Shinji s'arrêta net lorsqu'il vit le gamin venir dans sa direction. Ce gosse, il l'avait déjà croisé quelques semaines plus tôt lorsqu'il lui avait amené un ordre de mission. Il n'avait pas pu l'esquiver la première fois car il avait été pris par surprise mais cette fois il comptait bien lui rendre la tâche plus compliquée. Croisant le regard du jeune garçon qui s'approchait de lui à vive allure, l'Akuzu emprunta une ruelle adjacente avec l'espoir évident de semer son petit poursuivant. Le jeune homme força à son tour l'allure et crut un instant qu'il avait réussi son coup et à semer son poursuivant improvisé. Pour plus de sûreté, il allongea ses jambes et grimpa sur l'une des bâtisses avant de s'y installer, dos contre une paroi. Il en profita pour se rouler une cigarette avant de s'installer plus confortablement.

- "Akuzu Shinji?" fit une petit voix derrière lui.

Surpris par cette interruption désagréable, l'Akuzu en lâcha sa clope qui roula sur le toit avant de disparaître plus bas dans la rue. Sachant déjà ce qu'il allait découvrir en se retournant, il lâcha un long soupire agacé avant de toiser le gosse.

- "Si tu le dis..." rétorqua-t-il sobrement. "Qu'est-ce qu'il y a cette fois? Si c'est un truc avec une momie je te préviens tout de suite; c'est même pas la peine d'y penser! J'ai déjà donné, merci!"

Le gosse haussa les épaules et lui décocha un sourire espiègle avant de lui tendre un rouleau cacheté avec le symbole du bureau des missions. Un silence s'installa rapidement, chacun toisant l'autre du regard. Puis Shinji se saisit à contrecoeur de la missive et la décacheta en ronchonnant sur les gosses, les autorités et ces foutus employés responsables des missions qui semblaient s'acharner sur lui. Même si, dans ce dernier cas, il était bien logé à la même enseigne que tout le monde. Tawako semblait s'amuser à le recommander pour des missions et il imaginait sans peine l'air satisfait qu'elle devait arborer à chaque fois. Ho ouais, elle devait être fière d'elle! L'enfant disparut aussi soudainement qu'il était apparu et Shinji soupira une énième fois avant de lire ce nouvel ordre de mission:

Ordre de mission:

Bon! Au moins cette fois il n'était pas question de ruines emplies de pièges ou de cadavres recouverts de bandelettes. Et puis le jeune homme voyait clairement où se trouvait Kalachna tout en connaissant le meilleur moyen de s'y rendre en bon Akuzu qu'il était. Mais ces glandeurs des troupes régulières auraient largement pu s'occuper de cette affaire de disparation. Pourquoi donc déranger des honnêtes gens pour... enfin, des gens tout court... pour ce genre d'affaires? Il se promit d'aller se plaindre la prochaine fois qu'il passerait au bureau pour signifier à tous ces bureaucrates sa façon de penser. Et tant pis si ça ne leur plaisait pas!

Mais il y avait tout de même du bon dans tout ça puisqu'il allait pouvoir revoir Notsuu. Shinji n'avait plus recroisé le Saibogu depuis leur première rencontre lors d'un travail d'intérêt général. Il appréciait ce type en tout cas! Quant à ce Genshi, il était inconnu au bataillon, tout comme son nom de famille d'ailleurs. Mais l'Akuzu n'avait jamais été un pro des généalogies ou un expert des clans qui constituaient Suna. Et pour cause: il n'avait jamais jugé utile d'écouter en cours...

*Bon ben... Quand il faut y aller...*

Le jeune homme sauta de toits en toits pour regagner son chez-soi et y préparer ses affaires. Il en profita pour prendre une longue douche - ouais, c'est pas raisonnable vu la valeur de l'eau dans un pays aussi aride que celui du vent - et s'accorder une petite heure de repos pas vraiment mérité. Il s'accorda ensuite quelques instants pour vérifier l'état de son matériel et remplir son sac avec une grande gourde d'eau et quelques bouteilles d'alcool qu'il avait lui-même distillé. Ouais, c'était l'un de ses nouveaux dadas depuis qu'il avait mis la main sur un alambic...

Ceci fait il jeta un dernier regard à la chambre qu'il louait avant de descendre rapidement les marches et rejoindre la voie illusionnée où le lieu de rendez-vous avec ses coéquipiers était fixé. Il y arriva le premier ce qui était assez étonnant vu son sens de la ponctualité quasi inexistant. Il en profita pour boire de l'alcool après avoir débouché sa première bouteille et s'installa confortablement sur le premier niveau des remparts afin de voir aisément ses collègues lorsqu'ils arriveraient...

Il fallait aller plus vite ! Encore et toujours plus vite !

Notre héros serrait les rênes qui le liait à son cheval, si fort que ses os se confondaient avec le cuir. Il poursuivait un groupe de soldats devenu meurtrier. L'ensemble du clan Kurusawa venait d'être décimé, il était le seul survivant, il les avait vus, lui, il les avait poursuivis, seul. Ils étaient là, pas loin, il pouvait déjà apercevoir leur chevelure, tous étaient bruns, tous avaient le même gabarit. Il les suivait, tentant de combler l'écart les séparant. Ça y est ! Il était à l'arrière de l'un d'eux ! Zbam, il l'attrape par l'épaule et pouf, c'était son père en fait.

Il se leva d'un geste brusque, ce n'était qu'un de ces mauvais rêves qui vous tire de votre lit. Les draps étaient encore humides, la nuit avait été mouvementée pour notre jeune genin. Il essuya la sueur agglutinée sur son visage à l'aide d'un tissu propre proche de sa table de chevet et se prépara à sortir. Il était déjà une heure avancée de l'après-midi, et il fallait faire quelques courses pour pouvoir se nourrir.

L'homme trapu était là, accroupi sur les marches attendant patiemment la venue de notre héros, toujours vêtu de son long manteau blanc. Il apportait une missive à Genshi, lorsque cela fut fait, il apposa sa capuche et quitta les lieux.

Une nouvelle mission. Il allait devoir faire équipe avec Akuzu Shinji et Saibogu K. Notsuu, certainement deux ninjas du même rang que lui. Il leur fallait rejoindre un village-oasis plusieurs lieux plus loin.Le jeune Kurusawa n'en avait jamais entendu parler, il se contenta de faire demi-tour, agripper son pantin et de l'attacher sur son dos. La cape recouvrait quelque peu la masse imposante de la marionnette, mais quelques secondes d'observations suffisaient pour comprendre qu'il y avait quelque chose sous ces bandages. Le jeune genin s'en moquait, de toute façon, il ne pouvait pas faire autrement.

Il arriva au lieu de rendez-vous, toisa les deux ninjas à ses côtés pendant quelques secondes et soupira.

" En route. " se contentait-il de lâcher.

