille dans ce pays de toute manière. Chaque centimètre il y a un Samui. Ils étaient plus nombreux que n’importe qui ceux là. Enfin bref, alors que mes compagnons se présentèrent, j’ai moi aussi lâché mon nom. C’était elle qui nous avait fait demandé. Elle connaissait donc déjà nos noms et sûrement nos capacités et donc, il fallait seulement être poli et le redire a voix haute.

« Jisetsu Yuri. »

Mon regard alla effleurer au contraire les parachutes. Oh putain, j’avais toujours voulu essayer. Il y avait aussi quelques rations du survie et des médicaments, mais c’était plutôt les parachutes qui m’intéressaient moi, il fallait l’avouer. J’adorais les sensations fortes et sauter en parachute, surtout d’une montagne aussi haute que celle-ci était vraiment top ! Si en plus il fallait faire ça pour sauver des gens en bas en leurs apportant des médicaments, c’était encore plus cool ! J’avais hâte qu’elle donne les ordres, mais je ne pus m’empêcher de m’approcher des parachutes, ne les lâchant pas du regard.

« Quels sont les ordres ? »

Et ouais, je l’avais joué fine. Je voulais plus que tout sauter en parachute, mais il fallait aussi prendre en compte le fait que c’était elle la chef d’équipe et que c’était donc elle qui donnait les ordres. Attendons donc …

Après une longue et éprouvante chevauchée, voilà qu'on doit maintenant vider la charrette et répartir l'équipement sur différents tas. Je n'ai jamais eu une force physique ou une endurance impressionnante et je dois bien reconnaître que la fatigue commence sérieusement à se faire sentir. J'écarte une mèche de cheveux roux de mon visage et lâche un soupire suffisamment discret pour ne pas attirer l'attention. Voila qu'après des heures de cheval il faut encore qu'on se tape des efforts pour sauver des gens qui méritent clairement de mourir. Pourquoi s'obstiner et ne pas simplement laisser la sélection naturelle se faire?

Je m'arrange pour porter les choses les plus légères et laisse le soin à ces messieurs de s'occuper des charges plus lourdes. Qu'ils se cassent le dos, ça leur fera du bien! J'en fais toutefois suffisamment pour ne pas être qualifiée de tir au flanc. Il s'agit de ne pas se mettre à dos la cheffe d'équipe après tout! Cette dernière scelle d'ailleurs les différents tas et nous remet à chacun un sceau. Je suis promue déléguée aux draps! Tu parles d'un honneur. J'aurais sûrement levé les yeux au ciel si j'étais du genre à me laisser gagner par les émotions. Mais je me contente d'opiner du chef et d'obéir.

Je m'équipe ensuite du micro et de l'écouteur qu'elle nous confie et vérifie rapidement qu'il fonctionne. Puis c'est le tour du parapente. Je n'ai jamais utilisé ce genre de truc et je ne crois pas que je serai très à l'aise dans les airs. En fait j'en suis carrément certaine. Mon hésitation et mon manque d'expérience doivent être perceptibles puisque Yuki vient m'aider à m'équiper avant de me gratifier d'un léger sourire. Je le lui rends non pas par politesse mais parce que c'est sûrement ce qu'elle attend en retour.

- "Merci!"

Et finalement le moment que je redoute arrive: l'ordre de départ. Je regard notre cheffe s'élancer en avant et sa voile se lever derrière elle. Puis elle s'élève dans les airs avec une facilité déconcertante. Ça semble si facile quand on la regarde. De mon côté je ne suis pas particulièrement pressée de la suivre pour être honnête. Je jette un regard hésitant à mes deux camarades en me demandant quel est leur avis sur le sujet. Est-ce que c'est aussi leur première fois?

Bon ben... Quand faut y aller hein? J'imite notre supérieure et prends à mon tour de l'élan jusqu'à sentir une petite résistance quand la voile se dresse dans la nuit. Puis je décolle à mon tour sans grand effort. C'est plutôt facile en fait! Suivre Yuki, en revanche, devient un peu plus compliqué. Il me faut quelques instants pour apprivoiser ce moyen de transport pas vraiment conventionnel. Ceci fait je peux enfin profiter du paysage de désolation qui commence à défiler sous nos pieds. Merveilleux!

A peine arrivés, les directives furent données. Au moins, ils ne perdraient pas de temps en présentations. Les mondanités étaient un fardeau dans la vie d’un shinobi. Fuka en avait toujours fait preuve de par son éducation mais si l’occasion se présentait de les laisser de côté, il ne se faisait pas prier. Lorsque la Samui leur répartit les tâches, il put donc se concentrer là-dessus.

Tout comme le voyage, tout se faisait dans le calme le plus absolu. Et le silence surtout. Fuka n’était pas le plus sociable de tous les Shukajins et il semblait qu’il en était de même pour ses coéquipiers. Leur chef d’équipe, encore pire. Certainement une tactique pour jouer les supérieurs inaccessibles et distants pour bien délimiter leur relation. Ce qui ne dérangeait pas Fuka cela dit. Il était là pour faire son travail après tout. Il était déjà bien content de quitter le calme morbide de l’hôpital qui ne lui avait rien apporté de particulier, si ce n’est de l’ennui.

Les tas furent vite répartis. Puis la responsable de la mission scella l’ensemble des affaires dans des sceaux. Elle en confia un à chacun. Fuka récupéra celui de la nourriture ainsi que des écouteurs pour la radio. Les instructions viendraient ensuite une fois dans les airs. Au début, le sabreur pensait avoir mal entendu. Puis lorsqu’il la vit prendre une sorte d’engin aérien et s’élancer, il comprit que c’était bien sérieux. Il fixa son appareil des yeux tandis que Samehada susurrait dans un coin de sa tête :

- Ravie de t’avoir connu petit. Assure-toi de t’écraser là où un vrai shinobi pourra me récupérer.

- La ferme…marmonna Fuka en s’approchant de l’engin.