La journée avait été chargé en émotion entre la mission diplomatique, la lettre surprenante de Yami ou encore une ou deux rencontres des plus intéressantes et riches en information, et elle souhaitait plus que tout en parler avec son compagnon de voyage. Malheureusement, Akuzu Shinji était introuvable et ne semblait pas donner davantage de signe de vie. C’est dont en tapant des doigts systématiquement et frénétiquement qu’elle patientait à l’une des tables du Marcassin Agité, seule auberge fréquentable de ce triste et gris pays aux potentiels industriels et militaires incroyables.

- Excusez-moi, auriez-vous vu un jeune homme portant le même bandeau que moi dans les environs ? Ou a-t-il éventuellement laissé une note à mon intention, Kawaguchi Tsukiko ? finit-elle par demander au dernier employé qu’elle n’avait pas pu interroger. Comme tous les autres, ce dernier répondit à la négative.

A nouveau les minutes s’écoulaient, et à nouveau la colère gronda dans son cœur. Elle se promettait de lui faire regretter tout dès qu’elle le verra : l’abandon de Yami, la lettre inappropriée pour le Raïkage ou encore cette façon étrange de disparaître sans un seul mot. Il se devait de comprendre qu’ils étaient en voyage et qu’ils se devaient d’être coordonnés afin d’éviter tout accident inutile.

Petit à petit, l’atmosphère du bar changea. Les murmures et chuchotis s’intensifièrent, les conversations s’animèrent, les visages s’assombrirent ou se figèrent dans la terreur … N’ayant pas de compagnon de conversation, elle était incapable de savoir ce qui se passait. Un très mauvais sentiment s’empara d’elle, et c’est la gorge sèche qu’elle interpella le même employé que tout à l’heure pour demander ce qui se passait.

- Cette femme là-bas, elle aurait découvert des morceaux de cadavres dans un coin isolé du pays. Et beaucoup de sang. Nous avons eu beaucoup d’ennuis avec les fous et meurtriers, notamment avec les Sabakyo par le passé, mais jamais d’un démembreur, finit par chuchoter le jeune homme, retournant à sa tâche.

Rigueur militaire oblige – mais également la peur d’une hypothèse – elle se dirigea vers la femme désignée. Elle avait une chevelure ébène et la peau pâle. Quant à son expression, elle incarnée la maturité et le calme.

- Bonsoir. Excusez-moi de vous déranger mais … pourriez-vous m’indiquer où se trouve votre « découverte » ? demanda-t-elle d’une voix étouffée. J’ai un ami avec moi mais … je ne le trouve pas.

Shinji était un génie pour débuter des combats sans queue ni tête. Il aurait pu énerver un Shinobi ou un fou-furieux et il aurait pu être capturé dans son inconscience ou impulsivité. Pas une seule fois, l’idée de la mort ne l’avait effleuré. La raison était simple : elle se refusait de le considérer comme mort. Il ne pouvait pas mourir et l’abandonner lâchement, il ne pouvait pas la quitter alors qu’elle avait la conscience lourde de l’avoir « rejeté » des négociations.

- Il est impulsif. Il aurait pu … Juste se battre avec la mauvaise personne. Un ninja errant ou un criminel … Ou peut-être que je m’inquiète pour rien.

Sa nervosité allait grandissante, sa rigueur disparaissait au fil des secondes et son expression sereine laissait place à une expression paniquée. Quant à sa respiration, elle était de plus en plus irrégulière en raison d’un rythme cardiaque de plus en plus rapide.

- Au temps pour moi. Kawaguchi Tsukiko, Shinobi de Suna. Je saurais garder mon sang froid devant la scène.


Si la scène ne concernait pas Akuzu Shinji, évidemment.

Assise à une petite table isolée, l’Aburame regardait la jeune femme se diriger vers elle alors que le tavernier l’avait montré du doigt. Portant le verre à ses lèvres alors qu’elle était à son niveau, Miko la salua d’un signe de la tête. Sa découverte ? Hmm elle en avait parlé à l’aubergiste il y avait de cela vingt minutes à peine qu’il répandait déjà la nouvelle. Signaler la scène sur laquelle elle était tombée ne lui posait pas de problèmes mais elle pensait au moins être partie avant que quelqu’un ne s’y intéresse réellement.

Bien sûr. Asseyez-vous. Vous avez un plan ? C’est au …

Marquant une petite pause en guise d’hésitation, la trentenaire jaugea son interlocutrice. Si elle pensait vraiment que son ami était la victime de la boucherie qui s’était déroulée dans le sous-bois qu’elle avait traversé … Ce n’était pas étonnant qu’elle semble si fébrile.

Vous savez quoi, j’peux vous y amener, ça sera plus simple. C’est à quoi … Cinq minutes en courant ? Par contre je vous préviens d’avance … Ce n’est pas pour les âmes sensibles. Miko au fait.

Tendant sa main à la demoiselle, elle se leva, finissant d’un trait son verre puis le reposa. Laissant quelques ryos sur la table en guise d’addition, l’Aburame fit signe à la Sunajin de la suivre, poussant la porte pour sortir.

Sans trop m’immiscer dans vos affaires, que fait une Sunajin à Ame ? Venez c’est dans cette direction.

Facile à savoir, elle avait laissé quelques insectes inspecter la zone, ne s’y attardant pas elle-même. Repérer ses insectes sur place n’était pas un soucis de par les phéromones que les femelles émettaient. La zone était une véritable boucherie. Bouts de corps, sang. Sans s’y atteler trop un détail l’avait dérangé mais elle attendait confirmation de la part de ses insectes avant d’en arriver à la conclusion qu’elle avait déjà envisagé.

Elle avait laissé l’info filtrer auprès de l’aubergiste pour qu’il prévienne les autorités Konohajins. Elle n’aurait pas pensé retourner sur place dans l’immédiat et surtout avec une kunoichi de Suna. Et si son ami était bel et bien la victime, nul doute que les relations entre les deux pays risquaient d’en être quelque peu entachés. Jetant un coup d’œil vers la blondinette alors qu’elle courrait à ses côtés, Miko la jaugea à nouveau. Aurait-elle les tripes ? Nouveau coup d’œil, cette fois au niveau de ses poignets. Elle pouvait sentir une concentration de son chakra à ce niveau … ֤Étrange.

