L’ombre s’étendait à perte de vue sous mes yeux. La pleine lune brillait de mille feux dans le ciel parsemé d’étoiles. Assise dans les gradins du Colisée, seule, un léger vent vint caresser mon visage. Les pieds sur le siège de devant, les bras croisés sur mes genoux, j’attendais. Mes cheveux ondulèrent, la cape d’Hokage que je portais également. Un long soupir. L’Ombre du Feu était censée être le ninja le plus fort du village. J’inspirais la crainte. Les rumeurs allaient bon train sur la Rose Ecarlate. Ce que j’étais capable de faire faisait froid dans le dos. Mais jamais je n’ai eu à affronter un puissant ninja, en face à face. Qu’arriverait-il si, pour protéger Konoha, je devais me mesurer à plus fort que moi ? Miko avait été, en son temps, et sans aucun doute, la kunoïchi la plus forte du village : elle l’est aujourd’hui du Yuukan. Mais moi, qu’ai-je de commun avec ma senseï, outre mon nom et ma capacité ? Pas grand-chose, au fond. Je n’ai jamais rien prouvé sur le champ de bataille, que de vulgaires missions et des entrevues diplomatiques. Que de l’administration et de l’organisation. Que des ordres et du leadership. Jamais de puissance brute.

Deux oiseaux passèrent au-dessus du Colisée. Il arrivait. Baissant les yeux, je l’aperçus, éclairé par la seule lumière astrale. J’eus un petit sourire en me redressant. La nuit était bien entamée, désormais, et le village était d’un calme absolu. Je me levai et, d’un bond, je me mis face à lui. Lui qui étais sans doute le shinobi le plus puissant du village. Lui qui aurait sans doute dû être Hokage à ma place. Lui que le terrain avantageait sans doute bien plus que nécessaire. Lui qui maîtrisait les ombres. Lui, mon bras droit. Lui, Nara Natsuki.

Le Colisée gardait quelques traces des précédents affrontements du jour, auxquels j’avais assisté. Les Konohajins m’impressionneront toujours. Mais j’espérais, au fond, que ce que j’avais vu ne serait rien comparé au combat que je m’apprêtais à mener : orgueilleuse, j’espérais qu’il reste dans les annales, même si personne ne serait là pour l’admirer. Il avait accepté de se donner à fond, de ne pas retenir ses coups, d’agir comme si j’étais sa pire ennemie. J’avais besoin de me mesurer à celui que je pensais le plus fort. Et moi aussi, j’allais me donner à fond. La défaite ne serait pas permise. Quel genre d’Hokage je serais, sinon ?

Je lui adressai un sourire, plissant légèrement les yeux : pour le coup, il n’avait pas grand-chose de la chaleur qui se dégageait de certains de mes sourires lorsque je parlais.

- C’est gentil d’avoir accepté. Comme je vous l’ai dit, ne retenez aucun de vos coups… Evitez juste de me tuer. Ça ferait désordre. Enfin, après vous pourrez justifier ça facilement par un coup d’état : mais ça ferait de vous le Kyudaime. C’est vous qui voyez.

Je soufflai du nez. Natsuki aurait dû être Hachidaime, voire bras-droit de Miko avant moi. La seule chose qui empêchait le Céruléen de ne pas l’être était sa volonté. Il se contentait de rester dans l’ombre, agissant pour la Racine depuis plusieurs années maintenant, servant le village et l’Hokage à sa manière. Natsuki était le shinobi que tous les villages rêvaient d’avoir : puissant, fidèle, talentueux, intelligent et prêt à tout pour défendre ce en quoi il croit. Et c’est un bonheur lorsqu’il croit en vous. Je pris une grande inspiration.

- Prêt ?

Un vent se leva sur l’arène, une bourrasque bien plus grande que tout ce qu’on avait eu jusqu’alors. Le temps était venu pour moi d’enfin faire mes preuves. Miko, si tes insectes sont dans le coin, regarde ce que ton élève trouillarde est devenue. S’il te plaît.

« Vous voulez que je fasse quoi ? » s'immobilisa Natsuki bis entre deux piles de feuilles qu'il traitait sur le bureau annexe à celui de l'Hokage.

