Quatorze heures quinze ne sonna pas. L'horloge accrochée dans la cuisine de Natsuki ne sonnait jamais, pour la simple raison qu'elle n'était pas dotée de cette fonction. Mais cela ne l'empêchait pas d'accomplir son travail, à savoir indiquer l'heure. Tout au mieux, elle émettait un discret '' tic-tac '' régulier qui emplissait le silence. Un silence très fréquent dans sa maison. Les deux propriétaires légitimes, à savoir ses parents, étaient rarement présents, et lui-même qui en avait officieusement hérité, se montrait régulièrement absent. Parfois de corps, souvent d'esprit. La serrure cliqueta.

La porte d'entrée s'ouvrit, et offrit le passage à Natsuki qui la referma une fois son seuil franchit. D'un geste, il lança depuis le vestibule une large enveloppe brune qui tournoya dans un mouvement lisse avant de se réceptionner sur la table de la cuisine. Déchaussé, il gagna le lavabo de la salle de bain, où il trouva ses médicaments. Iji les lui avait prescrit, lui les pensait inutiles. Mais comment le prouver d'une meilleure manière qu'en suivant sa prescription ? '' Il ne faut pas oublier de prendre ses médicaments quand l'on est malade. '' disaient les infirmiers à l'hôpital. Combien de fois avait-il déjà entendu cela ? Il passa un peu d'eau sur son visage, et rejeta les mèches de ses cheveux bleu terne en arrière. Ce qu'il vit dans la glace le dégoûta. Il laissa tout retomber.

Quatorze heures trente. Nozomi ne devrait plus tarder. Il lui avait donné rendez-vous chez lui à cette heure-ci, suite à une demande – exigence – de la part de Miko : celle d'intégrer la nouvelle arrivante dans son équipe shinobi nommée Matsudaï. Pourquoi demander cela au pire des formateurs dans la pire des équipes qu'ait connu Konoha ? Sans doute parce que la Hokage n'attendait pas de sa part qu'il procure à la Myouga une formation complète sur tous les plans afin qu'elle devienne un parfait petit soldat de la Feuille. Non, tout ce qu'il avait à faire pour elle était de s'assurer qu'elle s'intègre bien dans son nouveau Village, et surtout qu'elle comprenne comment celui-ci fonctionne. En d'autres termes, qu'elle comprenne '' la Volonté du Feu ''.

Toutefois, si Nozomi était inscrite d'office dans Matsudaï, cela ne la dispensait pas d'un entretien d'admission, même si celui-ci avait plus ou moins déjà eu lieu. Natsuki avait déjà pu avoir un aperçu des valeurs que défendait la jeune femme le premier jour qu'elle avait passé à Konoha, lorsqu'elle avait dîné en sa compagnie. Des valeurs et une manière de penser, de voir le monde qui lui avait plu. Car si lui était ouvert d'esprit, il ne concevait cependant pas d'enseigner à quelqu'un dont les idées et la manière d'aborder le monde qui les entouraient étaient drastiquement opposées aux siennes : avoir un étudiant ne se limitait pas à lui apprendre des techniques après tout. Il y avait tout un ensemble de valeurs, de philosophies qui se transmettaient et se partageaient au fil d'expériences communes. Entendre en permanence '' blanc '' lorsque l'on ne pensait que '' noir '' ne pouvait pas aboutir à de bons résultats – même si cela pouvait être enrichissant à court terme.

Contrairement à son premier entretien pour le recrutement de la Matsudaï 2.0, celui de Nozomi était prévu en individuel, sans la présence de ses futurs équipiers, et ce essentiellement pour des raisons techniques. Leur présence aurait été souhaitable, mais Okasaki n'était pas disponible, et Rioko pas encore recrutée officiellement – c'était en cours, mais les événements du Pays du Bois avait retardé tout cela, même si ce Rp se passe avant l'envoie des troupes là-bas.

Natsuki se laissa tomber sur la banquette de la cuisine, et frotta ses cernes d'un geste las. Le plus difficile, ce n'était pas faire semblant de sourire, ou d'avoir l'air convaincant : c'était de vivre en ce demandant qui était le véritable soi, et si l'on avait fait le bon choix.

L'avenir ne répondait en général que toujours trop tard.

Ce jour là, Nozomi était de repos. Elle travaillait beaucoup à l'hôpital mais avait tout de même quelques jours de libres dans la semaine. Ce qui arrangeait bien la jeune femme qui en profitait alors pour prendre du temps pour elle-même : elle continuait de s’entraîner, allait aux sources chaudes ou bien elle se penchait sur le « cas Natsuki ». Depuis qu'Iji l'avait mise dans la confidence, elle passait la plupart de son temps à réfléchir à une solution à ce problème.

