Il y a de multiples façons de gagner des p'tits ryos à Suna. Et beaucoup d'entres elles ne sont pas forcément légales. J'imagine que c'est plus ou moins normal quand on songe qu'avant de se retrouver à Suna la plupart des clans qui composent le village étaient des nomades qui devaient survivre dans un désert qui n'avait - et n'a toujours - rien de clément. Chacun d'entre eux avait sa propre façon de s'enrichir et des traditions qui n'avaient pour la plupart rien de très noble. Qu'on en retrouve certaine aujourd'hui dans le village caché n'a rien de très étonnant, dans le fond.

Cette nuit - je suis un animal nocturne, mwa! - c'est aux Akuzu que je m'intéresse. J'avais un pote, fut un temps. Comment s'appelait-il déjà machin? Shinji non? Ouais, un truc du genre. Bref ce gars élastique avait une sacré descente et une bonne droit quand j'y pense. Et c'est grâce à lui que j'ai pu être introduit dans se sous-sol il y a maintenant quelques années. Et qu'est-ce qu'on y fait dans ce sous-sol, hein? Hein? Bon on se tape sur la gueule! On tabasse le mec qu'on vous désigne et l'autre essaie de faire de même. Pendant que plein de gens parient leurs ryos sur l'éventuel vainqueur et s'en mettent plein les poches - ou pas - au même titre que lui. Y'a du spectacle pour ceux qui préfèrent boire et du sang pour ceux qui favorisent la baston. Tout le monde est content comme ça! Sauf le vaincu, en fait!

Alors ce soir, donc, c'est dans cette cave quelque peu miteuse du Heaven's Night que j'attends l'occasion de me renflouer, une bière dans une main et un cigare dans l'autre. Je ne me fais pas trop de soucis à vrai dire: je sais plutôt bien encaisser. Et puis je possède un avantage de taille en la personne de mon bras gauche. Un pur produit de la technologie Saibogu. Blindé, puissant, il est à même d'exploser les dents les plus enracinées. Il a fait ses preuves, croyez-moi! Et puis comme je suis un habitué je suis presque sûr d'être opposé à l'une de ces jeunes pousses qui croient que l'avenir leur appartient. Un novice qui aura tôt fait de rentrer chez lui en chialant, la bouche plein de sang. Et le tout en criant après sa mère s'il d'aventure il se trouve qu'il avait encore la chance d'en avoir une!

Je sens un choc au niveau de mon pied droit - celui qui posé sur le sol, l'autre étant en appui sur la barre de mon tabouret - et baisse les yeux en haussant un sourcil. Tiens, une tête! Reliée à un corps! C'est pas le combattant qui vient de se faire expulser du ring? Enfin de ce qui ressemble à un ring considérant que ce dernier est délimité avec de simples traits de craie blanche. Je le relève en le saisissant par la gorge avant de lui décocher une tape sur l'épaule. Mais le bougre il tient plus trop trop debout et retombe aussitôt au sol. Bon ben... tant pis! J'aurai au moins tenté de faire ma BA du jour.

C'est finalement mon tour et je m'empresse de monter sur le ring non sans avoir roulé une gigantesque pelle à l'une des pouffiasses de la soirée, celles qui sont là uniquement pour vendre leurs charmes ou échapper à une vie bien trop morose. Je lance ensuite ma pièce fétiche en l'air pour savoir si je vais me la jouer réglo ou si je vais accélérer un peu les choses. Le hasard décide que je ferai ça de façon parfaitement légale. Ce qui n'est pas plus mal lorsque l'on considère le nombre d'yeux qui scrutent les mouvements des combattants.

Alors pendant que certains pleurent nos morts et que d'autres dorment, je cogne le type qu'on m'a désigné comme adversaire. 'Tain il pourrait être mon fils celui-là tellement il est jeune. Mais vu sa lenteur à esquiver les coups il ne ressemblera bientôt plus à grand chose. Alors je fais au plus vite pour en terminer parce que je ne suis pas non plus un monstre. Au lieu de m'acharner sur le bougre je lui défonce son genoux d'un coup de talon pour le forcer à s'agenouiller. Un second coup avec ma prothèse cette fois-ci et le voici expulsé du ring avec quelques dents en moins. Jackpot!

"Boum le noob!"
"Vainqueuuuuuuuuur.... Yamatooooooooooo!" que l'autre pseudo-présentateur annonce.
"Ouep!"