Notsuu fut le second à arriver sur place et Shinji en fut ravi. Il se laissa tomber de son perchoir et alla à la rencontre du jeune homme de sa démarche assurée et nonchalante à la fois. Il échangea rapidement une poignée de main amicale avec lui et lui demanda rapidement comment il allait. Il rit ensuite de bon coeur lorsque le Saibogu y alla de sa petite vanne sur la bouteille qu'il tenait en main. Le borgne haussa ensuite les épaules avant de reprendre une longue gorgée de saké puis tendre le contenant à son partenaire:

- "Il n'est jamais trop tôt pour l'apéro!" lui fit-il sur un ton entendu. "Ni trop tard, d'ailleurs!"

Ils se lancèrent dans une discussion sur leurs activités respectives depuis leurs dernières rencontre. C'était la première fois que Shinji revoyait le Saibogu depuis leur travail d'intérêt général mais il l'avait rapidement apprécié. Peut-être parce qu'ils avaient certains points communs et qu'une amitié avec lui ne semblait pas relever de l'utopie. L'Akuzu n'avait pas vraiment d'amis même si ses relations sociales s'étaient améliorées ces dernières semaines et l'idée ne lui déplaisait pas vraiment...

- "Bon il fait quoi l'autre?" s'impatienta-t-il après quelques minutes. "À ce rythme je tituberai avant même d'avoir quitté Suna..."

Il porta une nouvelle fois sa bouteille à ses lèvres comme pour mieux illustrer ses propos. Lorsqu'il la rabaissa il découvrit le troisième membre de leur petit groupe qui s'avançait vers eux. Ce dernier se contenta de les toiser en arrivant à leur hauteur avant de soupirer. Shinji haussa un sourcil sceptique avant de jeter un regard à Notsuu tandis que le nouvel arrivant se contentait de donner le signal du départ.

- "Super..." lâcha le borgne en regardant l'autre s'éloigner. "Quelque chose me dit que le voyage va être long..."

Celui qui devait s'appeler Genshi portait une cape blanche qui recouvrait une sorte de bosse dans son dos. Pourtant la dégaine de l'intéressée montrait clairement qu'il n'était pas bossu et que cette masse imposante n'avait rien à voir avec une malformation. Shinji était curieux de savoir ce que ces bandages cachaient mais d'un autre côté il n'était pas prêt à faire l'effort du dialogue avec un type qui semblait vouloir les snober, Notsuu et lui. L'Akuzu tendit une nouvelle fois sa bouteille à son compagnon avant d'allonger ses jambes et emboiter le pas au type glauque.

Les remparts imposants du village caché disparurent peu à peu de leur vue tandis qu'ils s'enfonçant dans le désert en direction de leur destination. Quelques heures s'écoulèrent, ponctuées par de trop rares discussions. Marcher dans le désert n'était jamais agréable et prenait une dose considérable d'énergie. Chaque pas s'enfonçait dans le sol et décuplait ainsi l'effort nécessaire pour avancer. Rien d'étonnant dès lors à ce que le silence règne sur le petit groupe. Tout ceci n'empêcha néanmoins pas l'Akuzu de terminer sa bouteille et de commencer à arborer un léger sourire niais tandis qu'il progressait vers l'oasis. Sourire qui fut encore accentué lorsqu'il roula une cigarette qui dégagea rapidement une odeur assez caractéristique de drogue douce.

- "Quelqu'un a déjà une idée de la façon dont on va procéder une fois sur place en fait?" questionna-t-il en crachant un long filet de fumée. "On pourrait commencer par trouver un bar et chercher des informations sur ces disparitions non?"

Si les langues avaient tendance à se délier sous l'effet de l'alcool, une personne connaissant bien Shinji comprendrait immédiatement que la pêche aux informations n'était pas sa priorité lorsqu'il parlait de trouver un bar. Mais l'Akuzu n'était pas spécialement pressé de résoudre cette affaire. Après tout, quelques disparitions de plus ou de moins n'allaient pas changer grand chose...

- "Hey Genshi! Tu vas tirer la gueule tout le trajet en fait? Ou c'est juste ta façon d'être? Parce que j'ai de quoi te détendre si tu as envie d'essayer de sourire un de ces quatre!"

Une question innocente qu'il termina avec une nouvelle bouffée sur sa cigarette naturelle...

C'est vrai que j'étais en retard. Le temps que j'avais passé à préparer mon pantin était assez impressionnant, mais il faut dire qu'il me paraissait nécessaire. Je ne pouvais pas vraiment me trimbaler avec mon pantin, et je ne souhaitais pas utiliser le Fuuinjutsu pour le moment. Non, j'étais bien comme ça, le transporter sur mon dos, ça me plaisait bien, même si sa forme gâchait un peu l'effet de surprise. Alors oui, j'avais passé une bonne dizaine de minutes à l'attacher derrière moi, mais je trouvais ça cool.

L'accueil réservé par mes deux alliés avait été bref, non, inexistant. Je les entendais rouspéter derrière moi, mais je ne leur en voulais pas. Il est vrai que je n'avais même pas daigné les saluer, alors pourquoi perdraient-ils leur temps en tentant de débuter un semblant de dialogue avec moi.

De toute façon, je n'avais pas grand chose à faire de l'avis des autres à mon sujet. On nous avait appris, lorsque j'étais à l'académie en tant que civil, à ignorer les critiques et à avancer seul. Dans nos projets, il est vrai qu'il est préférable de ne pas trop s'appuyer sur les autres pour ne pas être déçu dès lors où l'un des membres d'un groupe baisse les bras. Bien sûr, il fallait savoir compter sur les atouts de chacun, mais pas de là à être totalement dépendant d'autrui. Depuis ce cours, j'avais changé, et j'avais jusqu'alors offert ma confiance à une seule personne : Aishuu.

Je soupirais, la marche était longue, ennuyeuse. Je regardais autour de moi, une large étendue de sable s'étalait sous nos pieds. Alors que je contemplais ce paysage, vu et revu, je m'aperçus que j'étais à la tête de notre course. Je n'avais absolument aucune idée de l'endroit où pouvait se trouver ce village-oasis dont parlait l'homme capuché qui apportait mes missions. Ennuyé, je me demandais quelle direction nous pouvions prendre désormais. En ce temps, le gars qui portait une paire de lunettes rouge s'approcha de ma position.

Des banalités hein. Je n'avais pas quitté ma voie de civil pour m'adonner à de simples conformités. Je le regardais, lui esquissais un bref sourire hypocrite et me concentrais sur la position que nous devions suivre. J'avais soif, cela ne m'aidait pas vraiment à me fixer sur l'objet de ma réflexion. Je baissais les bras, sachant pertinemment que je ne pourrais jamais guider notre groupe vers l'oasis. Je laissais alors Shinji prendre la tête de notre excursion.

Ce ninja ne faisait que deux choses, boire et fumer. Nul doute concernant son état de santé, il devait être déplorable vu le rythme auquel il enchaînait les boissons et les différentes clopes qu'il possédait. Il n'était certainement pas capable de résonner correctement, du moins pas souvent. On le voyait à sa façon de guider ses pas, il ne marchait pas, il titubait. D'ailleurs, les premiers mots qu'il lâcha à propos de la mission qui les avaient réunis étaient prononcés dans l'optique de lui permettre de boire dans un bar.