Les notes posées devant elle, elle les relisait encore une fois. Bien qu'à force, elle les connaisse par cœur. L'envie d'aider était bien présente, les résultats moins. Arrivait-elle à aider son patient, cette fois-ci ? Ou bien est-ce qu'elle échouerait comme avec Seitô ? Bien qu'on ne pouvait pas vraiment dire qu'avec lui ça avait été un échec. Elle avait désiré le sortir de sa solitude, elle avait réussi. Mais elle était restée la seule personne avec qui il avait pu enlever son masque. Un semi-échec. Hors de question que l'histoire se reproduise. Elle trouverait.

Natsuki lui avait donné rendez-vous chez lui, certainement pour parler de ça. Ils ne s'étaient pas revus depuis ce jour là. Peut-être voulait-il connaître ses progrès. Malheureusement elle n'avait pas grand chose à lui dire. Elle rangea ses notes à leur place habituelle, puis se dirigea vers la salle d'eau. L'endroit était petit, et ne comportait que deux pièces : une chambre et une salle de bains. Il fallait dire aussi qu'elle n'avait toujours pas prit le temps de chercher un autre endroit où vivre. Elle y songeait souvent, mais ne franchissait jamais le pas. Peut-être que malgré tout, elle ne désirait pas vraiment s'installer à Konoha et que l'idée d'être dans un logement réservé aux voyageurs lui plaisait. Mais la raison la plus probable était qu'elle avait peur de s'installer, de s'attacher à tous ces gens. Les deux fois où elle s'était installée quelque part, ça c'était mal terminé...

Une fois propre, elle sorti de la douche et en quelques mudras son corps et ses cheveux furent secs, et l’excèdent d'eau atterrit dans le syphon. Une pulvérisation de son parfum, un coup de brosse dans les cheveux, ses vêtements habituels : elle était prête. Elle retourna dans la pièce principale pour prendre Haru et sorti de la chambre, ainsi que de l'auberge.

Le Nara tatoué habitait dans le quartier de son clan. Elle n'avait pas eu l'occasion de beaucoup mettre les pieds dans cette partie du village. Ni même dans aucun quartier de clan, d'ailleurs : elle ne faisait partie d'aucun. Elle était déjà une étrangère au sein du village, alors il était plutôt exclus qu'elle aille se promener dans ce genre d'endroit. Elle suivit les indications qu'il lui avait données. Son chaperon lui avait aussi montré les différents quartiers lors de sa visite et elle avait retenu certaines choses.

Un bruit caractéristique lui indiqua que son ami avait trouvé un repas. L'animal mangeait sa proie. Nozomi évitait soigneusement les alentours du quartier Aburame lorsqu'elle sortait se promener avec Haru. Ce qui signifiait la plupart du temps qu'elle passait à l'extérieur, se séparant rarement de lui. Elle avait toujours peur qu'il mange l'un de leurs précieux insectes. Qu'arriverait-il à son compagnon si ça arrivait ? Est-ce qu'il arriverait à digérer ce type d'insecte gorgé de chakra ? Sans parler du fait que le clan ne risquait pas d'être ravi... Comment pourrait-elle arriver à expliquer que son animal avait mangé l'un des leurs ? Ça devait pourtant certainement arriver parfois. Les ninken des Inuzuka devaient gober ceux passant sous leur truffe, du moins se l'imaginait-elle. Même si ces chiens là étaient plus intelligents que la normale, ils restaient tout de même des chiens.

Ils arrivèrent bientôt vers l'endroit désiré. La jeune femme ralentit le pas, il était inutile d'arriver trop en avance. Elle profita du paysage. L'environnement à Konoha était vraiment plaisant, surtout pour quelqu'un ayant vécu la majorité de sa vie à l'extérieur. L'air était agréable à respirer, les bâtiments pas trop haut ne cachaient pas la vue et les arbres plantés partout dans le village donnaient l'impression de vivre dans une foret. Jamais elle n'aurait pu vivre dans un endroit sans aucune végétation tel que Suna. Les deux compères s'arrêtèrent devant l'une des portes du quartier. La jeune femme vérifia que le nom correspondait bien à celui qu'elle cherchait, ou plutôt le prénom. Car le nom de clan était le même dans toutes les maisons alentours. Elle réfléchit quelques instants à quoi pouvoir lui dire lorsqu'il lui demanderait ses progrès, puis finalement frappa à la porte. Elle verrait bien le moment venu.

Natsuki s'arracha sans regret à ses rêveries lorsque des coups résonnèrent contre sa porte d'entrée. Une porte éprouvée par les frappes d'innombrable visiteurs, vu qu'il n'avait toujours pas changé la sonnette défaillante – depuis quoi, six ans ? - , mais pour le moment moins entamée que la précédente, laquelle avait mal vécu sa rencontre avec une sauvage aux cheveux roses. Que de souvenirs.

