Ta no Kuni, il y a un an.

- Je comprends.

J'avais hoché la tête, doucement, alors que je prenais une gorgée de thé. La terrasse sur laquelle nous étions posés avait une vue magnifique sur les terrains d'entraînement et les bassins en contrebas. De jeunes moines exécutaient encore et encore les mêmes mouvements, sous le regard attentif de leurs instructeurs. Il y avait de la beauté et de l'harmonie, dans les disciples de Maskine. Le vénérable maître, usé par le temps et les intempéries, soupirait, avant de continuer.

- Il s'est égaré, mais Maskine veille toujours sur lui. Pouvons-nous compter sur vous ?

Je faisais mine de réfléchir. Bien sûr que non, ils ne pouvaient me faire confiance. Néanmoins, je tenais à me faire des amis dans ce cercle ...

- Je ferai de mon mieux, moine.

- Qu'il en soit ainsi, que Maskine vous guide sur des routes sûres.

Je m'inclinais, légèrement, en acceptant le rouleau de parchemin qu'on me tendait. Si Maskine était une divinité bienveillante, elle ferait en sorte qu'un ours géant m'arrache la tête. Laisser une personne de ma trempe en vie, c'était l'assurance de beaucoup, beaucoup d'ennuis. A moins que tout cela ne fasse partie d'un plan plus global, tel que je n'arrivais pas à le percevoir ni le concevoir ? C'était possible, mais il ne servait à rien de penser à quelque chose que l'on ne contrôle pas.

J'avais pris congé rapidement, parcourant les couloirs sans un regard en arrière. Ce qu'il y avait à l'intérieur du parchemin ? Ce n'était pas mes affaires. Bien que la curiosité m'encourageait à l'ouvrir et à prendre connaissance de son contenu. Mais quelque chose me disait que ce ne serait pas bien vu. Avais-je une excuse ? Naturellement. C'était par précaution. Au cas où on me volerait. Néanmoins, je décidais de le laisser quand même de le laisser intacte. Le temple était bien derrière moi, je m'étais engouffrée dans les bois. On m'avait dit que l'égaré devait se trouver toujours à Ta, mais rien n'était sûr. Par où commencer la recherche ? Par les villages. Les voyageurs et étrangers n'y passaient pas inaperçus.

Mais contre toute attente, devinez ce qui vient me barrer la route de façon totalement opportune ? Un Ours géant. Plusieurs mètres de hauteur, au moins cinq ou six à vue de nez. Et je ne peux que glousser, avant de commenter à voix haute.

- Aurais-je eu droit à un chaudron rempli de gemmes si je te l'avais demandé, Maskine ?

L'ours, lui, se contentait de répondre avec un grognement sinistre. Avant de me sauter dessus. En toute amicalité. Juste pour voir si j'avais bon goût.

Si Yashi Ukyô avait été l’un des moines les plus prometteurs de sa génération, ce n’était pas uniquement grâce à ses aptitudes au combat, à sa maîtrise des respirations ou mantras. Non, c’était aussi par ses ruses et son intelligence, qui avaient été développés rapidement. Plus qu’intelligent, le jeune homme avait toujours été très mature, qu’importe son âge. Et c’est de cette agilité d’esprit qu’il faisait preuve aujourd’hui.

Lui qui voulait retrouver l’assassin de ses parents, ou « les » assassins s’ils avaient été plusieurs, il n’avait jamais égaré la possibilité que les moines, suite à son départ, décident finalement d’enquêter ou d’avoir des informations sur ce sujet. C’est pour ça que de temps à autre, l’ancien Kiezan allait flirter avec les alentours des temples. Juste au cas où.

Mais malheureusement, cette journée là fut une de plus, et pas « la » journée. Aucune nouvelle intéressante, du moins parmi celles que l’homme avait pu entendre. Tant pis, se disait-il à chaque fois. De toute manière, la manière dont les moines avaient réagie quant à cet assassinat avait tout changé dans la vie du Yashi. Et il n’avait pas envie que les moines servent de moteur à l’enquête qu’il menait depuis quelques semaines maintenant. Leur être reconnaissant… Hors de question.