Mais il n'avait pas besoin que Mizuki se répète, il avait très bien entendu ce qu'elle lui avait demandé. La perspective d'un combat contre la jeune dirigeante ne l’enthousiasmait toutefois guère. Si par le passé, il appréciait sincèrement se mesure à d'autres pour progresser aux travers de saines compétitions, il avait depuis quelques années passé un point où son plein potentiel était très dangereux, à commencer pour lui-même. A dire vrai, il ne s'était plus battu pour le plaisir depuis très longtemps. Et là, ce n'était clairement pas pour s'amuser que Mizuki lui demandait cette faveur. Elle ne désirait dans le fond qu'une seule chose de tout cela : qu'il lui serve d'échelon de puissance pour mesurer où elle se situait.

Mizuki n'était pas du genre à faire des complexes d'infériorité, que ce soit envers Miko, ou la réputation illusoire de Natsuki, aussi sa demande sonnait quelque peu comme étrange aux oreilles de son Bras Droit. Toutefois, avec le recul, et alors qu'il se dirigeait vers le Colisée à l'heure convenu, le Nara tatoué cru saisir un peu mieux les enjeux de ce combat. Mizuki était à la tête de Konoha, ce qui constituait une pression énorme sur ses épaules. Et au-delà de l'aura qu'elle dégageait pour paraître forte et implacable, elle se devait aussi de l'être. Miko était celle qui l'avait guidé sur la voie des shinobi alors qu'elle n'était qu'une gamine trouillarde de ses propres insectes. Elle fut un mentor, et était à ce jour l'un des ninja les plus redoutables de sa génération. A ce titre, elle était une figure iconique pour Mizuki, un idéal à atteindre, et un niveau à dépasser...

Cela ne restait cependant que des spéculations de Natsuki. Tout aussi bien, elle pouvait n'avoir envie que de le dérouiller sévèrement pour relâcher un peu de stress. Mais cela, il en doutait... N'importe comment, il sera très vite fixé : il dépassa l'entrée des artistes du Colisée, et pénétra dans l'arène sous le couvert de la lune. Depuis les gradins, Mizuki l'y attendait déjà.

« C'est entendu, je ne retiendrai pas mes frappes. Toutefois, sachez je ne suis pas en mesure de vous tenir tête en exploitant mon plein potentiel, Hokage. Le résultat en serait au bas mot catastrophique, à commencer pour moi. J'ai passé près d'une décennie à imposer pleinement ma volonté sur ce corps, et s'il présente des atouts non négligeables, j'évite au possible de m'en servir à l'excès. Non plus car je me répugne, mais parce que même si le risque est très faible, il y a toujours une probabilité pour que je m’égare au cours de l'affrontement, et me laisse emporter par la frénésie. Auquel cas des retenues, je n'en aurai effectivement plus aucune. »

Pas plus d'une heure ou deux probablement, mais c'était suffisamment de temps pour causer des dégâts regrettables...

« Je sais que vous êtes capable de tuer d'un simple regard. Si vous voyez mes cornes pousser, n'hésitez pas, car cela signifiera que ce ne sera plus mon cas. »

Il ne lui avait jamais rien dit sur son sujet, mais elle en savait déjà l'essentiel. Peut-être juste pas le plus important. Elle risquait d'en voir beaucoup ce soir, et c'était à lui de se montrer à la hauteur de la confiance qu'elle lui avait accordé jusqu'à présent.

Avant que quoi que ce soit ne commence, Natsuki retira son T-shirt à manches longues, et le jeta dans un coin. Son vêtement ne lui apportera aucune protection contre les insectes de Mizuki, et finira de toute façon en lambeau s'il devait se battre sans retenu. Ce faisant, il révéla à la jeune femme une part de son corps tatoué, laquelle était ornée de quatre nouveaux motifs situés respectivement sur ses omoplates et ses pectoraux.

La lune offrait une visibilité relativement claire, mais elle n'avantageait pour ainsi dire personne. Natsuki était dans son éléments parmi les ombres, bien entendu, mais la petitesse des insectes de Mizuki les rendaient difficilement discernables dans l'obscurité. Il allait devoir compter bien plus sur son ouïe que sa vue. Posant finalement un pied devant l'autre, il prit sa position de garde. Son visage se ferma, et la lueur dans ses yeux s'éteignit comme une bougie soufflée.