Tsukiko blêmit à la première phrase de l’inconnue. Le « Au cas où » interrompu ne présageait rien de bon et ne faisait que l’emplir d’horreur. Blêmir était un véritable euphémisme face à la nouvelle teinte que la blonde adopta contré gré et instinctivement. Pouvait-on dire blafarde ? Pale comme un fantôme, comme les fesses d’une femme – ou d’un homme – nordique ou comme la face de la lune ? Cependant, pouvait-on la blâmer ? Comment ne pas réagir aussi excessivement quand la demoiselle prétendait que ce n’était pas pour « âme sensible » ?

- Cinq minutes. Très bien, répondit-elle d’une petite voix rauque et grave.

Durant le trajet, la Kawaguchi observait à peine les environs, et écoutait à peine les propos de la demoiselle. D’ordinaire observatrice – maîtresse dans l’art des Illusions oblige – la blonde ne remarqua pas une seule seconde le regard inquisiteur de l’inconnue au niveau de ses poignets. Ele était bien trop Perturbée pour se rendre compte de ce genre de détails, et la tête un tantinet ailleurs, par conséquent elle ne répondit que vaguement – sans prendre garde à ses mots – aux questions.

- Une mission. Avec un Konohajin.

Les missions en collaborations avec d’autres villages étaient rares. Cela pouvait sous-entendre plusieurs choses. Les villages étaient alliés et en très bon terme, ou les villages avaient trouvé un intérêt commun. Dans les deux cas, ce n’était que du bon pour les acteurs principaux et –peut-être – du mauvais pour d’autres. Par le passé, les Alliances inter-village eurent le don de créer des conflits ridicules comme la fameuse guerre de l’Indépendance.

- Arrivons-nous bientôt ? demanda-t-elle, ayant oublié toute cette histoire de mission. A cet instant, elle se fichait que Suna et Konoha soient alliés ou ennemis, ou qu’elle soit en mission ou non. Tout ce qui l’importait à cet instant était la sécurité de son coéquipier et partenaire de voyage.

Elle avait l’impression que les cinq minutes étaient une éternité – ou alors des secondes – et que la route était pavée d’une matière visqueuse et lourde, la ralentissant toujours plus. Dans les faits, c’était elle qui ralentissait dû à un corps toujours plus rigide, toujours plus tremblante. Finalement, et enfin, les cinq minutes s’étaient écoulées et le trajet s’était terminé.

La scène qui lui fit face la laissa sans voix. Elle ne pouvait en détourner les yeux, ni en pleurer, ni en être dégoutée ni en rire. Elle était « subjuguée » devant cette horreur humaine – ou non humaine -, et persuadée de minute en minute qu’elle était dans un affreux Genjutsu. En effet, quel « humain » ou sorte d’homme serait capable de disséminer des bouts de cadavres partout, dans une mare de sang fraîche ou non – les sangs des morts vivants et celui de Shinji s’étaient mêlés, et n’offraient qu’un effluve métallique pourrie aux narines - ?

Sa gorge s’était asséchée, son corps engourdi, son esprit vidé … Elle ne savait pas quoi penser, quoi dire ou quoi faire. Elle aurait pu être neutre si elle n’était pas persuadée que Shinji n’y était pas mêlé. Or il y était. Elle voyait là un ou deux objets qui l’appartenait, tantôt son cache-œil antique, tantôt une lame souillée par le sang de ses adversaires.

- Shi…n ? finit-elle par dire, les yeux « presque » embués de larmes. Elle était incapable de pleurer, fatiguée d’avoir à pleurer une succession de morts ou d’échecs. Elle ne se contentait plus que d’une petite voix et d’un air scandalisé. Il est vivant. Il ne peut pas crever. Il est trop… bête pour ça, tenta-t-elle de se leurrer.

Elle finit par bouger pour aller s’isoler plus loin que cette scène.

- Je vais faire … un tour. Il doit être dans les environs ou … des indices dans les environs. Son épée est là. Mais… il a ses propres capacités pour se défendre. Il doit être quelque part. Je.. Je dois le retrouver. Je…

Elle lança un regard à ses bras. Plus que jamais, elle voulait se débarrasser de ses entraves.

- Savez-vous desceller ? Je dois … desceller ses bracelets. Je dois … le retrouver, répéta-t-elle telle une automate, farfouillant soudainement dans son sac. J’ai des Kuchy. J’en aurais. Ils peuvent fouiller. Ils peuvent … trouver.

Mais pour cela, elle avait besoin de son chakra. De la totalité.

Les insectes qu’elle avait laissé sur place revenant vers elle, l’Aburame redressa sa main à hauteur de son visage pour qu’ils puissent se poser dessus afin qu’elle recueille les informations qu’ils avaient récolté. Du bon travail. Un regard vers la blonde totalement perdue qui semblait avoir besoin d’un moment seule alors qu’elle s’éloignait, et l’Aburame concentra légèrement son chakra dans la plante de ses pieds afin de ne marcher sur le sang frais et ne pas de patauger dedans. C’était ce qui lui avait semblé. Des cadavres. Et de longue date d’après les insectes qui fourmillaient déjà dedans. Elle n’avait qu’une explication en tête : un nécromancien. Fût un temps où Konoha grouillait de ce genre d’individus. Elle-même s’y était déjà intéressée.

Arrivant à l’objet de sa convoitise, elle s’accroupit en face d’une tête livide et tranchée. Gants à l’appui elle ouvrit un peu plus la mâchoire et découvrit ce que ses insectes lui avaient indiqué : un doigt… et demi. Et pas de mort vivant cette fois. Probablement la victime. Invoquant un bocal, elle y glissa les indices et le referma. Rien d’autre de très intéressant sinon. Un cache-œil. L’ami de la blondinette était donc probablement borgne. Ramassant l’épée plantée dans un corps –probablement sa dernière attaque-, elle pêcha le cache-œil sanguinolent avec la pointe de la lame avant de le mettre également dans un bocal hermétique.

