Été 15

→ Intermède avec : "Concrétiser d'anciens projets"

Les discussions allaient bon train sur la frontière entre le Pays des Oiseaux et celui du Vent. A l’ombre des grands arbres des forêts éternels de Tori, une petite équipée discrète se rencontrait, à l’abri du soleil et du vent tout comme des oreilles indiscrètes. Dans cette localité reculée et inconnue de tous, les deux micro-ambassades de Suna et d’Iwa se retrouvaient afin de discuter de projets futurs. Et ce n’était pas une simple rencontre protocolaire ; car ce n’était ni plus ni moins que le Kazekage et l’Empereur qui se faisaient face. Pour la première fois depuis l’attaque qui avait dévasté le Village Caché du Sable, pendant que le Kamui faisait face à une ignoble tentative d’assassinat.

Une tente installée, les deux Ombres s’étaient glissés à l’intérieur, non sans ironie. Ce genre de rencontre correspondait davantage au prédécesseur de Kibo ; en tant qu’ancien élève du Kazekage Yamada, il n’avait pas à rougir, ni à renier les apprentissages qu’il avait reçus de lui. Les discussions de la journée devraient être longues et nombreuses. Economie, géopolitique, stratégie militaire et – bien entendu – projet d’alliance déjà enraciné depuis plusieurs mois, si ce n’était une année complète ! Héritage laissé à Suna comme un cadeau empoisonné, c’était pourtant en répondant à une invitation du nouveau Maître du Sable que Kakeshuou Samui espérait bien renouveler ce projet ambitieux, et mettre au clair les relations futures entre ces deux puissances.

Plusieurs heures étaient déjà passées. Les deux petites troupes s’affairaient à l’extérieur à leur façon. Sans doute y avait-il beaucoup à dire, et à planifier. Mais aucun doute : quand on est venu juste pour la balade, on se fait certainement sacrément chier dans l’attente !
Enfin, du mouvement ! De sa stature élevée et puissante, l’Empereur écartait un pan de tissu et s’éloigna de l’édifice de fortune, fouillant dans ses manches pour une curieuse raison. Arrêtant ses pas, restant seul pendant un moment, il était rejoint pendant quelques secondes par l’un de ses accompagnateurs et gardiens. Aucune nouvelle alarmante du reste de l’Empire ni traces d’une présence étrangère dans les parages, la rencontre pouvait continuer sans problèmes. Acquiessant à cette nouvelle d’un simple signe de tête, l’Ancien trouvait enfin ce qu’il cherchait … et son bras de glace, créé pour plus de confort, retirait sa kiseru pour la fourrer en tabac et s’accorder cet instant de répit. Les deux Ombres s’étaient accordés une pause dans les discussions.

Portant son regard à droite et à gauche, il remarqua une silhouette qu’il avait déjà vaguement identifiée lors de la rencontre des deux groupes. Plongé dans ses pensées, cet homme s’était mis à l’écart. Volontairement ? Ca n’en faisait qu’une cible plus facile à emmerder. Non, en vérité, le Kamui n’y allait pas nécessairement dans ce but. Mais c’était toujours une façon d’approcher ladite personne.

~ Dis-moi, … Ogami Toshiro, c’est ça ? Tu as du feu ? je ne trouve plus mes allumettes …

Une question anodine, très certainement surprenante de la part d’un homme à la réputation si froide et distante. Mais cette approche était bien intentionnelle, cette fois-ci. L’Empereur était curieux de savoir ce qui se cachait derrière le titre de Second du Sable.

Spoiler:

L'été 15 allait sûrement marquer l'avenir du pays du vent, en cette saison tant attendue dans certaines contrées, Suna allait probablement officialiser son alliance avec le Shukaï. En toute honnêteté, je soutenais entièrement cette alliance. C'était une décision que j'appréciais particulièrement d'ailleurs. Elle allait nous permettre de ne plus nous soucier de l'ouest du Yuukan, le Shukaï et sa force armée pouvait aussi nous être utile lors des plus grands conflits. Stratégiquement, c'était LE choix à faire. Dans le passé, j'avais longuement critiqué cet Empire. Pour moi, ils ne disposaient pas de la bonne définition de la paix puisque pour l'obtenir, ils avaient tout simplement assassinés les plus grands dirigeants.

Je me souviens d'une discussion avec mon maître -l'actuel Kazekage-, je lui avais dit qu'être trop proche de l'Empire allait nous causer des problèmes et que je réfutais l'approche de cette grande organisation. Aujourd'hui, je voyais les choses autrement. Je me rappelais aussi de l'examen Chûnin, là où toutes les autres entités militaires nous avaient abandonnées.. nous avions eu le soutient de Kusa no Kuni. Comme chaque Shinobi de Kaze no Kuni représentait Suna, c'était de même pour le pays qui nous avait soutenu. L'Empire nous avait donc tendu la main lors d'un conflit douloureux-.. Ils étaient les seuls à l'avoir fait.

Enfin, la rencontre qui allait sceller cette alliance se passait aux frontières du pays des oiseaux. Je ne l'avais jamais visité auparavant et je ne comptais toujours pas le faire en ce jour, la raison de ma venue était tout autre. Je devais soutenir le projet d'alliance en tant que bras-droit et dirigeant du Kakumeigun. Alors lorsqu'il était l'heure de prendre une pause, je m'écartai quelques instants pour respirer et observer le pays qui nous accueillait. Je pouvais observer de ma position une somptueuse forêt, elle me faisait presque penser à celle qu'on pouvait trouver à Ki no Kuni. Dans mes pensées, je me perdis dans le passé. Je foulais les terres de l'Empire et je ne pouvais m'empêcher de penser à celle qui m'avait mis au monde. Elle était née à Kusa no Kuni et portait le nom de Jisetsu. Je ne m'étais jamais senti aussi lié à l'Empire qu'en ce jour, je foulais leurs terres et j'allai pouvoir observer une poignet de main qui changerait à coup sûr l'avenir du Yuukan. C'était étrange comme sensation, je ne pensais qu'être un homme de Kaze mais je ne l'étais pas entièrement. J'étais aussi un fils de Kusa.