C'est logique non? Tellement logique en fait que je ne vais sûrement pas gagner de quoi m'acheter mes cigares du lendemain... C'est le désavantage lorsque l'on est l'un des rares shinobis à se prêter à ce genre de petit jeu: y'a rien de bien compliqué à se débarrasser de civils. Aussi musclés ou courageux soient-ils. Pourquoi il m'arrive de tricher, dans ce cas? Parce que c'est plus drôle! Mais j'aurai au moins de quoi me payer quelques verres jusqu'à mon prochain combat.

Par contre y'a un truc pas net avec ma prothèse. Faut dire aussi que je ne l'entretien pas autant que je le devrais. Prudence est mère de sûreté, je sais bien. Mais je baise l'une et l'autre alors bon... Mon bras, donc, sans doute détraqué à cause du sang, des poils ou même du sable, commence à s'agiter en tout sens. Et son poids couplé à mon alcoolémie ne me permet pas de rester très stable. Merde il est où déjà le bouton pour le désactiver. Ha ben non y'en a pas c'est vrai! Faudrait que j'utilise un sceau pour ça. Mais allez en poser un quand vous avez une masse de métal pareille qui s'agite en tout sens et balaie à l'aveuglette.

Finalement il semble se calmer un peu. Enfin non pas du tout en fait! Les doigts qui en forment l'extrémité se rétractent et libèrent l'accès à un canon qui commence à tourner sur lui-même. Ho merde! Merde merde merde! Je plonge au sol avec l'espoir que l'arme pointera le plafond. Quitte à tuer quelqu'un, que ce soit lui! Bon le soucis c'est que le bâtiment risque de s'effondrer sur nous si l'impact est trop puissant. Et me connaissant, il le sera. J'aime bien les gros trucs qui défoncent tout alors bon j'ai évidemment pas le moindre petit calibre sur moi! Conclusion: ça va faire un gros trou!

"PLANQUEZ-VOUS!"

Ne réfléchissant pas vraiment aux conséquences de mon acte mais ne désirant pas tirer sur une personne en particulier j'attends donc que la munition achève de se charger et qu'elle explose à la gueule du mur. Ouais c'est pas malin mais bon, y'a urgence et je m'en remets à l'instinct. Un instinct qui, quelques fois, peut-être douteux. Je le concède!

Prudence est mère de sûreté ? Peut-être bien. J'étais au Heaven's Night ce soir-là, comme souvent depuis quelques années, depuis cette fameuse mission. Il y avait là devant moi, où plutôt au bar un autre Saibogu. Yamato. Je le connaissais et lui avait forcément entendu parler de moi, à vrai dire, j'étais l'un des cadors du Heaven's !

Mon combat du soir, facile. Je m'étais amusé avec ce pauvre homme que j'avais envoyé valser sur Yamato. J'avais envie de me battre contre lui, une fois. Il le faudrait. J'essuyais mon crochet et je retournais m'asseoir à ma place au bar. Un verre de whisky m'attendais déjà. Je le prenais de ma main valide et le soulevais afin de faire atterrir son contenu dans mon estomac, avant d'héler le serveur pour qu'il m'en resserve un autre.

Je refaisais la même chose.

Soudain, Yamato se levait pour aller combattre son adversaire du soir et comme à son habitude, il lançait sa pièce afin de savoir s'il allait tricher ou non aujourd'hui. Apparemment, c'était plutôt non.

Il s'approchait de son adversaire et d'un coup de talon pied placé, il le forçait à s'agenouiller et l'envoyait valser de l'autre côté de la salle. Il retournait ensuite à sa place.

J'allais commander un nouveau verre lorsque je le voyais qui s'agitait, mon expérience et mes connaissances en technologies m'avaient permis de comprendre rapidement ce qu'il se passait. Pendant qu'il se battait contre lui-même, je m'approchais d'un pas décidé et préparait mon crochet. D'un coup simple et précis, j'accrochais celui-ci à l'armature métallique du bras de Yamato avant de placer un sceau sur son mécanisme qui le stoppa instantanément.

« Tu vois. Certains s'occupent de Prudence et d'autre de Sûreté. J'te laisse deviner lequel de nous deux s'occupe de Prudence. Par contre... Mon sceau n'est pas sûr, il peut se rompre à tout moment. »

Du haut de mes deux mètres, je regardais Yamato qui s'était couché par terre pour se protéger et je l'aidais à se relever.