« Bonjour Nozomi. » lâcha-t-il sans autre forme de cérémonie en la découvrant de l'autre côté de la porte. « Je vous attendais. »

Il ne se donna pas la peine de jouer un rôle comme la première fois qu'ils s'étaient rencontrés, aux Grandes Portes. Maintenant que Nozomi était au courant de sa situation, il n'avait plus à s'épuiser à se cacher derrière un masque. Et quelque part, c'était dommage pour elle, car même si c'était plus simple pour le Nara tatoué d'être tel qu'il sombrait plutôt que de faire semblant de ressembler à ce qu'il était avant d'être malade, cela faisait de lui une compagnie guère plaisante...

Ses yeux fatigués passèrent de la jeune femme à son caméléon qu'elle portait à l'épaule. Il était à peu près sûr que l'animal lui rendit un regard clairement méfiant. Natsuki n'avait pas le tact avec les animaux. Il pouvait tromper les humains, même si certains étaient plus réceptifs que d'autres, mais il ne pouvait pas cacher sa réelle nature aux bêtes, qui réagissaient à son aura soit par la fuite, soit par l’agressivité. Cela dit, il ne craignait pas grand chose, surtout de la part d'un saurien : seulement les conséquences qu'un '' affrontement '' pouvait avoir s'il devait éclater. Les Inuzuka par exemple apprécieraient moyennement qu'il passe leurs chiens à tabac si ces derniers en venaient à lui sauter à la gorge sans avertissement.

« Venez entrez. » proposa-t-il en s'écartant du pas de la porte. « Il y a une table et des chaises à l'intérieur, inutile de rester sur le pallier pour discuter. »

Natsuki la fit entrer, déchausser, puis traverser un couloir propre et rangé pour atteindre la cuisine. Si c'était lui qui s'occupait de l'entretien général du domicile à l'époque, il avait depuis longtemps fait sous-traiter cette tâche à un employé. C'était fou ce que l'on pouvait faire passer en missions de rang D à Konoha. Et cela garantissait aussi l'efficacité du concerné : sans être une célébrité, il s'était taillé un nom dans le Village qui ne donnait pas envie de décevoir.

« Installez-vous ici. » désigna-t-il de la main la banquette qui faisait l'angle de la pièce autour de la table.

Comme au final, il n'avait pas préparé grand chose, il assura rapidement le couvert en déposant sur la table de l'eau et du jus de fruit, une boite de pâtisseries sortie du réfrigérateur et deux verres – dont aucun devant lui. Suite à quoi, il s'installa et fit le service pour son invitée, en ignorant parfaitement ce qu'il devait servir à un caméléon.

« Votre temps est sans doute précieux, aussi je vais tout de suite entrer dans le vif du sujet. » commença-t-il après avoir visiblement prit sur lui pour ne pas s'exprimer en un ton qui tendrait à faire croire qu'il lui reprochait d'exister. « Si je vous ai demandé de venir me retrouver aujourd'hui, c'est sur demande du notre Hokage. Elle souhaiterait que, pour faciliter votre intégration à Konoha, je vous inclus dans l'équipe shinobi nommée Matsudaï – Éternité - dont je m'occupe. »

Il marqua un temps de pause pour laisser à Nozomi l'occasion d'assimiler l'information.

« Je sais que vous n'êtes ni kunoïchi, ni mercenaire, et notre Hokage aussi est au courant. C'est d'ailleurs pourquoi le but de cette inclusion ne va pas être de développer vos compétences et vous entrainer afin que vous deveniez apte à survivre sur un champ de bataille – surtout que cela, vous avez déjà prouvez que vous en étiez capable. Le véritable objectif va être de vous enseigner et de vous transmettre ce qu'est '' La Volonté du Feu '' de Konoha. »

Il ignorait s'il avait réussit à bien rendre les majuscules à l'oral.

« Vous êtes libre de refuser cette offre, je ne vous contrains à rien, mais si vous la déclinez, sachez que ce n'est pas à moi qu'il faudra rendre des comptes. »

Il passa son annulaire sur l'une de ses cernes, puis attrapa l'enveloppe marron qu'il fit glisser d'une pichenette vers Nozomi.

« Si vous acceptez, vous trouverez là-dedans toute la paperasse nécessaire pour rendre officielle votre intégration au sein de Matsudaï. Vous pourrez garder le stylo si vous voulez. »

Il était plutôt chouette, l'embout faisait de la lumière quand l'on appuyait dessus. Mais ce n'était pas le sien, il s'était servit sur le bureau du fonctionnaire qui lui avait remit les documents en question au Palais du Hokage.