Alors que je m'étais perdu dans mes pensées, j'entendis une voix familière. Cette voix, je l'avais entendu à quelques reprises lors de la réunion. C'était l'Empereur lui même, je mis quelques secondes d'ailleurs à le situer puisque je ne m'attendais pas à le voir à mes côtés. J'abaissai légèrement le haut de mon corps afin de le saluer avec respect. L'homme à la tête de nombreux pays me demanda du feu, c'était en effet nécessaire pour fumer.

«  Oui, c'est bien moi. Attendez quelques secondes... »

De ces mots, je tirai un vieux papier de ma poche. De ma main droite je composai quelques signes et soufflai sur ce même morceau de papier. Le feu étant allumé, je tendis cela à l'Empereur. Je n'avais pas d'allumettes ni de briquet, c'était mieux que rien. Comme une sorte de philosophie, si je n'avais pas à portée de main l'un de mes désirs, je faisais tout pour parvenir à le saisir. Je regardai devant moi quelques secondes pour observer à nouveau le pays.

« Dites-moi, est-ce que Kusa no Kuni est aussi beau que Tori no Kuni ? Pour être honnête, j'ai appris récemment que ma mère était native de ce premier et j’espère pouvoir en apprendre plus. Elle m'a aussi fait don de pupilles dorées, j'imagine donc aisément où débuter mes recherches. »

Même si ce début de conversion était plutôt léger, je ne savais pourquoi l'homme qui avait entraîné Kibo m'avait rejoint. Peut-être souhait-il juste prendre une pause ? Si c'était le cas, je ne comptais pas le déranger en amenant à nouveau le sujet de l'alliance. Si ce n'était pas le cas, j'étais disposé à répondre à ses questions.

Acceptant – avec surprise – la présence de l’invité imposé, le Toshiro recherchait de quoi satisfaire les besoins et attentes de l’Empereur. Sans dire mot, l’homme restait concentré sur l’objet de sa demande. Le Sunajin ne manqua pourtant pas de formules de respect, et lui apporta le feu tant attendu, tels les dieux grecs à l’égard de Prométhée. Observant le micro-Katon lui apporter la lumière et la salvation d’une bouffée de tabac sur un petit chiffon blanc, un bruit grinçant et cristallin vint perturber cette petite entrevue, pendant que le vêtement couvrant l’épaule gauche du kamui s’agita de soubresauts étranges. Une seconde plus tard, une main de glace et de cristal faisait son apparition afin de se saisir de l’échantillon enflammée. Poussé avec force, et ce malgré la flamme vive, dans le bec de sa kiseru, le chiffon fut écrasé l’instant d’après dans la paume glaciale du Maître du Shukaï ; et une petite fumerole s’échappa des doigts du Vétéran.

La petite pipe japonaise en place, l’homme humait le parfum de son tabac, et inspirait avec calme. Gonflant le torse, il se satisfaisait de cet instant de pause où il savourait à la fois le silence, le goût, et la quiétude. Un de ces rares moments qu’un homme de son importance pouvait s’accorder dans sa misérable vie d’administrateur et de combattant. On eut presque dit qu’il ne portait aucune attention à son jeune serviteur qui, après avoir été si serviable, venait à engager la conversation et à interroger le vieux Samui.

De ce premier engagement, Kakeshuou Samui retenait quelques informations intéressantes, voire surprenantes ! La beauté des paysages des contrées qu’il gouvernait en tant que Seigneur des Ombres n’était pas une chose sur laquelle il s’était attardé ces dernières années. Interloqué par cette remarque, sa main vint récupérer l’instrument afin qu’il lève les yeux et observa les alentours. Il fallait reconnaître que malgré son passé hargneux, son ancien dirigeant despotique et ses Clans belliqueux, cette Nation détenait de bien beaux paysages … . Il était trop rare pour le Ninja de s’arrêter et de profiter de la vue ; il cherchait avant tout à protéger ses yeux de toute vilénie et malice ennemie.
Deuxième information stupéfiante, les origines d’Ogami ! Les pupilles dorées n’étaient pas chose courante, et représentaient le trésor d’un Clan mondialement connu. Qui, sur cette Terre, pouvait ignorer les pouvoirs surprenants des Jisetsu, Manipulateurs de l’Espace-Temps ? Anciennement à Kiri, ils s’étaient depuis installés à Kusa sous les ordres du Seigneur de Guerre Oterashi qui y gouvernait d’une main de fer gantée. Le Clan demeurait encore aujourd’hui l’un des plus puissants et des plus fiables au sein du Shukaï !

Maintenant, quant à répondre aux questions qui lui étaient posées, l’Empereur doutait de son objectivité ou de ses connaissances … .

~ Kusa … est certainement un magnifique pays. Je n’ai fait que le traverser au cours de ces dernières années, mais je n’ai jamais pu prendre le temps de m’y arrêter pour observer ses horizons. Sans doute quelque chose que je tâcherais de faire à l’avenir … .

Ces paroles étaient plus prononcées en l’air que pour donner naissance à un véritable échange. En vérité, le Kamui n’était que rarement allé dans les nombreuses nations dont il avait la charge et la protection. Yuki et Tsuchi étaient bien les deux seules où il s’était régulièrement rendue, en excluant Mizu qui figurait comme terre natale. Bref, peu de choses pour peu d’importance.

~ Je sais en revanche que les Jisetsu sont toujours à la recherche de savoir. De leurs racines et de leur avenir. Rencontrer un nouveau membre, même éloigné, sera pour eux un grand plaisir car ils apprendront ainsi plus et auront le sentiment de partager avec le monde qui les entoure. Les Jisetsu ne sont d’ordinaire pas un Clan sédentaire … .