J'écoutais attentivement l'idée du binoclard, et l'analysais ensuite. J'arrivais brièvement à la conclusion que l'idée de ce genin était bonne, et m'empressais de l'énoncer.

" C'est une bonne idée Notsuu, faisons cela. " me contentais-je de dire, faisant l'effort de montrer au genin en ma compagnie que j'avais fait l'effort de retenir son nom.

Alors que je faisais presque louange à l'idée du Saibogu, le second genin m'observa, me toisa et se lança. J'écoutais attentivement sa remarque, le regardais puis soupirais. Je n'étais pas vraiment étonné par la nature de sa critique. L'idée première que les Hommes se faisaient de moi n'était pas juste, elle était erronée par la rencontre que je leur offrais. Je n'étais pas de ceux qui s'ouvraient aux autres brièvement, et il fallait être patient pour me compter en tant que bon partenaire.

" Tu veux que je te dise quoi ? Et non tes saloperies ne m'intéressent pas. " lâchais-je en le cherchant un peu.

C'est vrai quoi, on n'était pas là pour devenir amis, simplement pour enquêter, combattre en qualité de compagnons d'armes. Je soupirais, un peu blasé à l'idée d'avoir pourri l'ambiance de notre expédition. Je voulais rompre le silence, lassé par le bruit du vide. Notsuu le fit avant moi. Je l'avais écouté avec attention, et n'hésitais pas à y aller de mon grain de sel. Oui, j'avais une petite idée à émettre à propos de ce village-oasis, et je ne tardais pas à la présenter aux deux ninjas à mes côtés.

" Je ne connais pas Kalachna. Cependant, je pense que celui qui a fait appel à Suna est riche en ressources, en biens. C'est d'ailleurs pour cela qu'il a pu s'offrir les services de trois ninjas de notre village dans le but d'enquêter sur ce qui paraît être de simples disparitions. Je suppose ainsi que pour trouver cet homme, il nous suffira de questionner les plus hauts fonctionnaires de ce village-oasis. " j'achevais ces mots par un soupir.

Je guettais l'horizon. Je pouvais d'ores et déjà observer quelques-uns des plus hauts palmiers de Kalachna qui flirtaient avec le soleil. Etait-ce bien le village-oasis ou ma soif me jouait-elle des tours ?

Ma pitoyable tentative pour tenter de convertir mes camarades à mon idée n'avait pas vraiment porté ses fruits. Notsuu avait visiblement compris que je ne souhaitais pas chercher des informations en me rendant dans un bar - peut-être même que je comptais boire tranquillement un alcool quelconque en les laissant faire le travail - et Genshi se rangea rapidement à l'avis du Saibogu. Mouais, ils n'avaient pas torts en disant qu'il valait mieux aller rencontrer directement leur mandataire pour se faire une idée plus précise sur ces enlèvements. La démocratie ayant rendu son verdict, je me contentai de hausser les épaules avec ma nonchalance habituelle. Celle d'un type qui se fout un peu de tout à vrai dire...

- "Soit, allons voir ce type!" je retire une taf sur mon pétard avant d'en expirer longuement la fumée.

Genshi refusa ensuite ma généreuse offre pour l'aider à sourire et je me fendis d'un large sourire goguenard lorsqu'il me dit qu'il ne voulait pas de mes saloperies! J'avais dans l'idée de lui raconter une des blagues vaseuses dont j'avais le secret, celles qui se voulaient réservées à un public masculin averti. Mais là encore je laissai rapidement tomber l'idée de décrisper le bossu. S'il voulait se la jouer comme un connard, soit! C'est pas comme si j'avais l'habitude d'en fréquenter tous les jours...

Notsuu argua ensuite qu'il fallait que je me calme sur le pétard et là encore je ne pouvais pas lui donner tort. Le pire dans tout ça? C'est que j'avais parfaitement conscience que je me détruisais la santé et l'esprit avec ce que j'ingurgitais ou fumais. Et la cerise sur le gâteau c'est que n'avais absolument pas envie d'arrêter malgré les multiples expériences négatives que ça m'avait attiré. La bataille avec Oniri s'était révélée éprouvante et m'avait conforté dans l'idée que je devais changer, faire le choix de la vie et non celui d'une mort prématurée. Mais ce qui me manquait n'était pas la volonté comme certains pouvaient le penser. Simplement la motivation...

- "Il y a une poignée de femmes à Suna qui peuvent te confirmer qu'endurance est mon deuxième prénom tu sais? Mais vous avez raison, je vais ralentir le rythme! Si je ne vous surveille pas vous allez faire des bêtises! Surtout lui, là!"

Je pointai mon doigt en direction de Genshi avant de me lancer dans un rire amusé et peut-être un peu forcé. J'avais la vague impression qu'il me cherchait un peu celui-là et s'il persistait dans cette voie il allait rapidement me trouver. Si je me targuais de mon endurance, la patience n'était en revanche pas l'une de mes qualités. Loin de là! Mais je pris néanmoins sur moi pour réfréner l'envie qui se faisait de plus en plus pressante dans ma petite tête: lui écraser mon poing sur la tronche! La mission avant tout, comme disaient les instructeurs de l'académie à l'époque. Le reste pouvait bien attendre un peu...

Notsuu demanda s'ils avaient des informations au sujet de Kalachna et je laissai d'abord Genshi répondre et exposer son opinion au sujet de ce village-oasis. Je réprimai le désir de relever certaines de ses affirmations tellement elles me semblaient logiques. Effectivement il fallait avoir de l'argent pour engager des shinobis et oui, ça tombait sous le sens que les fonctionnaires pourraient les aider puisqu'ils s'étaient sans doute chargés de transmettre sa demande à Suna. Je préférai donc tirer une dernière latte sur mon joint avant de glisser son cadavre dans l'une de mes poches. Le désert ne méritait pas d'être souillé par ce genre d'immondices...

- "Je suis un Akuzu vous vous rappelez?" je leur adressai un sourire empli de fierté en pointant mon pouce sur mon torse. "Je connais pratiquement chaque recoin de ce désert! Je me suis déjà rendu à Kalachna pas le passé mais j'étais un gosse. De mémoire c'est un repaire de mercenaires plus ou moins légal ou en tout cas toléré. On peut dire que ce n'est pas vraiment le genre d'endroits où les gens comme il faut voudraient s'installer! Un simple mot de travers et on pourrait se retrouver avec une tonne de types pas fréquentables sur le dos!"

Je remarquai alors que Genshi semblait observer un point à l'horizon et j'allongeai mes jambes sur une dizaine de mètres pour prendre un peu de hauteur et m'offrir une vue imprenable sur les environs. Une forêt de palmiers entourait un grand espace d'eau bleutée. Cette oasis avait une taille impressionnante comparé à la grande majorité de ses homologues qui parsemaient le pays du vent. Il n'y avait rien d'étonnant finalement à ce que des gens aient choisis d'y fonder un semblant de village...