Non je ne sais pas réellement défaire les sceaux … Mais s’il s’agit de t’enlever tes bracelets c’est probablement possible.

La lame en l’air alors qu’elle la nettoyait avec un mouchoir en tissu tout en revenant vers elle les deux bocaux dans sa poche, elle en inspecta le tranchant et l’équilibre.

Une belle lame. De très bonne qualité même.

Lui tendant le katana, la poignée vers la Sunajin, elle se remit à parler presque insensible.

Tu devrais la garder, ou du moins la rapporter à ton village afin de la donner à sa famille.

Petite pause avant de reprendre.

Il est très improbable qu’il ait survécu j’espère que tu en as conscience. Peut-être vaudrait-il mieux que tu ne t’embarques pas dans ce genre de quête en vain, tu finirais déçue. Tiens. Je sais que ce doit être dur mais … probablement quelques choses qui te permettront de vérifier son identité.

Posant les deux bocaux à côté de la kunoichi, l’Aburame se concentra plus spécifiquement sur les bracelets. Pourquoi avait-elle ce genre de protection ? Peut-être avait-elle menti, peut-être était-elle une fuyarde de Suna. Ces menottes ne pouvaient être là sans raison.

D’où viennent ces bracelets ? Je ne sais pas si c’est vraiment une bonne idée que je me mêle à tout cela …

Miko finit par apporter le Katana de son « disparu » ami, complimentant la lame, et indiquant qu’il serait bon de la ramener auprès de la famille. Voilà des paroles qu’on ne prononçait que derrière un mort … Or, elle se refusait de croire que son compagnon était mort, qu’elle était la seule Sunajin sur tout Ame no Kuni ou encore qu’il avait trouvé son trépas au premier jour de ce long périple pour le bien de Suna et de Kaze réunis. Il n’aurait pas pu l’abandonner ainsi, surtout pas sans avoir eu à subir les foudres de la blonde sur ses dernières bêtises. Il n’aurait pas non plus laissé derrière tous ceux qui l’attendaient à Suna …

Tsukiko était très loin de connaître la vérité sur chacun. Elle ne savait pas que ce brun avait tué des enfants ou encore usé de Yami tel un objet. Elle savait encore moins la trahison de cette dernière à l’égard de Shinji avec un certain Yamada. Et elle était encore bien moins au courant de la rupture de ce petit couple étrange. Elle était encore bien ignorante de plusieurs choses … une Ignorance qui lui coûtait des sanglots et de la vie.

- Il n’y a pas à la garder ou la ramener auprès de la famille ! Il est toujours vivant et il doit attendre quelque part. Il doit être retenu. Au lieu de perdre du temps à parler, il faut aller le sauver, dit-elle d’une voix tremblante. Elle aurait voulu dire tout cela d’une voix assurée mais elle avait du mal. Si tu ne veux pas y être mêlée, va-t’en alors !

Elle arracha la lame des mains de l’inconnue enterrant Shinji un brin trop vite au goût de Tsukiko vivant dans un véritable déni. L’acte de déni était le fait de refuser une réalité et de vivre sans reconnaître cette dernière une seule seconde. A cet instant, la Sunajin ignorait cette scène pour aller s’enfoncer toujours plus dans la forêt pour trouver un indice ultime – salvatrice. Ce dernier arriva bien plus vite que prévu, sous la forme de bocaux, « offert » par la brunette.

Tsukiko ne voulait pas regarder. Mais elle se devait. Elle lança un regard dessus, pour aussitôt détourner ses yeux.

- Il vit. Ce ne sont pas … ses doigts. Ou il a dû les perdre en se défendant. Il doit saigner abondamment et s’il n’a pas été soigné … Il va. Non. Il est vivant. Il doit vivre. Il ne peut pas… nous abandonner. Je l’interdis , dit-elle d’une voix perdue, les yeux toujours plus embués de larme.

Tsukiko vivait dans le parfait déni, ignorant cette scène et toutes ses composantes, s’auto-persuadant que Shinji était toujours vivant et en bonne santé. Etait-ce de la folie ou une simple défense de son cerveau ayant déjà été bien malmenée par le passé ? Cependant, vivant ou non, cela avait engendré un déni dans lequel la demoiselle n’était guère méfiante.

- Ce sont des bracelets de Suna, dans l’optique de me protéger et protéger autrui. En aucun cas c’est dangereux pour quiconque.

Hormis pour elle vu que cela la mettait dans une situation de vulnérabilité des plus totales. Cependant, le flux de chakra « laissé » à la Sunajin était déjà bien plus important que les premières semaines de mise en place de ce dispositif mais toujours insuffisant pour l’élaboration de techniques importantes ou pour la liaison avec un pacte.

- J’ai … j’avais des soucis pour réguler mon chakra. J’ai demandé à un ami un dispositif pour m’aider mais … Je dois m’en débarrasser. Je dois retrouver Shinji, dit-ellle en tirant de toutes ses forces sur les bracelets.

Sans surprise, c’était peine perdue. Elle ne pouvait pas s’en débarrasser avant de retrouver un expert dans l’art des sceaux. Ou à moins qu’il n’y ait une alternative.

- Il faut que je le retrouve. Il a besoin de moi. Il doit … avoir besoin d’aide.

Malheureusement, malgré sa ronde aux alentours, elle avait à se faire à l’idée. Elle ne trouverait rien.

- Je dois retourner à l’auberge. Je dois avertir … Suna. Il me faut une équipe de recherche. Il me faut … un expert de Sceau. Il me faut … Il me faut … de l’aide. Il me faut … Kioshi … Kibo, finit-elle par dire, ne pouvant plus retenir le sanglot qui la secouait.

Le déni semblait être battu par sa logique – ou par son expérience des nombreuses annonces des défunts au cours de sa vie -, et petit à petit, les larmes commencèrent à voir le jour et à creuser des sillons sur ses joues. Plus que jamais, elle voulait se retrouver auprès de son équipe. Mais elle avait abandonné son chef d’équipe dans le désert et son coéquipier l’avait abandonné pour une région nordique. Plus que jamais, elle voulait quitter ce cauchemar éveillé qu’était la vie.