L’Ancien repensait à l’ancienne querelle qui manquait de peu de diviser ce Clan aux pupilles brillantes, entre ceux désireux de s’installer pour mieux s’épanouir, et ceux prêts à suivre un Renégat pour découvrir le monde et aller de l’avant. Toute une conflictualité qui s’était achevée par une disparition mystérieuse ; que certains lui auraient certainement reprochés … .
Cette annonce sur les intentions et le cœur des Jisetsu permettait au Dernier des Kirijins de s’intéresser un peu plus au cas de son interlocuteur. Non pas forcément pour connaître les origines obscures de sa famille ; mais plutôt le rôle qu’il jouait aujourd’hui au sein de Suna.

~ J’ai cru comprendre que tu étais le numéro 2 au sein de ton Village … . Comment se rétablit-il de la désertion de son ancien Chef ? Et de la scission entre le Daimyo et les Ninjas du Vent ? Je suppose que ce n’est pas une situation facile à tenir et à développer tous les jours … .

Mon interlocuteur m'expliquait un peu le fonctionnement des Jisetsu, n'étant pas un clan sédentaire ils m’accueilleraient sans problème d'après lui. C'était une bonne chose si je souhaitais en apprendre plus sur ma défunte mère et mon pouvoir récemment éveillé. Je peinais à l'utiliser puisque je n'avais comme support que des récits contés dans de vieux livres, des rapports datant de l'an 5-.. Rien qui ne pouvait m'aider à progresser et à exploiter cette nouvelle faculté. Maîtriser le temps était quelque chose qui pouvait faire peur à première vue, moi je voyais ça comme une opportunité. L'opportunité d'orchestrer le temps, de jouer avec afin d'accomplir mes objectifs. Enfin, ma formation ne pouvait que se dérouler aux côtés des miens et de l'Empire. Quelque part j'étais l'un des leurs après tout, en tant que fils du désert et fils d'un Jisetsu ayant longtemps vécu à Kusa no Kuni, je pouvais me sentir chez moi en ces terres. Bien sûr cela ne pouvait rester qu'un ressenti, ce pays était contrôlé comme tous les autres par la plus puissante organisation militaire du Yuukan. Malgré les liens d'amitiés qui étaient en train de se dessiner peu à peu, je devais être prudent. L'empereur venait de m'apporter des informations intéressantes et qui allaientt sûrement m'aider dans le futur.

«  Je vous remercie pour ces informations Empereur, j’espère avoir un peu de temps pour m'entraîner avec les miens et comprendre les origines de ce pouvoir. »

Je disais « les miens » assez facilement, c'était après tout un lien de sang que je ne pouvais renier. Ma mère était une descendante directe du clan Jisetsu, pour ma part je ne l'étais pas mais d'après les dires de mon interlocuteur, ça ne devrait pas être trop grave. Le Samui à la main de glace prit à nouveau la parole pour me parler de mon rôle au sein de Suna et des derniers événements. Il évoquait aussi la scission entre la Daimyo et les Shinobis du village caché du sable. Il avait vu juste, cette situation plus qu’embarrassante allait sûrement nous mener à notre perte.

«  Bien qu'aux yeux du monde, Suna est encore passé pour un village n'ayant à sa tête que des traîtres.. La désertion de Yamada Kioshi fut une bonne chose. Il n'était pas un bon dirigeant, s'il avait des qualités en tant que Shinobi, il ne pouvait rester à ce poste indéfiniment. Son incompétence en la matière n'avait d'égal. Alors l'expression un mal pour un bien a bien sa place dans cette histoire. » Dis-je l'air très sérieux.

C'était un fait, malgré le fait qu'il soit mon prédécesseur au vu de son lien avec le Kazekage actuel, je n'avais pu l'accepter longtemps. Je n'avais de peine à le dire et si je devais le dire devant Kibo, je le ferai sans hésiter. Cet homme nous avait aussi apporté des informations quant au Nidaime Kazekage mais cela n'excusait pas ses nombreuses fautes. Son incompétence allait mener Suna à sa perte et Kaze allait certainement suivre. Que pouvait faire un si grand pays sans un appui militaire certain ? Nous dépendions de Kaze et eux dépendaient de nous. Nous faisions régner l'ordre dans le pays, nous réglions des problèmes en échange de très gros financements. L'empereur avait aussi amené dans la discussion la scission entre la partie politique et militaire du pays. C'était juste, peu à peu nous avions l'impression que Kaze était nôtre. Le pouvoir politique s'était tellement affaibli-.. Et moi j'avais un avis sur ce sujet, un avis tranchant et même s'il était contraire aux idées de l'homme à mes côtés, je n'avais aucun mal à le prononcer.

«  Concernant la scission, c'est une chose très fâcheuse. Nous n'avons pas su rester à notre place et la Daimyo n'a pas su garder la sienne. Pour ma part, je crois en la séparation des pouvoirs et je crois en ce système politique. Je sais que l'Empire pense autrement, je sais ce que vous avez fait pour obtenir le plein pouvoir dans de nombreux pays. Aujourd'hui je ne remets plus en cause vos actes car je pense que vous avez essayé d'apporter la paix. J’espère ne pas me tromper en souhaitant conserver une séparation entre le pouvoir politique et militaire, je souhaite persévérer dans cette voie et si je m’aperçois qu'elle ne mène nulle part-.. J'aviserai de la meilleure façon possible, j'entends par là la façon qui profitera le plus à mon pays et aux résidents de celui-ci. »

Dans un cas comme dans l'autre, je ne renonçai devant rien. Si je devais éliminer les têtes dérangeantes, je le ferai sans remords. J'avais décidé d'emprunter un chemin semé d’embûches et m'étais promis de ne jamais regarder en arrière.

Le garçon, satisfait des réponses et informations apportées par l’Ancien, lui présentait immédiatement ses remerciements. Et il enchainait sur les questions posées par ce dernier.

