Un long moment, voici à peu prés le temps que la jeune femme, l'écarlate de son nouveau nom, avait quitté son ancienne vie. Celle-ci, cette nouvelle vie; elle n'était pas plus trépidante, pas plus palpitante; ce ne fut de toute façon pas les raisons de son départ, non puisqu'au début, avant que tout cela n'arrive, elle n'avait aucune envie de les quitter, ni même de les blesser. Une longue histoire, trop longue peut-être, l'avait mené ici, dans ce village de Kusa. Ah, longtemps; qu'elle n'avait pas foulé les landes de son pays natal, lui aussi elle l'avait abandonné. Elle n'avait plus de contact avec qui que ce soit, l'écarlate n'avait pas de famille, pas d'amis; aucun lien susceptible de la faire, de nouveau, chavirer. Seul pour une personne son cœur palpitait encore, et cet homme, unique, ne ressemblant à aucun autre; constituait son seul... support. Il disparaissait, et réapparaissait, sans parler de ce qu'il faisait. Elle s'en doutait. Séparés ils étaient presque invulnérables, ensemble... C'était toute autre chose.

Ce village, enfant, elle l'avait connu; il était plus petit, plus modeste et moins fréquenté. Ses longs cheveux s'agitaient sous le vent toujours si léger. Il venait de ce pays plus à l'ouest, de ses déserts et au de-là. Un soupçon de nostalgie ? Non, une simple remarque, une connaissance, de la culture rien de plus. Elle marcha quelques minutes. Ce bar où elle avait si souvent rejoint celui qu'elle nommait âme-sœur, aujourd'hui défunt. Elle poussa les quelques files munis de perles, ils résonnèrent dans un entrechoquement semblant ne pas finir, et avant même qu'elle ne s'asseye, un homme, vieilli, apparut. Elle s'assit. Elle pointe du doigt cet alcool qu'une fois le Kazekage lui avait offert, un genre de liqueur brunâtre, il s'agissait d'un mélange à base de fleur, et notamment de la rose, la rose des sables l'avait il ainsi nommé. Elle se souvenait de cette phrase, et n'avait toujours pas compris si il parlait de l'alcool, ou de la fille, d'elle.

L'homme au regard ridé, attrapa la bouteille, et en versa un verre, un shooter pour plus précisément. Elle lui fit signe, et d'une vois étonnement clair et douce lui demanda de laisser la bouteille. Surpris, le patron, barman ou serveur, peu importe; posa la bouteille. Il la fixa un instant, et sembla rajeunir de dix ans.

Une dure journée ?
Pas plus que d'ordinaire, et vous ?
Ha... Les temps sont durs, comme toujours. Fais attention avec ça, c'est fort.
J'ai l'habitude.
Ha... Oh oui, je me souviens maintenant, tu ne venais pas ici il y a plusieurs années avec un jeune homme ? Vous commandiez même un Jin Ginseng. Oh oui... je me rappelle.. Tu es..
Non, vous faites erreur vieil homme, je ne suis personne que vous puissiez aujourd'hui vraiment connaître.
Ah bon ? Pourtant j'aurais juré, avec ces cheveux et ce regard...
Tout le monde peut se tromper... Puis-je profiter de cette rose ?
Mes excuses, oui bien sûr. Appelez moi s'il y a le moindre problème.

Il partit, elle ne répondit pas, et avala un premier shooter, le liquide de bonne facture enflamma un bref instant le fond de sa gorge, avant d'être dissipé. Elle s'y était vraiment habituée, avec le temps. Les files perlés s'agitèrent à nouveau. Quelqu'un était entré, elle savait qui.

Hum... Zanshissss... Ne restons pas trop longtemps... ces lieux ne sont pas... surs..
Kirido, nul part n'est sûr, le seul endroit et nous pourrions être en paix, c'est le cimetière, et encore.
Mais, au moins, ne te saoules pas je te prie, on ne sait jamais...
Haha.. C'est trop tard, j'ai commencé. Dit elle en servant déjà son quatrième verre.

"Vous appréciez ? Vint troubler le patron.
J'appréciais. Répondit elle sur un ton agacé.
Haha. sur un ton gêné. Mais... Tu es sûre que.. Il y avait une famille ici avant, les Hab...
Vous le faites exprès ? Lorsque je dis "PERSONNE", c'est "PERSONNE"! Dit elle en brisant le verre entre ses mains, lequel fumait.
Zanshisss...
Veuillez m'excuser madame... Je dois.. je dois faire erreur. Avec crainte. Je vais nettoyer, et vous en servir un nouveau.
Pardon... faites donc... Soupira-t-elle à voix basse en regardant sa main saigner. Si tu étais toujours là... tu m'aurais arrangé ça, n'est ce pas ? Elle parlait seule. Vous m'apporterez la bouteille, tenez, pour le dédommagement. Une liasse de billets tomba sur le comptoir.
Je ne peux accepter... Je... Fixant la jeune femme. Ah... Merci. Il lui donna la bouteille réclamée."