« Cela dit, quel que soit votre choix, la Volonté du Feu est un concept que vous devrez connaître si vous souhaitez faire partie intégrante de Konoha. »

Une légère inflexion de sa voix, perdu quelque part dans sa phrase entre le début et la fin, laissait subodorer que c'était quelque chose qu'il valait mieux qu'elle souhaite.

« Comme cela à chaud d'ailleurs, avez-vous la moindre idée de ce que c'est ? »

La question n'était pas piège, il ne comptait pas dévorer Nozomi sur place si elle répondait mal ou par la négative. Pas pour cette raison, tout du moins...

La porte s'ouvrit sur le jeune homme tatoué, qui la laissa entrer chez lui. Elle répondit à ses salutations et y ajouta un sourire, comme à son habitude. Quand la porte se referma elle attendit qu'il lui montre le chemin à emprunter, en regardant avec curiosité l'endroit où il vivait. Une maison donnait des informations sur la personne qui y résidait. Que ce soit avec des bibelots entreposés, sur le désordre qui y régnait ou au contraire une propreté extrême. Elle ôta ses chaussures et le suivit jusqu'à la cuisine, où il la fit s'installer. Elle prit donc place, Haru toujours perché sur son épaule, et le regarda faire.

- « Merci. »

Elle n'avait aucune idée si c'était par politesse ou pour conserver les apparences, mais il s'occupait bien de son invitée. Lui offrant à boire et à manger. A moins que ce ne soit pour qu'elle ait meilleur goût. Elle aurait également put difficilement se défendre, coincée comme elle l'était derrière la table. C'était perturbant d'avoir ce genre de pensées, au lieu de profiter du temps passé ensemble. Comme lors de leur dîner, qui avait été agréable.

Il prit la parole tandis qu'elle portait le verre de jus de fruits à ses lèvres. Ainsi, ce n'était pas pour connaître le résultat de ses recherches qu'il l'avait faite venir. Ni même pour une volonté personnelle. Il voulait qu'elle intègre son équipe, et elle deviendrait ainsi son élève. Enfin plutôt, on lui avait demandé de l'intégrer. Et il lui fit clairement comprendre que cette décision ne venait pas de lui. Miko en avait décidé ainsi. Le but de ceci ne serait pas de l’entraîner aux arts shinobis mais de lui enseigner la « Volonté du feu ».

- « Ho... »

Un peu surprise, elle ne sut que répondre sur l'instant présent. Une équipe, devenir « vraiment » shinobi. C'était tellement nouveau, tout ça. Elle posa les yeux sur l'enveloppe qu'il lui faisait passer, sans pour autant faire le moindre geste vers celle ci. C'était un tout autre engagement que celui d'être médecin à l’hôpital de Konoha. Puis elle releva le regard vers lui lorsqu'il lui posa une question.

- « Pas vraiment, non. »

Pourtant elle ne serait jamais Konohajin à part entière sans savoir cela. Du moins d'après ce qu'il lui en disait. Et elle était venue ici pour cela, pour s'intégrer.

- « J'imagine que c'est une sorte de volonté commune, partagée entre tous les membres du village ? »

C'est ce à quoi ça lui faisait penser, en tous cas. Avant qu'il ne lui explique, elle poursuivit.

- « Mais... C'est Miko qui vous a demandé cela ? Et vous, qu'est-ce que vous en pensez ? Je ne voudrais pas m'imposer à vous contre votre volonté... Une nouvelle fois. »

Iji l'avait déjà intégrée de force dans l'équipe pour soigner son patient, et l'avait mise dans la confidence concernant quelque chose qu'il n'avait certainement pas voulu partager. Et maintenant c'était Miko qui lui imposait une nouvelle fois sa présence sans qu'il ne le choisisse, le mettant devant le fait accompli. A ce rythme, il allait finir par être lassé de la voir s’immiscer partout dans sa vie. Ce qui ne l'aiderait pas à refréner ses pulsions meurtrières qu'il avait en la voyant. Ou bien il allait la détester, chose qu'elle ne désirait pas. Comment pourrait-elle espérer s'intégrer dans un village si la personne qu'il l'y avait accueillie ne l'appréciait pas ?

La proposition de Natsuki fit naître la surprise sur le visage de Nozomi, ce qu'il ne manqua pas de relever. Cela l'avait été pour lui aussi à dire vrai : la jeune femme était sympa, il trouvait dommage que Miko la force à se faire frapper par la malédiction – laquelle rappelons-le fait disparaître dans des conditions mystérieuses les joueurs incarnant le personnage qui intègre son équipe du jour au lendemain sans avertissement ni préambule. Mais bon, c'était ainsi, il n'allait pas discuter les demandes de son Hokage – pas celle-ci tout du moins.