- Je dois … et sa voix se tut. Plus un « couinement » qu’une « parole ».

Lui administrant une gifle magistrale qui résonna à travers tout le sous-bois, l’Aburame ne laissa pas à la jeune Sunajin le temps de finir sa phrase. Sa crise de panique n’avait que trop duré. Et bien qu’elle n’était pas la mieux placée pour parler vu que la première fois qu’elle avait perdu un être cher au combat elle en avait pleuré plusieurs jours même si plus jeune, Miko prit sa mine la plus sévère. Dans un sens cette gamine lui faisait penser à toutes les élèves qu’elle avait eues et qu’elle avait essayé d’accompagner du mieux possible. Krystal, Mogura, Krystal et enfin Mizuki … Des gamines qu’elle avait tenté de transformer en femmes fortes. Imprudence, coquetterie trop prononcée, timidité … naïveté. Chacune avait ses défauts. Mais chacune avait également ses qualités.

Assez pour les lamentations ! Tous ces bouts de chair étaient des cadavres. Sais-tu quel genre de shinobi utilise et contrôle les morts ? Les nécromants ne sont pas connus pour simplement capturer les gens … Du moins pas les vivants !

Elles lui manquaient. Les autres jeunes qu’elle avait formés également mais plus en particulier ces quatre là. Elle avait connu la douleur d’en perdre certaines d’elles. Des coups toujours plus durs. Souffrir de la disparition de personnes à qui elle s’attachait... Elle comprenait la détresse de la blondinette en face d’elle. Mais elle ne pouvait pas non plus la laisser ici. Qui sait dans quel genre d’histoire elle serait prête à s’embarquer en perdant ainsi ses repères.

Je ne te connais pas mais je me doute que si ton village t’a envoyé en mission dans un autre pays en partenariat avec un autre village ninja, c’est qu’il doit avoir totalement confiance en tes compétences.

Posant sa main sur l’épaule de la gamine, Miko la regarda, à peine adoucie. Toujours tranchante dans la voix et ferme dans la poigne.

Il ne tient qu’à toi de rapporter la situation à ton village afin qu’il enquête puis de finir ta mission. Tu ne peux rien faire toute seule concernant ton ami. Surtout dans cet état. Est-ce que tu me comprends ? C’est le moment de montrer à ton village, à ton clan, à ta famille, à tes amis mais surtout à toi-même que tu es une femme forte. Tsukiko, je ne te demande pas ni te conseille d’oublier ton ami. Mais s’il a vraiment perdu la vie ici même, il n’y a rien d’autre que tu puisses faire si ce n’est lui faire honneur...

Se faisant plus douce elle continua.

Et si en effet il a survécu, laisse tes compatriotes s’en charger, ce n’est pas à toi de le faire… Tu n’y es pour rien…

Attendrissant sa pression sur son épaule, l’Aburame l’attira doucement à elle avant de lui poser ses mains dans le dos en guise de réconfort.

Ce n’est pas ta faute… Tu n’y es pour rien …

À vrai dire elle n’en savait rien mais elle n’avait pas de paroles adéquates autres que celles-ci. Elle savait qu’à chaque fois elle avait toujours envisagé être responsable des funestes nouvelles de ce type, trouvant toujours un détail qui pourrait justifier cette mort injuste et dont elle serait responsable. Un mauvais conseil, un mauvais entraînement, une mauvaise décision, elle s’était toujours reproché bon nombre de morts à cause de ces doutes sur ses actions passées. Mais était-ce vraiment de sa faute ? Était-elle vraiment la coupable ? Le monde shinobi était cruel et impitoyable … Laissant la gamine sangloter dans ses bras, elle la laissa là jusqu’à ce qu’elle se sépare de sa propre initiative.

Veux-tu toujours que je t’enlève ces menottes ?

Tendant ses paumes vers la jeune fille, elle fit calmement sortir ses punaises kikai de ses manches, ceux-ci infestant à présent les mains de l’Aburame. Ne restait plus qu’à attendre sa décision. Par ce geste elle lui montrait qu’elle avait confiance en son jugement. En espérant que la blonde avait maintenant elle aussi confiance en celui-ci.

Tsukiko s’était enfoncée dans un profond délire et déni, refusant toutes ces vérités qui lui sautaient à la figure. Elle savait que c’était l’œuvre d’un Nécromant car elle s’était déjà intéressée à cet art par le passé, dans le cadre de l’enquête de la mort des Conseillers – leur corps avait été introuvable. Elle savait tout autant que le corps de son ami, si capturé, n’était en rien à l’abri ou « vivant » mais bel et bien le nouveau pantin d’un fou-furieux. Doucement, mais sûrement, une haine féroce naquit à l’égard de tous les Nécromants de cette planète.

Jusqu’à maintenant, elle ne s’était contentée que de les trouver effrayant et immoral. Cependant, jamais, ô grand jamais, elle n’avait imaginé l’option de capturer des corps vivants pour en faire de futurs pantins cadavériques, ou pour les stocker dans une collection morbide. Dorénavant, face à ce fait, elle ne les craignait plus mais les haïssait tout bonnement.

La gifle des plus violentes de Miko qui avait laissé une merveilleuse trace rouge et nette sur sa délicate joue noyée par les larmes l’avait ramené à la réalité, et l’avait aidé dans ce raisonnement haineux. Elle voyait assez « clairement » pour savoir qu’un jour, elle retrouverait ce maudit nécromant et qu’elle le tuerait de ses propres mains. S’il y avait des hommes aptes à jouer avec les morts, il devait y avoir sûrement d’autres talents ou art cachés pour retrouver ces corps … ou parler avec son esprit.

La poitrine tremblante, les manches sans cesse trempées à tenter de sécher ses joues ravagées par les larmes, Tsukiko écoutait tant bien que mal le reste des paroles. Effectivement, elle était une Shinobi de Suna et elle se devait de respecter les procédures ou encore faire honneur tant aux disparus qu’aux morts. Elle n’était plus « seule », mais elle avait tout un village avec elle. Elle se devait de « travailler en équipe » et non « seule ».