Les perles s'agitèrent, elle n'y prêta aucune attention, les clients avaient le droit de venir se désaltérer, se poser après un long voyage, elle n'y voyais aucun inconvénient, tant qu'ils ne la dérangeaient pas, qu'ils ne la questionnaient pas. Seulement, les perles ne firent que s'agiter, rien de plus. Personne n'entra. Pour le moment. Le lézard lui, observait. Depuis maintenant plusieurs mois il la suivait, il était devenu son plus fidèle compagnon, bien que leurs débuts, remontant à ... loin, ne fussent pas aussi cordiaux. Il grimpa le long de la jambe de la jeune femme, et s'assied sur son épaule, aussi bien que peut le faire un lézard. Il regarda derrière, vers la porte, observa l'agitateur de perles du coin de l'œil, écouta. Cela ne lui prit pas plus de temps que cela pour avertir sa maîtresse.

"Quelqu'un qui te connaît, Zanshisss.
Bien sûr qu'il me connaît, il me connaît depuis que j'ai trois ans.
Non, pas le vieux; lui.
Lui ?"

Elle pensa directement à une personne, un espoir lui traversa l'esprit, une lumière, son visage jusque sévère et fermé s'éclaircit soudainement. C'était tout à fait possible et tout à fait son genre de la retrouver sans prévenir, une véritable surprise, et ce à chaque fois. La seule qui pouvait avoir une réelle importance, aujourd'hui, à ses yeux; son seul point faible, et son ultime amour. Elle se retourna sans penser à une autre possibilité, et parla sans réfléchir à ce nouveau venu dont elle connaissait, bien évidemment, l'identité.

"Te voilà enfin! dit elle à moitié retournée. Kenji... termina-t-elle, sur un ton plus... surpris."

La surprise était bien au rendez-vous, mais pas celle escomptée. Son sourire s'effaça soudainement, ses sourcils se froncèrent. Elle reposa son regard de braise sur la bouteille hautement inflammable et hésita un instant la jeter... mais non, elle ne pouvait gaspiller un si précieux nectar. Elle dévissa le bouchon métallique sur lequel étaient gravées des petites fleures, et en avala une longue gorgée. L'alcool l'aiderait à y voir plus clair. Ces derniers temps elle avait la fâcheuse tendance à voir des visages de personnes qui sont censées ne plus être de ce monde, celui-ci en faisait partie. Ce ne fut qu'après avoir absorbé une dose conséquente qu'elle réalisa que Kirido l'avait aussi vu... peu importait.. Elle se tourna à nouveau. Et fixa cet homme.

"La rose des sables est un alcool dur, mais à ce point là! C'est injuste. Laissa-t-elle échapper, en se marrant finalement. L'alcool commençait à agir, et son cerveau ne rationnalisait plus les choses de la même façon, et encore moins ses réactions. Si Kirido te voit, c'est qu't'es pas mort... haha.. encore un truc que j'ai foiré... pour changer... Acheva-t-elle sur un ton relevant du regret."

Elle se tût, Kirido se tût, le patron se tût. L'Ecarlate espérait que cette apparition soudaine ne soit qu'une vision dû à un délire collectif provoqué par des émanation provenant d'une fuite de gaz...

Le lézard été descendu de son épaule dés que le revenant fut à proximité, il se cacha sous une table derrière quelques chaises pour observer ce qui allait se passer. Kiridomitoueï de son véritable nom, n'aimait pas les humains et avait eu bien du mal à tolérer qu'un humain, qui plus est une femme; soit sa maîtresse. Mais avec le temps, et tout ce qu'il avait put voir de cette jeune femme, il finit par l'accepter comme une membre à part entière de la famille des Lézards perlés, bien qu'il ne fut en fait rien de plus qu'un subordonné de leur ordre. Le petit monstre de Gila avait entendu les mots du Sunajin, celui-ci ne le connaissait pas, mais lui, lui le connaissait; combien de fois il avait put entendre son nom, et bien d'autres d'ailleurs; lorsque "L'Ecarlate" parlait dans son sommeil, lorsqu'elle buvait plus que raison ou lorsqu'elle délirait. Il observait, dans le plus grand des silences, il l'observait.

