Le gargantuesque animal restait ainsi sans bouger et sans réagir. Du coup, le médecin observa un silence tout aussi complet. Certainement par respect. Après tout, si le dénommé Zurui l’avait fait venir ici, il avait ses raisons et il ne tarderait pas à les exposer. Daiki n’avait donc pas à demander au risque de passer pour quelqu’un d’impatient. Il resta à fixer le même point que le renard géant. Ce volcan l’avait intrigué tout autant et il n’avait toujours pas eu de réponses. Mais au vu de l’intérêt que lui vouait l’animal, l’Hayashi sentait que cela ne serait plus aussi long avant qu’il puisse obtenir des éclaircissements. L’endroit dégageait une force et l’attirait. Daiki aurait aimé marcher sur les flancs de ce mont enflammé pour arriver au sommet et en explorer le contenu. Beaucoup penseraient que c’est idiot et qu’il n’y aurait que du magma là-dedans mais qui sait après tout ?
Mais le Godaime fut finalement interrompu par la voix imposante du renard à ses côtés. Comme il fut tiré de sa réflexion, il orienta sa tête ainsi que son regard vers l’origine de ce bruit qui portait pour écouter ce qu’il avait à lui annoncer. Il espérait d’ailleurs avoir enfin de réelles explications. Le discours commença ainsi :
Le repaire du plus puissant d’entre nous. Celui que vous appelez Kyûbi. Il s’est exilé il y a des années là-bas. Du moins cela remonte à trop longtemps pour dire si mes Ancêtres l’ont banni ou s’il s’est lui-même isolé du reste de notre civilisation.
Daiki l’observa intensément sans perdre une goutte de son discours. Il s’était toujours fasciné pour ses histoires. Les démons à queue. Son père lui avait parlé de Kyûbi et rapidement du culte qui lui était voué à Konoha sans jamais pousser plus loin sa présentation car il avait toujours considéré que son fils devrait lui-même se faire un avis sur les diverses religions de son monde avant de décider d’en rejoindre une. Tout comme il pouvait continuer de vivre sans se plier à l’une d’elles. Mais en tout cas, le jeune Daiki avait longuement insisté et avait à de nombreuses reprises lassé son père pour qu’il lui raconte les légendes des démons à queue. Son rêve de gamin aurait été de les rencontrer. Un rêve insensé mais comme tous les rêves d’enfants. Ce rêve s’était perdu avec le temps mais Daiki n’avait pas pu oublier toutes ces histoires ayant bercés son enfance. Et aujourd’hui, il se trouvait à quelques mètres de l’une d’elles. Il observa un instant le volcan avant de revenir à Zurui qui en avait fait de même. Ils se regardèrent de nouveau et le renard reprit la parole :
Depuis un certain évènement qu’il n’est sûrement pas nécessaire de rappeler, sa rage a augmenté. Il était déjà un être rempli de haine pour des raisons qui nous échappent mais la destruction du temple n’a rien arrangé. Nous craignons à la fois pour nos terres et pour les vôtres. Ma dernière entrevue avec lui n’a pas été concluante et n’a fait que limiter les conséquences de certains de ces actes.
Daiki commençait à voir de plus en plus où voulait en venir le sage. Il n’était pas totalement imbécile. Ou alors Zurui prévoyait des coups à l’avance en ayant prévus qu’il comprendrait pour faire passer un autre détail pour l’aider. Mais devant l’avenant accueil auquel il avait eu le droit ainsi que les mots de ce noble animal, il avait du mal à voir de la malice dans ses actes. S’il y en avait en tout cas, elle était plutôt bien dissimulée dans ce cas. Mais il laissa le renard mener la conversation où il souhaitait. Il finirait bien par en venir au point qui les intéressait. Daiki garda les bras croisés sur sa poitrine en attendant la suite. Zurui reprit la parole après un temps de répit :
Et je n’irais pas par quatre chemins. La situation actuelle m’inquiète au plus haut point. D’ordinaire ce volcan, dit-il en tendant une griffe vers le mont culminant, reste totalement inactif ou rentre de temps à autre en éruption. Aujourd’hui la lave semble couler à flot sans jamais s’arrêter. Si Kyûbi ne décide pas de s’en prendre directement aux Shinobis, il détruira cet endroit dans sa colère.
Vous attendez une protection de ma part donc ? demanda naïvement Daiki.
Non ! Non loin de ça Daiki ! Vous avez déjà à faire d’un village, je ne me permettrais pas de vous importuner avec une autre population à protéger. Non il n’est rien de tout ça.
Zurui semblait maintenant plus focalisé sur le Kage au niveau des griffes de ses pattes arrière que sur le volcan. Il s’allongea même pour que sa tête arrive un peu plus près du médecin qui le fixait dans l’un de ses immenses yeux.
Je pense que la reconstruction du temple en son honneur serait un acte qui apaiserait sa colère et permettrait à la fois à ceux que tu protèges et ceux qui me sont chers de pouvoir échapper au pire.
Daiki fixa le sol cette fois alors que ses mains se joignaient dans son dos maintenant. Il fit quelques pas d’un côté, puis de l’autre alors que les rides sur son front traduisaient sa réflexion intense. Il regarda de biais le renard à qui il s’adressa :
Loin de moi l’envie de paraître égoïste mais votre royaume et Konoha n’ont jamais eu de lien excepté Kyûbi. Et encore ce dernier n’est qu’une divinité à nos yeux. En quoi ce simple acte peut nous assurer du salut du village ou de ce monde qui n’a jamais eu d’intérêt pour la Feuille ?