Il entendit un bruit ou plutôt un rugissement au début du chemin qui devait l’éloigner de ce temple. La minute qui suivit lui permit de découvrir un ours géant face à face à une jeune femme. Elle ne semblait pas effrayée, et Ukyô n’était pas à l’abri de voir débarquer un moine dans les environs. Cela n’aurait pas été un problème en soi, mais il préférait éviter d’éventuelles retrouvailles. Cependant, il ne pouvait laisser la jeune femme là, et le bond de l’ours ne lui laissa pas trop le choix. Ah, s’il avait pu sonder la jeune femme pour voir si c’était une kunoïchi, peut-être aurait-elle pu se défendre elle-même ?

Un coup puissant projeta l’ours sur le côté, qui avait sans aucun doute survécu. Et comme l’ancien moine n’aurait pu agir sans se dévoiler, il resta devant la jeune femme, sans pour autant se retourner. L’ours n’ayant probablement pas l’intention de se relever et encore moins d’attaquer à nouveau l’inconnue, l’homme encapuchonné fit un pas en avant, puis deux. Il se préparait à partir…

J'étais prête à réagir, comme toujours.

Un ours, aussi grand qu'il pouvait être, n'était rien comparé à ce que j'avais pu croiser sur les routes. Au fond, j'étais même soulagée de faire face à tel ennemi. Un ours n'a guère d'intelligence, aussi grande soit sa force elle n'est rien comparée à celles d'humains semblables ou pas à ma personne. Le sceau brûlait ma paume, et j'allais l'apposer sur le ventre, après une esquive in extremis. Mais ce n'était pas nécessaire. Quelqu'un était intervenu. Quelqu'un était venu, pour abattre la menace soudaine. Il s'était interposé bien trop vite, et quand j'avais saisi sa présence, l'ours était étalé, inconscient ou mort, cela ne m'intéressait pas de le savoir.

Il était d'habillages rougeâtres, son visage était dissimulé par une capuche. Il n'avait rien dit, car il n'y avait rien à dire. Et il se préparait à partir comme il était venu, héros des temps modernes. Il était très fort. Beaucoup trop fort même. M'avait-il impressionné ? Totalement. Mais il me fallait me reprendre. Peut-être saurait-il ? Peut-être, même, était-il celui que je cherchais ? Il fallait le questionner. Lui demander. Il serait si simple si il pouvait me guider.

- Excusez moi ...

Je m'inclinais avec grâce, en signe de respect.

- Veuillez accepter mes sincères remerciements pour votre aide. Sans vous, j'aurai été réduite à un vulgaire repas.

Je gloussais, un peu gênée.

- Mais, puis-je prendre un peu plus de votre temps ? Je suis mandatée par l'Ordre de Maskine. L'on m'a demandé de porter une missive au moine prodige Kiezan Ukyô. Auriez-vous entendu des nouvelles à son sujet ?

Ce serait vraiment pratique, si c'était le cas. Mais je savais que la vie prenait un grand plaisir à me rendre la vie compliquée à l'excès.

Etait-ce vraiment une surprise que la jeune femme eut pris la décision d’engager la conversation ? Après tout, qu’importe ce qu’elle était ou ce qu’elle voulait, elle avait forcément une raison de le faire. Cela n’aurait pas été perçu comme poli ou normal de rester muet face à quelqu’un qui vous avait protégé. Et naturellement, l’homme à la capuche s’arrêta. Mais il ne se doutait pas qu’il allait devoir lui aussi parler.

Car ce que la damoiselle demanda était tout sauf prévisible. Elle était mandatée par les Kiezan, pour retrouver Kiezan Ukyô. Le moine venait de sauver une kunoïchi qui était à sa recherche ? Car premièrement, la jeune femme ne pouvait être qu’une kunoïchi, sinon jamais elle n’aurait été mandatée pour une telle mission. Certains moines avaient tenté de le retrouver, et jamais ils n’avaient réussi. Alors aller confier ça à une civile, c’était tout bonnement impossible.