C'était sa déchéance, l'exemple le plus simple, le plus parlant; l'alcool. Ces derniers temps elle aurait certainement tué la plupart de ceux se sentant l'âme d'une tête brûlée. Toucher à ce qu'elle possédait, la toucher; était l'erreur fatale que tout le monde redoute, celle qu'on attend sans le savoir, que l'on espère ne jamais commettre mais qui est en réalité inexorable. Même dans cet état, second; la rouge pouvait agir, pouvait se battre ; d'ailleurs sans retenue... Mais, aujourd'hui, cette fois là, celui-là; ne subirait aucun de ses courroux, aucun de ses démons, rien. Elle était fatiguée de se battre, de courir, de ne plus pouvoir se poser tranquillement. Alors, quand le blondinet se rapprocha, prit la bouteille de ses mains pour la mettre "hors de portée" - rien est jamais hors de portée pour l'Ecarlate - , et qu'il prit sa main pour en extraire les quelques éclats du verre brisé quelques minutes avant, elle le laissa faire.

Elle l'avait entendu, elle réfléchit un instant, le temps de comprendre ce qu'elle avait dit, et ce qu'il avait dit. Elle reprit sa position, face au bar, laissant le... ninja finir ce qu'il avait envie de faire, la soigner... Une scène relevant de l'absurde plus que du reste. Comment devait elle réagir ? Peur, angoisse, joie ? Comment ? De la joie peut être, car au moins un avait survécu du plan de son... "Grand père", ou de l'l'angoisse que ce ninja ne veuille se venger... non impossible, on ne pouvait plus l'atteindre, lui faire peur, la faire chanter ou la manipuler; cette période été finie. Elle se frotta le visage de sa main libre, et posa le regard sur Kioshi. L'observant manier sa main avec précaution et délicatesse. Le souvenir de leur première rencontre lui revint alors, il avait toujours été comme ça avec elle, et elle... Même le jour de ce test qu'elle avait mis au point pour l'unité d'élite du village.

"Quand...quand les personnes meurent, on a plus besoin de savoir si elles vont bien, ou pas... Dit-elle en observant toujours le ninja penché à côté. La même erreur qu'avant, qu'à Suna et ailleurs, avec lui et d'autres. Son plus grand défaut, ne jamais s'excuser, toujours donner une explication, toujours paraître dure et froide. Avec le temps, depuis son affrontement avec le Kazekage, et la mort d'Akuraï; elle avait comprit que c'était une erreur, ne pas être suffisamment entourée... Elle se frotta cette fois les yeux, comme pour chasser une idée, ou pour se reconcentrer. Son esprit était semblable aux champs de bataille qu'elle avait souvent parcouru par le passé, un incommensurable bordel de long en large où régnaient le chaos, l'anarchie et la mort, avec dans un petit coin, un carré de verdure ensoleillé, une tache blanche sur une sombre toile, et elle, perdue dans ce désert de ténèbres et de destruction. Non... ce n'ai pas ce que je veux dire. Ajouta-t-elle sur un ton plus doux. Je regrette tellement de choses... l'écarlate... on devrait m'appeler Regret... Je ne suis que ça. Et toi tu es là... Comme par miracle... à me soigner, comme... Elle se tût et se mordit l'intérieure de la lèvre, et se frotta à nouveau les yeux, mais cette fois dans l'espoir d'essuyer une éventuelle larme."

Les souvenirs ressurgissaient un à un sans crier gare, jusqu'aujourd'hui elle avait réussi à les tenir éloignés, à les restreindre; elle avait essayé de les oublier, de les effacer mais ce n'était pas si simple, tout ce qu'elle avait vécu et subit formait  une encre plus indélébile que celle des Hyô. Elle aurait frotter à s'en faire saigner, il lui était impossible de stopper ces larmes là. Ce n'était pas un pleure, et pas vraiment de la tristesse, mais plutôt un concentré, un concentré que le Sunajin représentait parfaitement. Il terminait le bandage, il avait dû l'écouter, sans rien dire. une fois fini, elle lui serra la main, pas dans l'intention de lui faire mal, de cette même main abîmée. Elle chercha encore un instant ses mots.

"Je te présente toutes mes excuses, pour tout ce que j'ai pus te faire... Et tout ce que je te ferai certainement endurer... pour Suna, pour... Elle prit une profonde respiration, tentant de retrouver ses esprits. Ses yeux étaient rivés sur le visage du jeune homme. Comme Tsuna. Termina-t-elle sa phrase précédente."