- Je vais le faire , finit-elle par dire. Je vais … Appeler une équipe. Je les attendrai,termina-t-elle d’une voix toujours plus faible, à peine inaudible vers la fin.

Elle ne refusa en rien les bras de cette étrangère, s’y engouffrant pour pleurer encore, jusqu’à ne plus avoir de larmes. Ses sanglots redoublaient de force dès qu’elle entendait cette phrase magique : tu n’y es pour rien. Elle aurait voulu n’y être pour rien mais ce n’était malheureusement pas le cas. Tsukiko était la fautive de cette mort, ou disparition, car c’était elle qui avait exigé à ce qu’il quitte les négociations. C’était également sa faute de ne pas être partie à sa recherche tout de suite. Elle avait négligente et extrêmement faible.

Si elle avait eu ce fameux pacte de Kuchkyose, ses bêtes auraient pu l’avertir du danger que courait son ami. Au contraire, si elle avait eu cette fameuse sensorialité qui faisait tant la fierté du clan Kawaguchi, elle aurait pu ressentir de loin que son meilleur ami était en proie à un redoutable et haïssable adversaire.

Si elle avait été « forte », les choses auraient été différentes. Son maître n’avait pas cessé de tenter de lui faire entendre raison en répétant inlassablement que c’était son sable qui était son arme et non de stupides arcs ou lames ou Kunais. Elle avait été sourde.

Et elle en payait lourdement le prix.

- Oui. Je veux en être débarrassé. Pour toujours, conclut-elle.

Si elle était en colère ou triste et que le sable détruisait ou protégeait au gré du désir de sa manipulatrice, soit. Que chacun sache la craindre, ami comme ennemi – surtout ennemi. Plus jamais, plus jamais elle ne serait une pauvre fillette sans défense, à s’appuyer sans cesse sur les autres. Le nez plein de morves, les yeux gonflés et rouges, le visage pâle et blême et l’expression vide et fatiguée, Tsukiko tendit ses poignets.

Elle les retira soudainement. Elle regarda autour d’elle avec la gorge des plus sèches. Même si elle le voulait, elle ne pouvait pas se permettre tout de suite. Elle avait des choses à accomplir en excellente Kunoichi tout d’abord.

- J’ai à prévenir les autorités de Suna d’abord. Puis … mes amis. Pourriez-vous patienter que j’écrive ces missives ? S’il vous plaît.

Elle prit appui auprès de Miko pour se relever, et continuait à prendre appui sur la brune pour continuer son chemin jusqu’à l’auberge. Lorsque l’aubergiste vit le visage décomposé de la blonde, il ne demanda rien, les invita à la meilleure et la plus isolée table, offrant une bouteille même de la maison.

- J’ai besoin de papier et de lettres, demanda-t-elle. On accéda à sa requête aussitôt. Elle tenta d’écrire mais elle ne pouvait pas. Ses larmes tombaient comme de grosses gouttes sur sa feuille, diluant l’encre et par la même occasion toute la lettre. Je ne peux pas. J’avais à le protéger Miko. Et il avait à me protéger. On était des compagnons de voyage.

Elle posa sa plume pour poser ses poings sur son front, et fermer ses yeux. Enfin, écrire une telle nouvelle par lettre lui déplaisait. Elle aurait voulu amener la lame devant les proches ou la Kazekage elle-même, mais elle était la « fautive » de cette perte. Comment pouvait-elle regarder droit dans leurs yeux sans être assailli par un profond sentiment de culpabilité ?

- Il était … stupide. Et bagarreur. Mais il était bon. Il a toujours … Il m’a toujours aidé. J’ai commis mes pires bêtises comme mes meilleurs coups avec lui. Il était mon partenaire, mon allié, mon complice … Mon frère.

Elle n’éclatait plus en sanglot incontrôlable. Non, elle ne se « contentait » que de torrents de larmes.

- J’aurais dû … ne pas le quitter. J’aurais dû … mieux le protéger. J’aurais dû … être plus forte, dit-elle en se remplissant un verre qu’elle avait cul sec. Elle enchaina avec un autre. Deux verres pourraient être peu mais c’était des alcools forts consommés rapidement, l’estomac vide, suite à un long voyage et une journée pleine d’émotion. Elle ne tarda pas à être soul. Ma faute ! Je me suis entêtée avec ces stupides bracelets ! J’aurais pu le sauver si j’avais eu toute ma force ! J’ai eu peur de ce qui aurait pu le sauver ! J’ai été … stupide et égoïste ! Mon égoïsme l’a tué. C’est ma faute. La mienne. ET uniquement la mienne.

L’homme qui prétendait qu’une femme en larme était belle était sûrement le plus grand menteur de la planète. Un humain en pleurs était sûrement la chose la plus lamentable, la plus pitoyable et la plus horrible à voir. A part ressentir de la lassitude – pour ceux qui n’avaient cure – ou ressentir un profond mal-être – pour ceux un tantinet empathique -, il n’y avait rien d’autre.

- Je ne cesse de perdre des êtres chers ... , dit-elle avec un ton des plus sinistres et sombres.

La bouteille commençait à se vider, elle appela la serveuse d’un signe de la main et lui glissa quelques mots. Une ou deux minutes plus tard elle revint, une bouteille en verre contenant un liquide ambré sur un plateau et deux verres avec des glaçons. Quitte à faire passer ça, autant faire ça proprement et non avec la piquette que la pauvre petite avait commandé. Servant un fond dans chaque verre, elle lui fit glisser le sien alors que la gamine continuait de culpabiliser. Levant son verre en signe de toast, elle le but cul sec avant de les resservir. Hmmm bien plus fort que la bouteille précédente. Sa gorge était en feu mais ses papilles en émerveillement.

À Shinji !

Deux services, deuxième tour. L’alcool commençait à légèrement la frapper, sa résistance naturelle grâce à ses insectes commençait à faiblir. Sûrement qu’eux aussi commençaient à ressentir les effets de l’alcool. Sortant une chainette accrochée à son cou, elle l’ôta et la posa sur la table. Elle ne l’avait jamais montré à quiconque. Surtout le pendentif.