Mais il y avait plus intriguant. Deux choses. La première, elle avait nommé Ukyô comme un Kiezan, chose qu’il n’était définitivement plus. D’ailleurs, comment des moines pouvaient encore penser qu’il était officiellement des leurs ? Avaient-ils oubliés qu’il les avait balayés lorsqu’ils l’avaient empêché de quitter un des temples de Ta no Kuni ? Pire encore, on avait missionné la jeune femme sans laisser la moindre information ou le moindre portrait de celui qu’elle recherchait ? Evidemment, l’ancien Kiezan avait pris le soin d’effacer le plus de traces possible de son ancienne vie. Mais c’était quand même surprenant…

Faisait-elle semblant ? Il n’y avait malheureusement qu’un seul moyen de le savoir. Et instinctivement, Ukyô pensa avoir pris la meilleure des décisions. Il se retourna.

Kiezan Ukyô ? Je crois en avoir entendu parler dans une taverne non loin d’ici. Tu veux que je t’y emmène ?

Il attendit. La taverne existait de toute façon belle et bien. Mais le plus important allait venir. Il fallait juste être patient, et attentif. Et c’était une chose pour laquelle Ukyô était plutôt doué. Mais la situation pouvait devenir extrêmement compliquée. Cela ne tenait qu’à la jeune femme, dont l’homme n’avait pu remarquer le certain charme qu’elle possédait, trop occupé sur sa propre situation ou plutôt sa tranquillité, à présent menacée.

Je n'avais senti aucune hésitation dans l'homme à capuche.

Il fallait dire qu'il était de dos, et que même si il ne l'avait pas été, je n'aurai pas pu de toutes façons regarder les traits de son visage afin de déceler le moindre signe de mensonge. C'est pour ça que je déteste les gens se cachant derrière de tels artifices. C'est difficile de les lire, et impossible lorsqu'ils arrivent à contrôler le ton de leur voix et autres langages corporels mineurs. Les gens mentent, mais les visages, eux, rarement. Et il me privait de ça. Une certaine méfiance commençait à se faisait ressentir.

C'était bien trop pratique, que le premier inconnu que je croise sur les routes puisse me guider à lui. Quoi que. Non, c'est moi qui extrapole ... Il a dit qu'il en a entendu parler à une taverne. Cela pouvait dire que le concerné pouvait s'y trouver, ou qu'une quelconque personne avait cité son nom pour une raison tout aussi quelconque. Mais qu'il prenne le temps de me guider jusque là ? C'était bien trop aimable. Bien trop aimable pour l'époque dans laquelle on se trouvait. Mais après tout, ne m'avait-il pas "sauvé" la vie et ce de façon totalement désintéressée ..?

- Ce serait avec joie.

Je lui adressais un sourire aimable, alors que je notais dans un coin de mon esprit de ne jamais le perdre de vue. Au cas où il tenterait quelque chose à mon égard. Parano', moi ? Définitivement. Mais c'est l'époque qui veut ça.

- Je vous suis, aimable inconnu. Avez-vous un nom, d'ailleurs ? Le mien est Tomoe, je viens des terres d'Ame.

Je lui adressais un petit sourire en coin, attendant qu'il prenne les devants. Et qu'il me réponde. Même si au fond, ce n'était pas nécessaire. Si il me guidait, il pouvait garder le silence que je ne le prendrai guère mal.

Elle semblait avoir hésité. N’importe qui aurait sans doute eu ce comportement. Un inconnu qui vous invitait à le suivre et qui, comme par hasard, peut répondre à une requête assez singulière en plus de vous avoir sauvé la vie – ou pas – précédemment… Cela allait peut-être paraître trop beau pour la jeune femme. Mais après tout, c’était elle qui avait pris les devants et avait posé sa demande. Et c’était aussi elle qui avait forcé l’ancien moine à réagir face à l’attaque de l’imposant animal, à présent couché à quelques mètres de là.

Ce fut donc à moitié surprenant que l’inconnue accepte de suivre le Yashi. La taverne n’était pas loin, mais chaque pas que le duo allait faire en sa direction allait être un pas de distance avec le temple de Maskine le plus proche. Alors une fois arrivé à l’établissement, Ukyô pourrait agir sans tomber nez à nez avec un de ses anciens frères d’esprit.