C’était un jeune homme franc, qui n’avait visiblement pas froid aux yeux. Était-ce par pure fidélité envers son actuel Kage ou par conviction personnelle qu’il affirmait son rejet du Yondaïme ? Allez savoir, Kakeshuou Samui ne tenait à partager son avis sur celui qui était aujourd’hui connu comme un déserteur. Il avait gardé avec cet homme un semblant de contact ; nulle doute qu’il n’en parlerait pas encore à Suna. La chose était certainement trop fraîche, et le Pays du Vent avait sans doute bien d’autres priorités, notamment ce conflit interne qui lui pesait sur son développement et sa stabilité.

Ogami exprimait sa position vis-à-vis de la bicéphalie féodale. L’Empereur n’était pas ignorant de ces systèmes : il avait été l’un des premiers témoins de la création de ce modèle politique, lorsque Mahan Samui s’était installé comme Shodaime Mizukage et Ombre du Pays de l’Eau, au service de son Seigneur Féodal. Pendant plusieurs décennies, ce même homme avait servi les intérêts d’un Village Caché Ninja, effectuant ses missions, suivant les règles et dogmes de sa Nation. Aujourd’hui, il était certes sorti de ce cadre. Cela signifiait-il qu’il avait rejeté ce système ? Pas nécessairement. C’était sans doute ce point qui était le moins compris par les gens de l’Extérieur. Une chose que le Kamui s’échinait à expliquer à chaque occasion.

~ L’Empire ne pense pas nécessairement autrement comme tu le dis, jeune Toshiro … . Avant d’être un Empire, nous avons été une Alliance ; où cette séparation des pouvoirs existait. A-t-elle disparu aujourd’hui, je ne le pense pas. Il est vrai qu’en tant qu’Empereur de l’Ombre, je reste le ciment rassemblant ces nations indépendantes. Mais chacune conserve son propre gouvernement et un fonctionnement interne qui lui est propre. Le Pays des Cascades est dirigé par un Seigneur de Guerre à la fois Ninja et Daimyo. Le Pays des Neiges fonctionne sur un modèle Triumviral aujourd’hui, rassemblant Ninjas, ancienne Daimyo et autorités locales. Le Pays de l’Eau se gère sur l’ancienne séparation Kage/Daimyo ! … En fin de compte, l’Empire est une gigantesque marmite politique, où chacun peut faire son plat à sa sauce.

C’était là l’ultime modèle qu’il avait choisi de mettre en place. Il ne reniait ni les origines troubles du nouveau Shukaï, ni la place qu’il s’était octroyé en se plaçant au dessus des autres. Mais il acceptait de porter ce fardeau car ce dernier s’accompagnait d’une fierté immense dans cette liberté de pensée, de conscience et de découverte qu’il avait ainsi instaurée. Les premiers Daimyos contactés pendant cette année 15 avaient peu à peu intégrés l’intérêt de ce système ; et s’ils n’en ressentaient pas moins de la méfiance pour l’ancien Samui, ils restaient plus confiants quant aux intentions impériales futures.

Mais temps était venu de se pencher sur les propos d’Ogami. Qui, pour le coup, avait fait montre d’une bien terrible détermination – ce ne serait pas Kakeshuou Samui qui lui reprocherait une telle ambition … . L’homme tira une nouvelle fois sur son tabac et prit une grande inspiration pour relâcher la délicieuse fumée et observait le ciel.

~ Accomplir un acte fort au nom de l’Unité et de la Nation est une chose lourde à porter ; et j’en sais quelque chose … . Il y a bien des façons de procéder, mais aucune n’en vaut la peine si l’objectif ultime visé n’est pas le maintien de l’Ordre et de la Paix … . Pour cela, chacun d’entre nous doit être prêt à s’arracher membres et âme. Mais il faut toujours prendre garde à ce que les intérêts personnels ne viennent pas en opposition à ces nobles objectifs … .

Le regard glacial de l’Ancien s’était posé sur son interlocuteur. Était-ce un message subliminal ? Quelle était sa propre situation sur ce point précis ?

~ Comment se débrouille le nouveau Kazekage depuis sa prise de fonction ? Devoir supporter la perte d’un soutien aussi précieux que celui du Daimyo du Pays doit être difficile … . Parvient-il à régler les problèmes, ou reste-t-il des lacunes ?

«  Je vois... »

Répondis-je simplement aux paroles de l'Empereur. Il m'avait expliqué en quelques phrases comment l'Empire était à l'heure actuelle sur le plan politique. Je l'avais écouté très attentivement pour peut-être en apprendre sur sa personne, sur sa façon de voir les choses et peut-être pouvoir utiliser son expérience afin d'obtenir des réponses ? Certains des pays contrôlés par l'Empire avaient décidés de rester sous le modèle Kage et Daimyo, ce qui pour moi était une très bonne chose ; D'autres par contre disposaient d'un Seigneur de Guerre qui faisait office de Daimyo, point légèrement dérangeant si j'ose dire. Un général à la tête d'un pays, ça pouvait être problématique. J'avais pourtant face à moi un grand général qui contredisait mes idées. Pour Kaze no Kuni, je ne le voyais pas fonctionner sous un système similaire. Je voulais clairement créer une séparation entre le Daimyo et le Kazekage. C'était mon souhait pour éviter des débordements, nous étions la sécurité du pays, la force militaire du pays et non les gouvernants de celui-ci. Comme s'il avait compris mes convictions, mon interlocuteur m'expliquait qu'un acte voulant apporter l'Unité pouvait être lourd à porter.

L'Empereur évoquait les sacrifices, c'était pour moi inévitable de sacrifier quelque chose pour obtenir la paix. Le seul sacrifice que je m'étais autorisé n'était autre que celui de mon maître. Si sa mort pouvait nous apporter la paix alors j'étais volontiers d'accord pour prononcer moi même la peine capitale. Seulement je n'avais pas ce pouvoir et ce n'était sûrement pas la solution que de le tuer sauvagement.