Tu n’es pas la seule petite à ne cesser de perdre des proches. Je devais avoir ton âge quand mon mari m’a quitté. Une mission qui a mal tourné … J’en suis devenue folle, rongée par la culpabilité et le chagrin, à me terrer aux yeux de tous. Je ne sais pas quel genre de relations vous entreteniez mais … je ne te conseille pas de faire comme moi. Beaucoup de temps de gâché pour au final pas grand-chose. Ça ne l’a pas fait revenir … La vie continue et il faut continuer d’avancer pas pour les morts mais pour les vivants … Enfin, ça, j’ai mis longtemps à m’en rendre compte … Disons que j‘ai toujours été un peu bizarre.

Laissant l’alliance accrochée à la chainette sur la table, elle se servit un autre verre. Trop de souvenirs étaient revenus. Mais bon, elle n’allait pas chialer comme la Sunajin. Au fil du temps elle avait appris à se forger une carapace, à refouler ses sentiments quand ils pointaient le bout de leur nez afin de ne pas se faire submerger. Écoutant la kunoichi qui commençait à plus que ressentir les effets de l’alcool, l’Aburame s’autorisa à sourire quand elle lui raconta que si elle était bizarre son ami l’aurait sûrement trouvé attirante vu ses goûts particuliers.

La laissant s’épancher sur des anecdotes à propos de son camarade, l’humeur à la table se faisait plus joyeuse. Bagarres, alcool, drogue, femmes. Un vrai rebelle … Et en plus de ça il était borgne ! Rigolant légèrement alors qu’elle lui racontait qu’il avait eu le culot de sortir une chicha lors d’une rencontre diplomatique en faisant croire qu’il s’agissait d’une tradition Sunajin afin de détendre l’atmosphère pendant les négociations, Miko finit son verre avant de se pencher au-dessus de la table légèrement histoire de prendre le papier, la plume et l’encre.

Bon on en oublie ta lettre, vas-y je vais écrire pour toi, tu ne m’as pas l’air en état … Qu’est-ce que j’écris ?

Trempant la plume, elle jeta un coup d’œil à la blondinette. Bon il allait falloir qu’elle bosse un peu…

La nouvelle bouteille commandée par Miko avait un goût bien plus prononcé que la précédente, et brûlait avec plus de force le palais de la demoiselle – et sûrement de la brune aussi. Cependant, cela ne dérangeait en rien Tsukiko. Au contraire, elle ne pouvait qu’en remercier l’inconnue.

- Il n’est pas ma première perte, commença-t-elle. J’ai déjà perdu ma mère à six ans. Mon grand-père à neuf ans. Ma grand-mère à onze ans. Mon père, je ne l’ai connu qu’à mes quinze ans mais considérons-le comme inexistant. Et aujourd’hui, à vingt-deux ans, cet ami. Dix ans s’est presque écoulée entre deux pertes chères … un record, conclut-elle sarcastiquement.

Elle se tut un court instant pour avaler une autre gorgée de ce verre, retrouvé un tantinet de calme.

- Je sais que la vie tourne. Je sais que j’aurais à continuer. Encore. Jusqu’à ce que tout s’arrête pour moi, finit-elle par dire. Mais ... on ne peut … pas s’empêcher.

Elle se tut à nouveau pour boire. L’alcool fit bien vite le chemin, et son cerveau bouillonna bien vite d’idées de conte. Elle racontait tout ce qui lui venait à l’esprit au sujet de Shinji. Le nombre d’enfants qu’il avait – oubliant de préciser que c’était des Orphelins recrutés pour rassembler des informations -, son goût trop prononcé pour les femmes – surtout les plus belles qu’il arrivait à avoir par on ne sait quelle mystérieuse méthode – ou encore sa capacité à rendre une mission toujours plus ardue. Un court instant, elle crut que Shinji passera par la porte, lui sourire et parler comme si rien de tout cela ne s’était passé.

Malheureusement, c’était impossible.

Elle fut interrompu dans son récit par Miko, désireuse d’écrire la lettre pour elle apparemment. Tsukiko ne put s’empêcher de serrer cette brune forte dans les bras, montrant maladroitement sa gratitude au sujet de ce service. En effet, à cet instant, bourrée ou non, la demoiselle était inapte à annoncer quoi que ce soit.

- Très bien ! On va z’écrire que deux lettreux. Pour la Kazekage, la Godaime Kazekage Habashi Zanshou … et pour son petit-copin, chef du Kaku, Yamaaaada Kioshi ! Bien ! Aloooors !

Elle souffla une ou deux fois, comme réfléchissant à une belle formulation. Peine perdue, tenant peu l’alcool, elle ne risquait pas d’avoir de merveilleuses idées.

- Chère Kaze ! La mission est un franc succès ! Konoha et Hi vont être nos potes normalement ! Faut juste rédiger les termes de l’alliance … pour conc .. concratizer. Concrétiser. Et sinon, avec toutes mes condoléances, votre élève est disparu. Des affaires à lui trouvé avec plein de bouts de cadavres. Une équipe de recherche à envoyer pour confirmer …

Elle se tut, la gorge nouée, incapable de dire « sa mort ». Elle espérait que la brune saura y deviner.

- Pour maître Kioshi, et elle commença à verser des larmes. Une équipe … de recherche. Et dire… que je reviens à Suna. Que j’ai besoin de le voir.

C’était sûrement, et peut-être, le plus apte à voir suite à un tel événement. Cependant, elle pourrait tout autant s’isoler, comme elle avait tant l’habitude de faire. Elle aurait souhaité cette option mais elle sentait les foudres de Kioshi de très loin … Elle voulait tout sauf énerver ses « rares » connaissances encore vivantes.

- J’veux pas voir personne. Mais il voudra. Il insiste toujours à savoir ce que ze veux, ce que ze pense … même quand ze veux rien dire. Il est chiannnnnnnnnt, finit-elle par dire en gonflant ses joues, les éclatant suite à un souffle, et reboire un coup.

Elle ne se rendait pas compte que ses paroles avaient été trop succinctes et qu’elles ne constituaient pas vraiment une lettre.