Il était paré pour la rixe à venir, qu'il livrera autant contre son Hokage que contre lui-même.

Spoiler:

- S’il y a bien une personne dans ce village qui ne me fait pas peur, Natsuki, c’est bien vous. Vous m’impressionnez, je vous trouve incroyablement fort et puissant. Mais je vous sais fidèle en toute circonstance. Quels que soient vos maux, quelles que soient les significations de ces tatouages et quelle que soit votre discernement lorsque les fameuses cornes pousseront, je sais que je n’ai pas à avoir peur.

Et lui non plus, au fond. Il avait travaillé toutes ces années pour contrôler ses démons intérieurs, et il avait travaillé à la fois avec des experts spirituels comme Iji, mais également avec des gens dans le même cas de lui. Je ne craignais d’autant plus pas pour lui car quoiqu’il arrive, je savais que je réussirais à le ramener parmi nous. Je savais qu’Iji était celui qu’il faudrait appeler à l’aide : et au pire, j’avais les capacités pour le soigner sur place. Mais l’heure n’était pas à la réflexion sur d’éventuels débordements : l’heure était au combat. Natsuki s’était mis en tenue de combat. Moi, je restai les bras croisés, à fixer le Nara tatoué.

Et ce fut d’ailleurs ma première attaque. Une simple illusion, mais qui me permettrait sans doute de faire des choses intéressantes si le Céruléen ne la remarquait pas. Je ne tardai d’ailleurs pas à envoyer la seconde offensive : une trentaine d’insectes s’envolèrent de mes manches… Mais sans qu’il ne puisse les voir. Mes parasites, ma plus grande arme et ma plus redoutable. J’ignorais encore les effets concrets sur des personnes aussi puissantes que Natsuki et avec un métabolisme aussi étrange que le sien, il me fallait donc tester au plus vite. Et puis, ils m’assuraient une protection supplémentaire. Ils étaient comme des bombes à retardement, des mines que l’on pourrait activer quand la situation deviendrait incontrôlable.

- Je vous laisse le soin de lancer la première réelle offensive, Natsuki. N’hésitez pas.

J’eus un petit sourire. Mes parasites étaient parvenus à Natsuki et s’attelaient désormais à pénétrer sa peau. S’ils avaient touché, Natsuki sentirait de légères piqûres dans son dos. Sinon, et bien… C’est qu’il les aura sentis venir. Et je devrais trouver un autre moyen pour me trouver une sortie de secours. En attendant, je restais statique, les bras toujours croisés, le vent faisant voler mes cheveux et ma longue tenue blanche d’Hokage. Je pris une grande aspiration quand mes propres parasites s’attaquèrent à moi. Ils se trouvaient déjà dans mon corps, eux j’étais sûre qu’ils toucheraient. Je sentis mon corps s’alourdir, l’intérieur de ce dernier devenant dure comme de la pierre.

J’étais prête. J’avais posé tous mes pions sur le terrain, et pourtant je n’avais pas bougé d’un poil. Une situation rendue possible par le fait que ce combat était convenu. J’en avais conscience : il faudra trouver un autre moyen dans des combats plus surprises où mon adversaire attaquera directement… Mais une chose à la fois. Voyons voir comment le Nara allait agir désormais…

Spoiler:

Mizuki lui avait demandé s'il était prêt. Autant que l'on pouvait l'être pour un combat de cette envergure... Il contracta l'ensemble de ses muscles, et une épaisse carapace irrégulière commença à se former assez rapidement par-dessus la peau, émergeant en différents points d'éclosions avant de se rejoindre et se superposer. La couleur nuit de son nouvel épiderme le recouvrant de la tête aux pieds se zébra de veines céruléennes, laissant en uniques points vulnérables ses yeux et les orifices naturels de son visage.

La jeune Aburame tout comme lui devait prendre le temps de se préparer, car elle n'esquissa pas le moindre geste, si ce n'est de lui accorder quelques paroles rassurantes quant à ce qu'elle pensait de lui. Oui, lui aussi avait confiance en sa maîtrise de soi, surtout depuis qu'il s'était affranchit du concept de dualité, mais cela n'empêchait pas un accident de potentiellement pouvoir arriver. Dans le fond, ce n'était pas si différent d'une mission, où il était soumit aux même contraintes, et au même stress. N'importe comment, il n'était pas question de perdre le contrôle : cela ne lui était plus arrivé depuis qu'Oniri l'y avait aidé, pendant l'examen Chunin de Suna. Et s'il n'était pas lui-même sûr de ses capacités, il ne se serait jamais inscrit dans les affrontements bimensuels du Colisée.