- "Ouais, nous arrivons!" lâchai-je en retrouvant une taille normale. "Bien vu Genshi!"

Il fallait être honnête! Si je lui reprochais ce qui me déplaisait, je n'allais pas non plus occulter ses mérites. Je me rendis compte que la fumette et l'alcool avaient altéré mon jugement puisque je pensais que l'oasis se trouvait droit devant et à une distance plus élevée alors qu'elle se situait sur notre flanc droit. J'avais failli me perdre! Pour le coup, je me dégoutais! Oniri m'avait déjà prouvé que je mettais mes camarades en danger par mon comportement irresponsable et pour le coup ça se vérifiait. Je jetais un regard à la bouteille que je tenais toujours dans la main et hésitai vaguement avant de la glisser dans mon sac. C'était plus sage, en effet!

Il nous fallut encore presque une vingtaine de minutes avant d'arriver à destination et j'en profitai pour utiliser le henge pour prendre l'apparence d'un binoclard à l'apparence sale, vêtu des vêtements que portaient habituellement les voyageurs les plus démunis dans ce coin du pays. Je me tournai ensuite vers mes camarades:

- "Des fois il vaut mieux laisser l'ennemi venir à soit plutôt que de se porter à sa rencontre non? Si on nous prend pour le genre de types qui ne manqueront à personne s'ils venaient à disparaître, il y a de bonnes chances qu'on attire l'attention des kidnappeurs. Ces personnes doivent être leurs cibles favorites puisque leur absence soulève moins de questions en général. En tout cas c'est ce que je ferais moi!"

Si on se pointait avec nos dégaines de shinobis il y avait peu d'espoir qu'on s'en prenne à nous. Pourquoi s'attaquer à des cibles difficiles quand il était plus aisé de s'en prendre à des nomades semblant désarmés? Et même si nous allions d'abord nous rendre chez le mandataire, il ne fallait pas se leurrer: notre arrivée serait forcément remarquée dans un coin comme celui-ci où tout le monde se méfiait de tout le monde. Nous arrivâmes peu après sous l'ombre des premiers palmiers tout en attirant quelques regards curieux sur nos personnes. Rien d'inhabituel...

Trouver le mandataire ne fut pas si compliqué et même franchement facile. Après quelques questions posées aux fonctionnaires du village on nous indiqua une maison et un nom. La demeure en question était plus grande que les autres mais ne respirait pas vraiment l'opulence. Peut-être que c'était simplement un choix pour éviter de provoquer les plus envieux. Nous nous arrêtâmes devant la porte et je m'effaçai pour laisser l'un de mes deux coéquipiers prendre les choses en main. Peut-être que leur employeur n'avait pas envie de poser le regard sur un type refoulant l'alcool dès qu'il ouvrirait la porte. Il parait que la première impression est toujours la plus importante! Dès lors j'avais plutôt intérêt à laisser mes camarades parler...

Spoiler:

J'avais vu juste, et Shinji ne manqua pas l'occasion de me complimenter en soulignant l'acuité de ma vue. Mon regard se posa sur la bouteille qu'il tenait, sa main se crispait et il sembla réfléchir un moment. Je n'étais pas contre la consommation d'alcool, mais pas en mission voyons et puis, je ne vois pas ce qu'apporte la consommation d'une boisson en plein jour. Il se demanda certainement s'il pouvait vraiment continuer la mission en buvant et finit par se convaincre en rangeant sa bouteille dans sa besace.

Après une vingtaine de minutes, nous arrivions enfin aux abords du village de Kalachna. L'alcoolique se mit à utiliser une technique académique, celle de la métamorphose. En soit une technique accessible à tous, que je n'appréciais absolument pas. Tout d'abord parce que j'avais mis un temps fou à l'apprendre à l'académie, étant à la base un civil, je ne parvenais pas à contrôler mon chakra et chacune de mes copies se soldaient par un échec cuisant : manque de constance, couleur de peau, différent gabarit. Mais aussi, car, une fois apprise, on lui découvre un affligeant défaut ; le fait que le moindre contact annule cette technique. Je me contentais de suivre, laissant mon argument pour plus tard, assurant à Notsuu que l'idée me convenait.

L'image de Shinji nous aida à pénétrer au sein de Kalachna. À la suite d'une brève enquête, nous découvrions l'adresse du mandataire. Comme convenu, sa bâtisse était la plus grande de toute cependant elle demeurait d'un habillage classique, s'assimilant au quartier en ressemblant aux autres baraques. Une idée intéressante qui avait permis au riche personnage de rester discret. Nous approchant de celle-ci, nous constations la présence d'un majordome à la réception de celle-ci. Il nous ouvrit la porte et nous invita à entrer. Nous guidant à travers les pièces, il finit par nous présenter à son employeur. Il était assis sur son fauteuil de cuir, régissant à l'arrière de son bureau tout en savourant un cigare et en crachant au nez de son secrétaire.

Son discours était préparé, presque mécanique. Avait-il l'habitude de faire appel à des ninjas pour régler ses affaires ? Je me souviens que Tossen avait toujours pris soin de régler ce genre d'inconvénients, seul. Je me mis à penser que si cet Homme était réellement à la tête d'un sombre trafic, nos dirigeants –s'ils avaient été quémander à plusieurs reprises- étaient au courant de ses agissements. Les avait-il corrompus ? Je laissais tomber, de toute façon, il me fallait simplement accomplir la mission pour obtenir ma prime, alors je devais laisser filer ce genre de réflexions.

« Par où commencer, avez-vous des indices concernant leur position ? Et quelle est leur motivation ? »

Le secrétaire posa ses mains sur sa paire de lunettes, les remontants doucement et d'un geste appliqué. Il se leva et me fit face, à moi et à mes compagnons.

« - Ne pensez-vous pas que nous aurions agi de nous-même si nous connaissions leur planque ? Idiots. –il soupira- Pour ce qui est de leur motivation, vous devriez déjà l'avoir comprit de vous-même. Ils nous mettent des bâtons dans les roues, nous ne pouvons continuer à effectuer notre business s'ils continuent à agir comme ils le font. »

Humilié, je me sentais ainsi. Je lâchais un sourire courtois au scribe du mandataire tout en contrôlant ma colère. Mon poing se serra, mais je pris le soin de ne pas le montrer ouvertement. Après avoir salué l'assemblée, nous prenions congé. Par la suite, nous sortions de l'énorme bâtisse, toujours accompagnés par le majordome, et nous nous écartions de son lieu de travail.

Une fois dehors, je demandais à mes compagnons de marquer une pause. Je souhaitais revenir sur le plan de Shinji, et l'approbation de Notsuu. Mes propos étaient clairs, et malgré l'affront qu'avait mené l'employé du mandataire, je tenais à démontrer que nous n'allions pas dans la bonne direction. Je soupirais, levais la tête et tenais un regard droit, fixant un point à mi-hauteur.