« Bonne déduction, quoi qu'un peu facile. » répondit-il à la tentative de Nozomi de deviner ce à quoi correspondait la Volonté du Feu. « Il s'agit effectivement d'une volonté commune, bien qu'elle tienne davantage de la philosophie de vie. C'est assez difficile de mettre des mots dessus, car les variantes sont nombreuses, propre à chaque Konohajin, et qu'elle se vit davantage qu'elle ne s'explique, mais dans la racine commune, il y a l'acceptation de son prochain. Konoha est un Village, mais avant tout, ses habitants ne forment qu'une seule et même Famille. Au delà de la frontière des quartiers, des clans et du sang, chaque Konohajin m'est lié tout comme je le suis auprès de chacun d'entre eux. Pour le moment, vous avez beau commencer à vous trouver une bonne situation à l'hôpital, à vous faire une place dans l'équipe médicale et vous intégrer au sein de la vie du Village, vous ne serez jamais perçu autrement que comme une étrangère tant que vous n'aurez pas acquit cette façon de penser. »

Acquérir n'était pas le terme exact, mais il avait déjà utilisé '' intégrer '' dans sa phrase : cela aurait fait répétition.

« Je ne dis pas que ce sera vite fait, qu'au bout d'un mois ou deux ça y est, vous serez l'incarnation de la Volonté du Feu. Même avec les bonnes dispositions que vous avez, ainsi que votre amour pour la vie, cela prendra probablement des années, peut-être plus. Mais quand ce sera fait, vous serez considérez comme une véritable Konohajin, indifféremment de ceux qui ont grandit et baigné dans cette culture depuis leur naissance. Vous deviendrez une sœur qui nous sera liée avec bien plus qu'une arme : une volonté. Je serai un frère qui vous défendra et vous épaulera de la même manière que si nous partagions le même sang. »

Difficile de croire qu'il pensait réellement ce qu'il disait, après l'avoir vu et entendu sur une table dans les quartiers d'Iji, et pourtant. C'était cette idée qui l'avait aidé à tenir. Cette philosophie en laquelle il avait toujours cru qui l'avait poussé à ne pas sombrer totalement dans la démence, à ne pas se laisser dominer par la présence qui l'habitait, et ce malgré tout ce qu'elle avait changé en lui, que ce soit son comportement, sa perception du monde, ou ses émotions. Il était un Konohajin, et s'efforcera de le rester jusqu'au bout, dusse-t-il aller à l'encontre même de ce qu'il était poussé à devenir.

« Quand à ma proposition de vous intégrer Matsudaï, oui, c'est Miko qui m'a demandé de lui rendre ce service. Non pas en tant que Hokage pour une fois, mais en tant que Famille. »

La fin de la phrase de Nozomi le fit presque sourire.

« Et sincèrement, je pense que le plus gros du mal a déjà été fait, si c'est là votre inquiétude. Mais nous avons déjà parlé de cela la semaine dernière, alors inutile de revenir dessus. Ce qui compte aujourd'hui, c'est votre décision d'accepter ou non cette offre qui vous est faites. Je ne suis peut-être pas la personne la plus qualifiée pour vous transmettre cet héritage du Premier Hokage, mais je suis parfaitement apte à le faire croire. Et si je considérai de vous avoir dans mon équipe comme une contrainte, sachez que vous ne seriez actuellement pas ici. De la même manière, vous devez voir cette offre comme une opportunité, et non une obligation. Si vous la déclinez, vous en aurez probablement d'autres. Peut-être même que vous serez capable d'intégrer la Volonté du Feu par vous même, seule. Ou peut-être que vous préférez simplement être une citoyenne de la Feuille, à jamais comme une étrangère vivant au sein de Konoha. Mais je doute que ce soit le cas. Vous n'auriez jamais accepté ce bandeau sinon. »

Il désigna du regard l'effigie gravée au centre de la plaque qui ornait le bandeau de tous les militaires Konohajin.

« Encore une fois, je ne ferai pas de vous ce que vous ne souhaitez pas être. La réciproque se vaut aussi. Alors en ce qui me concerne, je pense qu'il pourrait être profitable à nous deux de travailler ensemble. Si c'est un désir que vous partagez, vous trouverez le nécessaire dans cette enveloppe pour y parvenir. Si vous préférez vous débrouiller par vos propres moyens, si vous vous sentez capable d'y arriver seule, je n'en prendrai pas ombrage : vous connaissez le chemin jusqu'à la sortie. »

Il croisa mécaniquement les bras sur sa poitrine, et pencha légèrement sa tête sur le côté.

« Y'a-t-il d'autres inquiétudes qui parasitent vos pensées ? »

Assise confortablement, Nozomi écoutait parler celui qui se proposait d'être son sensei. Elle avait ainsi vu juste concernant la volonté du feu, mais une explication plus claire s'imposait. C'est ce que le tatoué fit, en lui exposant les choses. A l'écouter parler, ça avait l'air d'être une pensée positive partagée par tous les Konohajins. Et tant qu'elle n'aurait pas intégré cela, elle resterait toujours en marge de la société. Cette façon de penser devait donc également influer sur la façon de faire de ceux la partageant. Ce qui leur permettait de se reconnaître entre eux, d'une certaine manière.