Mizuki lui offrit de lancer la première réelle offensive, une phrase dont le choix des mots frappa immédiatement Natsuki. Il savait que le point fort de son adversaire ne résidait pas dans le corps à corps, auquel cas elle avait peut-être déjà préparé le terrain avec ces insectes. A moins qu'il ne s'agissait d'une illusion ? Plutôt que de foncer tête baissée dans un piège potentiel, il opta pour la forcer à bouger – ou au contraire, l'immobiliser - pour évaluer sa réaction. S'il voulait l'emporter, c'était en la surclassant sur son propre terrain.

Une force considérable s'exerça sur ses appuies, dont les griffes qui jaillirent des orteils et des talons se cramponnèrent dans le sol en perforant la terre. La poignée de signes qu'il composa ensuite puisa dans les courants qui les entouraient pour les soumettre à sa volonté. Ils ne tardèrent pas à se rassembler pour former une immense tornade entre Mizuki et Natsuki, dont la force d'aspiration attira à elle tout ce qui n'était pas fermement ancré à quelque chose : poussières, débris, déchets laissés dans les tribunes etc... Même Zo, vêtu pour l'occasion en vendeur de pop-corn tout de bleu et rouge rayés dans les gradins commença à s'élever, heureusement retenu par les épaisses chaînes à ses chevilles, reliées à des boulets en fonte ridiculement lourds. Il était censé être le cadeau pour Mizuki à la fin du match – comme il ne pouvait de toute façon plus le garder à la maison – mais à le voir ainsi ballotant dans les vents comme un drapeau sur une hampe, la surprise fut gâchée.

Sauf si la concernée avait mieux pour occuper son attention dans l'immédiat...

Spoiler:

Objectivement, le combat ne pouvait paraître spectaculaire s’il était vu de l’extérieur. Pire : même du point de vue de Natsuki, il ne devait pas voir moult chakra se diriger vers lui : et pour cause. Une de mes attaques m’était destinée et une autre était une illusion qui cachait la troisième. Un tour presque parfait, à un détail près : Natsuki avait eu une idée similaire à la mienne, à savoir se protéger de façon préventive. J’apercevais mes insectes et je sentais qu’ils peinaient à pénétrer l’armure que le Nara s’était faite pousser. Posés sur son dos mes parasites tentaient de creuser, en vain : ils auraient dû creuser pendant plusieurs minutes avant de se créer une brèche dans cette épaisse carapace.

Toute ma stratégie se basait sur l’intrusion de ces insectes qui continuaient à tenter leur chance : je devais m’assurer que leur passage soit facilité, mais sans que Natsuki ne comprenne que des parasites étaient en train de creuser son dos. Une nuée d’insectes sortit de mes manches, moi toujours immobile. La moitié du nuage s’étant avancé, une tornade de grande ampleur se mit au travers de leur route, au milieu de mon bras droit qui restait statique tandis que je me sentais partir en lévitation. D’un geste de la main, et trahissant pour la première fois du combat une émotion, j’ordonnai à mes insectes de ne plus s’attaquer à Natsuki mais de s’en prendre à la tornade de futon. Rapidement, elle se dissipa, en même temps que mes insectes qui s’envolèrent tout autour du Colisée.

- Impressionnant, la rapidité avec laquelle vous avez su créer une tornade aussi puissante. Mais j’ai bien peur que ce ne soit pas suffisant.

Pendant que je parlais, j’avais libéré de nouveaux une nuée d’insectes qui se dirigea rapidement vers le Nara. Pour m’assurer de leur bonne arrivée, et éviter que Natsuki ait le temps d’attaquer une nouvelle fois pour intercepter mes insectes, je composai quelques mudrâs, qui ne devaient sans doute pas avoir grand impact dans l’esprit du Nara, mais qui aurait comme effet d’accélérer drastiquement la vitesse de mon essaim.