« - Pour revenir à ton stratagème Shinji, je ne l'approuve pas. L'idée que tu as eu est, dans le fond, excellente. Nous attirerions ainsi les kidnappeurs et pourrions alors les démasquer, connaître leur identité. Cependant sur la forme, c'est compliqué. À partir du moment où l'un d'eux t'auras touché, tu reprendras ta forme réelle, et en ce cas nous perdrons notre avantage et ils se rendront compte de la supercherie. Après tout, c'est le principe d'un piège. »

Jusqu'à là, tout ce que j'avais dit n'avait été qu'une suite logique, certainement déjà comprise par mes camarades. Je soupirais, m'accroupis et prenais un bâton en bois couché sur le sable.

« –je faisais trois ronds pour nous représenter, prenant le soin de mettre Shinji aux avants postes et nous à l'arrière- Puisque tu seras l'appât Shinji, tu vas être fortement exposé au danger potentiel. Là, les brigands tomberaient dans notre piège. –j'ajoutais trois triangles face au rond de Shinji- Après avoir découvert la supercherie, les kidnappeurs seraient surpris, presque apeurés et Notsuu et moi apporterions alors notre soutien sur le champ de bataille. –Je faisais des croix sur les triangles– Notre victoire serait assurée, je pense. Cependant, supposons cette fois que ces Hommes soient des ninjas, en ce cas mettons un utilisateur du Futon, un épéiste et un senseur. –je cochais trois croix face à Shinji- Ne penses-tu pas que ce soit eux qui nous tendrais un piège par ton intermédiaire, convaincus par le fait que tu sois un ninja ? »

Je barrais le rond de Shinji, et ajoutais deux flèches à l'arrière de Notsuu et moi, représentant alors notre fuite après l'échec total de l'opération, tentant de faire comprendre que c'était ici Shinji qui prenait tous les risques.

« Enfin bon, si tu es sûr de toi, moi, je te laisse prendre les rênes de l'opération, mais en cas d'échec, je ne manquerais pas de souligner ton manque de préparation dans mon rapport »

Je soupirais, puis posais le bâton au sol, à vrai dire le schéma ne m'avait pas été vraiment utile et sa pertinence était à désirer, mais j'étais convaincu qu'il avait pu leur faire prendre conscience des dangers de notre stratagème.

Je repris mon apparence naturelle une fois à l'intérieur de la demeure de notre mandataire, comme Notsuu me l'avait conseillé. Je me fichais pas mal de faire bonne ou mauvaise impression à notre employeur dans la mesure où il n'était pas capable de mettre fin lui-même aux agissements de ces kidnappeurs. Tout comme je me fichais de l'image qu'il pouvait avoir de moi. S'il n'était pas content il n'avait qu'à faire appel à d'autres personnes ou s'occuper lui-même de ce problème d'enlèvements. Je n'avais ni besoin de ses ryos, ni de son approbation morale pour agir comme je l'entendais. Néanmoins je souhaitais éviter des tensions inutiles avec mes partenaires et je n'avais guère envie de débattre sur le bien fondé ou non de me présenter devant cet homme sous la forme d'un clochard ou la mienne. Plus vite tout ceci serait terminé et plus vite je serais de retour à Suna dans les bars que j'affectionnais tant...

Je gardai le silence tout au long de l'entretien. Notre mandataire nous expliquait avec l'arrogance qui caractérise les gens les plus aisés que tout ceci était mauvais pour ses affaires. Comme je m'y attendais, il se fichait bien du sort des personnes enlevées et se désolait plutôt des bénéfices perdus. Ce genre de personnes me donnaient la nausée et je n'avais aucune estime pour ceux qui privilégiaient les ryos aux vies humaines. Je serrai le poing dans ma poche tout en me concentrant sur des pensées plus positives. Ce fut donc avec Yami à l'esprit que j'observai ce gaillard nous exposer les faits même si je fus obligé de reconnaître certaines de ses qualités, notamment lorsqu'il rabroua Genshi. Je me fendis d'un léger sourire tout en passant mon regard sur les différentes œuvres d'art et autres futilités matérielles qui emplissait l'espace. Ce mec savait cacher sa fortune mais ne se privait pas pour l'exposer dans son intimité, à l'intérieur de sa demeure qui ne payait pourtant pas de mine à l'extérieur.

Nous prîmes finalement congé de lui et je m'empressai de me métamorphoser une nouvelle fois afin de jouer le rôle d'appât. Ça ne me dérangeait absolument pas d'être dans cette position dans la mesure où la patience n'était pas mon fort. Je préférais nettement qu'on se jette sur moi plutôt que d'enquêter longuement sur cette affaire. Il fallait savoir prendre des risques et puis je m'estimais plus efficace dans l'adversité que dans le rôle du type planqué. Un peu d'action ne faisait jamais de mal. Que ce soit à cause d'une trop grande confiance en moi ou en mes capacités, je ne m'inquiétais pas le moins du monde quant à la suite des événements. Ce fut donc avec l'apparence d'un pauvre type frêle et insignifiant que je me roulai une cigarette avant de la visser au coin de mes lèvres une fois à l'air libre.

- "Ce type est un vrai enfoiré hein?!" lâchais-je en allumant le tabac grossièrement roulé. "M'enfin bon... On aurait pu tomber sur pire! Et puis bon il est prêt à nous offrir une prime d'efficacité alors je peux bien fermer les yeux sur ses airs condescendants..."

Je tirai une longue bouffée sur ma cigarette tout en laissant mon regard vagabonder sur les environs, une nouvelle fois à la recherche de quelque chose sortant de l'ordinaire. Mais là encore il semblait qu'il n'y avait rien de spécial à se mettre sous la dent. D'un autre côté si ce "responsable" de village n'avait pas réussi à régler le problème par lui-même malgré les hommes qu'il devait avoir sous sa coupe - ou son commandement, au choix - je n'avais guère d'espoir de trouver un indice probant simplement en faisait preuve d'un minimum d'observation. Ne restait plus qu'à attirer l'attention de ces kidnappeurs et à croiser les doigts pour qu'il voit dans le clochard que je jouais une proie digne d'intérêt...

Néanmoins Genshi ne semblait pas disposé à passer à la pratique et se saisit d'un bout de bois pour tracer des schémas sur le sol après avoir fait remarqué qu'il n'approuvait pas mon idée. Je n'avais rien contre le fait qu'il ne soit pas d'accord, bien au contraire. Néanmoins j'étais curieux de voir ce qu'il allait proposer comme alternative à me proposition d'action. D'autant plus que l'argument selon lequel je serais démasqué au premier contact physique me semblait un brin léger. Après tout dès le moment où nous pouvions mettre la main sur un de ces kidnappeurs, le reste suivrait de lui-même. Il n'y aurait qu'à le faire parler - en usant des méthodes adéquates - pour remonter la filière. À supposer, encore, que ce groupe était organisé et qu'il ne s'agissait pas seulement de quelques individus esseulés qui souhaitaient faire les malins.