- Il voudra savoir ce que z’ressens. Je vais lui dire que c’est d’ma faute. Que j’ai tué un Sunajin. Un n’ami. Il me dira «NON ». Comme toujours. Mais j’ai fait ça. J’avais dit à Shinji de sortir, de me laisser avec … le Konohajin-machin. Il faisait n’importe quoi, à droguer tout le monde. J’aurais dû lui dire de rester. Il serait resté.

Et il ne serait pas mort.
Continuant à blablater sur son inutilité ou sa culpabilité, elle but encore et encore durant tout le chemin jusqu’à sa chambre. Elle réagissait à peine là où on l’avait déposé – sûrement sur le lit – et ne s’en rendit compte que plus tard. Aussitôt, une folle idée lui vint à l’esprit.

- Tu vas faiiiiire quoiiiii ? Pourquoiiii tu restes ?, elle se tut et soudainement ses yeux brillèrent d’une lueur noire, Je ne couche pas avec n’importe qui. Même si … on en a l’impression ! Si faut payer la bouteille … Je la paie en …. Argent ! Ryoooooooos ! Pas en natuuuuure !

Elle était tombée dans le bras d’une ou deux personnes à Suna mais elle « aimait » se convaincre qu’elle choisissait et qu’elle ne se laissait pas influencer par quelques envies d’ordre purement physiques. Se dire qu’elle n’était pas totalement pitoyable en plus de sa bâtardise.

Ahah cette gamine la tuait. Métaphoriquement parlant bien sûr. Trempant à nouveau le plus sérieusement possible sa plume dans le pot, l’Aburame légèrement souriante s’appliquait à écrire ce que la gamine lui dictait, s’autorisant quelques corrections quand c’était nécessaire tout de même. L’idée n’était pas de faire en sorte que la blondinette se retrouve humiliée pour avoir écrit un torchon bourré de fautes.

Chère Kazekage,

La mission est un franc succès. Konoha et Hi Suna et Hi no Kuni seront désormais alliés. Il faut peaufiner quelque peu les détails afin de concratizercrétiser tout ça. Cependant durant la rencontre, Shinji s’est absenté et après exploration je suis tombée sur les restes d’un combat où j’ai retrouvé certaines de ses affaires. Je suis désolée mais il semblerait qu’il soit mort. Pourriez-vous envoyer une équipe de recherche au Marcassin Agité afin de confirmer cette sinistre nouvelle ?

Kawaguchi Tsukikoo

Hmmm un peu trop pompeux sur la fin et beaucoup trop de ratures. Elle se rattraperait sur la deuxième.

Maître Kienchie,

Envoyez une équipe de recherche. Shinji est mort. J’ai déjà prévenu la Kazekage… Je vous expliquerai tout quand je reviendrai à Suna vu que vous insistez toujours pour que je vous raconte tout même quand j’ai pas envie de parler.

Bisous à bientôt,

Kawaguchi Tsukikoo

Pliant les deux lettres, elle les rangea dans des enveloppes, fit couler la cire en ratant un peu au début ce qui donnait un pâté assez sale et écrivit les deux noms. Soufflant un peu, elle se sentait déjà mieux, ses insectes bourdonnaient subrepticement à l’intérieur, par sûr que si elle les faisait sortir ils puissent tous voler droit. Souriant mais cette fois avec plus de malice quand la jeune femme aborda le fait de payer en nature, Miko tendit sa main droite au-dessus de la table et la posa sur la joue qu’elle avait giflé si fort un peu avant, avant de la laisser un peu glisser alors qu’elle plongeait son regard amusé dans celui de la Sunajin.

Qui a parlé de payer en nature ? Je t’avoue que j’espérais que tu accepterais de ta propre initiative, pas afin de rembourser une quelconque dette.

Caressant une nouvelle fois la joue endolorie, l’Aburame fit sortir l’un de ses frelons afin qu’il pique la jeune femme. Une dose suffirait vu l’état dans lequel elle était. Ses yeux papillonnèrent avant qu’elle ne s’effondre. Remplissant sa flasque vide avec ce qu’il restait de la bouteille, l’Aburame se leva, plaçant la jeune femme endormie sur son épaule comme un vulgaire sac à patate, prenant de sa main libre le sabre, les manteaux et les deux lettres. S’approchant du comptoir elle apostropha le tenancier afin de lui confier les deux lettres histoire qu’elles partent immédiatement avant de lui demander dans quelle la chambre la gamine résidait.

La montant à l’étage elle l’allongea sur le lit avant de se raviser et de la placer sur le fauteuil en face du feu. Dans tous les cas elle aurait un réveil difficile. Quelques courbatures en plus ou en moins … Fermant la chambre à clé, elle se débarrassa de ses affaires et décida de faire une petite sieste. Quelques heures le temps de digérer ne pouvaient pas faire de mal. Elle comptait s’arrêter ici bien plus longtemps mais ce n’était pas dans son intérêt d’attendre les renforts Sunajins et de servir de témoin oculaire. Elle avait suffisamment fait les baby-sitters pour aujourd’hui. Se glissant dans les draps elle ferma les yeux, sombrant sans surprise dans un sommeil profond assez rapidement.

* * * * *

Réveillée par ses insectes –eh oui, il y avait du bon à être une ruche vivante, le réveil était inclus dans le package-, elle se rinça la bouche décidément pâteuse. Se rhabillant chaudement, elle repoussa la couverture afin d’y glisser la Sunajin l’air de rien comme si elle avait dormi seule toute la soirée. Dehors la nuit était déjà noire mais elle ne pouvait se permettre d’attendre le matin. Ame était un territoire en étroite collaboration avec Hi no Kuni et cette affaire risquait de faire bien plus de bruit qu’elle ne l’aurait cru.

Remettant le manteau et tout le matériel de la jeune femme, dont elle avait eu la bonté d’alléger la tenue pour dormir, elle s’arrêta dans son geste avant de commencer à fouiller dans les poches de la jeune fille. Farfouillant un peu elle n’y trouva malheureusement rien d’intéressant … Hmmm … L’arc, des parchemins d’invocations … Pas génial vraiment … Se servant dans sa bourse quelques piécettes mais pas suffisamment pour qu’elle s’en aperçoive vraiment, l’Aburame retourna vers la blondinette. Elle avait presque oublié. Prenant ses mains dans les siennes, elle incita ses punaises Kikai à sortir et à remonter jusqu’aux menottes. Ce serait relativement facile. Le sceau n’avait pas l’air très élaboré. Il se basait apparemment sur la présence d’un chakra étranger, et en se débarrassant de celui-ci le sceau alors plus approvisionné en chakra cesserait de fonctionner.

