Ça y est les première feuilles brunâtres commencent à tomber sur le sol du village caché du feu. Là au milieu de ce mélange de jaune, d’or et de marron, je laisse mes pas me guider à leur guise. Déjà deux mois que je suis dans le village de la feuille, deux mois passés à m’entrainer, à rencontrer des shinobis, et pourtant j’ai cette désagréable sensation de perdre mon temps ici. Apparemment ce village est aussi faible que celui qui m’abrite, aucune rencontre digne de ce à quoi je m’attendais, déçue, je suis irrémédiablement déçue…
J’arrive au cœur du village, toujours guidée par mes pas, je m’avance vers un poste d’information, lasse, je demande alors :

-Bonjour j’aimerais savoir où je pourrais trouver des membres du clan Nara, je n’en ai toujours pas croisé un seul depuis mon arrivée au village et j’aimerais vraiment m’entretenir avec l’un d’eux.

Bon en réalité j’en ai rien à faire du clan Nara, puisque j’ai quasiment fait le tour du village et ce n’est pas un clan à la réputation intelligente qui risque de rehausser le niveau, mais comme le disais si bien ma feu mère, on ne peut pas juger tant que l’on ne sait pas. Le shinobi en face de moi me répond de manière calme et posé dans un ton monotone :

-Le clan Nara n’accepte pas les visites ainsi, il vous faut faire toute une lettre en bon et nu forme, sans parler de l’attente qu’il faut pour sa validation et puis toute les…

Incroyable, on me l’avait jamais fait celle-là, tout un pataquès pour rentrer en contact avec l’un des membres du clan, j’y crois pas, et en plus l’autre à l’air sérieux. Il continu, inlassablement à me sortir l’ensemble du protocole, toujours avec cette même voix monotone qui commence sérieusement à me taper sur le système. Je n’attends même pas qu’il ait fini pour lui répondre de ma voix calme, toujours maitresse de la petite colère qui monte en moi pour lui dire :

-Je voudrais juste discuter avec l’un de leur membre, je ne veux pas que l’ensemble du clan me reçoive lors d’une grande cérémonie, juste parler, échanger des mots, communiquer et avoir une relation normale et basique.

Oui je l’ai pris pour un con, mais c’est ce qu’il est après tout, j’ai dit tout cela avec légèreté, le clouant alors litéralement sur place, cependant il se ressaisit et sans sourciller me réponds :

-Dans ce cas là vous devrez tout de même remplir ce formulaire attestant de votre…

Et merde, non vraiment il est lourd, ce n’est pas possible d’être borné à ce point-là, je veux juste discuter, discuter ! Ce n’est pourtant pas sorcier, il suffit juste de me mettre en relation avec l’un de leur membre et basta. Non pour Mônsieur, il faut quand même passer par de la paperasse. Bon cette fois ci je ne l’écoute pas, mais je le laisse finir son petit monologue histoire de lui faire plaisir…

Une voix me tire de mes pensées qui ne cessaient de maudire l’homme qui se trouve devant moi. En me retournant je me rends contre que l’homme en question, car oui j’avais deviné que c’était un homme au timbre de sa voix, porte un large kimono avec un traditionnel chapeau de paille.
Il remet en place le shinobi qui retourne rapidement à sa paperasse en bredouillant quelques excuses incompréhensibles. Enfin un homme galant, cela faisait tellement de temps que j’en avait pas croisé ici bas, il faut croire que l’habit de shinobi enlève toute forme d’élégance dans la bouche d’un homme. Cependant, je sais pertinemment qu’il ne faut pas que je me fie à ces bonnes manières, surtout que s’il m’est semblable ceci n’est qu’une simple façade, pour obtenir certainement quelque chose de moi. Mais en cessant de résonner comme si tout le monde était menteur et manipulateur, et en résonant de manière normale (s’il existe une pensée normale en cette terre) il n’apparait pas comme menaçant, il a même une voix et un visage rassurant. Surtout que c’est un Nara j’ai de fortes chances, en plus d’apprendre des choses utiles sur l’art ninja, de passer une soirée amusante.
Après qu’il se soit présenté je fais une brève courbette, accompagnée d’un large sourire pour ensuite dire d’un air jovial :

-Mais tout l’honneur est pour moi, Ozuka, Hakushi Ozuka, je suis une simple kumojin venue apprendre un peu plus sur l’art shinobi dans votre village. Je venais justement voir à ce bureau pour rencontrer un membre du clan Nara, discuter de manière tout ce qu’il y a de plus normale et en apprendre un peu plus sur les gens qui peuplent ce village. Vous conviendrait-il qu’il en soit ainsi ? J’ai l’impression d’être on ne peut mieux tomber lorsque vous vous êtes présenté.

Toujours avec un large sourire je forme une hanse avec mon bras droit, posant la main sur ma hanche, de telle sorte qu’il puisse s’y attacher pour me mener.

-Donc si vous êtes d’accord, je vous laisserais me guider.