Il poursuivit son explication, parlant de Famille. Les mains tenant nerveusement son verre, le regard dans le vide, elle l'écoutait sans broncher. L'idée de cette volonté commune était belle, c'était vrai. Un bien beau discours, des paroles alléchantes. « Les bonnes dispositions », « La personne que tu es », « Nous formerons une famille », « Nous serons des frères et sœurs d'armes ». Des phrases qui ressemblaient à ce qu'elle avait déjà entendu ailleurs, il y avait deux ans et demi de cela. Elle y avait cru, s'était investie. Mais le résultat n'avait pas été concluant. Et aujourd'hui voilà qu'on lui resservait les mêmes idéaux, à une sauce différente. L'issue serait-elle différente elle aussi, ou bien resterait-elle la même ?

Il en vint à lui parler du recrutement en lui-même. Elle fut soulagée de voir que personne ne l'avait forcé à le faire. Ainsi donc, il s'agissait de sa propre volonté, même si on le lui avait proposé. Malgré ce qu'elle savait de cet homme, il avait l'air d'être sincère et de penser tout ce qu'il lui disait. Son regard suivit le sien tandis qu'il jetait un coup d’œil sur le bandeau de Konoha. Ses paroles étaient convaincantes, mais il restait cependant une zone d'ombre. Et comme s'il lisait dans ses pensées, Natsuki finit par lui demander s'il restait des inquiétudes dans l'esprit de la jeune femme. Elle leva alors enfin les yeux vers lui.

- « Eh bien... Je dois dire que oui. Ce n'est pas par rapport à vous, au contraire. Vous êtes celui qui m'a accueillie ici, qui m'a fait faire mon interrogatoire et celui qui me connaît le mieux ici, à Konoha. Vous êtes donc le plus apte à m'enseigner quoi que ce soit. Et s'il y a bien quelqu'un qui peut devenir mon sensei, c'est vous. »

Si elle refusait sa proposition, il était inutile qu'on lui en refasse : personne d'autre ne conviendrait. Mais là n'était pas son inquiétude.

- « Et justement, vous savez où j'étais, avant... On m'a déjà proposé de faire partie d'une Famille, de partager une même volonté, les mêmes valeurs. J'ai accepté, et celui qui m'a proposé tout cela a tout fait voler en éclats. Il m'a... Trahie. »

Nozomi prit une gorgée du breuvage, avant de reposer son verre sur la table. Puis elle poursuivit quand elle eut terminé de mettre de l'ordre dans ses idées.

- « Comment je pourrais savoir que ça ne va pas se reproduire de nouveau ? C'est bien plus facile pour un village d'intégrer une seule personne que l'inverse. Qu'est-ce qui me prouve que tous ces gens vont me considérer comme l'une des leurs, si je me comporte bien ? Et en attendant que je partage cette... Volonté ? Qu'est-ce qui me dit que je ne risque rien ? »

Lui-même lui avait avoué qu'il pensait à la tuer depuis la première fois qu'il l'avait vue. Comment savoir qu'il ne passerait pas à l'acte ?

- « Et puis... Tout ce que j'ai toujours voulu c'était de protéger les gens, leur venir en aide. Et dans l'organisation, l'un de nos buts était de libérer les shinobis du joug des villages. De lutter contre le fait de devoir évoluer absolument dans le pays de naissance, sans autre choix que celui de se plier au village ou de devenir un déserteur traqué par sa propre famille. Pourquoi un Nara né à Konoha n'aurait pas le droit d'aller se battre pour Kumo, par exemple ? »

Elle se tut, réalisant qu'elle avait peut-être été trop loin et dit quelque chose qu'il ne fallait pas. Gênée, elle reprit au bout de quelques instants.

- « Pardon, je ne sais pas trop comment expliquer cela. Vivre à Konoha, c'est une chose. Mais intégrer une équipe, et se battre pour le village, c'en est une autre. En fait, c'est un réel engagement. Je crois que j'ai tout simplement peur de m'investir une nouvelle fois, et de trahir mes idéaux par la même occasion. Je ne pourrais plus aider n'importe qui, simplement les Konohajins... »

La jeune femme soupira, et reprit.

- « Je me suis déjà trompée, et je me sens stupide pour m'être engagée dans quelque chose qui était au final différent de comment je l'avait perçu. »

Nozomi prit une inspiration, et regarda Natsuki dans les yeux :

- « Comment savoir que cette fois-ci, je fais le bon choix ? »

Après tout, sa vie changerait encore d'avantage après cela. Elle avait déjà rejoint un village, alors qu'elle avait vécu en les évitant toute sa vie, et voilà qu'elle s'apprêtait maintenant à entrer dans une équipe shinobi alors qu'elle s'était toujours considérée comme médecin itinérant, rien de plus. Cela faisait au final beaucoup de questions auxquelles répondre.