Ses insectes s’attelant à la tâche, ils en eurent pour une bonne minute. C’est que les sceaux étaient tournés vers les poignets et elle ne pouvait y glisser que quelques insectes. L’opération finie, elle se tourna vers la porte puis se retourna, glissant sa main dans le cou de la kunoichi avant d’y déposer l’un de ses scarabées de la taille d’un pépin de pomme. Celui-ci s’infiltra sous la peau de la gamine jusque dans son organisme. Elle ne perdrait pas la pleureuse de vue ainsi. Épongeant du doigt la goutte de sang qui allait perler, l’Aburame sortit enfin de la pièce, descendant l’escalier avant de s’adresser au barman pour lui commander un bon repas chaud et lui signaler qu’il n’avait qu’à tout mettre sur la note de l’émissaire. Une rencontre intéressante au final …

- Non et non Madame ! Je ne paie pas la Charit… La voix de Tsukiko perdit en puissance suite à la piqûre inattendue d’un frelon. Tiens … ils ont … des insect… dans ce pa…

L’Aburame avait injecté une petite dose pour endormir la Kawaguchi mais voilà bien un geste inutile. La journée avait été rude pour la blonde entre le voyage de la veille dans le désert du Pays du Vent et sous la pluie du Pays de la Pluie – deux climats extrêmement opposés -, les négociations avec les émissaires du Pays du Feu, la journée de recherches de Shinji – avant qu’elle ne découvre cette macabre scène – et la découverte de ce dernier. Il lui suffisait seulement de poser la tête sur un coussin pour aussitôt s’enfoncer dans un profond sommeil, digne de la Belle au Bois Dormant.

Cependant, et voilà la différence entre ce sommeil artificiel et le sommeil naturel, elle n’était pas embêtée par des cauchemars terribles et oppressants, apportant plus de fatigue que de repos pour la demoiselle. Ainsi, et pour la première depuis de longues semaines, elle put apprécier un sommeil sans cauchemar, sans rêve, sans interruption inutile … Un sommeil profond, et paisible. Et réparateur.

Tant dû à l’injection que dû à cette intense fatigue, elle remarqua à peine qu’on la transportait d’un lieu à un autre, ou encore qu’une petite bête de la taille d’une graine avait élu demeure à l’intérieur même de son corps. Elle n’en ressentit ni la piqûre ni la confortable niche qu’il s’y faisait. La seule chose qui la dérangeait, éventuellement, était un simple grattement à ce niveau-là. Par contre, si elle fut à peine gênée par cette intrusion, son sommeil ne se fit que plus agiter au fur et à mesure que les insectes aspiraient tout le chakra au poignet, et que le bracelet se retrouvait être devenu un simple bracelet.

Elle ouvrit les yeux lorsque Miko quitta la pièce même. Malgré sa volonté de se lever, et poursuivre cette brune, elle ne pouvait pas. Elle était dépourvue de tout chakra, ce qui l’enveloppait d’un profond engourdissement et endolorissement de tous les membres. De plus, entre les courbatures et la gueule de bois, elle était tout simplement incapable de faire le moindre geste sans vomir pitoyablement.

- Shin … dit-elle naturellement, oublieuse des événements de la veille quelque seconde. Cependant, contrairement à d’habitude au lendemain d’une belle cuite, ni Shinji ni une connaissance n’était dans les environs. Plus important, elle n’était pas à Suna mais à Ame.

Elle se souvint aussitôt de tous. Et aussitôt des larmes coulèrent à nouveau, elle se recroquevilla longuement, et termina cette merveilleuse inactivité en se traînant à même le sol jusqu’à la salle de bain pour vomir tripe et boyaux. La sensation de vider un estomac vide était décidément bien plus écœurante et douloureuse que vider un estomac trop plein … Cette acidité ne fit qu’accentuer sa misère, et elle continuait à pleurer.

Sa journée ne s’était résumée qu’à pleurer. Et elle aurait continué ainsi si l’un des employés ne toqua pas à sa porte pour aussitôt glisser une petite lettre. Peu curieuse, mais habitude militaire oblige, elle ne tarda pas à récupérer la lettre portant le sceau de Suna. Sans un mot, ni expression, elle plia le bout de papier dans un coin, se dirigea à nouveau vers la salle de bain pour nettoyer. Tout. Les larmes, la fatigue, le vomi, l’écœurement …

- La vie … continue.

Elle attendit les équipes, afin d’apporter sa propre aide pour les recherches. Malgré les divergences d’opinions et les tensions entre les équipes de Suna et d’Ame, les deux étaient parfaitement en accord avec la conclusion de l’enquête : c’était l’œuvre d’un Nécromancien, et il a dû sceller – comme tant d’autres de ses confrères et consœurs – le corps dans un parchemin. En somme, il était impossible de déterminer la position du meurtrier – la pluie avait effacé toute trace et odeur – et encore moins de poursuivre un corps scellé dans un parchemin.

Akuzu Shinji était mort. Et son corps n’était plus qu’un jouet entre des mains sordides.

- Je les déteste.

Tous ces manieurs de vie, et de corps, et de sépulture. Elle les haïssait plus que tout dès ce jour même. Pire … elle commençait à en vouloir aux Shinobis dans leur totalité. Perdre sa famille dans les champs de bataille, voir son seul cousin aimé déserter dû au système Shinobi, apprendre qu’une Alliance entière d’un pays avait été violé par la volonté d’un seul Shinobi – voire plusieurs - ou encore assister à une autre divergence et perversion des Shinobis comme ce Nécromancien « Mystère » étaient tout simplement trop d’éléments.

Plus que jamais, Kawaguchi Tsukiko était perdue. Et dégoutée.
Avec un arrière-goût amer, elle retourna à Suna.

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