Il fréquentait cet endroit depuis un long moment. En fait, il avait franchi le pas peu de temps après la mission de récupération du corps à Kawa no Kuni. Si cet évènement avait été le déclencheur, l’idée lui trottait déjà dans la tête depuis bien plus longtemps… Quand il était plus jeune, bien avant que Suna ou le Kakumeigun ne se mette en place, il vivait dans le désert avec une fille et un garçon, plus ainées que lui. Ce groupe improbable avait fini par se serrer les coudes et chacun considérait les autres comme des membres d’une famille. Oui, c’était ce qu’ils étaient. A l’époque, Hayato et son frère, Sakyo, courrait après l’argent, pour la survie, mais surtout pour pouvoir s’occuper de Fuyutsuki, gravement malade. Durant toutes ces années, ils n’arrêtaient pas de se dire qu’avec des connaissance en ninjutsu médical, les choses seraient plus simples.

Comble du comble, aujourd’hui ils n’étaient plus de ce monde. Soigner les morts n’était pas dans le domaine de la médecine. Ca ne l’avait pourtant pas empêché de commencer cette formation. Malgré l’apparente insalubrité du village, Suna savait être moderne. Pour ce genre d’entreprise, pas question d’un long voyage en quête du fameux maître, qui sera capable d’enseigner la technique convoitée. Hayato n’avait eu qu’à franchir les portes de l’hôpital du village, puis à s’adresser à l’accueil et il s’était retrouvé en un éclair dans cette petite salle, pour le début d’une formation de quelques mois, au terme de laquelle, il aurait acquis les bases en jutsu médical. Entre temps, il était passé Jonin, donc assister régulièrement aux séances n’avait pas toujours été facile.

Ils étaient une petite dizaine d’élève, femme et homme de tout âge et de tout horizon. Tous n’étaient pas shinobi, mais chacun aspirait à comprendre les bases de ce noble art, destiné essentiellement à soigner les autres personnes. L’enseignante en question était relativement jeune – environ la trentaine – et donnait ces petits cours pour arrondir ses fins de mois. Récemment devenue maman, enchaîner les missions n’était plus suffisante pour subvenir aux besoins de sa jeune famille. La première impression qu’elle avait donnée au groupe était celle d’une femme distante et autoritaire… Mais ils avaient fini par s’y habituer.

Aujourd’hui, Hayato se rendait pour son dernier cours. Pour des raisons de sécurité évidente, il n’était pas autorisé à faire usage de ce qu’il connaissait déjà, sans avoir terminé sa formation. Sur le chemin, emplie de nostalgie, il repensait à toutes les notions qu’il avait pu apprendre.

[…]

- Shosen no Jutsu ! Cette technique est essentielle pour tout Eisen-nin digne de ce nom ! Mais avant de l’enseigner, il y a une notion importante sur laquelle nous devons revenir.

Elle tira sur un fil et dévoila alors une immense toile parsemée de schéma et de tableaux en tout genre. A l’aide d’une longue règle, elle pointait les endroits les plus importants, s’en servant pour appuyer la véracité de ses dires. Hayato parcoura le plan des yeux, se demandant quel pouvait être le lien entre la nature du chakra et un jutsu médical.

- Petite leçon d’Histoire. A l’époque où la plupart des Clan Shinobi ont vu le jour, peu d’entre eux se sont concentré sur le changement de nature du chakra. Il est tout de même important de savoir que le Chakra « neutre » n’existe pas !

- Vous parlez du Yin et du Yang ? Ce sont de vieilles croyances, non ?

- Non, Hayato ! Tu te trompes. Et le ninjutsu médical est certainement la meilleure preuve. Mais au lieu de perdre du temps en paroles inutiles, je vais plutôt vous illustrer ceci avec une petite démonstration.

Le Yin et le Yang, deux notions assez abstraites pour notre marionnettiste. Il assimilait ces deux mots à des rituels pratiqués par des moines ou autres personnes dans le genre. On parlait souvent du Yin et du Yang dans les vieilles histoires Shinobi, mais sans plus. Il comptait bien regarder avec attention ce que le Sensei allait démontrer à l’aide de ce jeune fennec blessé qu’elle venait d’invoquer depuis un parchemin. Elle invita tout le monde à s’approcher et retroussa ses manches avant de commencer à utiliser la fameuse technique. Ils avaient déjà eu droit à la version théorique du Jutsu, dans un cours précédent. Le principe était d’émettre un chakra particulier sur un endroit particulier afin d’y favoriser la régénération des cellules. Et effectivement, après le bref halo de lumière, le petit fennec se tenait parfaitement debout.

- Pour vous prouver l’existence du Yin et du Yang, je vais à présent utiliser la même technique sur la patte de ce fennec. Normalement, vu qu’il est en pleine santé, il ne devrait rien se passer.

