(Désolé de l'attente )

Attends, c’est pas moi qui était en train de poser les questions ? Je veux dire, à quel moment j’ai paru être faible, ou propice à la conversation ? C’était sexiste en plus : une fille seule dans les bois, oulala, mais si j’avais été un mec, pas de soucis, promène toi, je t’en prie.
Et puis ce « Tu es en mission ? ». J’ai pas le droit de me promener, d’aimer la nature et la solitude ? D’aimer les doux embruns hivernaux émanant des arbres de mon pays ? Bah non, une fille seule dans la forêt en pleine nuit, c’est forcément qu’elle est en mission. Et pas toute seule, hein, sinon, mon Dieu malheur !

Bref, j’étais donc en mission et pas toute seule. Je ne sais pas si c’est son sens de la perspicacité ou le fait qu’une Konohajin vienne à sa rencontre qui lui a fait dire ça, mais en tout cas il avait vu juste. Un peu vexée d’être aussi peu discrète, je croisai les bras, attendant vaguement une information qui m’intéresserait. J’aurais bien admiré la nature en le laissant étaler sa science et ce qu’il avait pu deviner en dix secondes (je ne sais pas pourquoi tous les ninjas font ça, sans doute pour se donner un style cool et intelligent), mais il faisait noir, alors on a déjà vu mieux niveau admiration. Je me contentai donc de regarder droit devant moi, me perdant dans ses sombres yeux.

Un peu trop perdu d’ailleurs puisque j’en ai même occulté son prénom qu’il m’avait pourtant donné. Bah, tant pis, c’est pas le plus important. Je voulais surtout savoir ce qu’il faisait ici, de base parce que c’est ma mission et que ce serait mieux pour moi de le savoir, et ensuite parce que ça ferait taire l’autre goret qui doit sans doute tourner en rond autour d’un arbre pour faire semblant de chercher. J’imagine déjà la réponse qu’il aura quand je me rendrais à ses côtés : « Snif snof, mes recherches sont bofbof ». Tu m’étonnes. Bref. Décroisant les bras et oubliant un peu pourquoi mon orgueil avait été piqué, je continuai d’en savoir un peu plus. Toujours affichant mon plus beau sourire (Hey toi, là-bas dans le fond, je t’ai entendu dire « Aha, elle a un beau garçon devant elle alors elle sourit de manière niaise aha », et c’est pas sympa), je repris la parole :

-Ouais, désolée de t’embêter avec ça. Konoha nous a effectivement envoyés mon… collègue… et moi pour voir qui tu étais. Comprends le village, c’est plus très sûr dans le coin depuis un petit moment…

J’étais une pauvre Genin qui n’avait jamais pris la peine d’essayer de monter en grade – va falloir que je pense à le faire, d’ailleurs – du coup, les affaires secrètes du village ne m’étaient pas trop destinées. J’entendais parfois Tata Miko en parlait à d’autres ninjas qui l’abordaient pendant qu’on s’entraînait, mais rien de bien concret. Je présume juste : si Konoha envoie deux ninjas pour vérifier l’identité d’une personne suspecte, c’est qu’ils craignent quelque chose. Ce que c’est ? Quand ça doit arriver ? Aucune idée, mais il faudra se préparer à l’affronter. C’est le souci quand on est en bas de l’échelle : on nous envoie au casse-pipe sans qu’on sache vraiment pourquoi…

- Mais il ne me semble pas avoir entendu ce que tu fais là, ni où tu comptes te rendre !

S’il allait à la même auberge que moi, je pourrais l’accompagner ! Oui, mes réflexions profondes ne durent jamais très longtemps. Taisez-vous.

[Si seulement tu avais répondu une semaine plus tôt... c'est toi qui aurait attendu :p je viens de me remettre à rp]


Le visage de la demoiselle sembla se soulever, à l'écoute de la première réponse de Mikami. Ce dernier put lire dans ses rictus une certaine offuscation, qui bizarrement ne le surprit pas. Il vit ses traits s'arrêter. En réalité il n'y eut pas vraiment de mouvement sensible sur son visage mais son regard disait à lui seul "Eh oh c'est pas parce qu'on est une fille qu'on peut pas se balader tranquille !" De son côté le jeune homme était plutôt du genre factuel. Elle était une fille, elle se présentait seule à lui. Sa tenue plus adaptée à la routine d'un shinobi plutôt qu'une balade nocturne et la présence d'un autre ninja fouillant la forêt l'avait laissé déduire la conséquence d'une mission ; à moins que son interlocutrice ne soit plus rassurée de se promener équipée pour combattre qu'en tenue civile. Mais au-delà de sa réaction presque imperceptible de par sa prompteur peut-être elle aussi appréciait le calme qu'un lieu déserté de toute civilisation procurait.