L’essaim se mêlerait à mes parasites qui continuaient de voler autour du dos du Nara, et lui dévorerait son armure, permettant à mes parasites de s’introduire dans on organisme… Si cette fois, les parasites réussissaient leur œuvre… Alors peut-être que le combat prendrait une autre tournure. Et il serait temps. Honnêtement, je sentais déjà mon état défaillir. Première leçon : ne pas trop en donner d’un coup, ou améliorer son endurance…

Spoiler:

Mizuki était curieusement passive en ce début de combat, ce qui laissait penser à Natsuki qu'elle préparait clairement quelque chose. Elle connaissait ses forces, elle jouait probablement dessus pour le précipiter dans sa toile. A moins que c'était du bluff, et qu'elle comptait davantage sur l'appréhension de son adversaire de venir au corps à corps pour attaquer autrement. L'un dans l'autre, la tornade qui s'anima sur le terrain avait pour objectif de lui permettre de tirer des conclusions.

Le laps de temps qu'il lui fut légué pour cela se retrouva être extrêmement court. Sa technique avait à peine eu le temps de prendre forme et de commencer à happer ce qui l'entourait qu'elle se dissipa en une poignée de secondes, sans qu'il ne puisse comprendre comment. Mizuki avait a peine bougé la main, et rien n'en avait résulté. Des insectes capable de dévorer un élément de cette force ? Il n'y croyait pas. Qui plus est, il n'avait rien vu, rien entendu, et rien sentit. La scène défilait mille fois dans son esprit à chaque battement de cœur, les hypothèses se multiplièrent, les suppositions furent légions, mais une seule conclusion lui sauta soudainement aux yeux, lorsqu'il sentit sa carapace se désagréger à grande vitesse après les nouveaux signes de Mizuki.

Il expulsa aussitôt une impressionnante quantité de chakra par tous les pores de sa peau, qui forma un dôme de vent éphémère repoussant tout ce qui existait autour de lui. Dans la foulée, une décharge de colère l'irradia lorsqu'il fit détoner l'un des deux sceaux qu'il portait dans son dos, laquelle remit son système nerveux en état. Alors il la vit. Ou plutôt, il l'entendit bien avant de la voir : la nuée d'insecte qui l'entourait. Cette dernière vola dans sa direction sitôt que la barrière de vent qui la empêchait de passer s'arrêta d'agir. Sauf que cette fois, Natsuki était en mesure de réagir. Ses poings durcirent, couvertes à nouveau d'éclats de carapace sombre et irrégulière, et lui permirent de dresser un barrage imperméable devant la menace qui se profilaient. Les insectes avaient beau être nombreux, Natsuki était rapide et expérimenté : en deux battements de paupière, il avait tranché du plat de ses mains toutes les composantes de la nuée, qui gisaient désormais au sol.

S'il n'avait pas su à quoi s'attendre un minimum pour nourrir sa réflexion après l'avoir observé se battre dans l'arène il y a quelques mois, aucun doute qu'il n'aurait pas été en mesure de réagir à temps, aussi vif d'esprit qu'il était. Cela ne les mettait pas vraiment à égalité, vu que Mizuki savait de lui jusqu'à la couleur de ses sous-vêtements, mais l'écart était au moins réduit. Elle ne devrait donc pas être surprise par sa prochaine attaque. Celle où une Mizuki géante s'arracha des ombres jusqu'à la taille devant elle, et lui abattit ses deux poings entrelacés dessus.

« Passé ce point, vous pouvez vous considérer comme gagnante. »

Sauf que dans la nature sauvage, l'on ne rencontrait pas toujours des adversaires qui acceptaient de se mettre à son niveau. Mais de là à la tabasser si elle était à bout, y avait-il un intérêt ?

Spoiler:

[color=black]Je serrai les dents, légèrement déçue par l’échec total des parasites qui s’étaient vus désintégrés par les techniques successives du Nara. Pire encore : il avait pu complètement dissiper mon illusion, en comprenant d’une part que sa tornade ne s’était pas désintégrée toute seule, et en sentant sa carapace se désagréger. Après tout, Natsuki était l’un des meilleurs shinobis du monde, j’ignore encore à quoi je m’attendais en essayant de le prendre de vitesse : forcément qu’il était plus rapide que moi.