« Tavernier ! Deux verres pour Yamato et moi ! » Je me retournais vers lui pour l'inviter à me rejoindre. « Allez viens ! Fais pas ta timide. »

Dans ce genre d'établissements, les événements de ce style n'étaient pas rares, tout comme les filles de joies qui les peuplaient. De ma main valide, j'agrippais le cul de celle qui se trouvait à côté de moi et je lançais un clin d'œil à Yamato.

« On ira s'amuser plus tard, d'abord, on tise ! À la tienne cow-boy ! »

Ha ben... Pas de boum? J'ouvre les yeux et découvre une silhouette familière penchée sur moi. Ho tiens, un collègue! Je saisis la main qu'il me tend et me redresse au milieu des regards réprobateurs, surpris ou encore appeurés. Oui bon ça va hein! Ça arrive à tout le monde de faire des conneries! À certains plus qu'à d'autres, je le concède. Mais tout de même... Y'a pas de quoi s'exciter pour une pauvre petite roquette non plus! Ils en ont pas vu d'autres ou quoi?

Je reprends peu à peu ma contenance et ajuste le col de mon poncho - même s'il en a pas! - avant d'accorder un signe de tête en guise de remerciement à mon camarade de clan. Putain qu'il est moche avec sa grosse cicatrice! Ok alors les filles aiment ça mais il y a tout de même des limites! Ceci dit j'ai reçu une éducation voyez-vous? Et celle-ci m'empêche de lui faire remarquer ce petit... détail de son anatomie. D'autant plus qu'il vient de me sauver la mise. Les autorités n'auraient sûrement pas apprécié ce qui aurait pu se passer ici sans son aide.

"Hum... Je gérais!" mon cul ouais! "Mais bon... Merci quand même!"

C'est jamais vraiment agréable de se taper la honte devant un collègue. Déjà parce que la plupart d'entre eux se font une joie de propager ce genre d'âneries. Mais aussi parce qu'il fut un temps ou la technologie n'avait aucun secret pour moi. Et aujourd'hui... Je suis une épave! Faut bien le dire! Et le pire dans tout ça? C'est parce que j'en ai envie! Ouais... Je passe mes doigts dans ma barbe pour m'assurer qu'elle est encore là avant de neutraliser à mon tour et de manière définitive ma prothèse. On ne sait jamais d'autant plus que l'autre vient de m'avouer que son sceau souffre de quelques lacunes. Et ça me fait la morale! J'te jure! N'empêche que j'hésite pas vraiment avant de lui emboîter le pas. D'autant plus qu'il semble vouloir m'offrir un verre! Après tout c'est lui qui a passé la commande alors je ne dépenserai pas un ryos! En parlant de ça...

"J'aime quand on me dit des choses comme ça!" ouep! "J'te rejoins ok? J' dois juste aller récupérer mon fric! Deux secondes!"

Et il me faut bien deux secondes - bon ok un peu plus quand même! - pour aller arracher de la main de l'un des bookmakers la bourse qui me revient. Après l'avoir brièvement ouverte pour m'assurer qu'elle était bien remplie de pièces je viens poser mon fessier aux côtés de mon nouveau mécène! C'est qu'il est pas désagréable tout compte fait! Je n'hésite que brièvement avant de trinquer avec lui:

"Et à la tienne Yur.. Riri... Machin!" faut que je travaille ma mémoire sérieux! "On remet ça?"

Cette fois-ci je passe donc une commande non sans avoir préalablement tâté les fesses - bah quoi on partage! - de la demoiselle à ses côtés. Mouais! Pas mal! Mais j'ai ma favorite dans le coin! Je la siffle d'ailleurs pour lui indiquer que ses services son requis et elle ne tarde pas à prendre place à mes côtés. De l'alcool, des femmes et un spectacle sanglant tout au long de la soirée. Ouais, je prends! La vie est belle de temps à autre! Même avec un bras ballant le long du flanc et son poids à compenser. D'ailleurs je ne tarde pas à m'en séparer en le scellant dans le sceau qui orne le moignon qu'il est sensé cacher.

"Puisqu'on est entre estropiés j'vais éviter de prendre des gants ok?" vala je craque! "Rafraîchis-moi la mémoire déjà: comment tu t'es fait amocher la tronche? Non parce que j'en ai vu des blessures de guerre mais alors la tienne... Pfiouuuuu... Tu t'es fait péter une ogive à la gueule?"