Elle passa le bout des doigts de sa main bandée sur la joue du Yamada, et de l'autre main, la droite; attrapa la bouteille. Elle resta face à lui et tenta de porter la bouteille à ses lèvres, lorsque Kirido surgit à pleine vitesse, les chaises qui le dissimulaient se renversèrent, aussi vite que le peut un lézard; et attrapa la bouteille en plein vol. Aussi vivement, il la fit glisser loin le long du comptoir. Et se tourna finalement vers le Sunajin alors que Zanshi semblait se résignait.

"C'est moi, Kirido; et pour toi, humain, ce sera Kiridomitoueï, le garde du Trésor de...
Kirido! Cria-t-elle.
Bon... Kirido, c'est ok. Dit-il en se rapprochant. Il renifla furtivement le ninja, et se rapprocha un peu plus encore, et, parla à voix basse. Fais attention aux quesssstion que tu poses. Tu l'as connais visiblement, alors... attensssssssssion aux sujets sensssssssibles. Dit-il avant que Zanshi ne l'attrape par le haut de son petit veston.
Laisse-le tranquille... Lui dit elle tout calmement. Puis elle le reposa sur le tabouret à sa droite. Et se retourna de nouveau vers le Yamada. Elle tenta.
La bouteille ? Je te dis qui était le vieux, et tu me donnes la bouteille. Elle marqua un court arrêt. Le vieux, c'était mon grand père."

J’enlevais précautieusement les éclats au nombre de dagues plantées dans le cœur de Zanshi. Pourtant, elle paraissait normale aux premiers abords. Le fait qu’elle n’ait pas résisté à la prise de la bouteille non, mais oralement elle était restée la même. Jusqu’à la suite. Je rêve où elle venait de s’excuser ? Désolé demoiselle, j’ai dû me tromper de personne. La Zanshi que je connais ne demande jamais pardon, même lorsqu’elle le devrait, même lorsqu’elle brûle les membres de ses camarades. De plus, sa main serrant la mienne… Cette proximité, cette douceur, je n’y étais pas du tout accoutumé. Bien au contraire plutôt. Mais je tiquais sur une partie de sa phrase.

" Que tu me feras certainement endurer ? "

Un temps au présent. Où est la lame ? Tu es devenu folle au point d’accorder une dernière étreinte à tes victimes avant de leur ôter la vie ? Mais je ne vis aucune mauvaise intention. Juste une main me caressant la joue, me laissant hébété par la surprise d’un tel bouleversement. A la suite de quoi, un lézard doué de parole vint me tirer de ma torpeur. Alors Kirido c’est lui ? Je pensais que c’était le nom du vieux. Une bouteille contre son identité ? Je ne suis pas certain que ce soit bon pour elle, mais j’inclinais tout de même la tête.

" C’était ? "

Je compris aussitôt ce qu’elle voulait dire. Encore un mort. La question de l’assassin perdurait cependant. Ce pourrait-elle Zanshi. A présent, je la croyais capable de tout. D’ailleurs, plus du pire que du meilleur. Mais je ne pouvais me résoudre à lui faire du mal, elle à qui je devais tant.

" Une bouteille d’eau. "

Evidemment, je m’adressais au propriétaire du lieu qui ne tarda pas à m’apporter ma requête, avant que je ne la tende à la demoiselle. Tu avais demandé une bouteille, mais tu n’avais pas précisé quelle bouteille.

" Il est vrai que l’alcool semble te rendre bien plus aimable et douce, mais je préfère que tu t’accordes un temps à une oasis qu’une bouteille comme exutoire. "

Référence à notre première rencontre, qui aura peut-être pour effet de lui rappeler de bons souvenirs. Zanshi était bien trop gentille, ça se voyait que quelque chose n’allait pas. Ou que tout n’allait pas. En pensant à ce qu’elle était, le changement en était presque pathétique. Comment pourrais-je ne rien faire en ce cas ? Je pris la main qui me touchait la joue au creux de la mienne, comme pour lui transmettre un peu de chaleur.