Comme le disait si bien le Samui, les intérêts personnels ne devaient surtout pas venir entacher notre recherche de la paix. Je le savais pertinemment et était tout à fait d'accord avec lui ; Chacune de mes actions était destinée à apporter cette paix, je réfléchissais pour Suna, pour Kaze et non pour moi même. Seulement à un moment précis, j'ai vu qu'une solution s'offrait à moi et je faisais parti intégrale de cette solution. Un sacrifice était à faire, certes et je devais remplacer la personne sacrifiée. Ce n'était pas que je pensais être la solution à tout, c'était seulement que je voyais la possibilité d'avancer aux côtés des miens. Les Kazejins et nos militaires avaient bien trop souffert, j'osais espérer une paix pour ces hommes. C'était sûrement illusoire mais j'y croyais, je croyais à une paix durable pour mon pays.

«  J'entends vos mots Empereur et je suis totalement de votre avis. Je ne pense pas à moi quand j'imagine une unité, quand j'imagine une vie plus stable pour les miens, je pense à ceux que j'ai promis de protéger. »

J'avais répondu simplement à ses « conseils » et j'avais aussi remarqué un regard insistant, il était même légèrement pesant. Il avait souhaité me faire passer un message et j’espérais avoir répondu correctement à ses attentes. L'homme me demandait alors des nouvelles sur mon maître qu'il avait lui même formé pendant un moment. L'Empereur souhaitait connaître les capacités de notre Kazekage actuel.

«  Il a pris de bonnes décisions, c'est indéniable. J'en ai soutenu de nombreuses. Cela dit, comme vous l'avez si bien relevé, nous n'avons plus l'appui de notre Daimyo et pour moi c'est dérangeant. Je crois en une séparation des pouvoirs comme je vous l'ai déjà dit. Et elle n'existe plus vraiment cette séparation. Je ne veux plus avancer dans cette direction. »

Il connaissait dorénavant mon point de vu sur le Kazekage et la scission provoquée par celui-ci. Je ne pouvais être tout à fait honnête avec mon interlocuteur, je ne pouvais non plus tout déballer simplement sur sa demande. Ce n'était pas un problème de confiance mais plutôt que je souhaitais seulement garder pour moi certains avis. S'il souhaitait continuer la discussion, j'étais disposé à répondre à ses interrogations.

C’était une chose étrange que faisait là le jeune Toshiro ! A peine accosté par un individu – certes mondialemet connu mais quand même – étranger qui lui demandait du feu sans faire usage des marques de présentation habituelles, il n’hésitait pas à ouvrir son cœur et à confier ses opinions politiques et ses revers de cœur ! Était-ce l’un de ces Ninjas sensibles, davantage attaché à ses sentiments et à ses élans du cœur qu’à son Devoir de Ninja et d’homme des Ombres ?! Suna avait déjà plusieurs fois souffert de ce genre d’individus, et il lui serait quasi-fatal de se retrouver derechef impliqué dans ce genre de problème. De plus, Ogami venait clairement d’énoncer sa retenue quant aux actions récentes de son supérieur hiérarchique, en raison de la défiance du Daimyo à son encontre. Avait-il seulement réalisé qu’il venait de faire ces confidences à l’homme envisageant une alliance durable avec le Sable Caché ? Était-ce vraiment la meilleure stratégie lors de cette rencontre secrète mais néanmoins capitale ?

L’Empereur était resté silencieux, préférant laisser le temps à la réflexion. Un moyen de faire planer la pression sur son jeune interlocuteur ? Si ce dernier réalisait le sens de ses propos, serait-il gêné ? Se confondrait-il en excuses, ou serait-il prêt à se battre pour défendre ses idéaux personnels ? Le ton du Kamui, caverneux et forcé, semblait indiquer de la frustration, voire une certaine colère envers le Sunajin.

~ Le Ninja est avant tout un soldat. Un homme qui jure de combattre, et de mourir pour les Siens. Il ne soulève pas de question sur sa hiérarchie ou sur ses intentions. Son Devoir est triple : il doit se battre pour démontrer sa fidélité ; il doit se battre pour défendre sa patrie ; et il doit se battre pour mourir, afin que son exemple soit repris par les générations qui s’inspireront de sa vie ! Il n’y a aucune autre Voie pour le Shinobi !

Des réprimandes ? Sans doute ne pouvait-il pas accepter de voir les racines d’und dissidence dans les rangs de son futur allié et ancien élève … . Alors qu’il recherchait la stabilité à l’Ouest, pour porter son regard et ses projets vers l’Est, craindre une nouvelle conflictualité dans les terres alliées ne servirait plus les intérêts de l’Empire. Si une telle menace devait planer, alors sans doute vaudrait-il mieux ne pas conclure cette alliance.
Mais son teint s’éclaircit d’un étrange sourire, et d’un léger penchement de tête en direction du haut gradé.

~ Mais ceux qui peuvent exercer leur Devoir tout en montrant une Voie nouvelle ne sont pas de ceux qui condamnent le Ninja auprès des autres. Faire grandir ses espoirs, afin de porter une nouvelle Mission peut être l’un des rares privilèges que le combattant d’expérience peut s’offrir. Et dans ses prérogatives, le fait de pouvoir partager son opinion et s’ouvrir à autrui devient alors précieux.

Ce n’était finalement qu’une simple boutade ! Certainement pour tester les nerfs du jeune guerrier. Était-ce devenu coutume pour le sexagénaire de torturer mentalement, fort probable ! Mais maintenant qu’il avait clairement exprimé sa pensée, il avait démontré qu’il ne se ferait pas le porteur de sombres présages au sein de l’équilibre fragile du Vent. Ce Pays connaissait déjà bien des troubles. S’il devait retrouver sa puissance d’antan, il devait pour commencer par se retrouver, se réorganiser et se fixer un objectif. Et s’il fallait passer par de plus douloureuses étapes … et bien, le Shukaï en avait connu de même.