La sagesse, c'est d'avoir des rêves suffisamment grands
pour ne pas les perdre de vue lorsqu'on les poursuit.

Quand Nozomi leva finalement les yeux vers son hôte, ce fut pour lui lâcher une bordée de questions nées d'une angoisse ayant pour origine sa mésaventure avec le Shoraizen. Des questions plutôt simples en elles-même, puisqu'il pouvait y répondre dans l'ordre sans se creuser longtemps la tête comme suit : Vous ne pouvez pas, rien du tout, personne. Toutefois, il avait bien conscience de ce qu'impliquaient ces questions pour la jeune femme, aussi il s'essaya à un discours plus riche qu'une simple exposition des faits.

« Il m'est avis que vous vous posez les mauvaises questions Nozomi. Je veux dire, vous faites bien de vous questionner, c'est tout à fait normal lorsque l'on est proie au doute, mais vous attaquez le sujet sous le mauvais angle. Quand vous vous occupez de soigner un blessé dans un état grave, comment est-ce que vous pouvez savoir qu'il va s'en sortir ? Qu'est-ce qui prouve qu'avant d'essayer vous allez être capable de réussir ? Et s'il se rétablit, qu'est-ce qui vous dit qu'il ne risque pas d'utiliser cette seconde chance pour nuire à son prochain ? »

Le domaine de la médecine pour illustrer ses propos parlera sans doute davantage à la jeune femme que d'autres exemples qu'il avait plus spontanément à l'esprit.

« C'est impossible de savoir si un choix est bon avant de l'avoir fait, et surtout, avant d'en avoir vécu les répercussions. En attendant, l'on ne peut que supposer, et imaginer. La véritable question, à mon sens, n'est pas '' comment puis-je savoir si ma décision est la bonne ? '', mais plutôt '' est-ce que je suis prêt à refuser une opportunité à cause de la seule crainte de la douleur qu'elle peut infliger ? ''. Je ne limite pas cette interrogation à votre intégration à Konoha, mais je l'élargis à votre avenir. Car au final, ce qui m'est dérangeant, ce n'est pas votre réticence à choisir de devenir ou non une Konohajin – cela c'est normal - , mais les raisons de votre réticence à décider tout court. Vous voyez-vous vivre dans le futur sans prendre plus aucun engagement, de peur d'être déçu ? »

Il lui laissa le temps nécessaire pour envisager cette perspective.

« Je ne pense pas que ma mère était certaine de vivre heureuse et aussi longtemps avec mon père, quand elle l'a rencontré pour la première fois. De la même manière, je n'étais pas sûr que c'était une bonne idée de demander de l'aide à Iji pour me soigner. Il n'avait pas l'assurance non plus que vous accepteriez de le soutenir plutôt que de vous enfuir quand il vous a invité dans notre salle de jeu. La vie est une succession de choix, qu'il faut trancher si l'on désire avancer. Autrement, l'on mêne une existance solitaire et sans saveur, à piétiner sur place. »

Plus Nozomi parlait, et plus Natsuki répondait par des questions destinées à lui faire voir le problème sous autre perspective. Celle de soigner '' simplement '' des Konohajin en faisait partie.

« Pour quelqu'un qui me disait qu'une vie est une vie, peu importe à qui elle appartient, je vous trouve très réductrice en enfermant les habitants de ce Village dans la case '' Konohajin. '' Car avant d'être citoyens de la Feuille, ce sont des hommes, des femmes et des enfants comme l'on en trouve n'importe où ailleurs. Des gens qui souffrent et meurent, il y en a partout dans le monde en ce moment même Nozomi, mais vous n'avez que deux bras. Vous ne pouvez pas sauver tout le monde. Quelle différence y'a-t-il alors entre soigner ceux qui sont ici, et aider ceux qui sont là-bas ? Ceci était déjà valable du temps où vous erriez à gauche et à droite. Atteindre une nouvelle destination, c'était s'ouvrir à de nouvelles occasions de secourir ceux dans le besoin. Mais pour arriver, il vous fallait bien partir de quelque part. Et quitter cet endroit, c'était vous fermer à la nécessité de ceux qui restaient. »

Il hésita un instant à lui faire part d'une annecdote personnelle, avant de réaliser qu'elle avait sans doute déjà vu ce qu'il y avait de plus honteux en lui. Il n'était plus à cela près.