" Les regrets appartiennent au passé, et tu es au présent. Alors concentre toi dessus pour ne plus en faire à l’avenir. "

De toute façon, dans ce genre de cas, tout le monde sait que seul le temps peut guérir pareil plaie. Tout ce qu’on peut faire, c’est rendre l’attente de la rédemption moins douloureuse. Un peu comme le temps suite à la mort d’Ao Kuroi. Depuis lors, je me suis entraîné sans relâche pour que cela ne se reproduise plus, me hissant au rang de Jônin. Un jour, Kumo paiera son crime. Mais pour le moment, c’était de Zanshi dont je m’occupais. Alors que logiquement, ce devait être à elle de prendre soin de moi, de recoller les morceaux. N’était-ce pas elle qui m’avait laissé pour mort ? Elle qui n’a que le nom de morts ou de disparus à la bouche ? Kenji, Tsuna, … Mais je me souvins du conseil du lézard et me ravisai pour une approche plus délicate.

" Que fais-tu ici ? Pourquoi ne pas être revenue ? "

Une bouteille comme exutoire. Zanshi le regarda, peut-être fut ce l'alcool et son taux dans le sang qui l'empêchèrent de rire, ou alors une cruelle vérité qu'elle venait d'entendre, l'un ou l'autre, cela ne faisait pas une grande différence. Elle ferma les yeux un instant, et prit la bouteille d'eau, les rouvrant. La bouteille resta close, cependant elle n'essaya pas de récupérer l'autre non plus. Son regard un peu éteint croisa celui du patron, elle pouvait y lire la pitié, ou la déception, à moins que cela ne soit de la tristesse. Elle se souvenait ces moments passés avec cet homme, grand ami de son père; le passé était tellement plus agréable que le présent, se dit-elle. Tout avait dégénéré lorsque son "grand père" l'avait contacté. Elle avait comprit ce qu'il avait fait depuis que ce dernier est mort. L'oreille attentive, comprenant non sans mal ce qu'il disait, elle prit un long moment avant de répondre. Son visage restait sans expression, bien qu'on put aisément y lire la fatigue, ou quelque chose s'en rapprochant.

"Kioshi... Tu as toujours eu cet art de jouer avec les mots... enfin... dit-elle lentement en se penchant vers lui. Le présent hein. En reprenant sa position. Je ne comprends pas... J'ai failli vous tuer, toi et les autres... J'ai attaqué Suna... Dit-elle d'une vois plutôt étrange, en saisissant la bouteille d'eau. J'ai... j'ai... Elle ferma les yeux, et un sourire crispé contracta ses lèvres. J'ai tué des Sunajin, des personnes qui me respectaient et d'autres qui m'aimaient, Kioshi. Ajouta-t-elle, son sourire forcé se mua, s'inversa."

La bouteille d'eau dans sa main se mit à fumer subitement. Un trou laissa s'échapper le liquide, lequel elle dissipa de l'autre main, le faisant simplement disparaître, comme si il n'avait jamais existé. Elle lâcha la bouteille à moitié fondu maintenant, elle roula, tout au moins, chavira de l'autre côté du comptoir. Son cœur battait bien plus fort qu'un instant auparavant. L'alcool désinhibait les émotions, les sentiments et les comportements; sans distinction. D'habitude seule, elle n'avait pas de problème avec elle même, elle oubliait le temps d'une soulerie, et généralement elle se réveillait le lendemain sans vraiment se souvenir de la veille, sans même savoir comment elle avait put rejoindre un lit, ou une chambre, une autre histoire. Mais cette fois, la dose n'était assez conséquente pour oublier, et pas assez faible pour avoir le contrôle total. À cet instant, elle aurait bien voulu trois ou quatre verres de plus.

"Retourner à Suna... c'est... c'est le passé. Mon présent, c'est le regret; c'est mon vrai éxé.. éxutoire. Les degrés de la rose se faisaient de plus en plus ressentir. Ma vie, c'est comme cette bouteille... bien pleine... brûlée... et finalement décon... décontenancée, inutile. Se marra-t-elle. Au moins... ça jpeux leur reconnaître le mérite aux Samouraïs, d'avoir le courage de terminer leur vie honorablement... D'ailleurs... Où est mon sabre ? Ah oui... Soupira-t-elle en passant le bout de son doigt sur le torse du Yamada. Tu dvrais leur dire que je suis là, ils n'auraient pas de mal à me capturer. En se marrant à nouveau. Ou alors... m'éliminer, tu rendrais un grand service à beaucoup de personnes, je pense. Elle fouilla maladroitement dans une sacoche dissimulée et en extrait un kunaï. La pointe vers le cœur, elle reprit. Un coup sec, une fraction de seconde, et tu deviens celui qui a éliminé l'Ecarlate. continua-t-elle sur un ton plus sérieux. Derrière elle le lézard observait la scène en plissant les yeux, scrutant alternativement et le kunaï, et Kioshi. Je suis sûre que c'est... ce que tu souhaites au plus profond de ton cœur, comme un désir, ou une envie... cachée, restreinte... et cela ne me choquerait pas. Maintenant, le patron avait aussi les yeux rivés sur la demoiselle, et d'un regard celle-ci lui fit comprendre qu'il n'avait plus sa place dans la discussion, il partit."