- "Vas-y je t'écoute!" fis-je en puisant dans mes réserves de patience pour ne pas lui répondre quelque chose de moins poli. "Explique-moi ce qui ne va pas!?"

Je me penchai sur son épaule pour décrypter ses schémas tactiques et le tout dans le silence. J'attendis qu'il ait terminé de pointer les inconvénients de notre plan à Notsuu et à moi tout en attendant ses propres propositions... qui ne vinrent pas. Non seulement il se contentait de mettre en exergue le plan d'action que nous comptions suivre mais en plus il se permettait de... me menacer? Dites-moi que je rêve! J'échangeai un regard avec le Saibogu et résistai à l'envie d'écraser ma cigarette sur le visage de notre partenaire. À la place je tirai une dernière bouffée de tabac avant de jeter d'un geste nonchalant et maintes fois répété le cadavre sous mon talon avant de l'écraser. Puis je pris une longue inspiration en fermant les yeux avant de recracher la fumée en direction du ciel. Si j'avais des scrupules à polluer le désert, j'en avais nettement moins lorsqu'il s'agissait de respecter un endroit comme celui-ci.

- "Arrête-moi si jamais je fais fausse route d'accord?" repris-je d'une voix qui se voulait maîtrisée. "Donc tu mets les faiblesses de notre plan en avant avec tes beaux petits dessins mais sans proposer la moindre alternative c'est bien ça? Pour simplifier tu critiques mais tu n'as rien à proposer de concret pour augmenter nos chances de réussite? Le tout en te permettant de préciser que si les choses fonctionnent tu seras le premier à suivre mais que si ça échoue tu t'empresseras d'aller rapporter les carences de ma proposition à Suna? C'est bien ça où j'ai halluciné?"

Je ne comprenais pas vraiment où il souhaitait en venir. Est-ce qu'il avait envie de me pousser à bout? Je lâchai un long soupire avant de baisser la tête vers Genshi, que j'observai longuement. En réalité j'étais en train de serrer mes points si forts dans mes manches que j'imaginais fort bien mes jointures se blanchir sous la pression musculaire. Je me passai ensuite une main sur le menton tout en acquiesçant plus ou moins dans le vide.

- "Je vois..."

Vous ai-je déjà précisé que la patience n'était pas mon point fo... Oui, ça je l'ai fait c'est juste! Nous étions dans la rue et des gens pouvaient fort bien nous voir aussi pour cette raison je ne lui sautai pas à la gorge. Je pris donc sur moi pour calmer la colère qui menaçait de m'engloutir tout en pensant à Yami pour m'aider à la réfréner. Lorsque je rouvris les yeux ce fut donc un visage plus ou moins lisse que j'arborais...

- "Alors écoute-moi bien petit merdeux parce que c'est la première et dernière fois que je vais prendre le temps de t'expliquer certaines choses!" fis-je d'une voix calme mais dans laquelle un énervement sous-jacent était parfaitement perceptible. "Tu peux raconter ce que tu veux dans ton rapport, je m'en contrefous au moins autant que de ma première chaussette! Tu peux même stipuler que je suis un incapable fini que ça me rendrait encore service! Comme ça on évitera de me faire perdre mon temps sur des missions dont je me fous totalement! Alors tes grands airs tu peux les ravaler directement sinon c'est moi qui m'en chargerai! Et tu peux me croire quand je te dis que tu n'aimeras pas du tout ça!"

Je pris le temps de lui décocher un sourire qui n'avait rien de sincère et qui ressemblait davantage à une menace qu'à un signe de bonne volonté.

- "Je n'ai jamais dis que ce plan était parfait mais c'est le seul dont nous disposons actuellement! Tu as une meilleure idée? Alors vas-y, on t'écoute! Propose-nous une alternative et je te promets de l'étudier attentivement comme tout partenaire qui se respecte! S'il est meilleur j'irai même jusqu'à lui donner mon approbation et à l'appuyer, juré! Mais ne vient pas me balancer tes théories foireuses à coup de schémas comme si nous étions dans une salle de cours! Ici, maintenant, c'est la réalité! Et dans la réalité, on prend des risques et on les accepte! Des complications il risque d'y en avoir! Des tonnes mêmes! Parce qu'on ne peut jamais tout prévoir quand bien même on essaierait!"

Je m'agenouillai à mon tour pour me mettre à sa hauteur et approchai ma tête de la sienne afin de positionner mon œil valide face aux siens.

- "Maintenant si tu as un problème avec moi on peut le régler ici, maintenant! Parce que je ne compte pas subir tes remarques désobligeantes tout au long de la mission! Tu n'as qu'à dire un mot, un simple petit mot, et on réglera nos différents comme des hommes! Ceci dit, écoute-moi bien attentivement: si tu oses me menacer encore une fois, une toute petite fois, tu n'auras pas assez de papier pour poser tes griefs à mon encontre sur ton rapport de mission! Et si tu crois que ce sont des paroles en l'air, essaie de tester ma détermination pour voir!" je pointe mon doigt en direction de son thorax. "Et si tu avais un doute laisse-moi mettre les choses au point: oui, ce sont bien des menaces que je te retourne! Et oui, je les mettrai à exécution si tu oses ne serait-ce que me regarder de travers! Quand quelque chose ne me plaît pas je ne remplis pas de la paperasse moi, je cogne!"

Je me redresse sans le quitter du regard et me roule une nouvelle cigarette que je porte à nouveau à mes lèvres avant d'y bouter le feu. Je jette un regard alentours tout en maîtrisant ma respiration pour retrouver un semblant de calme qui me fuit depuis que ce type est arrivé à notre rencontre à la voie illusionnée. Puis j'échange un regard avec Notsuu.

- "Tu as quelque chose à ajouter Notsuu? Autant mettre les choses à plat maintenant comme ça on pourra se concentrer sur la mission! En ce qui me concerne je crois que tu devrais prendre le commandement d'ailleurs! Puisque tu es le seul qui semble un brin civilisé ici je vais m'en remettre à ton avis! Et j'espère que c'est pareil pour toi Genshi! On a pas de temps à perdre avec ces conneries!"

Je reprends une longue taf et fais de mon mieux pour garder le silence malgré les remarque acerbes qui continuent à me brûler les lèvres...

- "Alors on fait quoi pour finir?"

HRP:

HRP:

Je plongeai mon regard dans les tubes des armes que Not's pointait sur nous. L'avantage quand on a qu'un oeil c'est qu'on a pas besoin de fermer le second pour ce genre de choses. Je ne m'offusquai pas de sa réaction, bien au contraire: c'était du Saibogu tout craché ça! Mais c'était surtout un excellent moyen pour mettre un terme à cette mise au point qui risquait de s'envenimer et de mettre à mal notre mission. Car il fallait avant tout se concentrer sur notre objectif et mettre de coté nos bisbilles personnelles. Nous aurions le temps de régler ça avec Genshi une fois que nous serions rentrés à Suna, comme des hommes et non les gamins que nous étions en train de devenir dans cette discussion aussi stérile que puérile...