« Quand j'étais plus jeune, je voulais être fort pour protéger le monde entier du mal. Rien que cela. Je savais aussi déjà que je n'arriverai jamais à atteindre cet objectif incensé. Beaucoup trop grand, beaucoup trop ambitieux. Mais je me disais que si je faisais tout mon possible pour parvenir à ne serait-ce que l'effleurer du bout du doigt un jour, j'aurai déjà accomplit énormément. Vous voyez où je veux en venir ? J'ai l'impression que dans le fond, vous êtes un peu pareil : vous voulez pouvoir aider tout le monde, tout en sachant que vous avez vos limites. Ne vous inquiétez pas, le Pays du Feu est bien assez vaste pour accaparer tout le temps que vous voudrez consacrer à sa population. »

Mécaniquement, il lui resservit le verre qu'elle avait entamé sans le finir.

« De façon plus terre à terre maintenant, accepter le bandeau de Konoha fait de vous une militaire, pas une soldat. En étant enregistrée comme médecin, vous n'aurez pas à '' vous battre pour le Village '', surtout si vous en êtes incapable. Vous l'avez peut-être oublié quand je vous l'avais dit, mais les shinobis ne savent pas que tuer : nous faisons aussi des missions humanitaires, de secours et de diplomaties. Je ne sais même plus si dans la chronologie de notre Rp, vous êtes déjà allée au Pays du Bois, ou si vous allez vous y rendre, mais n'importe comment, l'unique but de cette assignation est de venir en aide à une population touchée par une catastrophe naturelle, en leur prodiguant des soins et les moyens de se relever. Ces opérations sont bien plus nombreuses que ce que vous imaginez, aussi vous n'avez pas trop à vous en faire pour cela, vous ne serez pas cantonnée à '' aider simplement des Konohajin. '' - même si votre patientèle sera orientée, j'en conviens. Mais au final, quelle différence entre soigner ceux vers qui les demandes du Village vous dirigeront, et ceux que vous trouverez sur le bord d'un chemin ? Il y aura de toute façon toujours bien plus à accomplir que ce que vous parviendrez à faire seule. »

La suite était facile à dire maintenant qu'il savait, mais ce n'était pour autant qu'il comptait s'en priver.

« Et cela ne s'arrangera nullement au fur et à mesure que vous gagnerez en notoriété – ce qui arrivera, je n'en doute pas un seul instant. Que ce soit notre Hokage qui se tournera vers vous chaque fois qu'il lui manquera un morceau, une cheffe Sunajin qui aura besoin de votre aide pour réparer sa jambe boiteuse ou un assassin de Daimyo amputé qui voudra soi disant simplement discuter, de plus en plus d'individus du monde entier viendront vous rencontrer pour espérer bénéficier de vos talents médicaux : vous aurez le choix de votre patientèle, et elle ne portera probablement pas que du vert. »

Un peu comme Haru, qui changeait régulièrement de couleur.

« Mais je m'éloigne du sujet. Car je pourrai prêcher pour ma paroisse toute la journée, ce n'est pas cela que vous voulez entendre. Votre question, c'est comment savoir si vous faîtes le bon choix cette fois-ci. Ma réponse est : vous ne pouvez pas. A vous maintenant de voir, en fonction de ce que je vous ai dit, mais aussi surtout, en fonction de ce que voulez faire de votre vie. Prendre des paris en décidant, et continuer d'avancer, ou refuser de courir le risque des conséquences, et demeurer sur place. L'un dans l'autre, je n'attends pas de vous que vous m'apportiez une réponse aujourd'hui. Retenez simplement que le monde ne nous attend pas pour continuer de tourner. »

Il aurait pu aussi lui dire qu'entrer dans son équipe allait impacter si peu sa nouvelle vie, en comparaison d'avoir intégrer Konoha, et qu'il ne lui apprendrait que la Volonté du Feu, voire à survivre si les arts d'infliger la douleur et la mort à autrui ne l'intéressait pas, mais ce n'était pas le sujet qui tracassait le plus la jeune femme, aussi il ne jugea pas utile de l'aborder.

« Oh, tant que j'y pense, pour répondre à votre interrogation. Pourquoi un Nara n'aurait pas le droit de combattre pour Kumo s'il en avait envie. Je pense que ce n'est pas tant une question de droit, mais d'envie. Vous devriez demander à Kadoria Sho si vous voulez l'avis d'un connaisseur dans ce domaine, mais pour ma part, en plus d'être persuadé du bien fondé des intentions de mon Village, si je me bats pour Konoha, c'est parce que ma famille est ici, et que j'ai le souvenir de l'avoir aimé un jour. »

S'il avait bien comprit la réelle dénonciation dans la question, il s'était gardé d'y répondre sérieusement. Car au final, chacun était libre de partir où il voulait : n'était considéré comme déserteur que celui avait déjà prit ses engagements avec Konoha avant de fuir.