Cependant, alors que la taverne était devenue visible, à encore quelques dizaines de mètres de marche, la jeune femme se présenta. Dommage qu’elle ait décidé de le faire si tôt. Ukyô se devait de trouver de quoi l’occuper, le temps d’arriver à destination.

Le Pays de la Pluie ? Tu viens de loin.

Même s’il ne s’y était jamais rendu, l’ancien Kiezan connaissait beaucoup de choses du monde. Voyager allait d’ailleurs sans doute être une phase de sa vie. Il n’aurait probablement que ça à faire, s’il n’avançait pas dans sa quête. Mais avant toute chose, il fallait régler le problème de la jeune femme.

Ils arrivèrent derrière la taverne, et c’est là qu’il s’arrêta. Il voulut que la prénommée Tomoe fasse de même, et lui tint l’épaule, avant de la relâcher une fois qu’elle eut comprit que l’homme à capuche voulait lui dire quelque-chose.

Ecoute, Ukyô, c’est moi.

Et il ne dit pas un mot de plus. C’était suffisant ainsi. Quoi qu’elle fasse, l’ancien Kiezan pourrait agir. Mais sa curiosité le piquait, bien évidemment. Pourquoi avait-elle été envoyée ? Etait-ce une kunoïchi ou une civile de plus envoyée à sa recherche ou était-ce une mission plus… profonde et hors normes ? Bien entendu, Ukyô espérait ne pas avoir à faire du mal à l’inconnue, qu’il continua de regarder, mélangeant alors impatience et intrigue.

C'était trop beau pour être vrai.

Et ce qui l'est, en général, est très très moche une fois la couche de peinture pseudo-dorée grattée. Le moine allait me guider vers l'endroit où se trouvait l'Ukyo. J'aurai dû me sentir soulagée. Il m'épargnait bien des recherches ! Mais je n'y arrivais pas. J'étais à cran, même si je ne laissais rien paraître. Paraître ce que je ne suis pas, une façon de vivre qui était la mienne. On reste dans un silence relatif. Il me fait juste remarquer que je viens de loin. Mais rien de plus. Parce qu'il n'y a nul besoin de commenter la chose. On était derrière la taverne, maintenant. Il s'arrête. Je m'arrête. Pose sa main sur mon épaule. Je le fixe, suspicieuse. Mon cœur commence à battre, fort.

Il affirme qu'Ukyo, c'est lui. Je plisse les yeux, en alerte. Je regarde autour de moi, d'un rapide coup d'oeil. Rien d'inquiétant. A priori. Mais je n'étais guère douée en sensorialité, et il se pouvait bien que je sois tombée dans un traquenard.

- Pourquoi vous croirai-je ?

La question était simple, logique. Pourquoi le croire ?

- Vous êtes un parfait inconnu qui se met en travers de ma route de façon extrêmement fortuite. Qui me guide en un lieu reculé pour ensuite m'avouer être la personne que je recherche. Comprenez que je suis ... méfiante.

Mon ton était doux, agréable. Mais quelque chose me disait que j'étais dans une situation compliquée. Je doutais beaucoup que l'individu soit l'Ukyo que je cherche. Quelque chose me disait, plutôt, qu'il était un quelconque voleur. Mais un quelconque voleur se serait-il porté à mon secours ? Je ne l'aurai pas fait, moi.

- Je veux une garantie.

Je le fixais, impassible.

Une esquisse de sourire accompagna les dernières paroles prononcées par la jeune femme. Ukyô était devenu amusé par la situation, qui semblait s’éloigner de la violence qui aurait pu s’y produire. Elle ne le croyait apparemment pas, et il était clair que si les conditions restaient semblables, il n’y aurait pas la moindre chance qu’un combat éclate ici.

Une garantie ? Je n’ai rien à te prouver.

Ayant quelques instants réfléchi à la situation dans laquelle il se trouvait, et en prenant rapidement quelques facteurs en compte, il prit une décision osée : celle de se retourner. Il ne s’éloignait pas, non, mais il lui avait tourné le dos avant de poursuivre. Car il avait quelques mots à rajouter.

Est-ce que cette probable kunoïchi allait tenter quelque-chose ? Etait-elle quelqu’un de mauvais ? Pouvait-il douter de ses intentions respectueuses ? Il voulut être fixé sur ce point. Allait-elle tenter de l’attaquer ou pas ? Voilà la grande question qui se posait, alors que le moine reprenait la parole.

