Le pas calme, Michiki se mouvait tel un félin dans sa jungle. Sa dernière cigarette venait de rejoindre le sol, malgré sa résolution. Les feuilles et le vent s’engouffrant dedans offraient à cet endroit une énergie saine qui invitait à la détente. Le calme parfait. Pourtant le Shinda restait songeur.

Non pas à cause des derniers propos de la Kaguya mais surtout de ce qui l’attendait et de tout ce qu’il lui restait à faire. Il y avait énormément de fronts sur lesquels jouer. Beaucoup d’acteurs à prendre en considération. Comme il se l’était déjà dit auparavant lors de sa rencontre avec l’Ombre de la Foudre, tout ceci n’était qu’un vaste jeu d’échecs où tout un chacun a son rôle à jouer mais où chaque action détermine si nous sommes un vulgaire pion, une tour ou bien un roi. Dans le cas du nécromancien, on pouvait aisément le comparer au fou, se déplaçant sur de grandes distances en diagonale. Cela illustrait bien sa manière de penser.

Sa réflexion fut troublée par la signature du jeune garçon resté derrière. Il l’avait rattrapé ? Une audience à demander du coup. Pivotant sur lui-même avant que son interlocuteur n’arrive, il vit débarquer le Sairyo. Ce dernier ne se perdit pas dans milles politesses pour en venir au but. Il avait conscience des prérogatives du Mizukage et il ne comptait pas en abuser. Mais il faisait tout de même durer le suspense. Sûrement un moyen d’essayer de retenir le Shinda. S’ils n’étaient pas alliés, le Fossoyeur aurait eu tendance à se méfier de ce genre de comportements. Mais en l’occurrence, il savait que ce garçon ne souhaitait qu’attiser sa curiosité maladive.

Selon ses mots il désirait un service et non des moindres puisqu’il concernait son « Mouvement » comme il l’appela. Michiki savait parfaitement de quoi il parlait et cela l’intéressa d’autant plus. en quoi l’étonnamment jeune chef de la Rébellion, opposé à l’Empire, pouvait requérir son aide dans le cadre d’une réunion de ce groupuscule ? Sentant presque venir une demande, Michiki prit les devants en lui répondant presque du tac-au-tac :

- S’il s’agit d’y assister à ta place, sache que ça me sera impossible. Je ne peux être personnellement mêlé à ton groupe de rebelles. Mizu et Kiri sont des subalternes de l’Empire et l’on ignore jusqu’où ses espions peuvent se terrer.

Au moins mettait-il les points sur les i et les barres sur les t. Peut-être ne s’agissait-il absolument pas de ça mais le Shinda préférait se montrer clair dès le début. D’un côté, il voyait mal le garçon lui demander une telle chose. Il était assez malin pour se douter d’une telle réponse. Alors sûrement devait-il avoir autre chose en tête. Mais quoi ?

Ainsi le jeune chef du mouvement de la Rébellion était en contact avec le kumojin Monjara Shinji. Le feu Kumojin serait-il plus exact de préciser. Une information qui semblait ne pas avoir échappé au garçon. Heureusement car c’est le genre de surprises qui ne fait jamais bon à apprendre une fois face au fait. Même si ce renseignement pouvait déjà avoir son importance, quelque chose semblait perturber le jeune Shukajin.

L’utilisation d’un cadavre pour l’envoi de la missive avait mis la puce à l’oreille du Sairyo. Il n’avait peut-être pas fait le lien entre la mort de Shinji et ce moyen postal quelque peu douteux. Il appartenait donc au Shinda de lui en faire part. Ils étaient après tout unis par leur appartenance au Fumetsu et il se devait par conséquent de partager cette information avec lui.

- Tes informateurs ne t’ont pas mentis. Monjara Shinji est bel et bien mort. Mais il foule toujours les terres du Yuukan. Grâce, ou à cause, d’une technique interdite réservée aux Nécromanciens les plus aguerris : l’Edo Tenseï. Ce Kinjutsu a longtemps été gardé secret mais il est aujourd’hui mis en avant par certains. Le Raïkage fait partie de ces privilégiés.

Ce qui devait lui éclaircir l’esprit sur pas mal de choses. Les quelques éléments à sa disposition devaient maintenant s’ordonner un peu plus clairement dans sa tête. Il pouvait en rester là mais il tenait à se montrer très clair avec ce jeune garçon. Pour son propre bien et par devoir. Il était après tout un de ses alliés et il ne tenait pas à le perdre.

- Je te souhaite d’avoir des échappatoires en effet. Affronter un cadavre réanimé par l’Edo Tenseï en plus d’un Kage possiblement, ce n’est pas une partie de plaisir. Tâche de te montrer extrêmement prudent. Plus que jamais.

Venait la fameuse requête bien particulière qui avait amené Hiko à poursuivre Michiki suite à leur petite séance morbide quelques minutes avant. L’Engeance des Ombres souhaitait trouver un moyen de contrecarrer l’art obscur de la Nécromancie. Une remarque qui fit ricaner le Shinda qui ne put retenir une remarque du tac-au-tac :

- Le meilleur conseil que je puisse te donner est de ne pas mourir.

Une évidence certes.

- En réalité il n’y a pas grand-chose que je puisse te confier pour être sûr de l’emporter. Seulement quelques conseils. Si tu maîtrisais l’art des sceaux, tu aurais pu te débarrasser aisément du problème épineux qu’est l’Edo Tenseï. Mais sans ça, sache qu’une attaque d’assez grande envergure sera nécessaire pour empêcher le processus de reconstitution. Fie-toi à ton instinct et à ton Ninjutsu. Si tu restes à portée, tu t’exposeras aux poisons dans le meilleur des cas. Pour le pire, tu seras confronté au même fléau qu’elle.

Il avait ponctué ses derniers mots d’un bref signe de tête en direction de la clairière où il s’était retrouvé avec la Kaguya. C’était là les seuls éléments potables et potentiels qu’il pouvait utiliser lors de cette rencontre. Il avait également assuré qu’il n’oubliait en rien sa missive confiée par Ouranos. Une référence qui fit sourire une nouvelle fois le nécromancien :

- J’espère bien que tu n’as pas oublié. Il t’en serait gré.

Sondant une nouvelle fois la zone à la recherche d’une éventuelle présence importune, Michiki ne détecta rien d’autre qu’animaux et vies insignifiantes. En aucun cas des dangers pour leur rencontre parfaitement sous le manteau.

- Y a-t-il autre chose que je puis faire pour toi ? demanda simplement le Shinda.