Ce moment de flottement lui permit à son tour d’attaquer. J’avais réfléchi à contrer sa manipulation des ombres, son étranglement des ombres : mais ce que je vis fut au-delà de tout ce que j’avais pu imaginer. Après une série de mûdras, le Céruléen surprit le public en délire de zéro personne lors de sa prochaine attaque. Les yeux écarquillés, je regardais l’ombre me représentant. La pensée populaire qui disait que j’étais au courant de tout était évidemment erronée : je n’avais aucune raison de faire suivre Natsuki (sauf si j’avais envie de savoir concrètement que ce margoulin allait vivre une idylle avec Oniri, mais ce sera peut-être le sujet d’une prochaine histoire). Léger sourire tout de même, me repositionnant pour affronter l’ombre de moi-même – ce qui est, au fond, une formidable mise en abyme de mon rôle de Kage affrontant un manipulateur des ombres.

- A quel moment êtes vous tombé en admiration devant moi, Natsuki ?

Ouvrant les bras pour accueillir l’attaque de moi-même, le choc fit s’envoler toute la poussière du Colisée et fit trembler les murs de pierre dans un grondement assourdissant. Serrant les dents sous le choc, je sentis le coup sur ma peau mais mes organes tinrent bons. J’eus quand même le souffle coupé, mais la technique de renforcement lancée préalablement me permit d’encaisser l’attaque. Toujours debout (rassurez-vous, toujours la banane…♫), je laissai la poussière retomber pour sourire à mon adversaire.

- Allons, est-ce comme ça qu’on traite les femmes que l’on admire, mon cher Natsuki ?

Je regardai autour de moi. Quelques insectes avaient été désintégrés, mais la plupart tournait encore sans but autour de l’arène. Bref introspection sur moi-même : cette attaque serait la dernière. Prenant une grande inspiration, je libérai un grand nombre d’insectes qui allèrent enfermer Natsuki en l’emprisonnant. Il connaissait cette technique : il m’avait vu l’utiliser contre son élève il y a bien longtemps. Seulement, cette fois-ci, j’allais varier l’attaque qui allait suivre. Au lieu d’ordonner à mes insectes de le dévorer… J’utilisai le reste de mon chakra pour créer un filet Raiton entre eux.

Illuminant l’arène d’une forte lumière blanche légèrement bleutée, de la foudre lia tous mes insectes sur le terrain ; si le filet était disparate le long de l’arène, il était fortement rapproché dans la prison, les insectes entre eux étant fortement liés. Tombant sur un genou, essoufflée, après cette technique, je gardai l’œil sur la prison d’insectes… Voir ce que Natsuki prévoyait désormais, et sachant que mon ombre, si je n’avais pas remporté le duel, allait la remporter à ma place…

Spoiler:

Bien qu'avec son masque imperturbable, Natsuki ne laissa rien paraître, la scène qui se déroula sous ses yeux le mystifia. Mizuki avait beau avoir encaissé l'attaque plus qu'elle ne l'arrêta, il n'en demeurait pas moins qu'elle avait bloqué les poings écrasants de l'ombre colossale qui lui faisait face avec la seule aide de ses petits bras musclés, le tout sans s'esquinter. S'il y avait bien une chose qu'elle avait réussit à cacher jusqu'à présent, c'était la force titanesque qu'abritait son corps de crevette : Natsuki n'avait jamais rien soupçonné.

Il n'eut guère le temps de s'émerveiller toutefois, car Mizuki avait décidé que le combat n'était pas terminé. Elle envoya sur lui une nouvelle nuée très dense d'insectes, lesquels ne parvinrent guère malgré leur nombre à dissimuler les mailles d'un filet électrique dont ils formaient les liens. Sons et lumières étaient aux rendez-vous, que le Nara tatoué balaya d'un simple geste de la main, dans une démonstration de maîtrise prodigieuse de son affinité élémentaire. Les insectes tentèrent de revenir, mais le regard noir que leur lança leur cible les dissuada de recommencer. Il y avait eu déjà bien assez de morts du côté de la faune comme cela...