Naviguant entre le délire et une ébriété désinhibante absolue, la jeune femme semblait, étonnement, on ne peut plus sérieuse. Elle trahissait tout ce qu'elle gardait enfuie en elle; d'une simple phrase, d'une simple demande. On pouvait croire que ce fut ce qu'elle espérait le plus chèrement d'entre tout.

"Et.. je ne suis qu'une kunoichi, une ennemie de Suna, et tu ne m'es redevable que de tes maux; alors... tu n'as pas à hésiter. Acheva-t-elle en plaçant maintenant la lame dans la main du ninja."

Elle restait là, à l'observer; elle qui d'habitude avait la rétorque facile. Son pathétisme, son état, et son imbécilité lui revenaient peu à peu en plein visage. Ce garçon, ou plutôt cet homme, qu'elle avait connu au bas de l'échelle, ce ninja qu'elle avait malmené à plusieurs reprises; son ami ? Son regard restait posé sur la tignasse blonde, aucun mot ne lui venait. Il avait raison, et lorsqu'elle reconnaît ses torts, Zanshi n'a plus qu'une chose à faire; se taire. Elle posa le kunaï sur le comptoir, que le lézard s'empressa de saisir. D'ailleurs ce dernier avait fait les poches de sa maîtresse, l'avait complètement désarmé. Aucun mot, seulement un geste, cette même main qui tenait quelques secondes avant une arme de mort, caressa la tête du shinobi de Suna. Un ami, oui. Tout n'était donc pas si "perdu" que ça, bien sûr elle n'aurait de cesse de penser à son passé, à tout ceux qu'elle avait fait disparaître. Et malgré ses actes atroces, elle parvint à esquisser un sourire, un seul et court sourire. Des choses insolubles se mélangeaient dans sa tête, une savante alchimie d'alcool, d'électricité et d'émotion. Elle avait prit une décision, pas des plus faciles. Mais elle repensait aussi à son père, à son éducation; on lui avait apprit à assumer ses actes, pas les fuir. Une image, une scène ressurgit; peut-être le meilleur exemple.

Flashback! Enfant, gamine rougeoyante, fille d'un puissant marchand de Kusa qui avait posé pour la première fois son regard sur le sexe opposé -un garçon- ses premiers sentiments. Ce garçon fut accueilli dans leur famille comme le propre fils de l'Akano, malgré controverse et opposition de certains... Habashi. Zanshi avait dû considérer ce garçon comme son frère pendant un long moment. Mais les regards ne trompent jamais, ils sont le reflet de l'âme, des envies.. Plusieurs années s'écoulèrent, cette relation fraternelle avait évolué à un point formellement interdit par leur propre père. Une jeune fille, ou jeune femme à cet instant; allongée au côté de son "frère", son nom... Tsuna.. un regard d'une douceur angélique, des cheveux de charbon, une personnalité hors normes. S'en cachant un moment, le naturel refit surface tout aussi brutalement, ne pouvant se passer l'un de l'autre plus d'une journée, des âmes sœurs naquirent. Très rapidement le chef de famille, ou de clan apprit la "nouvelle", et ils durent, tant l'un que l'autre; assumer leur statut, un moment considéré comme des parias, et avec le temps; cela passa; ils furent acceptés, et promis l'un à l'autre... Une bien belle histoire... Retour à l'instant présent!

Cette relation n'avait rien à voir avec celle qu'ils entretenaient, elle et Kenji. Choisir Kenji, c'était choisir la fuite et quelque part, la lâcheté. Et comme elle était fatiguée de courir... Certes, elle éprouvait quelque chose d'incomparable pour l'ancien Kazekage; mais cela en valait il vraiment le prix ?