Les moines de Maskine n’envoient que rarement des personnes extérieures pour s’occuper de leurs affaires. Je les connais, après tout. Tu es donc une kunoïchi, et un ninja apprend à être méfiant, tu as dis toi-même l’être. Alors, « Tomoe », avant de douter de ma franchise, essaie de t’accoutumer de cette dernière.

Une réflexion et une logique qui n’étaient pas très poussées. Après tout, il avait été simple de comprendre que cette jeune femme ne pouvait pas être une simple civile. Les moines de Maskine détestaient faire appel à autrui. Mais pourtant, c’était le cas. Qu’est-ce qui était important pour eux, au final : Ukyô ou cette inconnue ? Dans les deux cas, il devait savoir. Que lui voulaient-ils, et pourquoi cette femme était là.

Après, si tu veux à tout prix une garantie, retourne donc voir ceux qui t’ont employé et partage leur ma description. Tu l’auras ta garantie, mais tu pourras également rentrer chez toi.

Tournant toujours le dos à l’inconnue, le Yashi se permit de lever les yeux vers le ciel dégagé. Il pensait que ça serait bien dommage que la jeune femme reparte chez elle, au Pays de la Pluie, au lieu de profiter de ce temps. Mais habitait-elle vraiment Ame no Kuni ? Ah, la méfiance…

Il n'a rien à me prouver. Personne n'a jamais rien à prouver.

C'était à la fois arrogant et humble. Pour le coup, ne connaissant pas le personnage à qui j'avais à faire, je ne savais pas lequel des deux qualificatifs lui correspondaient le mieux. Je me mordille la lèvre, mais garde un silence digne. Et voilà qu'il se retournait, dérobant son visage (ou sa capuche, plutôt sa capuche en fait) à mon regard. C'était malpoli si vous me le demandez, mais j'avais l'habitude des rudes manières des gens. Ils n'avaient pas tous eu la chance d'être éduqués dans l'art de l'étiquette comme je l'ai été, et de toutes façons, parler à une capuche ou à un dos revenait strictement au même.

Voilà le moment où le monologue commençait. Il était familier des us du temple de Maskine. Ou en tout cas, si ce n'était pas le cas, faisait preuve de grand logique. Ou pas du tout. N'importe qui d'un peu censé serait arrivé à la même conclusion. C'était même rassurant, en fait. Au contraire, son ignorance sur la question aurait prouvé soit sa stupidité, soit sa malveillance. Et contrairement à ce que les gens pensent, la première est bien moins courante que la seconde.

Mais le voilà qu'il continuait. La garantie ? Repartir voir les moines qui m'avaient engagés précédemment. Avec l'assurance que je devrais jouer au chat et à la souris avec cet inconnu si jamais il s'avérait être réellement l'individu que je cherche. Et si c'est le cas, alors, maintenant qu'il sait que je suis à sa recherche, et vu à quel point il ne semble pas très enthousiaste à l'idée de recevoir la moindre chose de la part de l'ordre de Maskine ... Ce serait tout sauf une tâche facile. Et ce serait surtout une tâche que je n'aurai aucune envie d'accomplir. Je tique. Me mordille à nouveau la lèvre. Il me présente clairement un ultimatum : Dis ce que tu as à dire, ou pars à tout jamais.

Je n'avais rien d'une lâche. J'étais même très prudente, j'avais de risques inconsidérés. Mais c'était là tous les efforts que j'étais prête à fournir à la tâche.

- Soit.

Un unique moment, signant mon assentiment.

- Je n'ai aucune raison de vous croire, mais aucune raison de ne pas vous croire, donc ...

Je sortais de sous ma manche le parchemin que l'on m'avait confié, et le tendais au dos qui m'était présenté.

- Je vous demanderai juste de me rendre le parchemin, après votre lecture.

Je n'étais pas sûre qu'il accède à ma demande. Je n'étais pas sûre qu'il ne se contenterait pas de fuir avec le butin. Je me maudissais pour ma négligence. Avoir lu le message m'aurait valu beaucoup moins de complications.