Puis elle n'hésita pas à dévoiler le but de sa mission alors que le vagabond n'arrivait pas à tirer une quelconque fierté de sa feinte perspicacité. Les gens qui trouvent que la plupart des ninjas en jouent et se la pètent ont raison, c'est bien trop facile de jouer les fins d'esprits alors que l'on voit les choses venir.
Aussi il put discerner sous les faibles lueurs de la lune passant au travers des feuilles les extrémités de ses lèvres se redresser alors que ses bras croisés retombaient, mais dans cette pénombre personne n'aurait pu deviner même à la distance à laquelle se trouvait Mikami si ce sourire était dû à l'agréable odeur du sous-bois, à une habitude naturelle ou bien une quelconque niaiserie. En revanche les coups d’œil intermittents qu'elle jetait en direction de son coéquipier, dans lesquels il reconnaissait l'homme(-)bête aperçu plus tôt avait le don de l'amuser, et même plus discrètement de le faire rire en son for intérieur.

- Mais il ne me semble pas avoir entendu ce que tu fais là, ni où tu comptes te rendre !

Mais apparemment trêve de plaisanteries. Dommage, dans la façon que la jeune femme eut d'aborder le sujet elle lui sembla plus accommodée à discuter plutôt qu'accomplir une mission, alors que les véritables intentions et raisons de la présence du shinobi errant en ces lieux ne lui avaient pas encore été dévoilées. Ce dernier souleva alors au niveau de leurs têtes le sac qu'il venait de ramasser comme pour humblement le présenter à la muse qui lui faisait face.

- J'allais me faire griller du poisson, je sais pas toi mais je n'ai pas encore mangé. Tu peux m'accompagner, ça te permettra de vérifier la nature de mes activités. Puis il tourna légèrement le visage dans la direction où se trouvait le second konohajin et replanta ses yeux dans ceux de la kunoichi. Par contre j'en ai pêché environ deux portions... pas quatre.

Mikami lui laissait subtilement le choix. La jeune fille pouvait appeler au renfort son camarade arpentant le sous-bois seul avec - peut-être - la conviction de tomber sur la personne qu'ils cherchaient ou bien poursuivre la mission de son propre chef et se risquer aux irréfragables raisons de sa présence dans cette forêt. De son côté son visage impassible ne permettait pas de saisir quelle amabilité ou piège que ç'aurait put être.

***

Ils marchaient côtés à côtes. La convenance de la situation ne permettait pas encore de lever la suspicion qui planait au-dessus des ninjas. Si l'un marchait devant il n'aurait aucune vue sur ce qui pourrait se tramer derrière lui alors qu'aucun n'était plus justifié à marcher derrière pour pouvoir surveiller.

Une semaine, trois jours, et ce n'était pas encore terminé. Cette journée-ci aussi avait été bien remplie, et ce dans la continuité de celles l'ayant précédée. Le jeune homme avançait vers le lieu où discrètement il s'affairait depuis qu'il était arrivé dans ce coin reculé et à l'abri des regards ; mais jamais il n'aurait pensé être aussi proche du village caché des feuilles, personne ne lui avait fait remarquer. Peut-être cette promiscuité n'était pas si anodine au final. Sa façon de travailler aurait été différente, le shinobi vagabond n'aurait pas agi de la même manière. Peut-être que l'arrivée de cette délégation dépêchée directement de Konoha mettrait fin aux activités qui s'y déroulaient. Ceci il avait du mal à le concevoir et ne serait dans les conditions actuelles que très difficile à mettre en œuvre pour tout ninja au bandeau gravé d'une feuille se rendant sur ces lieux.
Ils venaient d'y arriver, et le dernier rideau de l'épaisse végétation voilait la vue sur une clairière embusquée qui aurait pu abriter une petite armée. Mikami se glissa sur le côté et d'un coup de kunai sectionna un fil qui par une réaction en chaîne souleva brusquement les branches qui barraient l'accès.

Un espace paisible se dévoila. La clairière était assez dégagée des arbres qui l'entouraient pour se baigner dans les lumières que la lune reflétait tout en démasquant une partie du ciel nocturne et étoilé. S'y trouvait un cabanon en bois que l'on devinait récemment manufacturé malgré la solidité qu'il dégageait, un tronc à l'horizontale taillé comme un banc et le foyer d'un feu qui avait été maintes fois consumés. Plus loin derrière l'abri dépassait des rondins de bois de différentes tailles, parmi lesquelles le jeune homme en ramena une dizaine de l'épaisseur de doigts jusqu'à la taille d'un avant-bras. Il posa les plus gros à côté du foyer et les autres au milieu, après s'être machinalement délesté de ses affaires au hasard des mottes d'herbe.

- Je n'ai pas encore terminé ce banc, demain il aura un dossier. Mais il est quand même confortable et on peut s'y asseoir.

Après avoir montré l'exemple et déposé son humble postérieur sur le bois creusé, il se saisit des branches les plus fines en les serrant à l'aide de ses deux mains qui les tenaient à leurs extrémités. Un éclair jaillit de ses paumes et les brindilles commencèrent à s'embraser. Après leur avoir trouvé une place aérée à la base du foyer il s'attela à la préparation de ses poissons fraîchement pêchés, n'obligeant en rien mais laissant une place plus que convenable auprès du feu qui doucement se mettait à s'allumer...