~ Les Daimyos sont par nature des êtres faibles. Malgré leur statut privilégié et leur éducation, ce sont des hommes reposant avant tout sur le prestige et la politique. Leur faiblesse les oriente vers l’usage de moyens détournés : c’est ainsi que sont nés les Villages Ninjas il y a bientôt une décennie … . Au cours de leurs shogunats, nombreux sont ceux qui se sont illustrés par leur égoïsme, voire leur cruauté. Les Seigneurs de Tori et de Taki préféraient employer les soldats du Shukaï l’un contre l’autre ; le Daimyo de Nami réduisait sa population à la misère totale ; et votre Daimyo actuel se détourne de vous pour préférer la puissance du Feu … . Et pourtant, rien ne semble les inquiéter ! Car c’est une autre arme dont ils jouissent et disposent … celle des relations ! Tant qu’ils se trouvent un allié, un secours, une offre qui puisse servir au mieux leurs intentions, ils peuvent encore être considérés comme gagnants de la partie. Les Seigneurs féodaux de l’Alliance n’avaient rien à craindre, tant qu’ils bénéficiaient du soutien des autres Pays-membres ! Et le Daimyo de Kaze n’aura pas à s’inquiéter s’il peut compter sur Konoha … .

Le Dernier des Kirijins marquait clairement sa différence avec Ogami. Pourtant, il ne semblait pas être inquiet ! Il prenait pourtant le risque de perdre un soutien de choix en la personne du numéro 2 de Suna ! Il tira une bouffée de sa kiseru, et porta son regard vers son interlocuteur Sunajin.

~ Ogami … si tu veux contribuer à la renconstruction de Suna, tu dois toi aussi développer ces réseaux de relations qui porteront le nom de Suna et de Kaze à l’étranger. Il te faut un réseau d’information et de communication puissant, qui jouera en ta faveur et t’apportera reconnaissance et soutien.

J'étais bel et bien un soldat, un homme respectant au mieux la hiérarchie de notre organisation militaire. Je me revoyais dans sa description, je me battais corps et âme afin de rendre meilleur mon pays. Je suivais la voie du Shinobi à mes yeux, autant que mes frères. Si je remettais en cause les décisions et l'autorité de mes supérieurs ce n'était pas sans raison, je ne le faisais pas pour obtenir du pouvoir, je ne le faisais pas par plaisir-.. Enfin, je n'étais tout de même pas prêt à me confier à mon interlocuteur de cette façon. Je préférai garder pour moi certaines idées, certains projets. Cela dit je prenais en compte son avis et ce sur les différents points qu'on abordait au fil de la discussion. Un homme de son âge qui portait aujourd'hui le titre de Kamui ne pouvait que m'apporter au travers de son expérience. Si nos avis divergeaient, ce n'était pas très important puisque j'étais plus enclin à écouter un homme comme lui.

Néanmoins son expression faciale laissait présager une certaine colère. Une chose qui aurait pu un temps m'impressionner mais aujourd'hui ce n'était plus le cas. Il avait voulu me faire passer un message, un message que j'avais entendu. Je baissai légèrement la tête en avant et les yeux fermés, je décidai de prendre la parole.

«  Je suis un Shinobi et ce depuis quelques années maintenant. Mon seul but est de servir mon pays comme je l'ai promis en acceptant d'arborer les couleurs de l'organisation militaire de Kaze no Kuni. Mes devoirs ? Je veillerai à les accomplir jusqu'aux derniers instants. Sachez-le. »

Dis-je simplement avant d'écouter la suite, il me donnait sa propre définition du Daimyo et exposant quelques exemples. Il en était venu aisément à parler de la nôtre qui ne rentrait malheureusement pas dans le cas qu'il m'avait présenté ; Cette fille était loin d'être une privilégiée, elle avait en quelque sorte gagnée sa place. Je la respectais tout de même pour avoir investi beaucoup d'énergie dans Kaze, malheureusement elle s'était laissée guider par les mauvaises personnes et aujourd'hui l'étendue du pouvoir de la capitale se voyait peu à peu être réduite. Il marquait un point cela dit, les liens qu'elle entretenait avec Hi no Kuni pouvaient nous desservir, c'était un fait. L'Empereur avait parlé à plusieurs reprises de notre dirigeante. Il n'avait donc l'air de ne pas approuver ses agissements, c'était compréhensible et en même temps je ne pouvais m'empêcher de penser qu'il défendait d'autant plus son point de vu sur le rôle des Daimyo.

Le sujet me semblait être clos puisque nous avions tous deux exposer notre avis. Il en vint alors au nerf de la guerre, au bien le plus précieux en ce monde : l'information. Pour contribuer au renouveau de mon pays, il m'évoquait la possibilité d'élargir mes relations, tout comme les Daimyos pouvaient le faire. J'étais actuellement bien placé en tant que dirigeant du Kakumeigun pour créer un réseau, j'en détenais déjà plus ou moins un avec nos nombreux indicateurs mais le développer se trouvait être une très bonne option.

«  En effet, les informations sont des biens très précieux... Si vous m'en parlez, c'est sans honte que je suppose que vous souhaitez le développer vous aussi ? C'est en effet un projet intéressant si nous parvenons à réunir le plus d'informations possibles et à les communiquer facilement entre nos organisations. Si c'est bien de cela dont vous voulez parler, sachez que je suis tout ouïe. »

Je marquai une pause de quelques secondes en détournant mon regard pour finalement observer le paysage.

«  De plus, notre alliance naissante ne pourrait qu'être renforcée si nous décidions de collaborer. Dans cette optique, je suis ouvert à toutes propositions. »

Il m'avait fait part de son projet et ce n'était pas par hasard qu'il avait engagé cette conversation. Cet homme n'agissait pas sans réfléchir, il avait donc sûrement un projet très complet à me présenter. De ce fait, si cela pouvait aider mon pays, ça ne pouvait qu'être une bonne chose.

Le jeune Sunajin voyait où l’Ancien voulait en venir. Tant mieux, cela prouvait qu’il n’était pas un crétin, et qu’il était prêt à coopérer ! En rencontrant des hommes de valeurs, celui qui crée une alliance sait à quoi s’en tenir : ce qu’il peut attendre de ses alliés de demain, ce qu’il peut leur proposer, et la sincérité de cette nouvelle unité.