« Je ne comprends pas votre dernière décision, Hokage. Je vous annonce que je suis sans défense, et plutôt que de me neutraliser en me logeant une balle-frelon dans la tête, ou Kyubi sait quoi d'autre, vous cherchez à m'immobiliser pour me tuer à petit feu en puisant dans vos dernières forces. Et à en juger par l'intensité du courant, cela vous aurait prit au moins une minute avant que mes organes éclatent. »

Deux avant-bras terminés par des poings s'abattirent de part et d'autre de Mizuki depuis son dos, mais sans la toucher. Au-dessus d'elle, l'ombre portant vaguement les traits de sa victime planta les deux globes dorés qui lui servaient d'yeux sur elle, dans une expression dénuée de vie.

« Votre ombre n'aurait pas eu besoin d'autant de temps. Car aussi forte que vous semblez l'être, je doute que vous puissiez soutenir longtemps face à elle le même effort que précédemment. Pourquoi avoir fait ce choix, de fait ? A plus forte raison que vous saviez que je suis affilié au vent, et que la foudre n'a en conséquence presque aucun effet sur moi. Vous aviez la victoire à porté de doigts, et vous avez préféré arracher une égalité peu avantageuse. C'est dommage. »

L'ombre de Mizuki l'attrapa délicatement sous les bras dans ses immenses mains, et la redressa sur ses pieds avant de reposer le chapeau Kagal sur la tête de sa propriétaire puis disparaître.

« Cela va aller, Hokage ? » lui demanda Natsuki qui s'était approché.

Bilan du combat : égalité, un mort partout, avantage pour la défense.

Spoiler:

Haletante, je regardai et écoutai Natsuki tandis que l’ombre de moi-même s’abattit derrière-moi. Je n’avais aucune crainte quant aux motivations qui animaient le Nara : il ne me toucherait pas, voyant bien que j’avais perdu. J’eus un léger sourire.

- Parce que je n’ai jamais pris la victoire comme l’objectif de ce combat.

J’avais la tête qui tournait légèrement, et mal à l’abdomen pour je ne sais quelle raison. Serrant les dents, je posai un genou par terre en me tenant le ventre. J’avais encore du chemin avant d’atteindre son niveau. Mais je le ferais, un jour. Natsuki était le shinobi le plus puissant actuellement à Konoha, et sans doute le deuxième derrière Miko à Hi. Si je voulais la surpasser elle, je devais commencer par le surpasser lui. Or, Miko connaît la plupart de mes techniques les plus puissantes. J’aurais pu me contenter d’utiliser des Genjutsus, de le tuer d’un simple regard : mais quel intérêt aurais-je eu ? J’étais ici pour m’entraîner, tester mes limites, voir jusqu’où je pouvais aller sans me servir de mes techniques ultimes. Force est de constater que j’avais encore du chemin.

- Ce n’est pas en systématisant ce que je sais déjà faire que je vais progresser. Un enfant apprend à marcher, en tombant, en se faisant mal, en essayant. Jamais il ne reste immobile en s’exerçant à respirer.

Je me relevai, prenant un grand bol d’air frais, regardant le terrain autour de nous. Sans nous en rendre compte, nous avions fait tout de même des dégâts importants. Enfin, surtout lui. Ces ombres, immenses… Depuis quand un Nara est-il capable de produire ce genre de choses ? Le coup que mon ombre m’avait infligé était bel et bien réel : il avait une puissance et une consistance incroyable. Je n’étais pas experte dans le domaine, mais la maîtrise des ombres n’était pas censée faire ce genre de choses.

- Je vais bien, merci. Un peu fatiguée, du repos suffira à récupérer. Je ne vous retourne pas la demande.

Forcément qu’il allait bien. Je l’avais à peine égratigné.

- Merci pour ce combat, Natsuki. A charge de revanche.

Tournant les talons, je quittai l’arène en direction de mon appartement, où je pris une longue douche pour directement me mettre dans mon lit, courbaturée et endolorie. Mais le sommeil ne me vint pas : je mesurai toute la progression qu’il me restait à faire. Une chose était sûre cependant : Konoha était entre de bonnes mains. Miko veillait, même de loin. Natsuki veillait en son cœur. Je pouvais m’estimer heureuse de les avoir à mes côtés pour cette aventure. Je pouvais avancer plus sereinement, sachant que je n’étais pas seule, et que mes probables erreurs pourront être corrigées par le talent et l’intelligence de ces deux ninjas d’exception.