D'un autre côté mon esprit de contradiction avait envie de mettre en doute l'affirmation de Not's quant à ses balles explosives. Je savais que le projectile en lui-même ne me ferait rien mais la déflagration qui suivrait? Ce qui ne tue pas rend plus fort paraît-il mais bon c'était peut-être un peu risqué tout de même. Surtout en pleine tronche... Et puis j'en revenais toujours à la nécessité de clore ce débat pour faire avancer notre recherche de ces fameux kidnappeurs. D'autant plus que le Saibogu était un pote et je n'avais guère envie de m'embrouiller avec lui. Je pris donc un peu sur moi pour lever les mains en l'air avec un air amusé:

- "Ne tirez pas, je me rends!" fis-je sur un ton détaché.

Je restai ainsi jusqu'à ce qu'il baisse son arme et je fis pareil avec mes bras pour reprendre des bouffées sur ma cigarette qui se consumaient depuis un moment entre mes lèvres. Après m'être débarrassé de la cendre et écouté la proposition du Saibogu relative à la métamorphose du pantin de Genshi, je me tournai vers mes deux coéquipiers:

- "Ce n'est pas une mauvaise idée, en effet! J'aime bien prendre des risques mais si je peux éviter de me faire fracasser le crâne..." approuvai-je. "Et puis ce n'est qu'un pantin de toute façon c'est pas vraiment grave s'il se fait détruire non?"

Je regrettai d'avoir posé la question avant même de la terminer. Pour moi ce n'était qu'une marionnette mais pour un type qui avait passé des jours voir des semaines à la construire l'idée n'était peut-être pas aussi suffisante que ça... Mais la question ne se posa guère plus longtemps car Genshi décida purement et simplement de s'en aller sans un mot après nous avoir gratifié de l'un de ses fameux regards suffisants semblables à celui qu'il nous avait décoché lorsque nous nous étions rencontrés. J'écarquillai mon oeil valide en le regardant s'éloigner, me demandant s'il n'allait pas tout simplement chercher quelque chose ou souhaitait juste prendre un peu de recul. Mais visiblement ce n'était pas le cas puisqu'il prenait la direction de Suna et disparut bientôt de notre champ de vision.

- "Bon et bien... bon débarras!" lâchai-je, encore sous le coup de la surprise, avant de me tourner vers Not's: "C'est toi et moi maintenant on dirait bien!"

Ce qui excluait donc l'utilisation du pantin pour nous ramener à mon rôle d'appât. Je savais que mon coéquipier restant était un excellent tireur et que je pouvais compter sur la fiabilité de ses tirs mais ça nous faisait tout de même une personne de moins pour me protéger d'un enlèvement. Le problème c'est que je n'avais guère d'autres options à proposer pour l'instant et que je ne souhaitais pas tourner en rond trop longtemps. D'autant plus qu'à force de discuter nous allions finir par attirer l'attention des éventuels kidnappeurs à supposer qu'ils se trouvent bien dans le coin comme nous le supposions. Rester ensemble revenait à leur signaler que nous étions en relation. Il valait donc mieux passer à la partie pratique du plan...

- "Ok! Je vais faire ce que je sais le mieux faire, à savoir jouer l'alcoolique! Sauf que cette fois je vais faire en sorte d'être si pitoyable et inoffensif que ce sera pratiquement une invitation à l'enlèvement!" fis-je avant de juger nécessaire de préciser quelque chose. "Non Not's, non! Inutile de relever ce que je viens de dire! Je suis pas pitoyable en temps normal!"

Je lui demandai ensuite d'ouvrir l'oeil tout en lui assurant que je comptais sur lui pour m'éviter les désagréments que je cherchais précisément à attirer. N'était-ce pas le rôle d'un appât après tout? Sur quoi je m'en allai de m'en côté après avoir fait apparaître une bouteille d'alcool à l'aide d'un sceau aussi basique que pratique. Je trimballai ma pauvre carcasse de clochard puisque c'est l'apparence que j'avais choisi d'adopter via un henge et en vint rapidement à tituber à force d'ingurgiter ce précieux liquide. Et il n'est pas exagéré de dire que je ne jouais mon rôle qu'à moitié puisque effectivement je ne faisais pas semblant de boire.

- "Wouuuuups, scusez-moi!" balbutia-je en évitant de justesse un type à l'allure sinistre. "J'vous avais pas vu!"
- "Dégage le clochard ou je te bute!" eus-je droit comme toute réponse.
- "Wowowoooow! On s'calme m'sieur!"

Je m'éloignai donc comme il me l'avait si gentiment... heu... conseillé! Au gré de mes pérégrinations dans le village je situai rapidement la zone qui semblait être la plus malfamée et je décidai de m'y attarder, m’asseyant autours de l'oasis qui la jouxtait. J'en profitai pour me rouler un pétard supplémentaire pour rentrer encore plus dans mon rôle - ouais, on va dire ça - et attendit patiemment que quelque chose se manifeste. J'usai du peu de concentration qu'il me restait pour rendre en partie malléable mon corps et éviter ainsi de me faire fracasser le crâne par un coup violent. Du moins juste assez pour que ça reste crédible...

J'espérais que Not's était toujours dans les environs et qu'il n'avait pas décidé de rentrer comme Genshi quelques heures plus tôt. Mais c'était peu probable qu'il me laisse tomber, du moins je l'espérais. Je n'avais guère pris le soin de vérifier qu'il se trouvait toujours là puisque je ne voulais pas attirer l'attention sur lui à cause d'un regard pas assez discret dans sa direction. Et puis j'avais l'étrange sensation d'être suivi depuis un moment déjà...

*T'as intérêt à viser juste mon pote!* songeai-je lorsque j'entendis des bruits de pas derrière-moi.

Amis, ennemis, simples badauds curieux ou désireux de taper la causette avec un misérable? Nous n'allions pas tarder à être fixés de toute façon...

Spoiler:

Not's répondrait-il présent lorsque j'en aurais besoin? Quel était ce scorpion dont il parlait? Que faisait cette saleté de sceau qu'il m'avait apposé un peu plus tôt sur l'épaule? Est-ce que je risquais d'exploser à cause de lui? Autant de questions qui ne trouvaient aucunes réponses pour le moment! Mais l'intervention de ces kidnappeurs me ramena brutalement sur terre lorsque je sentis un choc à l'arrière du crâne puis un grand sac qu'on glissait autours de mon corps. J'étais habitué à recevoir des coups mais celui-là était d'une rare violence! Et si je n'avais pas fait appel au pouvoir si particulier de mon clan pour amortir le choc j'aurais sûrement été poussé dans l'inconscience. À défaut je me contentais de joueur le type inanimé tout en me préparant à l'intervention de mon partenaire que j'estimais imminente.