(OUAIS OUAIS JSUIS PAS EN RETARD)

L’aube pointait le bout de son nez. L’air frais du matin caressait lentement mes yeux rougis et douloureux de fatigue. Mikami me suivait. Nous marchions lentement dans la forêt, ne parlant pas ou très peu. Je pense qu’il était de toute manière aussi fatigué que moi. Ou pas d’ailleurs, ce gars était tellement mystérieux qu’il pourrait avoir l’air fatigué alors que… pas du tout. A méditer, je crois que j’ai une piste à creuser pour déterminer la personnalité de ce gars.

Je vous l’avais dit que j’étais fatiguée. A ce point, je pourrais danser le sirtaki là, de suite, que je m’étonnerais pas moi-même. Si j’évite de parler, c’est pas parce que je n’ai rien à dire, mais parce que la fatigue me fait faire et dire des trucs bizarres. Genre, première chose, je bafouille et je m’exprime mal, mais je suis persuadée de devoir faire de longues phrases hyper classes : ça rend l’union des deux plutôt suspecte. Au final, je ne me souviens même pas de la phrase que je voulais dire au début de mon monologue. Ou alors j’ai des réflexions très profondes sur le sens de la vie (que je mèèèène, et je l’aiiiiime hyeaaaah ♫), du genre « Olala qu’il est mystérieux, qu’il est fatigué ou non ». Je vous dis : une perle de philosophie.

L’auberge se dessinait enfin derrière les arbres dont le peu de feuilles étaient recouverts par la rosée du matin. Un grand bâtiment, qui ne payait pas de mine à première vue, mais dont je vous ai déjà vanté les mérites plus d’une fois. J’accélérai le pas, ayant hâte de me retrouver dans leurs lits chauds et douillets. Mais avant, le cri de mes paupières était moins fort et puissant que celui de mon estomac. Les effluves du petit déjeuner préparé par la maîtresse des lieux parvenaient jusqu’à mes narines, me faisant presque oublier cette fatigue.

- Il est un peu tôt pour boire un verre, mais je te paye le petit déj’ !

J’entrai dans l’auberge, dont le hall d’accueil était totalement désert. J’utilisais la petite sonnette pour signifier notre présence, et m’accoudai sur le meuble, croisant les jambes et me retournant pour faire face à Mikami, en souriant.

- Tu vas voir, la nourriture ici est géniale !

Une vieille femme vint quelques secondes plus tard, un tablier blanc autour du coup et un air bienveillant et chaleureux.

- Oh, Mizuki-Chan, comme je suis contente de te revoir !
- Ayumi-Sama ! C’est un plaisir pour moi aussi. Mon ami et moi aimerions manger, vous avez de la place pour nous ?

Elle me fit un signe de la main et m’invita à la suivre. Emmenant Mikami avec moi, nous pénétrâmes dans la grande salle où les gens mangeaient et qui étaient, à cette heure très matinale, complètement vides. Nous nous assîmes et demandâmes le menu petit déjeuner. L’occasion pour moi de revenir sur une particularité des menus et des restaurants : la différence totale entre moi avec un tablier et eux. Par exemple, ici, on ne fait pas de la purée, on « part sur un écrasé de pommes de terre et son espuma de crème au beurre salé ». Quel que soit le plat, il faut faire sentir la prise de risque, la touche créative qu’on lui apporte. Moi, la dernière fois que j’ai tenté d'apporter la touche créative, à la fin je suis plutôt parti sur un plat à emporter.

Quand on vous ramène voitre assiette, le dressage est un élément crucial de la recette : si un client estime que « le visuel me parle pas » ou que « le plat ne me raconte aucune histoire », vous pouvez remballer votre tablier et aller sublimer des quiches chez votre mère. Faites parler votre tartiflette ou cassez vous. Du coup les restaurateurs essaient d’innover. Une fois j’ai vu une « cuisson au foin ». Ça doit être un truc inventé de toute pièce et qui va juste donner une odeur d'écurie à votre plat. Pareil avec les légumes d'antan, autre arnaque monumentale montée uniquement pour vous faire acheter des crosnes à 18 balles le kilo : personne sait comment ça se cuit, ça va encore pourrir au fond du frigo, n'achetez jamais ça.

Enfin bref, Ayumi finit quand même par apporter notre plats remplis de viennoiseries, de boissons en tout genre, de charcuteries, de gâteaux : bref, de quoi faire un véritable festin dès le matin. Me servant un verre de jus d’orange, et empoignant un croissant, j’invitai Mikami à faire de même.

- Fais toi plaisir, c’est à volonté.

Je lançai tout de même un regard vers l’entrée. Je détestais ce type, mais j’avoue que je me demandais bien où pouvait bien être Daisuke. Bon ça se trouve il dormait à poings fermés mais tout de même. S’il lui était arrivé quelque chose… Bon j’aurais pas mauvaise conscience et ça ne m’empêchera pas de dormir, mais pour être franche, ça gâcherait un peu le plaisir du retour à Konoha… Parce que bon, devoir expliquer qu’il est pas là… Ca risquerait d’être long…