Inutile de se le cacher, le Kamui préférait assurer ses arrières. Même s’il ne le dirait pas à voix haute, l’Empereur jugeait le Village du Sable profondément instable. Et cela, non pas par sa situation actuelle ; mais bien par les évènements successifs depuis la fin de la Guerre d’Indépendance ! L’Homme Masqué, l’assassinat de Zanshi Habashi – qui serait toujours vivante !, l’élection étrange du précédent Yamada, l’attaque du Kaïho-Sha pendant un Examen international, sans oublier les nombreux dangers qui n’étaient pas tous encore neutralisés, et enfin cette querelle entre pouvoir temporel et pouvoir de l’Ombre ! Rien à dire, Suna était un bel exemple de cacophonie sans chef d’orchestre … .

Si ce Village aujourd’hui isolé était prêt à intégrer un réseau d’information à large échelle permettant de se transmettre des informations et d’agir promptement et intelligemment en fonction de celles-ci, il serait alors encore possible pour lui de se hisser à sa hauteur passé, et de prétendre une nouvelle fois à rivaliser avec les puissances adverses.

~ Je souhaite effectivement que Suna intègre un réseau plus large, en profitant des informations et connaissances impériales … . Mais tout ne peut pas passer par ton Kage – il a déjà beaucoup à faire, je me demande même s’il ne se laisse pas dépasser. Pour cela, son Second doit être capable de le soutenir en lui apportant toute nouvelle et information critique capable de l’aider à agir avec rationnalité. Si l’Empire et le Vent échangent leurs informations et leurs connaissances, nous pourrons promettre une paix durable à l’Ouest du Yuukan.

Un beau rêve, n’est-ce pas ? Tout dépendait maintenant de la forme que devait revêtir ce réseau d’informations. Comment il devait communiquer, comment il devait s’organiser et avec quels objectifs.

~ J’attends de ce réseau qu’il assure une pleine sécurité à nos intérêts individuels et collectifs. Le Shukaï se voit affronter un adversaire encore difficile à identifier, mais dont tout porte à croire qu’il s’est créé dans votre Pays … . Un mouvement anarchique appelé le « Kyomu » souhaitant ma mort et la fin de l’Empire. Nous avons également des difficultés avec Kumo, Village belliqueux, toujours prompt à faire la guerre sans réelle raison … . Je voudrais informer de toute entreprise de leur part afin de vous contacter, et ce quel que soit le motif de cette rencontre … . Il va de soi que nous en ferions de même vis-à-vis de Konoha et du Feu … .

Situation complexe ; car pour l’heure, cela signifiait que les deux puissances de l’Ouest devaient faire front commun, ou au moins renseignement uni. N’était-ce pas une forme d’ingérence dans les affaires du Sable ? L’équivalence était égale, puisque le Shukaï agirait dans le même sens ! Mais ce premier point était nécessaire pour établir une confiance durable entre les deux groupes paramilitaires.

~ Dans un deuxième temps, certaines informations et nouvelles de base se doivent d’être transmises en priorité. La situation et l’équilibre du Village, la stabilité politique du Pays et les besoins éventuels lorsque la situation se fait pressante. Nous devons également déterminer avec ton Kage si la justice sera commune vis-à-vis des criminels de chacun. Car les traîtres ne peuvent errer en toute liberté et avec notre bénédiction … .

Le transfert de la liste des déserteurs était monnaie courante pour les soldats de l’Ombre. Entrainer, former et envoyer des agents en mission pour qu’ils se retournent finalement contre vos propres intérêts était l’une des situations les plus critiques qu’un Kage ait pu affronter.

~ J’ai également d’autres idées, mais davantage en rapport avec votre commanditaire principal, le Daimyo de Kaze. Je suis particulièrement intéressé par votre dernière réalisation … un transport unique, permettant de traverser de longues distances sans connaître la fatigue, d’après ce qu’on m’a dit … !

Je représentais Suna au vu de mon rang, je devais donc faire attention à quel chemin je souhaitais emprunter aux côtés de l'Empire. Ils avaient beau être nos alliés, un réseau d'information pouvait aussi nous causer du tort. Même dans une collaboration aussi certaine, je souhaitais être prudent. Il en valait de la sécurité de la nation de conserver certains secrets et indices. Malgré cette petite prudence, il n'en restait pas moins que ce projet ne pouvait apporter que du positif pour l'Empire et Kaze no Kuni. Un outil de cet envergure allait nous aider à éradiquer les différents maux de cette terre. L'homme cita alors le Kyomu, l'organisation criminelle... Je voyais où il voulait en venir et il avait raison d'évoquer cette menace. Tôt ou tard nous allons être amenés à les combattre, ce n'était qu'une question de temps et le jour venu.. il faudra être prêt. Notre réseau ne pouvait que nous avantager dans cette prochaine lutte, c'était évident-... Concernant la diplomatie et les relations étrangères, mon interlocuteur souhaitait être prévenu si le village militaire de Kumo venait à prendre contact avec nous. J'écarquillai les yeux quelques instants et attendis la suite, en échange il voulait aussi faire de même avec le village de la feuille.

Ça ne me semblait pas dérangeant de nous prévenir mutuellement de possibles approches diplomatiques. C'était même logique au vu de notre lien, notre alliance se devait d'être forte et ces petites choses ne pouvaient que contribuer à la pérennité de celle-ci. Je ne voyais pas de raison à refuser sa proposition.

«  Bien, nous vous préviendrons en cas de contact avec Kumo. Soyez en sûr Kamui, nous tiendrons parole. Ce n'est qu'une simple formalité qui viendra nouer d'autant plus notre alliance, n'est-ce pas ? Si tel est votre souhait, alors il sera respecté. »

Dis-je avant d'écouter la suite de ses paroles. L'homme me demandait de nombreuses informations quant à la situation politique de notre pays, nos actions vis-à-vis des déserteurs-.. J'étais d'avis de faire ployer le genou aux traîtres, réellement. Je n'avais aucune préférence à ce jour concernant les méthodes, je souhaitais seulement traîner devant la justice ceux qui avaient osés nous trahir. Vint ensuite un autre sujet. Il ne connaissait à première vue pas le terme que nous avions décidé d'utiliser pour nommer cet engin mécanique. Nous l'avions appelé le « train » et en découlait des mots techniques pour qualifier tout ce qui touchait de prêt ou de loin au train. C'était une révolution technologique sans équivoque et une fois développée, elle pourrait même être utilisée dans le monde entiers. J'esquissai un sourire avant de prendre la parole.