Mais il n'y eut pas le moindre coup de feu, pas le plus petit son de détonation alors que je me faisais emmener vers une destination que je n'arrivais guère à deviner. L'appréhension laissai rapidement place à l'espoir tandis que je me demandais si Not's n'avait pas lui aussi décidé de rentrer à Suna et de me laisser accomplir la mission seule! Je ne le connaissais finalement pas assez pour être certain de sa fiabilité et il était toujours possible que j'aie commis une erreur en comptant sur lui. J'étais déçu et attristé à la fois par l'absence de manifestation de sa part et j'en vins à envisager une issue moins favorable que prévue à mon enlèvement.

*Qu'est-ce qu'il fout bordel?*

Je dus plusieurs fois résister à l'envie de me débattre pour tenter de quitter ce sac mais tant que nous étions en mouvement ça signifiait qu'on était pas arrivés à destination. Bah oui, logique! Dès lors je me devais de rester calme encore un peu si je voulais avoir une chance de cueillir tous les responsables en même temps! Je pris donc mon mal en patience tandis qu'on me ballotait comme une simple marchandise. Je n'eus heureusement pas à attendre longtemps avant qu'on me jette au sol après avoir pénétré dans une bâtisse si j'en jugeais au bruit de porte que j'avais entendu quelques secondes plus tôt. Je restai ensuite patiemment à attendre dans mon sac tandis que des échos de voix me parvenaient.

- "Qu'est-ce que vous avez trouvé les gars?"
- "Un clochard chef ou quelque chose comme ça! Le type titubait tellement il en avait dans le sang! T'aurais du voir ça!"
- "Je vous ai pourtant répété plein de fois que ces mecs ne font pas des bons esclaves! Ils crèvent au bout de quelques semaines à tout casser! Qui va nous l'acheter hein?"
- "Ben... Faut dire aussi qu'on avait pas vraiment le choix! Avec tout ça les victimes se font rares! Les gens restent chez eux le soir maintenant et puis..."
- "Rhooo ça va! Voyons plutôt ce que nous avons-là!"

J'entendis des bruits de pas se rapprocher et j'allongeai mes doigts pour aller récupérer deux kunaïs dans mes poches, prêt à frapper le premier type qui ouvrirait le sac. Mais une explosion coupa court aux projets de mes assaillants, aussitôt suivis de bruits d'arme à feu propres au Saibogu. Un mince sourire éclaira mon visage alors que je prenais conscience que Not's était finalement entré dans la danse. Je profitai de la cohue qui suivit son intervention pour lacérer le sac avec mes lames de jet et me redresser en me massant le crâne.

Les types étaient trop occupés à se protéger des tirs de Not's pour réellement remarquer que je m'étais libéré. J'en profitai pour allonger le bras et saisir un de ces enfoirés par le col avant de le tirer sans ménagement en arrière. L'élasticité fit le reste et je l'envoyai s'écraser contre le mur tandis que je fonçais sur un deuxième pour enrouler mon bras autours de sa gorge. L'autre lâcha immédiatement son cimeterre et sombra bien vite dans l'inconscience à cause du manque d'air. Je relâchai mon étreinte avant que la vie ne le quitte définitivement et le regardai s'écrouler sur le sol. Les efforts conjoints de mon coéquipier et moi-même eut tôt fait d'avoir raison de la résistance de nos adversaire.

Je me dirigeai vers le dernier qui reculait jusqu'à rencontrer un mur, faisant tournoyer mon avant-bras à la manière d'une fronde tandis que je m'apprêtais à frapper. Il leva deux mains devant lui, l'air visiblement appeuré, tandis que Not's venait me rejoindre. J'aimais beaucoup ces retournements de situation et à en juger par la tronche de notre adversaire, ce dernier y gouttait beaucoup moins.

- "Ok les gars, on se calme d'accord? C'est une erreur d'accord? Nous ne voulions pas vous faire du mal..."
- "Tu entends ça Not's? Il s'agit d'une erreur!" relevai-je en ricanant.
- "Ok écoutez! C'est le maire qui vous envoie pas vrai? Il n'a toujours pas digéré son écartement de l'affaire c'est ça? Alors dites-lui qu'on va de nouveau travailler pour lui! On le fera même gratuitement! Mais inutile de nous tuer d'accord?"

J'échangeai un regarda avec Not's avant de saisir le type par le col pour le plaquer davantage contre le mur.

- "Explique-toi! Qu'est-ce que le maire a à voir dans tout ça?"

L'autre compris rapidement sa méprise mais ne se fit néanmoins pas prier pour tout nous expliquer. C'est fou ce que les gens se montrent coopératif quand plane la menace de se faire exploser la tronche... Il nous raconta que ces enlèvements étaient à la base l'idée du maire lui-même. Ce dernier désirait se débarrasser des éléments gênants de son village en les faisant enlever puis en les revendant comme esclaves à l'étranger grâce à ses connexions avec certains Nukenins. Ainsi il se faisait de l'argent tout en écartant du village les personnes qu'il ne désirait plus y voir.

Il avait donc fait appel à ce type et sa bande pour faire le sale travail et partageait les bénéfices avec eux. Néanmoins après quelque temps la plupart des gêneurs avaient été mis de côté et le boulot se faisait plus rare pour cette équipe de truands. Ils avaient alors décidé d'agir pour leur compte et de s'en prendre à des cibles plus aisées, indépendamment de l'avis du maire. Ce dernier avait alors sûrement fait appel à nous pour régler cette histoire et éviter de se salir les mains ou prendre le risque d'engager des mercenaires sans être certain qu'ils pourraient remplir leur part du contrat. Ainsi donc nous avions été engagés par le mec qui avait fomenté tout ceci à la base... C'était plutôt culotté de sa part!

- "Merci! Fais dodo maintenant!" fis-je avant de lui cogner le crâne contre le mur.

Assommé comme ses collègues, il ne fallut guère de temps à Not's pour l'attacher solidement avec les autres survivants de sa bande. Nous avions besoin d'eux pour témoigner contre le maire du village car il fut rapidement évident pour nous que nous ne pouvions fermer les yeux sur les agissements de ce dernier. Morts, ces types ne nous auraient servis à rien... Assurés qu'ils ne pourraient pas s'échapper, nous décidâmes donc de rendre visite au chef du village. Nous décidâmes en chemin de laisser Not's "parler" avec le responsable de tout ceci. Il ne nous fallut pas plus d'une dizaine de minutes avant de rejoindre sa somptueuse demeure et nous y inviter sans le moindre ménagement.

- "Salut!" clamai-je en arrivant dans son bureau.

Le chef du village leva les yeux vers nous et nous accueilli avec un sourire aussi hypocrite que soulagé. S'il se doutait...

- "Alors les amis! Vous avez réussi à mettre hors d'état de nuire ces kidnappeurs?"
- "Pas tous, non! Il nous en manque un en fait... Mais je vais laisser mon partenaire vous expliquer précisément tout ça!"

Je tournai alors le regard vers Not's comme pour l'inviter à agir comme il l'entendait...