Et pourtant, à l’endroit où elle déployait son chakra, la peau de l’animal semblait se flétrir progressivement, jusqu’à se décomposer. Elle finit par abréger les souffrances de l’animal et arrêta le processus, sous les regards ébahis de ses élèves. La démonstration parlait d’elle-même, il lui avait suffit de changer quelque chose dans son chakra pour inverser l’effet du jutsu. En tant que marionnettiste, Hayato ne put s’empêcher de faire le parallèle avec les différentes façons dont les clans du désert considéraient le Kugutsu no jutsu. Certains s’appliquaient à créer des marionnettes indestructibles, d’autres se concentraient sur un poison efficace au possible, d’autres encore se contentaient d’utiliser leur fils directement sur leurs adversaires…

- Avec le chakra de type Yin, le jutsu me permet de soigner, alors qu’en utilisant le Yang, je détruis les tissus. Sachez donc qu’à l’inverse du ninjutsu médical pratiqué par les Eisen-nin, il existe un art plus sombre nommé Nécromancie, principalement basé sur le côté Yang.

[…]

Le jeune homme atteint finalement l’hôpital et se rendit au sous-sol, où ses autres camarades, déjà arrivés, attendaient que l’épreuve ne débute. Comme on pouvait s’y attendre, afin de prouver qu’ils avaient acquis toutes les connaissances nécessaires, chacun d’entre eux allait devoir s’occuper d’un animal blessé, recueilli au préalable dans le désert. En comparaison avec toute la matière qu’il avait fallu absorber jusque là, ce test semblait bien dérisoire. Un assistant vint finalement chercher le groupe d’étudiants qui patientaient dans le couloir. Ils enfilèrent des tenues stérilisées et pénétrèrent alors dans une salle froide. Plusieurs tables d’aciers étaient aménagées dans les lieux. Les étudiants divisés en groupe auraient chacun à s’occuper d’un animal. Les tâches étaient diverses, traiter une plaie, retirer une lame, annuler une illusion… Bien sûr, à chaque fois il fallait terminer en referment la blessure à l’aide du Shosen no jutsu.

Rapidement, l’équipe passa à l’action. Chacun usa d’une première technique censée accélérer l’examen complet du corps afin de pouvoir poser un premier diagnostic. Tous arrivèrent plus ou moins à la même conclusion : leur animal semblait blessé et empoisonné. La première chose à faire était donc de déterminer le type de poison afin de choisir la manière adéquate d’en neutraliser les effets. Par chance, Hayato possédait déjà une connaissance accrue des différentes toxines. A la manière des scorpions, qui piquaient leur proies en leur injectant un véritable cocktail de toxines impossible à clairement discerner, le mélange présent dans l’organisme de cet animal était trop hétérogène que pour être identifié. Un étudiant enroba sa main de chakra et procéda à une ablation de la blessure, pour empêcher la toxine de progresser d’avantage. Les autres s’appliquèrent à refermer le tout à l’aide du Shosen no Jutsu, pour éviter que ça ne saigne trop. Hayato avait agit de concert avec son groupe, sans toutefois apprécier totalement la solution employée.

[…]

- Hayato, ça peut paraître rude, mais dit toi qu’en situation réelle, tu n’auras pas le temps ou les outils, il faut savoir faire vite et avec ce qu’on a…

- Je le sais bien, mais j’ai l’impression que ce n’est pas suffisant. Je ne me sens pas aussi utile que ce que j’aurais voulu. Je voudrais aller plus loin que ces simples soins d’urgence, je voudrais acquérir d’avantage de savoir, être capable de véritablement m’occuper d’une personne…

- Garde à l’esprit ce que je vais te dire : l’eisen nin s’occupera toujours des combattants. C’est ce lien à la guerre et au combat qui le rend différent du Médecin. L’Eisen-nin n’a donc pas besoin de tout ce savoir, car sur le terrain, il n’a généralement pas le temps de réfléchir !

- Dans ce cas, je vous remercie pour vos enseignement, mais je n’ai plus rien à faire ici. Je deviendrai Médecin !

- La route sera longue, mais vas au bout de tes convictions, Hayato !

Difficile de s’en rendre compte, mais il s’agissait là d’un moment particulièrement important. Le marionnettiste prenait cette décision car en tête, il avait son frère et sa sœur, décédés. C’était la première fois qu’il se lançait dans une telle initiative de son plein gré. Pour que jamais personne n’ait à subir ce qu’il avait lui-même subit, il aspirait à devenir Médecin accompli. Il était encore loin de se douter de la face sombre que pouvait comporter la profession. A la manière des enfants, il idéalisait la chose, en ne voyant que les aspects positifs.