"Tu m'as toujours fait confiance Kioshi; Pourquoi ?.. Bien, je vais t'expliquer les choses; peut-être qu'après cela tu me verras autrement. Déjà que là... mon image soit pas mal écornée... Doux euphémisme.
Mon grand père se nommait Akuraï, Habashi Akuraï. Ce n'était pas vraiment mon grand père, mais un ancêtre de mon clan qui a réussi à traverser les âges. Il m'a... manipulé. Cela n'excuse en rien ce que j'ai fait, ou ce j'ai pus être. Il s'est infiltré dans Suna et m'a contacté une nuit, j'ai été méfiante un temps, mais peu à peu; je suis tombée sous son emprise... Il connaissait tellement de chose, il connaissait si bien mon père, ma sœur et... Tsuna.. Il m'a promis de m'apprendre à mieux protéger les personnes que j'aime... que j'ai aimé... Je lui parlais souvent de... vous, les personnes que j'aime; Toi, Kenji, Tsuna, Anka, Amakyuuden... Lorsque Kenji a disparu, lors de la guerre; j'ai été... abattue.. une faille dans mon armure, et il s'y est engouffré avec... un genjutsu, me persuadant que l'amour, l'amitié, tous ces liens m'affaiblissaient peu à peu; j'ai été comme un pantin entre ses mains.. Une larme coula, et s'écrasa sur la tête du Sunajin. Après.. Il m'a persuadé de tuer Amakyuuden, un de mes frères qui vivaient à Konoha... ensuite, lors d'une mission. Sa voix tressaillit. J'ai tué Anka et Tsuna.. Il brisait les piliers de mon existence les uns après les autres, me poussant à... haïr les shinobi. Les dernières personnes qui pouvaient l'empêcher de me posséder totalement, ce n'était autre que toi et Mia... sans compter tous ceux qui ont péri dans mon attaque... apres... Il est mort, et tout s'est arrêté... bien sûr, je sais ce que j'ai fait; ce sont mes mains qui sont couvertes de vôtre sang... J'aurais dû être plus forte, j'étais comme... votre mentor à vous tous... Ajouta-t-elle. Ses yeux jusque là asséchés de toutes larmes rougirent, elle porta sa main bandée à ses yeux, et les frotta. Cette femme que tu as connu à Suna, ce n'était pas tout à fait "moi", je n'ai jamais été cruelle, ou sadique... Tu te souviens bien cette fois à l'Oasis, cette première fois où tu me rencontras, j'étais encore normale; la semaine suivante mon... soupire. Cet homme est arrivé dans ma vie. Enfin de compte, tu as connu cet homme, pas moi. Je suis une femme... qui aime les autres et qui veut en prendre soin.. à côté de ça, j'espère que tu comprends que la mort peut me paraître douce. Avant cela, j'étais... Zanshi, du clan Habashi; la juste et honnête Zanshi... celle qu'un Kazekage a épargné, en laquelle le village pouvait avoir confiance, sur laquelle on pouvait se reposer, on pouvait compter... Tu comprends ce que je dis ? bien sûr que tu comprends..."

Le patron du petit restaurant de bord de chemin sortit de sa cuisine à moitié en pleure. Bien sûr, il avait écouté; elle le savait. Elle lui jeta un rapide coup d'oeil, et reporta aussitôt son attention sur le Sunajin.

"Je savais que c'était toi... Zanshi... Tu... tu sembles... plus mature... tu as traversé tant de choses... Et l'alcool... dit-il en sanglotant. "
"N'en faites pas trop. L'alcool... je peux l'éliminer de mon sang en quelques secondes... dit-elle en souriant. Bon... maintenant que tu sais tout ça... Je vais te... suivre. Je vais te suivre jusqu'à Suna. Là-bas, ils me jugeront; et je serai... "punie" en conséquence. Tu sais ce que cela veut dire Kioshi ? Je ne mourrai pas de ta main, mais de celle de la justice, finalement. C'est mieux; personne ne sera accusé de meurtre pour m'avoir fait disparaître; et je l'accepterai, si tel est le cas. En tout cas, Kioshi, dit-elle en le faisant se relever. Je t'ai toujours apprécié, et certainement, peut-être, davantage. Je te remercie de m'avoir remis les points sur les "i". Ajouta-t-elle en lui déposant un simple et court baiser sur le front. Maintenant, si tu veux bien, avant que nous partions pour le village, je voudrais savourer mon dernier... Jin Ginseng."

Le vieil homme s'empressa de lui servir, dans un verre tout en hauteur, très fin, un verre. Un tiers de Jin, deux de sirop de Ginseng le tout couronné d'une rondelle de citron.

"Prends en un, Kioshi. Tu verras, c'est... très bon, comme le passé."

Le lézard, quant à lui, resta cloitré dans son silence, toutes les babioles de sa maîtresse suspendues un peu partout.

L'Ecarlate, ou la Juste; souriait; enfin.