Vous pourrez revenir quand vous le souhaitez pour observer vous-même les résultats et prendre les décisions qui s’imposent si cela a été un échec. Mais songez-y très sérieusement je vous prie. Je vous le demande comme un service Daiki. Ne laissez pas ce royaume être détruit par la bêtise de ceux que vous ne portez pas dans votre cœur.
L’Hokage releva la tête d’un coup. Ses yeux écarquillés traduisaient de son état d’esprit et le détail n’échappa pas à Zurui qui continua rapidement après :
Un secret pour personne ici mais que nous n’avons pas ébruités. Nous n’y avons aucun intérêt naturellement.
Daiki n’en était pas plus soulagé pour autant et il continuait de fixer le renard géant qui reprit de nouveau :
Au final, qu’y avez-vous à perdre ?
Des moyens. Ici ce n’est pas un problème mais au-delà de vos frontières existe un monde où on ne peut se permettre des actions sans allonger la monnaie derrière pour obtenir un simple service. Et je doute du fait que vous ayez la possibilité de financer ceci. Ce que je refuserais d’ailleurs car je trouve ce genre d’échanges plus mesquins qu’autre chose.
Daiki continua les cents pas qui se faisaient plus posés et plus calmes. Qui le connaissait savait que dorénavant, il avait trouvé son plan et qu’il le mettait en marche paisiblement en procédant par étapes comme il l’avait déjà planifié et replanifié une dizaine de fois dans son esprit avant de l’appliquer. Un détail insignifiant et même invisible à Zurui qui allait s’empresser de retourner dans un argumentaire mais Daiki lui coupa l’herbe sous le pied en prenant la parole le premier :
Je ne veux pas y perdre au final. Je ne peux penser seulement pour moi et également songer à mes hommes.
Justement vous les protégeriez d’un grand malheur en faisant ça ! Songez aux dégâts que le démon renard pourrait causer ! Et puis il va de soi que nous sommes prêts néanmoins à vous rendre la pareille.
Le médecin s’arrêta. Là où il se tenait, le renard ne pouvait voir son visage. Il resta immobile un instant avant de prononcer lentement et distinctement :
C’est-à-dire ?
Zurui y vit là une occasion qu’il n’hésita pas à saisir. Ce sur quoi comptait Daiki.
Disons que si vous nous apportez l’aide que nous quémandons, nous serions à notre tour prêt à vous apporter notre aide dans votre tâche de protection du village caché de la Feuille.
Daiki se retourna, l’air un peu surpris mais pas excessivement non plus. Il se ravança alors que son visage prenait un air sévère pour redevenir sérieux, voire tiraillé par un doute. Il ne tarda pas à le manifester, mais en murmurant. Comme une chose qu’on aurait honte ou qu’on essayerait de cacher :
Je ne peux pas revenir à Konoha la bouche en cœur et engager des ressources dans une telle reconstruction sur de simples suppositions comme celles-ci et la seule promesse non assurée d’une « alliance » avec les Renards.
Zurui plaça sa patte avant droite devant lui pour que les griffes s’arrêtent avant d’arriver à Daiki. Pendant son geste, il sortit un :
C’est pour cela que je vous offre de quoi être suivi par vos hommes par la suite.
Puis il dégagea sa patte. A l’endroit où elle se tenait avant, trônait un rouleau. Lorsque l’Hayashi le prit et le déroula, il était vierge de toute inscription. Ce qui signifiait que le médecin était le premier à mettre la main sur le Pacte d’invocation des Renards. Il ne put réprimer un sourire satisfait. Il caressa le papier et promena sa main sur l’étendue blanche où devait figurer le premier nom. Il observait le rectangle de papier alors que le renard face à lui tenta une approche ultime. Une dernière tentative dans le désespoir pour en tirer ce qu’il souhaitait :
Si vous me rendez ce service, soyez assurés du soutien des Renards auprès de Konoha pour des générations.
Daiki resta encore un instant silencieux avant de reposer le rouleau au sol. Il plongea son regard dans celui de Zurui et, sans prévenir, se retrouva le kunaï en main pour se blesser le pouce. Le sang coula au compte-goutte avant que l’Hayashi ne l’applique sur la feuille et commence à signer. Zurui le regarda faire, un sourire non dissimulé sur ses babines. Lorsque Daiki eut fini, le renard déposa une griffe qui laissa une marque en dessous de l’inscription. Le premier rectangle portait maintenant la mention de Hayashi Daiki, Godaime Hokage. Ce dernier tendit le rouleau à son propriétaire qui repoussa l’offre :
Emmenez-le à Konoha pour leur prouver vos dires. Les plus méfiants plieront ainsi.
Daiki doutait en avoir besoin mais il accepta le présent qu’il scella dans un parchemin plus petit qu’il accrocha à sa ceinture. Puis là-dessus, il regarda avec bienveillance le sage qui lui rendit son sourire. les deux êtres se fixèrent un moment avant que Zurui n’approche sa griffe du cœur de Daiki et ne lui dise :
Vous êtes un homme de bien, Daiki. Nous nous reverrons vite.
Et la griffe atterrit délicatement sur sa poitrine. Le contact l’emplit d’une sensation étrange. Il ne voyait plus rien jusqu’à ce que tout s’arrête et qu’il reconnaisse les alentours des ruines du temple. Le parchemin toujours à la ceinture, il émit un large sourire qu’il garda jusqu’à son retour au village où il lancerait les préparatifs. Il tiendrait promesse en échange de ce don qui lui avait été fait. Les Renards se battraient dorénavant aux côtés de…bah du Renard ! L’idée l’enchantait et le poussait à s’investir dans sa promesse faite au vieux sage.