Oui non alors je sais que ce n'est pas très poli et que j'avais dit que je ne lui poserais pas cette question. Mais franchement si on ne peut même plus poser une simple question... Spécialement une question qui ne cache aucune moquerie ou autre sentiment du genre. Je suis curieux, c'est tout. M'enfin il vaut peut-être mieux dissiper rapidement ce qui pourrait devenir un instant de malaise.

"Enfin moi c'que j'en dis, hein! je hausse les épaules. "Et puis comme disait un p'tit daimyo de j'sais plus où: l'essentiel est invisible pour les yeux!"

C'était la petite touche philosophique de la soirée même si tout le monde sait que l'apparence compte plus que tout le reste. C'est toujours des frustrés qui inventent ce genre de phrases. Comme les pauvres avec leur c'est pas l'argent qui fait le bonheur. Tu parles! Ils essaient de convaincre qui ces gens-là si ce n'est eux-même?

"Hé mais en fait maintenant que j'y pense! T'es pas un shinobi? Qu'est-ce que tu fous ici alors?" c'est vrai quoi! "C'est pas très bien vu par la hiérarchie tout ça! En même temps ce qu'ils ne savent pas ne peut pas te faire de tort! Et c'est sûrement pas moi qui irai te balancer!"

Ha mais wait! Je suis aussi shinobi en fait! Faudra que je me foute ça dans le crâne un jour ou l'autre. C'est encore trop récent tout ça!

Le jeune plus si jeune Yamato s'en allait récupérer ses ryos pendant que je l'attendais avec la fille de joie à mes côtés. Rien que de penser à ce qu'il allait se passer plus tard, j'en avais l'eau à la bouche, mais comme je l'ai dit à mon collègue Saibogu ; l'amusement, plus tard ! D'abord, on s'hydrate. Comment ça l'alcool ça n'hydrate pas ? Encore une phrase des alcooliques anonymes Sunajins qui fut un temps, se regroupaient dans des endroits bizarres afin de faire leurs rituel de sevrage encore plus spécial. Pourquoi j'en sais autant ? Hum... On se le dira peut-être plus tard.

Nous buvions nos chacun nos verres, je payais parce que bon, ouais j'aime l'argent, mais pas autant que ce petit Yamato chéri. Donc je payais la deuxième tournée, puis la troisième et ainsi de suite jusqu'à ce que l'alcool ouvre un peu le flot de paroles qui pouvaient être mal prises. J'y étais habitué et je m'en foutais au final. Il faut vivre avec son corps et cela fait toujours des histoires à raconter autour d'une bonne bière !

« Haha ! Je l'attendais celle-là ! Parce que bon, toi et ta mémoire, c'est comme une femme avec un cerveau, ça n'existe pas ! » Je marquais une légère pause avant de reprendre. « Donc, pour mon histoire. En effet c'est arrivé durant une guerre il y a plusieurs années. Les villages venaient à peine d'être créés et je me suis pris un méchant coup de kunaï dans la gueule. J'vous passe les détails, mais maintenant j'ai cette belle cicatrice qui traverse toute ma gueule, haha ! »

Voilà, rien de bien méchant, pas d'ogives dans la gueule ni rien. Juste un vieux kunaï tout rouillé, il m'avait bien fait mal ce con ! Nous buvions encore et toujours lorsque tout à coup, Yamato a eu comme une vision ! J'étais shinobi ! Ouais... mais non. J'aimais pas trop parler de ça, mais il le fallait après tout. Je lui devais bien ça au cow-boy !

« J'étais... j'étais. La hiérarchie c'est du passé. Je m'occupe de moi-même et tout seul. » Je marquais une légère pause avant de reprendre. « Il s'est passé quelques petites choses qui font qu'aujourd'hui, je ne suis plus un shinobi. Si Suna à besoin de moi, je suis dispo, mais je ne réponds plus d'eux le reste du temps. Je suis un peu un electron libre, tu vois ? »

Je ne voulais pas en dire trop, pas ici. J'avais foiré et c'est pour ça que Suna et moi-même nous étions détachés, mais le calme était revenu et j'avais laissé entendre que j'étais à nouveau disponible s'il fallait aider Suna. Je décidais ensuite de sortir des mes pensées pour m'intéresser à Yamato, toujours une main sur le cul de la petite à côté de moi.

« Et toi ? Qu'est-ce que tu deviens ? »