En fait désormais cela m’est égal si l’on discute de techniques ou bien si on discute de la pluie ou du beau temps, j’ai envie de m’amuser avec ce Jumonji.


[hrp] désolé pas très grand post :s [hrp]

La lumière rosée du soleil couchant venait colorer la montagne surplombant le village de la feuille. Les toits des maisons alentours prenaient aussi cette teinte si particulière dont le passage éphémère rendait au spectacle toute sa splendeur. Comme une fleur de cerisier, voilà ce à quoi on pourrait comparer ce moment, court d’existence mais intense dans la beauté.
Faire de la poésie me va si mal, moi qui suis abjecte par la pensée, manipulatrice et menteuse, je ne devrais pas être autorisée à profiter de ce qui se déroule sous mes yeux et à le décrire ainsi, mais je le fait tout de même, ça m’amuse. De toute façon qui est capable de me juger ? Personne !
Soudain Jumonji me sort de cette petite réflexion intérieure. Ah oui c’est vrai c’est lui qui me guide depuis tout à l’heure, il vient me proposer un peu de saké. Je le regarde pendant un instant et lui fait un large sourire et tout en prenant la coupe et la menant à mes lèvres, je lui dis :

-Merci

Je sens le feu de l’alcool qui vient toucher mon palais et ma langue, puis lorsque je l’avale, je ressens toute sa descente à travers mon œsophage jusqu’à son arrivée dans mon estomac. Il a de la chance vraiment, je ne tiens pas l’alcool s’il continue comme ça il fera ce qu’il veut de moi. Je n’aime pas trop l’alcool, mais je me suis toujours donnée ce genre en le buvant à chaque fois que l’on me le proposait, le faisant comme si j’appréciais vraiment.
Ce que je veux apprendre sur les Nara ? En fait je ne sais pas vraiment, je ne lui répondrais bien sûr pas que si je fais ça c’est que je m’ennuie ferme dans ce village, mais ça me démange tout de même de le faire :

-On m’a dit que les Nara étaient des shinobis d’une rare intelligence, et je constate que c’est vrai, enfin vous êtes le seul que j’ai eu l’occasion de croiser et pour le moment et vous ne faites pas mentir votre réputation. Donc je me disais que j’avais peut être une chance d’échanger quelques mots sur des stratégies, mais je me rends compte que maintenant, vu l’heure je n’ai plus trop envie de parler de ce genre de chose. Parlez-moi de vous, je suis sûre que ce sera bien plus intéressant.

Tout en disant ces mots je m’accroche un peu plus à son bras, et je me serre un peu plus de lui, sans trop le faire tout de même. Je n’ai pas envie de passer pour un pot de colle. Non je le fais juste assez comme si j’avais un peu froid, comme si je cherchais à me protéger du baiser glacial d’une petite brise du soir dont seul moi serait capable de sentir les effets…

Mon clan impressionnant ? Il doit vraiment être en manque pour sortir des conneries pareilles, j’ai un clan de faibles, lâches, poltrons j’en passe et des meilleures, non mais vraiment qu’est ce qui lui prend de dire que mon clan est impressionnant…
J’attrape un bout de papier et le plie pour qu’il forme une fleur de cerisier que je pose délicatement sur mes cheveux :

-Voilà le pouvoir de mon clan, pour tout te dire, je ne le trouve pas si spectaculaire que cela, d’ailleurs mon clan n’a rien d’extraordinaire, il est un simple clan du village de la foudre parmi tant d’autres.

Pendant un moment je ne dis rien, me laissant guider, puis après quelques secondes je reprends :

-Sinon il est vrai que Kumo est un village agréable à vivre, les montagnes y sont magnifiques et l’air y est relativement pur. La paix permet au village de prospérer et au commerçant de bien s’établir, mais je ne crains que ce moment de répit ne soit que poudre aux yeux, la paix ne tient qu’à un fil, et des tensions entre les villages ne sont presque plus à cacher, mais je m’égare, je n’ai pas envie de parler de malheurs…

C’est vrai que parler de politique ne m’enchante pas trop, je trouve que cela plombe généralement l’ambiance, ou bien la rend trop sérieuse alors j’évite souvent d’en parler, pourtant étrangement le sujet m’est venu aux lèvres sans même que je m’en rende compte, certainement l’un des effets de l’alcool qui décide de pointer le bout de son nez.

-Mais vous avez dit que vous étiez écrivain, cela m’intéresse beaucoup, je peux venir chez vous visiter votre cadre d’écriture, et peut être lire une ou deux page écrite de votre main ? Nous pourrions continuer à boire au chaud, l’air commence à se rafraichir, et la nuit tombera d’ici peu.

Je lui fais un beau sourire, qui n’attend qu’une seule chose, son approbation. J’ai pas envie de me les geler dehors à marcher pendant cinquante ans, l’idée d’un âtre chaud et d’un autre verre me parait déjà bien plus intéressante…