Une gorgée de ce fin nectar, un sourire de plus. À son retour ? Oui, on pouvait dire ça. Elle regardais face à elle, le piano dont se servait le cuistot; les plats qu'ils préparaient jadis attiraient beaucoup de monde, mais depuis la guerre, depuis... tout ça; plus grand monde y passait. La dernière fois qu'elle se trouvait là, c'était avant la dernière guerre, elle discutait avec le fils du cuisinier, mort depuis; un inconscient, ou insouciant. Elle se tourna de nouveau vers le Sunajin, son verre à la main. Avala le fond de son verre, la partie la plus sucrée, la plus délicieuse et lui adressa la parole.

"Je t'aime bien Kioshi, mais... Tu sais très bien qu'on peut faire disparaître une personne sans aucunes raisons valables... parce qu'il est gênant, parce qu'il n'a pas la même façon de penser, parce qu'il est trop intelligent ou trop gentil aussi... tellement de raisons... Notre monde vat ainsi. Si je suis "graciée", j'essayerai de changer ça; mais j'en suis encore loin, très loin. D'autant plus que, je n'ai jamais eu confiance en ce "Rei"... un type qui débarque de nulle part, et s'octroie un titre par de fines manipulations... J'ai eu l'occasion d'aborder ce sujet avec... Kenji, et, même s'il n'est plus tout à fait lui même depuis la guerre, il a parfaitement confirmé mon hypothèse quant à cet usurpateur. Ah, ne t'offusque pas, je ne suis pas une Sunajin, aujourd'hui; je peux te parler en toute liberté. Souri-t-elle. "

La jeune femme avait son franc parler, une franchise que, même sous l'influence du vieil Habashi, elle avait gardé. Sans doute ce trait de caractère lui permettait il d'aller au bout de son plan; elle ne voulait plus en entendre parler, elle ne voulait plus en parler, c'était fini, certaines choses du passé doivent rester au passé; même si jusqu'à la fin de sa vie ce serait une partie à part entière de sa personnalité. Comme cette cicatrice sur le torse du Yamada, cela resterait une marque indélébile d'un lourd passé, et Kioshi serait toujours là pour lui rappeler, sans le vouloir, mais toujours. Elle posa sa main sur le torse de ce dernier, et lui sourit à nouveau, ça c'était Zanshi, l'authentique.

"Surtout, qu'elle que soit la décision du conseil de Suna, ou de "Kyoshi Rei", n'interviens pas; personne ne doit intervenir. Je ne veux pas risquer d'autres vies inutilement, et surtout pas la tienne, je tiens vraiment aux personnes comme toi. J'espère que tu comprends. Parce que, tu es l'une des personnes qui mérite le plus de vivre, d'aimer et d'être aimée. Dit-elle la main plaquée sur son torse, là où elle avait frappé; elle pouvait sentir les battements réguliers de son cœur, sa chaleur; puis elle retira subitement sa main pâle. Le chef intervint."
"Oh c'est tellement beau ce que tu dis! dit il en joignant les mains. Je te reconnais bien là."

La jeune femme eut un sourire gêné l'espace d'une fraction de seconde, et reprit la parole.

"Ha.. haha.. se força-t-elle à rire. Vous écoutez vraiment tout, vous; hein ? Hum... Donc, vous nous offrez le verre ?"
"Non, pas besoin, avec la liasse que tu m'as donné..."
"Hum... oui, les ravages de l'alcool. Kioshi, je dois aller chez moi avant de retourner à Suna, si tu acceptes de venir, tu pourras voir ce qu'était ma famille... Peu de personnes étrangères a la famille ont déjà vu le... temple. N'est ce pas, Oshii."
"Oui, c'est vrai, profites en petit, ce n'est pas tous les jours qu'un... qu'une Habashi invite un étranger à pénétrer dans ce lieu! Repondit-il, en faisant un clin d'eoil au Yamada"
"N'en faites pas trop, ce n'est qu'une grande maison."
"Une grande maison, en plein centre de la seule forêt du pays, et que personne ne peut trouver sans être accompagné d'un... Oui, une simple maison comme les autres."
"Oui, oui.. et bien.. Nous n'en aurons pas pour longtemps, Kioshi. Dit-elle en se levant. Tu me suis, et après, je te suis; on fait comme ça ? Avant que tu ne poses la question, ce que je vais chercher, c'est un sabre; celui de... Tsuna; l' Hi'Kari. Il ne s'en est jamais servis... il n'aimait pas les armes. Ajouta-t-elle en sortant du restaurant. Oh, Oshii-san, merci pour tout."

Dehors, il faisait beau.