«  En effet, on ne vous a pas menti Kamui. On appelle ça « un train », un engin mécanique spécialement conçu par les Saibogu. Ce train poursuit un itinéraire précis autour de notre pays et s'arrête à certains points qu'on nomme des « gares ». Actuellement il est utilisé à des fins civiles et ne transporte aucune marchandises militaire. Il est très fréquenté et même si dans un pays où certaines traditions pouvaient aller à l'encontre d'un tel projet, la personne à l'origine de ça n'est autre que Kawaguchi Tsukiko. »

Je marquai une pause de quelques secondes. J'avais choisi de terminer en évoquant la dirigeante de Kaze no Kuni puisque mon interlocuteur avait aussi abordé ce sujet. Il fallait savoir que trois acteurs avaient participé à l'élaboration du train. Les premiers n'étaient autre que les Kawaguchi, vint ensuite Kaze no Kuni et les Toshiro, mon clan. L'empereur était donc tombé sur la bonne personne pour parler de cela.

«  Elle a utilisé son influence et son pouvoir afin de réunir trois entités, Kaze no Kuni, les Kawaguchi et les Toshiro. À l'aide des moyens financiers de chaque partie, nous avons pu faire en sorte de créer ce train. Étant moi-même le dirigeant de ma famille, j'ai su guider les miens dans ce sens. Nous avons investi, ce qui représente un risque mais... cette technologie en vaut bien la peine. Je peux vous l'assurer. »

Le Kamui du Shukaï voulait sûrement établir un nouveau partenariat? Si c'était le cas, j'étais disposé à l'écouter.

L’échange s’engageait sur d’excellents termes. De toute évidence, les deux hommes trouvaient leurs comptes dans ce projet d’alliance qui se tissait entre le Sable et l’Empire des Pays Neutres. Si cela pouvait se concrétiser avec le représentant national de Kaze, ca n’en serait que de meilleur augure ! Mais pour cela, une autre opération serait certainement à établir … . En attendant, il fallait avant tout trouver des bases militaires et garantir le renforcement de la faction « Ordre » pour que prospère ce beau et noble projet pourtant tenu secret … .

Dans les rivalités auxquelles les deux partisans devaient faire face, on pouvait dire que chacun aurait du pain sur la place. Entre Suna face à la Feuille, et l’Empire face aux Nuages, et chacun ayant son compte de déserteurs, d’opposants et de troubles de l’ordre public, ils avaient beaucoup à faire. En unissant leurs forces, ils parviendraient bien à couper les ponts et les entraides étrangères, à saborder les plans dissidents et à défaire leurs ennemis. L’échange des listes de blacklistés serait un premier pas bénéfique. Une mise en contact régulière serait tout aussi intéressante, évidemment.

La création de cette nouvelle machine, aux talents mystérieux et au nom de baptême étrange – un « trein » ?! – pourrait sans doute garantir une plus grande aide au profit économique et à l’activité du Pays du Vent. Si l’Empire pouvait bénéficier d’une telle chose, ses intérêts n’en seraient que doublés, et sa réputation serait plus grande. Attentif à ce que lui dévoilait son interlocuteur, Kakeshuou Samui laissait malgré tout son esprit vagabonder sur les avantages potentiels que son Parti pourrait tirer d’une telle machinerie. L’ensemble n’en demeurait pas moins un mystère : il n’y avait bien que les Saibogu pour autant en découvrir à travers la science machiniste. Pour un profane comme l’Empereur, aucune chance de parvenir à la construction de tels engrenades.

~ Je suis effectivement curieux sur l’usage de ce … « trein ». S’il pouvait être installé à l’échelle de l’Empire, il n’y a aucun doute que les bénéfices et les avantages en seraient grandis et considérables …. . Ha – évidemment, ce n’est pas nécessairement ce que j’attends, je me doute bien qu’une telle technologie serait dure à obtenir, même à travers une alliance. Et cela ne la rendrait pas plus simple à maîtriser … .

Un brin de sagesse, comme pour limiter sa propre avidité. Le Kamui se doutait bien qu’à trop en espérer, il se placerait non plus comme un allié, mais comme un suzerain exigeant quelque chose de son sujet. Et il fallait à tout prix éviter ce genre de mauvaise impression avec les plus hauts représentants de Suna pour l’heure. Tirant un nouvelle bouffée sur sa kiseru, la fumée alla danser quelque instant avec l’air frais, avant de disparaître à ses yeux.

Non loin, derrière lui, une ombre se rapprochait. C’était une figure haute, frêle mais pas nécessairement faible. Un grand guerrier aux habits sombres et longs, certainement un épéiste étant donné son attirail. Sa présence attira le regard du vieux briscard. Un signe de tête ? La réunion va reprendre. Il était donc temps de laisser là cette tranquille discussion, et d’en retourner à des sujets plus sérieux et plus complexes.

~ Ogami Toshiro … un bon aide de camp, j’espère que nous aurons l’occasion de nous revoir dans ce monde en paix … .

Sur cette simple parole d’adieu, l’homme frappa de son poing sur sa poitrine avec deux doigts tendus – signe impérial nouvellement mis en place par la propagande officielle – et accompagna cela d’un signe de tête avant de retourner sa kiseru pour en vider les cendres. Il était temps de reprendre le débat, et de solder une fois pour toute cette alliance avec le Sable.

Un nouvel atout dans son jeu. L’Empereur se rapprochait pas à pas de son but.

→ Fin de l'intermède, retour sur : "Concrétiser d'anciens projets"

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